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08/10/2009 | FRANCE | N°06LY02424

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 08 octobre 2009, 06LY02424


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 décembre 2006 et 19 février 2007, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY ;

Le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement 0401763 du 3 octobre 2006 par lequel, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a condamné à verser, jusqu'au 2 février 2017, à l'enfant Julie A, sous administration légale de ses parents, une rente annuelle de 21 121,85 euros, à M. et Mme Pierre-Yves A une somme de 14 000 euros chacun ainsi qu'une somme de 8 000 eu

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 décembre 2006 et 19 février 2007, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY ;

Le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement 0401763 du 3 octobre 2006 par lequel, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a condamné à verser, jusqu'au 2 février 2017, à l'enfant Julie A, sous administration légale de ses parents, une rente annuelle de 21 121,85 euros, à M. et Mme Pierre-Yves A une somme de 14 000 euros chacun ainsi qu'une somme de 8 000 euros au nom de leur fils mineur Gaël et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier une somme de 426 151,19 euros, en réparation des conséquences dommageables du retard de diagnostic de la maladie dont leur enfant Julie était atteinte ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme Pierre-Yves A devant le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

Il soutient que le jugement est entaché d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation en ce qu'il a considéré que le retard de diagnostic était fautif et de nature à engager sa responsabilité alors que ce n'est que lorsque les obligations de comportement n'ont pas été respectées par les praticiens que la responsabilité de l'établissement est susceptible d'être engagée et qu'un retard de diagnostic erroné n'est pas fautif si toutes les obligations qui s'imposent au médecin ont été respectées ; que l'enfant ne présentait lors de la première hospitalisation aucun des symptômes décisifs de la maladie de Kawasaki et qu'il n'y avait donc aucune raison de la traiter pour celle-ci ; que le Pr B, qui n'a pas été contredit par le Pr C, avait retenu qu'il manquait un certain nombre de critères et que le syndrome se présentait de façon atypique ; que lors de la seconde hospitalisation, elle ne présentait pas un certain nombre de symptômes typiques, que tous les examens nécessaires ont été réalisés tandis que le Pr D consulté spécialement avait préconisé une antibiothérapie ce qui témoigne de la difficulté à établir un bon diagnostic ; que les praticiens s'en sont tenus à un traitement qui ne présentait pas de risques pour l'enfant ; que le lien de cause à effet n'étant pas certain, le centre hospitalier, en l'absence pour l'enfant d'une perte de chance réelle et sérieuse d'échapper au préjudice, aurait dû être mis hors de cause ; que subsidiairement dans la mesure où un diagnostic plus précoce n'aurait pas évité les conséquences qui sont survenues, il ne saurait être tenu pour responsable que dans les limites de l'aggravation imputable à la faute commise ; que très subsidiairement, les indemnités allouées sont excessives et qu'il y aurait lieu d'imputer sur la rente les frais de placement en établissement spécialisé et d'hospitalisation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 mai 2007, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier qui conclut à la condamnation du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY à lui verser la somme de 486 383,64 euros au titre des prestations servies ainsi qu'au paiement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par les moyens que le centre hospitalier a commis une faute dès lors que la symptomatologie présentée lors des hospitalisations était suffisamment évocatrice pour qu'un traitement par veinoglobuline et aspirine lui soit administré à titre préventif ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 juin 2007, présenté pour M. et Mme A qui, par la voie de l'appel incident, concluent à ce que la rente mise à la charge du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY soit portée à un montant de 60 000 euros ; à ce que la condamnation au titre leur préjudice personnel soit portée à 60 000 euros et 30 000 euros pour leur fils et à ce qu'une somme de 6 000 euros soit mise à la charge du centre hospitalier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par les moyens que le tableau clinique dès la première hospitalisation aurait dû entrainer l'évocation de la maladie de Kawasaki alors que l'éruption cutanée a été totalement négligée ; que chez le jeune nourrisson doivent être prescrites au moindre doute les gammaglobulines s'il présente un syndrome inflammatoire sévère et cliniquement inquiétant ; que le Dr D n'avait pas eu les informations nécessaires et fiables pour donner un avis sur l'état de santé de Julie ; que le traitement mis en place était inapproprié et tardif ; que l'absence de contrôle de la numération des plaquettes est fautive ; que la sortie était totalement inadaptée à l'état de l'enfant compte tenu du risque cardio-vasculaire ; que l'intégralité des séquelles est imputable au centre hospitalier dès lors que la durée de l'arrêt cardiaque aurait pu être plus limitée si l'enfant avait été gardée sous surveillance hospitalière ; que la rente a été manifestement sous-évaluée, ainsi que le préjudice subi par sa famille dont la vie a été bouleversée ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 décembre 2008, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier qui sollicite la capitalisation des intérêts ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 janvier 2009, présenté pour le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens et par les motifs, en outre, que même si l'on admet que l'enfant a été victime d'une erreur de diagnostic, celle-ci n'a pu tout au plus que la priver d'une chance de souffrir de complications cardiaques moins importantes ce qui empêche d'engager sa responsabilité intégrale ; que le montant de la rente est conforme à la jurisprudence ; que les défendeurs n'exposent pas en quoi le jugement pourrait encourir la critique quant au montant des indemnisations ; que la caisse continue à produire un décompte extrêmement sommaire qui, notamment, ne fait pas apparaitre les frais de placement ou d'hospitalisation qui doivent être imputés sur la rente tierce personne et qu'il y a lieu en tout état de cause de tenir compte des nouvelles dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 mars 2009, présenté pour M. et Mme A qui concluent aux mêmes fins que précédemment et demandent en outre une somme de 131 207,13 euros au titre de leur préjudice matériel et des sommes de 30 000 euros pour chacun des parents et 20 000 euros pour Gaël au titre du préjudice moral qu'ils subissent du fait du décès de Julie ; par les mêmes moyens et par les motifs, en outre, que le décès de leur fille survenu le 25 septembre 2008 est en lien avec la pathologie cardiaque ; que les débours de la caisse ne sauraient s'imputer que sur les frais médicaux et d'hospitalisation à l'exclusion des troubles dans les conditions d'existence puisque la caisse primaire d'assurance maladie n'a versé aucune somme à ce titre ; qu'ils n'ont par ailleurs pas bénéficié d'une allocation au titre de l'assistance d'une tierce personne, si bien qu'il n'y a pas d'imputation possible sur ce poste ; que Mme A a subi des pertes de revenus, qu'ils ont exposé des frais kilométriques, d'acquisition de matériel et d'un véhicule, d'aménagement de leur maison ;

