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20/10/2009 | FRANCE | N°07LY00109

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 20 octobre 2009, 07LY00109


Vu la requête, enregistrée le 17 janvier 2007, présentée pour Mme Maryse A, domiciliée ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502939 du 16 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à ce que le centre hospitalier de Sens soit condamné à lui verser une indemnité de 180 000 euros ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Sens à lui verser l'indemnité susmentionnée, outre les intérêts à compter du premier arrêté de mise en disponibilité d'office ;

3°) de mettre à la charge d

u centre hospitalier de Sens la somme de 2 000 euros, en application des dispositions combinées ...

Vu la requête, enregistrée le 17 janvier 2007, présentée pour Mme Maryse A, domiciliée ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502939 du 16 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à ce que le centre hospitalier de Sens soit condamné à lui verser une indemnité de 180 000 euros ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Sens à lui verser l'indemnité susmentionnée, outre les intérêts à compter du premier arrêté de mise en disponibilité d'office ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Sens la somme de 2 000 euros, en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, à charge pour son conseil de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;

Elle soutient que :

- le jugement a méconnu les dispositions des articles L. 9 et R. 741-2 du code de justice administrative ;

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que son état de santé ne relevait pas des dispositions du 3° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 à la date d'édiction de l'arrêté du 10 octobre 2002 la plaçant en position de disponibilité d'office à compter du 17 septembre 2002, et qu'elle ne pouvait en conséquence pas rechercher la responsabilité du centre hospitalier de Sens au motif de l'illégalité de l'arrêté du 10 octobre 2002, alors qu'il résulte des documents médicaux produits qu'elle remplissait les conditions d'octroi du congé de longue maladie à la date de sa demande du 14 janvier 2002 ;

- c'est également à tort que les premiers juges ont considéré qu'elle n'avait subi aucun préjudice économique, de retraite ou moral à raison de l'illégalité des arrêtés des 14 novembre 2003 et 11 mars 2004 ;

- les premiers juges ne se sont pas interrogés sur la légalité des arrêtés des 15 avril et 19 juin 2003, alors qu'elle avait soutenu en première instance que ces décisions étaient illégales et constitutives de fautes commises par l'administration ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 mars 2007, présenté pour le centre hospitalier de Sens, représenté par son directeur en exercice, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- les certificats médicaux produits par Mme A ne permettent pas de démontrer que l'intéressée remplissait les conditions pour bénéficier d'un congé de longue maladie antérieurement aux arrêtés des 14 novembre 2003 et 11 mars 2004, dont l'annulation était fondée sur la constatation d'une aggravation de l'état de santé de la requérante ;

- Mme A n'a subi aucun préjudice économique, eu égard à la rémunération qu'elle a perçue durant la période en litige, qui correspond à ce qu'elle aurait perçu si elle avait bénéficié d'un congé de longue maladie dès le 17 septembre 2001 ;

- la requérante n'établit pas la réalité du préjudice qu'elle invoque au titre de ses droits à retraite, dès lors qu'elle s'est trouvée dans une situation équivalente à celle qui aurait été la sienne en cas de placement en congé de longue maladie, tant au titre du maintien de sa rémunération qu'au titre de bénéficiaire des prestations en espèce, constitutives d'un revenu de remplacement pris en considération au titre des trimestrialités acquises ;

- si Mme A fait référence à une absence de reclassement, elle ne s'explique pas sur les postes qu'elle aurait été à même d'occuper dans les services du centre hospitalier ;

Vu la décision, en date du 3 juillet 2007, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a admis Mme A au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle, en fixant la contribution de l'Etat à 55 % ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 février 1983 ;

Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le décret n° 88-389 du 19 avril 1988 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 septembre 2009 :

- le rapport de M. Seillet, premier conseiller,

- les observations de Me Lebeaux, pour le centre hospitalier de Sens,

- les conclusions de Mme Humbert-Bouvier, rapporteur public,

la parole ayant été à nouveau donnée à Me Lebeaux ;

Considérant que Mme A, agent titulaire du grade d'ouvrier professionnel qualifié, affectée depuis 1976 au service des cuisines du centre hospitalier de Sens, et qui a cessé d'exercer son activité, en raison de problèmes de santé, à compter du 17 septembre 2001, fait appel du jugement du 16 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à ce que le centre hospitalier de Sens soit condamné à réparer les préjudices économique, de retraite et moral qu'elle affirme avoir subis en conséquence des fautes commises par ledit établissement hospitalier en refusant de lui accorder le bénéfice d'un congé de longue maladie ou de lui proposer un reclassement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, relatives aux mentions obligatoires du jugement, n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier la portée ;

Considérant, en second lieu, que, contrairement à ce que soutient Mme A, le jugement attaqué, par lequel les premiers juges, pour rejeter sa demande, ont considéré, d'une part, qu'il ne résultait pas de l'instruction que son état de santé relevait, à la date de l'arrêté du 10 octobre 2002 la maintenant en disponibilité d'office, des dispositions de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, relatives au congé de longue maladie et, d'autre part, que si la faute résultant de l'illégalité des décisions des 14 novembre 2003 et 11 mars 2004 engageait la responsabilité de l'établissement, Mme A n'établissait ni la réalité de son préjudice économique, ni celle de ses préjudices de retraite et moral, est suffisamment motivé ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative doit être écarté comme manquant en fait ;

Sur la responsabilité du centre hospitalier de Sens :

Considérant qu'en vertu des dispositions du 3° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, le fonctionnaire a droit à des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée et conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent ;

