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15/11/2005 | FRANCE | N°01LY00843

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 15 novembre 2005, 01LY00843


Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2001, présentée pour M. et Mme Jean-Luc X, agissant pour eux-mêmes et au nom de leurs trois enfants, domiciliés ..., par Me Gioria, avocat ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9601265 du 24 janvier 2001 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande tendant à ce que le centre hospitalier Emile Roux du Puy-en-Velay soit condamné à réparer le préjudice résultant de l'accouchement de leur enfant le 29 avril 1992 ;

2°) de condamner le centre hospitalier Emile Ro

ux à leur payer une provision à valoir sur l'indemnisation du préjudice de 5 milli...

Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2001, présentée pour M. et Mme Jean-Luc X, agissant pour eux-mêmes et au nom de leurs trois enfants, domiciliés ..., par Me Gioria, avocat ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9601265 du 24 janvier 2001 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande tendant à ce que le centre hospitalier Emile Roux du Puy-en-Velay soit condamné à réparer le préjudice résultant de l'accouchement de leur enfant le 29 avril 1992 ;

2°) de condamner le centre hospitalier Emile Roux à leur payer une provision à valoir sur l'indemnisation du préjudice de 5 millions de francs au titre de l'IPP dont il reste atteint, 500 000 francs pour le pretium doloris, 500 000 francs pour le préjudice esthétique, 500 000 francs au titre du préjudice d'agrément ;

3°) de dire que le préjudice global au titre de l'IPP devra être fixé après une nouvelle expertise lorsque l'état de l'enfant sera stabilisé ;

4°) de condamner le centre hospitalier à verser à chacun des parents, au titre du préjudice moral, une somme de 300 000 francs, 200 000 francs à chacune des soeurs de Benoît, 1 000 000 francs à Mme X au titre de son préjudice professionnel, avec intérêts de droit, ainsi qu'à une somme de 35 000 francs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2005 :

- le rapport de M. Martin-Genier, premier conseiller ;

- les observations de Me Gioria, avocat des consorts X, et de Me Demailly, avocat du centre hospitalier Emile Roux ;

- et les conclusions de M. d'Hervé, commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité du centre hospitalier du Puy-en-Velay :

Considérant que Mme X a accouché, par la voie naturelle, d'un enfant se présentant par le siège, le 29 avril 1992 au centre hospitalier du Puy-en-Velay ; qu'immédiatement après l'accouchement, le nourrisson a présenté des signes de détresse respiratoire et a été transféré au service de pédiatrie du centre hospitalier à 21h30, où le diagnostic de détresse respiratoire a été confirmé ainsi que l'existence d'une bosse sérosanguine ; que son état neurologique continuant à se dégrader, une oxygénothérapie a été mise en place jusqu'au lendemain ; qu'il a été transféré au CHU de Saint-Etienne le lendemain vers 16 heures, où une hémorragie de la partie haute de la fosse a été diagnostiquée, nécessitant une intervention en urgence ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport des experts nommés par les premiers juges, qu'en admettant même que la gynécologue ayant suivi Mme X jusqu'à la veille de son accouchement, en n'ayant pas indiqué la conduite obstétricale à tenir lors de l'accouchement, ait commis une faute susceptible de mettre en difficulté le médecin accoucheur, il est constant que la pelvimétrie que présentait Mme X lors de son admission au centre hospitalier n'était pas normale et que son bassin était transversalement rétréci au détroit supérieur ; qu'ainsi, compte-tenu de ces précisions dont il avait eu connaissance, en procédant à un accouchement par les voies naturelles alors que le foetus se présentait par le siège et que les données classiquement acquises de la science obstétricale, en 1992, étaient sans ambiguïté sur la nécessité, dans ces circonstances, de réaliser un accouchement par césarienne, le médecin-accoucheur a commis une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier du Puy-en-Velay ; qu'il en est résulté une expulsion difficile, qui a duré dix-sept minutes et nécessité diverses manipulations ayant pu affecter la tête de l'enfant ; que si l'hématome du cervelet n'est pas a priori connu comme étant la conséquence d'un accouchement par le siège, et si la cause d'une telle lésion doit être généralement recherchée dans une malformation vasculaire, il n'a pas été possible d'en retrouver quelque signe que ce soit lors de l'intervention chirurgicale au CHU de Saint-Étienne ; qu'ainsi, en l'absence d'autres explications possibles, la présence d'un hématome cérébral doit être regardé comme trouvant son origine dans les conditions d'accouchement de Mme X ; qu'il s'ensuit que le lien de causalité entre les conditions de la naissance de Benoît X et les troubles dont il reste atteint est établi, et que le centre hospitalier du Puy-en-Velay doit être condamné à réparer l'intégralité du préjudice ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande ;