Vu le mémoire enregistré le 10 juin 2009 par lequel la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier porte à la somme de 677 901 euros, outre l'indemnité forfaitaire de 955 euros, le montant de la condamnation à la charge du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY au titre de ses débours ;

Vu le mémoire enregistré le 11 septembre 2009 par lequel le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY conclut aux mêmes fins que précédemment par les moyens en outre, que les conclusions présentées par M. et Mme A au nom de leur fille sont irrecevables compte tenu du décès de celle-ci ; que la caisse n'est pas fondée à demander le remboursement de la totalité de ses débours lesquels sont en partie imputables à l'affection initiale dont l'enfant était atteinte ; que ses conclusions qui ne distinguent pas selon la date des ses dépenses et ne permettent pas de vérifier à quelles dates elles ont été exposées, sont irrecevables ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu l'arrêté du 11 décembre 2008 relatif au montant de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-4 du code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 septembre 2009 :

- le rapport de Mme Verley-Cheynel, président assesseur ;

- les observations de Me Demailly, avocat du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY, de Me Presle, avocat de M. et Mme A, et de Me Michaud, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier ;

- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée aux parties présentes ;

Considérant que la jeune Julie A, née le 2 février 2001, qui avait été, à la suite d'un état fébrile, hospitalisée au centre hospitalier de Vichy du 17 au 25 juillet 2001 puis du 31 juillet au 13 août 2001, a été victime le 15 août 2001 d'un infarctus ayant provoqué une atteinte neurologique sévère dont elle a conservé de très lourdes séquelles motrices et intellectuelles ; que le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY fait appel du jugement du 3 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a reconnu responsable du retard de diagnostic de la maladie de Kawasaki dont l'enfant était atteinte, laquelle est à l'origine des troubles cardio vasculaires apparus le 15 août 2001 et l'a condamné à réparer les deux-tiers du préjudice de l'enfant et de ses proches ainsi que, dans la même proportion, les débours de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier ; que, par la voie de l'appel incident les parents de l'enfant, laquelle est décédée le 25 septembre 2008, demandent que l'établissement soit condamné à réparer l'intégralité des préjudices, ainsi que la réévaluation de ces derniers ;

