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17/02/2005 | FRANCE | N°98LY00969

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5eme chambre - formation a 3, 17 février 2005, 98LY00969


Vu, I, la requête, enregistrée le 29 mai 1998, présentée pour la société civile immobilière (SCI) LE DOUBLE MIXTE dont le siège social est situé 45 cours Aristide Briand à Caluire (69300), représentée par son gérant et par son administrateur judiciaire, Maître X, par Me Seigle, avocat ;

La SCI demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 9201276-9500651-9702243-9702244 du magistrat délégué du Tribunal administratif de Lyon du 14 janvier 1998 rejetant le surplus de ses demandes en réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties

auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1991 à 1996 ;

2°) de prononcer...

Vu, I, la requête, enregistrée le 29 mai 1998, présentée pour la société civile immobilière (SCI) LE DOUBLE MIXTE dont le siège social est situé 45 cours Aristide Briand à Caluire (69300), représentée par son gérant et par son administrateur judiciaire, Maître X, par Me Seigle, avocat ;

La SCI demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 9201276-9500651-9702243-9702244 du magistrat délégué du Tribunal administratif de Lyon du 14 janvier 1998 rejetant le surplus de ses demandes en réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1991 à 1996 ;

2°) de prononcer les réductions demandées ;

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Vu, II, la requête, enregistrée le 20 février 2002, présentée pour la SCI LE DOUBLE MIXTE, dont le siège social est situé 73 cours Albert Thomas à Lyon (69003), et pour Maître Y, domicilié ..., en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la SCI LE DOUBLE MIXTE, par Me Y..., avocat ;

Ils demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9802935-9901382-9905184 et 0102737 du magistrat délégué du Tribunal administratif de Lyon du 22 janvier 2002 rejetant les demandes en réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles a été assujettie la SCI au titre des années 1997 à 2000 et leur demande subsidiaire d'expertise ;

2°) de prononcer les réductions demandées ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 janvier 2005 :

- le rapport de M. Raisson, premier conseiller ;

- les observations de Maître de X... pour les requérants ;

- et les conclusions de M. Kolbert, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes n° 98LY00969 et n° 02LY00339 concernent le même contribuable et le même impôt à raison du même immeuble ; qu'elles ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;

Considérant que, dans le périmètre du campus universitaire de La Doua, la SCI LE DOUBLE MIXTE a construit sur un terrain situé ..., que l'Etat lui a donné à bail emphytéotique, un immeuble de 9 000 m² environ destiné à accueillir des expositions, colloques, ainsi que des activités sportives ; que les cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties relatives à l'immeuble ont été établies, par référence à un immeuble type dénommé Espace Tête d'Or situé boulevard de Stalingrad sur la base d'une valeur locative de 75 francs au mètre carré sur laquelle il a été procédé à un abattement de 20 % ; que la société requérante et ses représentants relèvent appel du jugement en date du 14 janvier 1998 par lequel le magistrat délégué du Tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus de ses demandes en réduction des taxes foncières sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1991 à 1996 et du jugement en date du 22 janvier 2002 par lequel le magistrat délégué du même Tribunal a rejeté ses demandes en réduction des mêmes taxes pour les années 1997 à 2000 ;

Sur les conclusions à fin de non-lieu présentées à titre principal par la SCI LE DOUBLE MIXTE dans la requête n° 98LY00969 :

Considérant, en premier lieu, que la société appelante demande à la Cour de constater que ses demandes sont devenues sans objet dans la mesure où la Cour d'appel de Lyon a, par un arrêt rendu le 15 octobre 1998, rejeté la demande par laquelle le comptable public avait demandé, dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire la concernant, à être relevé de la forclusion née de la déclaration tardive de la créance constituée par le solde des cotisations de taxe foncière non réglées ;

Considérant toutefois que cette circonstance est sans influence sur la compétence du juge administratif pour se prononcer, s'agissant d'un différend portant sur l'assiette de l'impôt, sur les conclusions qui lui sont soumises par le contribuable, dès lors que ces dernières ne sont elles-mêmes entachées d'aucune irrecevabilité au regard des dispositions dont l'appréciation relève de la juridiction administrative et ce, sans préjudice des suites que la procédure judiciaire est susceptible d'avoir sur l'extinction, et par suite le recouvrement, de cette créance ;

Considérant, en second lieu, que la société appelante a présenté des conclusions à titre subsidiaire ; que, par suite, il n'y a pas lieu de requalifier ses conclusions à fin de non-lieu en conclusions à fin de désistement ;

Sur la recevabilité de la requête 98LY00969 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le jugement du magistrat délégué du Tribunal administratif de Lyon en date du 14 janvier 1998 a fait l'objet de deux notifications à la société appelante ; que l'accusé de réception de la première notification ne permet pas à la Cour de s'assurer de la date de présentation du pli à la société ; que la seconde notification a été effectuée le 2 avril 1998 ; que, par suite, la requête de la société enregistrée au greffe de la Cour le 29 mai 1998 est recevable ;