Sur le préjudice :

En ce qui concerne la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Loire :

Considérant que les frais médicaux, pharmaceutiques, de transport, d'hospitalisation et de soins spécialisés, nécessités par l'état de l'enfant Benoît X, justifiés par le relevé du 22 mai 2003, s'élèvent à la somme de 92 758,20 euros ; que le centre hospitalier du Puy-en-Velay doit être condamné à rembourser cette somme à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Loire ;

Considérant qu'il n'appartient pas au juge administratif de donner acte à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Loire de ses réserves relatives à d'éventuels débours ultérieurs qu'elle serait amenée à engager pour son assuré social ;

En ce qui concerne Benoît X :

Considérant que le taux de l'incapacité partielle permanente du jeune Benoît X a été provisoirement fixé à 100 % par l'expert nommé en première instance, et le pretium doloris ainsi que le préjudice esthétique à 7/7 chacun ; que ledit expert précise que le taux d'incapacité permanente devra être réévalué lorsque l'état de l'enfant sera stabilisé, c'est ;à ;dire vers l'âge de 13 à 14 ans ; qu'il sera fait une juste appréciation de ces préjudices et des troubles de toute nature subis par Benoît X jusqu'à l'âge de 13 ans, en fixant le montant de l'indemnisation, à la charge de centre hospitalier du Puy-en-Velay, à la somme de 80 000 euros ; qu'il appartiendra aux parents de Benoît de saisir le tribunal administratif afin qu'il soit statué, après nouvelle expertise, sur le montant du préjudice du jeune Benoît à partir de cet âge ;

En ce qui concerne M. et Mme X et leurs deux filles :

Considérant qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par les parents de Benoît en condamnant le centre hospitalier du Puy-en-Velay à leur verser, chacun et à titre définitif, une somme de 15 000 euros, ainsi que 10 000 euros pour chacune des deux soeurs de Benoît ;

Considérant que si Mme X soutient qu'elle a subi un préjudice financier en raison de l'interruption momentanée de sa vie professionnelle, puis d'une reprise à temps partiel, elle n'en justifie pas ; que dès lors les conclusions des consorts X tendant à ce que le centre hospitalier du Puy-en-Velay soit condamné à leur payer une somme en réparation de ce préjudice doivent être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le centre hospitalier du Puy-en-Velay doit être condamné à verser à M. et Mme X, en leur qualité d'administrateurs légaux de leur fils Benoît, une provision de 80 000 euros, 15 000 euros à chacun d'entre eux, 10 000 euros à Céline X et 10 000 euros à Blandine X ; que ces sommes porteront intérêts légaux à compter du 26 avril 1996, date de réception de la réclamation préalable des consorts X par le centre hospitalier du Puy-en-Velay ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge du centre hospitalier du Puy-en-Velay, la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés respectivement par M. et Mme X et la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Loire en appel et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 24 janvier 2001 est annulé.

Article 2 : Le centre hospitalier du Puy-en-Velay est condamné à verser à M. et Mme X, en leur qualité d'administrateurs légaux de leur fils, la somme de 80 000 euros, en leur nom personnel 15 000 euros à chacun d'eux, 10 000 euros à Céline X et 10 000 euros à Blandine X ; ces sommes porteront intérêts à taux légal à compter du 26 avril 1996.

Article 3 : Le centre hospitalier du Puy-en-Velay versera à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Loire une somme de 92 758,20 euros.

Article 4 : Le centre hospitalier du Puy-en-Velay versera une somme de 1 000 euros à M. et Mme X et une somme de 1 000 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Loire, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Loire est rejeté.

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N° 01LY00843


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 01LY00843
Date de la décision : 15/11/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: M. Patrick MARTIN-GENIER
Rapporteur public ?: M. D'HERVE
Avocat(s) : GIORIA

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2005-11-15;01ly00843 ?
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