Sur la responsabilité et l'étendue de l'obligation de réparation :

Considérant que s'il est constant que la maladie de Kawasaki est d'un diagnostic particulièrement difficile, il résulte des conclusions de l'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif que la gravité potentielle de cette maladie, rare mais connue, doit impérativement conduire à effectuer un traitement même dans les cas douteux et que, pour être efficace, celui-ci doit être administré au plus tard 8 à 10 jours après l'apparition de l'état fébrile ; qu'il résulte de l'instruction que compte tenu de la symptomatologie présentée par l'enfant dès la première hospitalisation le 17 juillet, laquelle associait une fièvre persistante, une adénopathie, une éruption cutanée prolongée, un syndrome inflammatoire majeur, une ponction lombaire à 20 éléments et un taux de plaquettes élevé, le diagnostic de maladie de Kawasaki aurait dû être évoqué dès la fin de cette première hospitalisation ; que si l'établissement hospitalier fait valoir qu'il a, en l'espèce, mis en oeuvre de nombreux moyens d'investigation, il résulte toutefois de l'expertise, d'une part, que les médecins du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY n'ont pas pris en compte la persistance pendant plus de sept jours de l'éruption cutanée pourtant mentionnée jour après jour dans le dossier infirmier et que, d'autre part, l'imprécision évidente des résultats communiqués par le laboratoire d'analyse de l'hôpital dans les autres numérations plaquettaires effectuées ne permettait pas leur exploitation utile ; qu'en outre, et alors qu'il y avait une aggravation des signes lors de la deuxième hospitalisation le 31 juillet, le traitement par Veinoglobuline mis en oeuvre seulement les 7 et 8 août a été beaucoup trop tardif et, par ailleurs, la sortie de l'hôpital dès le 13 août a été trop précoce et n'a pas été précédée d'un contrôle d'échographie cardiaque ; que ce retard tant diagnostique que thérapeutique qui a compromis les chances de l'enfant d'échapper à la complication dont elle a été victime constitue une faute de nature à engager la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY ;

Considérant, toutefois, que dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu ; que la réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ;

Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise que l'administration précoce d'immunoglobulines entraîne une diminution des deux-tiers de la fréquence de survenue des complications cardiovasculaires et de la constitution des anévrismes, mais que ce type d'accident n'est pas évité dans tous les cas ; que, dans ces conditions, le retard fautif n'a entraîné pour l'intéressée qu'une perte de chance d'échapper aux complications qui se sont produites ; que, par suite, la réparation qui incombe à l'établissement public hospitalier doit être évaluée à une fraction du dommage déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ; qu'il résulte de ce qui précède qu'en l'espèce le préjudice indemnisable doit être évalué aux deux-tiers du dommage ;

Sur les préjudices propres de Julie A :

Considérant que l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant du III de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007, dispose que : Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droit conserve contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre./ Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l'assuré ou à ses ayants droit les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de l'accident dans les conditions ci-après./ Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel./ Conformément à l'article 1252 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée./ Cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice (...) ;

Considérant qu'en application de ces dispositions le juge, saisi d'un recours de la victime d'un dommage corporel et d'un recours subrogatoire d'un organisme de sécurité sociale doit, pour chacun des postes de préjudices patrimoniaux et personnels, déterminer le montant du préjudice en précisant la part qui a été réparée par des prestations de sécurité sociale et celle qui est demeurée à la charge de la victime ; qu'il lui appartient ensuite de fixer l'indemnité mise à la charge de l'auteur du dommage au titre du poste de préjudice en tenant compte, s'il a été décidé, du partage de responsabilité avec la victime ; que le juge doit allouer cette indemnité à la victime dans la limite de la part du poste de préjudice qui n'a pas été réparée par des prestations, le solde, s'il existe, étant alloué à l'organisme de sécurité sociale ;