Sur la régularité du jugement du 14 janvier 1998 :

Considérant en premier lieu qu'en exposant les motifs pour lesquels l'abattement de 20 % pratiqué par l'administration fiscale sur la valeur locative de l'immeuble appartenant à la SCI LE DOUBLE MIXTE devait être regardé comme suffisant, le premier juge, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments de la société, a suffisamment répondu au moyen tiré de ce que les caractéristiques de l'immeuble dont la valeur locative est contestée auraient justifié un abattement supplémentaire ;

Considérant, en second lieu, que l'erreur matérielle commise par le jugement quant au montant de la valeur locative de l'immeuble de référence à partir de laquelle l'administration fiscale a accepté de pratiquer un abattement de 20 % reste sans incidence sur la régularité du jugement dès lors que le premier juge, en relevant que la société requérante demandait que soit appliqué à son immeuble un tarif de 52 francs au mètre carré, ne s'est pas mépris sur l'étendue des demandes de la société, telles que formulées notamment dans les mémoires enregistrés le 16 février 1995 et le 24 juin 1997 au greffe du tribunal administratif dans l'affaire n° 9500651 ;

Sur la régularité du jugement du 22 janvier 2002 :

Considérant qu'en estimant que l'abattement de 20 % sur la valeur locative pratiqué par l'administration était suffisant pour tenir compte de la différence de situation entre l'immeuble type et l'immeuble Le Double Mixte, le magistrat délégué du Tribunal administratif de Lyon a suffisamment motivé son rejet de la demande d'abattement supplémentaire exprimée par la société requérante ;

Considérant que, dès lors que la valeur locative de l'immeuble a été fixée par comparaison, en application des dispositions du 2° de l'article 1498 du code général des impôts, le moyen tiré du montant des loyers effectivement pratiqués dans les baux portant sur l'immeuble en cause dans le litige était inopérant ; que le premier juge n'était donc pas tenu d'y répondre ;

Considérant qu'en statuant sur le fond, le tribunal administratif s'est estimé suffisamment informé ; qu'il n'avait pas à motiver explicitement le rejet des conclusions annexes sollicitant l'ouverture d'une expertise ;

Sur les conclusions tirées de la violation des dispositions de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme :

Considérant qu'aux termes de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle …… » ;

Considérant que si les requérants soutiennent, en ce qui concerne la requête enregistrée sous le n° 98LY00969, que les dispositions de l'article 6-1 susmentionné seraient méconnues à raison de la durée excessive de l'instance, une telle circonstance, à la supposer avérée, reste sans incidence sur la validité de la décision juridictionnelle prise à l'issue de la procédure ; qu'ainsi, le moyen doit être écarté ;

Sur la valeur locative de l'immeuble Le Double Mixte :

Considérant qu'aux termes de l'article 1498 du code général des impôts : « La valeur locative de tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes ci-après : ….2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre type que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : …..Soit…par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune …… et qui faisaient l'objet à cette date date de référence de la révision de locations consenties à des conditions de prix normales ; 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe. » et qu'aux termes de l'article 324 AA de l'annexe III à ce même code : « La valeur locative cadastrale des biens loués à des conditions anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un titre autre que celui de locataire, vacants ou concédés à titre gratuit est obtenue en appliquant aux données relatives à leur consistance - telles que superficie réelle, nombre d'éléments - les valeurs unitaires arrêtées pour le type de la catégorie correspondante. Cette valeur est ensuite ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le type considéré et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien, de son aménagement, ainsi que de l'importance plus ou moins grande de ses dépendances bâties et non bâties si ces éléments n'ont pas été pris en considération lors de l'appréciation de la consistance » ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, comme il a été dit ci-dessus, lorsque la valeur locative d'un immeuble est établie par la méthode comparative, tout moyen tiré des conditions dans lesquelles cet immeuble a été ou pourrait être loué au regard des conditions du marché est inopérant ;

Considérant en outre que si, dans le dernier état de leurs écritures, les requérants soutiennent que les caractéristiques de l'immeuble Le Double Mixte sont plus proches de celles de l'immeuble dit des Puces du Canal que de celles de l'immeuble Espace Tête d'Or, ce n'est que pour justifier un abattement plus important par rapport à la valeur locative de ce dernier ; qu'ils doivent être donc regardés comme ne remettant en cause ni la méthode comparative, ni l'immeuble type retenu par les services fiscaux et entériné par la commission communale des impôts de Villeurbanne ; qu'en outre il ne résulte pas de l'instruction que l'immeuble dit des Puces du Canal constitue un immeuble de référence inscrit au procès-verbal des opérations de révision des valeurs locatives de la ville de Villeurbanne ;

