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17/06/2008 | FRANCE | N°06LY01502

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 17 juin 2008, 06LY01502


Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2006, présentée pour M. et Mme X, domiciliés ... ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0402527 du Tribunal administratif de Dijon du 9 mai 2006 qui a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de l'Yonne a refusé de mettre en demeure Y, soit de régulariser sa situation au regard de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, soit de procéder à l'élimination de déchets entreposés sur plusieurs terrains situés

dans la commune de Sennevoy-le-Bas ;

2°) d'annuler cette décision implicite de ...

Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2006, présentée pour M. et Mme X, domiciliés ... ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0402527 du Tribunal administratif de Dijon du 9 mai 2006 qui a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de l'Yonne a refusé de mettre en demeure Y, soit de régulariser sa situation au regard de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, soit de procéder à l'élimination de déchets entreposés sur plusieurs terrains situés dans la commune de Sennevoy-le-Bas ;

2°) d'annuler cette décision implicite de rejet ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de mettre en oeuvre les pouvoirs qu'il tient de l'article L. 514-2 du code de l'environnement dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

______________________________________________________

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2008 ;

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Besson, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que, par un courrier du 23 août 2004, M. et Mme X ont demandé au préfet de l'Yonne, par application des articles L. 514-2 et L. 541-3 du code de l'environnement, de mettre en demeure Y, soit de régulariser sa situation au regard de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, soit de procéder à l'élimination des déchets entreposés sur plusieurs terrains situés dans la commune de Sennevoy-le-Bas ; que, par sa décision implicite attaquée, le préfet de l'Yonne a rejeté cette demande ; que, pour estimer que le refus implicite de mettre en oeuvre les pouvoirs que le préfet tient de l'article L. 514-2 du code de l'environnement en matière d'installations classées n'était pas entaché d'illégalité, le Tribunal administratif de Dijon a considéré que « les déchets présents sur la propriété de Y ne constituent pas, contrairement à ce que soutiennent les requérants, une installation classée soumise à autorisation relevant de la rubrique n° 286 de la nomenclature (récupération et stockage de déchets de métaux sur une surface excédant 50 m²), dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que ce dernier se livrerait, en qualité d'exploitant, à une quelconque activité, commerciale ou non, au titre de ces déchets » ; que, ce faisant, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme X, le Tribunal a suffisamment motivé son jugement ;

Sur la légalité du refus implicite de mettre en oeuvre l'article L. 514-2 du code de l'environnement :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 514-2 du code de l'environnement : « Lorsqu'une installation classée est exploitée sans avoir fait l'objet de la déclaration ou de l'autorisation requise par le présent titre, le préfet met l'exploitant en demeure de régulariser sa situation dans un délai déterminé en déposant, suivant le cas, une déclaration ou une demande d'autorisation. Il peut, par arrêté motivé, suspendre l'exploitation de l'installation jusqu'au dépôt de la déclaration ou jusqu'à la décision relative à la demande d'autorisation. / Si l'exploitant ne défère pas à la mise en demeure de régulariser sa situation ou si sa demande d'autorisation est rejetée, le préfet peut, en cas de nécessité, ordonner la fermeture ou la suppression de l'installation. Si l'exploitant n'a pas obtempéré dans le délai fixé, le préfet peut faire application des procédures prévues aux 1° et 2° du I de l'article L. 514-1. / Le préfet peut faire procéder par un agent de la force publique à l'apposition des scellés sur une installation qui est maintenue en fonctionnement soit en infraction à une mesure de suppression, de fermeture ou de suspension prise en application de l'article L. 514-1, de l'article L. 514-7, ou des deux premiers alinéas du présent article, soit en dépit d'un arrêté de refus d'autorisation » ; que la rubrique 286 de la nomenclature des installations classées indique que sont soumis à autorisation le stockage et les activités de récupération de déchets de métaux et d'alliages, de résidus métalliques, d'objets en métal et carcasses de véhicules hors d'usage, etc. ( ...) la surface utilisée étant supérieure à 50 m² » ;

Considérant que les requérants soutiennent que tout stockage et toute activité de récupération de métaux sur une surface supérieure à 50 m² constitue une installation classée ; qu'il résulte toutefois des dispositions précitées de l'article L. 514-2 du code de l'environnement que leur application par le préfet implique l'exploitation irrégulière d'une installation classée ; qu'en l'espèce, s'il résulte de l'instruction que Y entrepose divers déchets sur des terrains situés sur le territoire de la commune de Sennevoy-le-Bas, aucun élément ne peut cependant permettre d'établir qu'il se livre à une activité liée à ces déchets pouvant le faire regarder comme étant l'exploitant d'une installation susceptible de relever de la rubrique 286 précitée de la nomenclature des installations classées ; qu'il s'ensuit que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que la décision par laquelle le préfet de l'Yonne a implicitement refusé de mettre en oeuvre les pouvoirs qu'il tient de l'article L. 514-2 précité du code de l'environnement est entachée d'illégalité ;