Considérant qu'en l'absence de dispositions réglementaires définissant les postes de préjudice, il y a lieu, pour mettre en oeuvre la méthode sus-décrite, de distinguer, parmi les préjudices de nature patrimoniale, les dépenses de santé, les frais liés au handicap, les pertes de revenus, l'incidence professionnelle et scolaire et les autres dépenses liées à ce dommage ; que parmi les préjudices personnels, sur lesquels l'organisme de sécurité sociale ne peut exercer son recours que s'il établit avoir effectivement et préalablement versé à la victime une prestation réparant de manière incontestable un tel préjudice, il y a lieu de distinguer, pour la victime directe, les souffrances physiques et morales, le préjudice esthétique et les troubles dans les conditions d'existence, envisagés indépendamment de leurs conséquences pécuniaires ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Julie A a conservé en raison des complications cardio vasculaires dont elle a été victime des séquelles graves se traduisant par une tétraplégie spastique, une microcéphalie, une arriération mentale profonde et des troubles cardiaques, entrainant une invalidité totale rendant nécessaire l'assistance d'un tierce personne ou un placement dans une institution spécialisée ; que compte tenu de son décès intervenu le 25 septembre 2008, lequel est, contrairement à ce que soutient le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY, sans incidence sur la recevabilité des conclusions présentées en son nom par ses parents, il y a lieu de procéder à l'évaluation définitive des préjudices ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial de Julie A :

Quant aux dépenses de santé :

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier qui avait, en première instance, chiffré provisoirement ses débours à la somme de 426 151,19 euros est recevable, en appel, à augmenter ses conclusions des sommes supplémentaires qu'elle a dues exposer depuis le jugement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la jeune Julie a été continuellement hospitalisée à partir du 15 août 2001 jusqu'au 28 avril 2008, date après laquelle elle a fait l'objet d'une prise en charge non hospitalière, ainsi que les 24 et 25 septembre 2008 ; que, déduction faite de l'hospitalisation initiale du 17 juillet au 25 juillet 2001, qui n'est pas en lien avec la faute imputable au requérant, la caisse justifie avoir pris en charge des frais médicaux, pharmaceutiques, d'hospitalisation de transport et d'appareillage pour la prise en charge de l'enfant du fait de son état d'un montant de 630 115,61 euros, dont le remboursement incombe pour les deux-tiers au CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY ; que la caisse peut prétendre à ce titre au versement d'une somme de 420 077,06 euros ;

Quant aux frais liés au handicap :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la jeune Julie A a été, à compter du 29 avril 2008, placée dans un institut médico éducatif et prise en charge par sa famille chaque fin de semaine ; que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier a justifié avoir exposé jusqu'au 23 septembre 2008, au titre du placement en institution spécialisée, une somme de 45 227,91 euros ; que M. et Mme A, justifient avoir exposé des frais d'aménagement de leur logement, d'acquisition de matériels et d'un véhicule, dont ils établissent la nécessité pour assurer l'accueil de leur fille handicapée à leur domicile, pour un montant total de 82 788,63 euros ; que les frais liés au handicap s'établissent donc à un montant total de 128 016,54, dont il y a lieu de mettre les 2/3, soit une somme de 85 344,36 euros à la charge du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY ; lequel versera, d'une part, la somme de 82 788,63 euros à M. et Mme A au nom de leur fille, d'autre part le solde, soit 2 555,73 euros, à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère personnel de Julie A :

Considérant qu'il sera fait une juste appréciation des troubles de toute nature et du préjudice d'agrément subis par la jeune Julie entre août 2001 et son décès, à raison de l'incapacité permanente dont elle était atteinte, de son préjudice esthétique, de ses souffrances physiques et de ses souffrances morales en évaluant son préjudice personnel à 81 000 euros ; qu'il y a lieu compte tenu de la part d'imputabilité au CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY de mettre à sa charge à ce titre le versement à M. et Mme A, au nom de leur fille, de la somme de 54 000 euros ;

Sur les préjudices personnels de M. et Mme A et de Gaël A :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les juges de première instance ont fait une insuffisante appréciation des conséquences personnellement subies par les parents et le frère de la victime au titre des préjudices matériels, des troubles de toutes natures dans les conditions d'existence et des préjudices afférant à la douleur morale endurée par les parents et le frère de la jeune Julie du fait de son handicap ;