Considérant toutefois qu'il résulte de l'instruction que l'immeuble Le Double Mixte présente des différences importantes par rapport à l'immeuble de référence Espace Tête d'Or ; que sa surface est nettement supérieure ; qu'il ne comporte que de grandes salles d'exposition et de colloques et pour le quart de sa surface, des installations sportives alors que l'Espace Tête d'Or est constitué de bureaux et de salles de réunions répondant mieux aux normes commerciales ; que l'immeuble Le Double Mixte est moins bien situé, et d'un standing nettement moindre, en particulier par la nature et la qualité des matériaux de construction et de revêtement utilisés, que l'immeuble Espace Tête d'Or ; que l'immeuble appartenant à la SCI, tourné vers un public d'étudiants, sert au déroulement d'examens universitaires ou de manifestations sportives alors que l'immeuble Espace Tête d'Or, tourné vers une clientèle d'hommes d'affaires est utilisé pour des réunions, expositions ou colloques et se trouve par sa qualité, adapté à cette clientèle ; que compte tenu de ces éléments, il sera fait une juste appréciation de la valeur locative de l'immeuble appartenant à la société en pratiquant, par rapport à la valeur locative de l'immeuble type Espace Tête d'Or retenu par l'administration fiscale comme terme de comparaison, un abattement de 30 % soit une valeur locative de 52, 50 francs au mètre carré en valeur 1970 au lieu de l'abattement de 20 % pratiqué par l'administration ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante est seulement fondée, sans qu'il y ait lieu d'ordonner une expertise, à soutenir qu'à hauteur de l'abattement supplémentaire accordé, c'est à tort que le magistrat délégué du Tribunal administratif de Lyon, par les décisions attaquées, a rejeté ses conclusions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Pour déterminer, au titre des années 1991 à 2000, la valeur locative de l'immeuble Le Double Mixte situé ..., il sera pratiqué un abattement de 30 % par rapport à l'immeuble type constitué par l'immeuble Espace Tête d'Or situé boulevard de Stalingrad, soit une valeur locative cadastrale de 52, 50 francs soit 8 euros au mètre carré en valeur 1970.

Article 2 : La SCI LE DOUBLE MIXTE est déchargée de la différence entre le montant des taxes foncières sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1991 à 2000 et le montant qui résulte de ce qui est dit à l'article précédent.

Article 3 : Les jugements du magistrat délégué du Tribunal administratif de Lyon en date du 14 janvier 1998 et du 22 janvier 2002 sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes de la SCI LE DOUBLE MIXTE est rejeté.

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N° 98LY00969-N° 02LY00339


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 98LY00969
Date de la décision : 17/02/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

54-05-05-01 PROCÉDURE. - INCIDENTS. - NON-LIEU. - ABSENCE. - LITIGE RELATIF À L'ASSIETTE DE L'IMPÔT - ENTREPRISE EN REDRESSEMENT JUDICIAIRE - MOYEN TIRÉ DE L'EXTINCTION DE LA CRÉANCE DU TRÉSOR PUBLIC - MOYEN INOPÉRANT - A) ABSENCE DE DÉSISTEMENT [RJ1]- B) ABSENCE DE NON-LIEU [RJ2].

z54-05-05-01z a) Le contribuable ayant présenté des conclusions subsidiaires en réduction des impositions, ses conclusions principales à fin de non-lieu, même non fondées, ne sont pas requalifiées en conclusions à fin de désistement.... ...b) Les conclusions à fin de non-lieu présentées par un contribuable au motif que la créance du Trésor public constituée par les impositions non réglées est éteinte faute d'avoir été produite en temps utile au passif d'une entreprise faisant l'objet d'une procédure de redressement judiciaire doivent être écartées dans la mesure où l'extinction de la créance du Trésor reste sans influence sur la compétence du juge administratif pour se prononcer, s'agissant d'un différend portant sur l'assiette de l'impôt, sur les conclusions qui lui sont soumises par le contribuable, dès lors que ces dernières ne sont elles-mêmes entachées d'aucune irrecevabilité au regard des dispositions dont l'appréciation relève de la juridiction administrative et ce, sans préjudice des suites que la procédure judiciaire est susceptible d'avoir sur l'extinction et, par suite, le recouvrement de cette créance.


Références :

[RJ1]

A propos de la requalification en conclusions à fin de désistement de conclusions à fin de non-lieu, jugées non fondées, cf. Section, 7 avril 1967, Monschein, p. 152 ;

sur l'absence d'une telle requalification en présence de conclusions subsidiaires, cf. 28 avril 1972, Sieur Colombe, p. 327.,,

[RJ2]

Rappr., en matière de marchés publics, Avis, Section, 30 janvier 1992, Sté Jules Viaux et fils, p. 31.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. Denis RAISSON
Rapporteur public ?: M. KOLBERT
Avocat(s) : SEIGLE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2005-02-17;98ly00969 ?
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