Sur la légalité du refus implicite de mettre en oeuvre l'article L. 541-3 du code de l'environnement :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 541-3 du code de l'environnement : « En cas de pollution des sols, de risque de pollution des sols, ou au cas où des déchets sont abandonnés, déposés ou traités contrairement aux prescriptions du présent chapitre et des règlements pris pour leur application, l'autorité titulaire du pouvoir de police peut, après mise en demeure, assurer d'office l'exécution des travaux nécessaires aux frais du responsable. (...) L'autorité titulaire du pouvoir de police peut également obliger le responsable à consigner entre les mains d'un comptable public une somme répondant du montant des travaux à réaliser, laquelle sera restituée au fur et à mesure de l'exécution des travaux (...) » ;

Considérant que ces dispositions confèrent à l'autorité investie des pouvoirs de police municipale la compétence pour prendre les mesures nécessaires pour assurer l'élimination des déchets dont l'abandon, le dépôt ou le traitement présentent des dangers pour la santé de l'homme et l'environnement ; que ces dispositions ne font toutefois pas obstacle à ce que le préfet, en cas de carence de l'autorité municipale dans l'exercice des pouvoirs qui lui sont conférés au titre de la police des déchets, prenne sur le fondement de celle-ci, à l'égard du producteur ou du détenteur des déchets, les mesures propres à prévenir toute atteinte à la santé de l'homme et à l'environnement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par leur courrier précité du 23 août 2004, M. et Mme X ont demandé au préfet de l'Yonne, à défaut de mettre en oeuvre les pouvoirs qu'il tient de l'article L. 514-2 du code de l'environnement en matière d'installations classées, de mettre en demeure Y de procéder à l'élimination des déchets entreposés sur plusieurs terrains situés sur le territoire de la commune de Sennevoy-le-Bas, et ce par application des dispositions de l'article L. 541-3 du même code ; que, par ce même courrier, M. et Mme X ont informé le préfet du refus du maire de cette commune de faire droit à leur demande du 16 février 2004 d'assurer l'enlèvement desdits déchets, demande dont le préfet avait d'ailleurs été informé, par un courrier également daté du 16 février 2004, lui demandant, « le cas échéant », de se substituer au maire ; que, dans ces conditions, dès lors que le préfet a été clairement informé du fait que le maire, précédemment saisi, avait refusé d'agir et que l'Etat ne conteste pas que les dépôts de déchets réalisés par Y auraient justifié l'application des dispositions de l'article L. 541-3 du code de l'environnement, le préfet ne pouvait légalement refuser de mettre en oeuvre ces dispositions en engageant une procédure de substitution au maire de la commune de Sennevoy-le-Bas ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande d'annulation du refus implicite du préfet de l'Yonne de se substituer au maire de la commune de Sennevoy-le-Bas dans les pouvoirs que ce dernier tient de l'article L. 541-3 du code de l'environnement ; que, par suite, il y a lieu d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette cette demande, ainsi que ce refus ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant que l'annulation de la décision par laquelle le préfet de l'Yonne a implicitement refusé de se substituer au maire de la commune de Sennevoy-le-Bas dans les pouvoirs que ce dernier tient de l'article L. 541-3 du code de l'environnement en matière de déchets n'implique pas nécessairement que le préfet mettent en oeuvre l'article L. 514-2 du même code relatif aux installations classées ; que les conclusions de M. et Mme X tendant à ce que la Cour enjoigne au préfet d'appliquer ce dernier article doivent, par suite, être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros au bénéfice de M. et Mme X sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 9 mai 2006 du Tribunal administratif de Dijon est annulé en tant que, par ce jugement, le Tribunal a rejeté la demande d'annulation du refus implicite du préfet de l'Yonne d'appliquer l'article L. 541-3 du code de l'environnement en engageant une procédure de substitution au maire de la commune de Sennevoy-le-Bas.

Article 2 : La décision implicite attaquée est annulée en tant que, par cette dernière, le préfet de l'Yonne a refusé d'appliquer l'article L. 541-3 du code de l'environnement en engageant une procédure de substitution au maire de la commune de Sennevoy-le-Bas.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme X une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 06LY01502


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06LY01502
Date de la décision : 17/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FONTBONNE
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : BRUNO CHATON

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2008-06-17;06ly01502 ?
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