Considérant qu'il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence et de la douleur morale résultant pour M. et Mme A du très grave handicap de leur fille, ainsi que de son décès en lien avec celui-ci, en évaluant globalement ces préjudices à 39 000 euros pour chacun des parents ; qu'au titre des mêmes préjudices, il y a lieu de fixer à 18 000 euros ceux subis par le frère de Julie ; que compte tenu de la part de responsabilité lui incombant, le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY doit être condamné à verser la somme de 64 000 euros ;

Considérant que M. et Mme A justifient par ailleurs avoir dû exposer des frais pour se rendre régulièrement au chevet de leur fille pendant toute la durée de son hospitalisation, tandis que Mme A établit avoir été contrainte de modifier ses conditions de travail afin de se rendre plus disponible, subissant de ce fait une perte de salaire ; qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce d'évaluer le préjudice matériel des parents à la somme totale de 39 000 euros dont les deux-tiers soit 26 000 euros doivent être mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les montants définitifs qui doivent être mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY s'établissent en réparation du préjudice de Julie A à la somme de 136 788,63 euros, en réparation du préjudice personnel de M. et Mme A et de leur fils mineur à la somme de 90 000 euros et en réparation des débours de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier à 422 632,76 euros ; que, dès lors, le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY est seulement fondé à demander que l'indemnité qu'il doit verser à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier soit réduite à ce dernier montant ; que M. et Mme A sont, de leur côté, fondés à demander que les sommes qui leur reviennent définitivement soient portées aux montants précités ;

Sur les intérêts et la capitalisation :

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier a demandé pour la première fois la capitalisation des intérêts dans son mémoire enregistré le 12 décembre 2008 ; qu'il y a lieu de faire droit à sa demande d'intérêts à compter du 18 mars 2006, date de réception de sa première demande de paiement de ses créances devant le tribunal administratif pour les sommes déjà échues à cette date et au fur et à mesure de leur paiement effectif pour les dépenses qu'elle a exposées ultérieurement ; qu'elle a également droit à la capitalisation desdits intérêts à la date du 12 décembre 2008 dans la mesure où il était dû plus d'une année d'intérêts à cette date;

Sur l'indemnité forfaitaire due à la caisse de sécurité sociale :

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier a droit à l'indemnité forfaitaire régie par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, pour le montant de 955 euros auquel elle est fixée, à la date de la présente décision, par l'arrêté interministériel du 11 décembre 2008 ; qu'il y a lieu de mettre cette somme à la charge du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, sur le fondement des dispositions susvisées, de mettre à la charge du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY le paiement à M. et Mme A de la somme de 1 500 euros au titre des frais que ceux-ci ont exposés et non compris dans les dépens ; qu'en revanche ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY qui n'est pas à l'égard de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier la partie perdante dans la présente instance, la somme que la caisse demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme que le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY a été condamné à payer à M. et Mme A au nom de leur fille Julie A par l'article 1er du jugement du 3 octobre 2006 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand est fixée définitivement au montant total de 136 788,63 euros.

Article 2 : La somme que le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY a été condamné à payer à M. et Mme A en leur nom propre et au nom de leur fils Gaël par l'article 2 du jugement du 3 octobre 2006 est portée à 90 000 euros.

Article 3 : La somme que le CENTRE HOSPITALIER DE VICHY a été condamné à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier par l'article 3 du jugement du 3 octobre 2006 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand est ramenée à 422 632,79 euros. Ladite somme portera intérêts à compter du 18 mars 2006 pour les sommes déjà échues à cette date et au fur et à mesure de leur paiement effectif pour les dépenses que la caisse a exposées ultérieurement. Ceux desdits intérêts qui seraient dus depuis plus d'un an à cette date seront capitalisés au 12 décembre 2008.

Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 3 octobre 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY versera à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier une somme de 955 euros au titre de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

Article 5 : Le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY versera à M. et Mme A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE VICHY, à M. et Mme Pierre-Yves A, à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier, à M. C (expert) et au ministre de la santé et des sports.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2009 à laquelle siégeaient :

Mme Serre, présidente de chambre,

Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

M. Stillmunkes, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 octobre 2009.

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N° 06LY02424


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06LY02424
Date de la décision : 08/10/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme SERRE
Rapporteur ?: Mme Geneviève VERLEY-CHEYNEL
Rapporteur public ?: Mme MARGINEAN-FAURE
Avocat(s) : DIDIER LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-10-08;06ly02424 ?
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