Considérant, en premier lieu, que, pour soutenir qu'elle devait bénéficier d'un congé de longue maladie dès le 17 septembre 2001, date à compter de laquelle elle a cessé d'exercer son activité en raison de son état de santé, Mme A, qui avait présenté dès le 14 janvier 2002, une demande tendant à l'octroi d'un congé de longue durée, produit plusieurs pièces médicales relatives à la période comprise entre le 17 septembre 2001 et le 17 septembre 2003, date à compter de laquelle, en exécution d'un premier jugement du Tribunal administratif de Dijon du 9 décembre 2004 qui a annulé des décisions des 14 novembre 2003 et 11 mars 2004 qui avaient maintenu l'intéressée en position de disponibilité d'office pour une nouvelle période de douze mois à compter du 17 septembre 2003, le centre hospitalier de Sens lui a versé la rémunération qu'elle aurait perçue si elle avait bénéficié d'un congé de longue maladie à compter de cette dernière date ; que, toutefois, l'attestation du 5 juin 2002 qui se borne à certifier que l'état de santé de Mme A nécessite l'octroi d'un congé de longue maladie, sans décrire ledit état de santé, n'est pas de nature à démontrer que les conditions posées par les dispositions précitées de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 étaient alors remplies ; que ne sont pas davantage de nature à l'établir, tant le rapport d'un médecin psychiatre, en date du 4 novembre 2002, qui évoque la pathologie et la symptomatologie de l'intéressée, tout en constatant qu'elle ne faisait l'objet, à la date de l'examen d'aucun traitement spécifique, que l'attestation rédigée par un rhumatologue en décembre 2002, qui se réfère audit rapport du 4 novembre 2002 sans davantage faire état du traitement suivi par Mme A ; qu'enfin, l'avis transmis, le 26 novembre 2002, au comité médical départemental par un médecin du service de la médecine du travail, qui évoque les troubles dont souffre Mme A et conclut à une incapacité d'exercer quelque activité que ce soit, ne fait pas état de la nécessité d'un congé de longue maladie ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que Mme A, dont l'inaptitude à toute fonction a été constatée, à plusieurs reprises, ainsi qu'il résulte des pièces qu'elle produit elle-même, et en particulier de l'avis du service de la médecine du travail du 26 novembre 2002 déjà mentionné, ainsi que d'un rapport rédigé par un expert le 12 février 2004, aurait pu bénéficier d'une mesure de reclassement au sein du centre hospitalier de Sens ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient la requérante, ledit établissement n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité en ne lui proposant pas de poste de reclassement et en ne l'invitant pas à demander à bénéficier d'une mesure de reclassement ;

Considérant, en troisième lieu, qu'en application des dispositions précitées de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986, si un congé de longue maladie lui avait été octroyé dès le 17 septembre 2001, Mme A aurait conservé l'intégralité de son traitement pendant un an, et son traitement aurait ensuite été réduit de moitié pendant les deux années suivantes, jusqu'à l'expiration dudit congé, le 16 septembre 2004 ; que la requérante, qui a perçu, durant ladite période, ainsi qu'il résulte de l'instruction, et compte tenu notamment des sommes versées par le centre hospitalier de Sens en exécution du jugement du Tribunal administratif de Dijon du 9 décembre 2004, l'intégralité de son traitement durant quinze mois, et un traitement réduit de moitié, ou l'équivalent sous la forme d'indemnités journalières, durant vingt et un mois, n'établit pas avoir subi, comme elle le soutient, une perte de rémunération qui n'aurait pas déjà été réparée en exécution dudit jugement ; qu'elle n'établit pas davantage, à défaut de produire toute justification sur ce point, avoir été privée de la chance de percevoir une pension de retraite plus élevée ;

Considérant, toutefois, en dernier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment des pièces produites en appel par Mme A, que l'illégalité fautive des décisions des 14 novembre 2003 et 11 mars 2004 par lesquelles elle avait été maintenue en position de disponibilité d'office, en conséquence desquelles elle avait été initialement privée de toute rémunération à compter du 18 septembre 2003 et s'était trouvée dans une situation de précarité, a entraîné pour l'intéressée un préjudice moral ; qu'il en sera fait une juste évaluation en le fixant à une somme de 4 000 euros, tous intérêts compris ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Sens à lui verser une indemnité de 4 000 euros, tous intérêts compris, en réparation du préjudice moral qu'elle a subi en conséquence de l'illégalité fautive des décisions des 14 novembre 2003 et 11 mars 2004 dudit centre hospitalier ;

Sur les conclusions de la requête tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée, relative à l'aide juridique, et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, le centre hospitalier de Sens doit être regardé comme la partie perdante ; que Me Chaton, avocat de Mme A, a déclaré renoncer au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle ; que, dans ces conditions et par application des dispositions législatives précitées, il y a lieu de condamner le centre hospitalier de Sens à verser audit conseil la somme de 1 500 euros, correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamés à Mme A si celle-ci n'avait bénéficié d'une aide juridictionnelle partielle ;

DECIDE :

Article 1er : Le centre hospitalier de Sens est condamné à verser à Mme A une indemnité de 4 000 euros, tous intérêts compris, en réparation de son préjudice moral.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Dijon du 16 novembre 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er .

Article 3 : Le centre hospitalier de Sens versera à Me Chaton, qui renonce au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle, la somme de 1 500 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Maryse A et au centre hospitalier de Sens.

Délibéré après l'audience du 29 septembre 2009 à laquelle siégeaient :

M. Fontanelle, président de chambre,

MM. Reynoird et Seillet, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 20 octobre 2009.

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N° 07LY00109


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07LY00109
Date de la décision : 20/10/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. FONTANELLE
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme HUMBERT-BOUVIER
Avocat(s) : BRUNO CHATON

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-10-20;07ly00109 ?
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