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22/10/1997 | FRANCE | N°95LY01190

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2e chambre, 22 octobre 1997, 95LY01190


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 4 juillet 1995, présentée pour la Société immobilière BOCCACE, société anonyme de droit suisse ayant son siège ... à (1211) Genève 17, par Me X..., avocat au barreau de Grasse ;
La Société immobilière BOCCACE demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement en date du 9 février 1995 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaire d'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années

1984 et 1985 ;
2 ) de prononcer la décharge des impositions contestées ainsi que le...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 4 juillet 1995, présentée pour la Société immobilière BOCCACE, société anonyme de droit suisse ayant son siège ... à (1211) Genève 17, par Me X..., avocat au barreau de Grasse ;
La Société immobilière BOCCACE demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement en date du 9 février 1995 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaire d'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1984 et 1985 ;
2 ) de prononcer la décharge des impositions contestées ainsi que le remboursement des frais exposés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-502 du 8 juillet 1987 ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 octobre 1997 ;
- le rapport de M. RICHER, président ;
- et les conclusions de M. BONNAUD, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la Société immobilière BOCCACE, société de droit suisse, exerçait au Cannet (Alpes-Maritimes) une activité de location d'immeuble à usage commercial ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, lui ont été notifiés des redressements d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 1984 et 1985, portant sur le montant des amortissements des exercices en cause, celui des amortissements réputés différés des exercices antérieurs, ainsi que sur les provisions, les charges à payer et les frais financiers comptabilisés ;
Sur la valeur des immobilisations amortissables :
Considérant que la Société immobilière BOCCACE a calculé le montant des amortissements afférents aux constructions réalisées sur la base d'une valeur estimée en francs suisses, convertie en francs français ; que le vérificateur a substitué à cette valeur celle résultant de la déclaration souscrite par la société le 14 mars 1979, pour la livraison à soi-même de l'immeuble ;
Considérant, en premier, lieu, que la Société immobilière BOCCACE n'établit pas, en tout état de cause, la réalité d'un accord verbal du service à la proposition d'estimation de la valeur de 9 607 369 francs au 31 décembre 1981 qu'elle aurait formulée le 11 mars 1985 pour les immobilisations en cause ;
Considérant, en deuxième lieu, que la valeur hors taxe, terrain exclu, retenue par le vérificateur, correspondant à la déclaration souscrite par la société le 14 mars 1979, il appartient à cette dernière de justifier la réalité et le montant des travaux effectués postérieurement à cette date et ayant eu pour effet d'augmenter la valeur des dites immobilisations ; que, contrairement à ce que soutient le ministre, la production, pour la première fois en appel, des pièces pouvant justifier ces travaux, ne peut faire obstacle, nonobstant l'ancienneté de ces pièces, dont les originaux figurent au dossier, à ce que la cour apprécie leur caractère probant ; que, toutefois, seuls les travaux ayant pour effet de créer de nouvelles immobilisations et ceux augmentant la valeur des éléments existants ou prolongeant de façon notable leur durée probable d'utilisation peuvent, à l'exclusion des travaux de réparation ou d'entretien, ainsi que ceux qui seraient insuffisamment justifiés, être pris en compte au titre des immobilisations amortissables ; qu'au vu des pièces produites, le ministre soutient sans être contredit que les travaux répondant à ces conditions doivent être arrêtés à la somme hors taxes de 463 106 francs en 1979, 9 582 francs en 1980 et 172 192 francs en 1981 ; que, dans ces conditions, la valeur amortissable des immobilisations doit être fixée à 6 494 901 francs pour 1981 et 6 512 309 francs pour les années suivantes ;
Considérant, en troisième lieu, que le montant de la TVA acquittée sur la déclaration de livraison à soi-même de la construction reste sans incidence sur la valeur des immobilisations amortissables, dont la comptabilisation s'effectue hors taxe ;
Sur les amortissements réputés différés :

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 39, 39 B et 209 du code général des impôts, le législateur n'a entendu, sous réserve du délai, établir aucune distinction entre le report des déficits et celui des amortissements différés, et les amortissements régulièrement comptabilisés, mais réputés différés en période déficitaire constituent des charges déductibles du bénéfice net imposable ; qu'ainsi leur report au-delà de la période prescrite concourt à la détermination des résultats imposables d'exercices non prescrits ; que les résultats des exercices clos en 1984 et 1985 ayant été rendus bénéficiaires par les rehaussements du service, le résultat net imposable devait être arrêté en tenant compte des amortissements réputés différés ; que, par suite, l'administration était en droit de remettre en cause le calcul desdits amortissements, en tant qu'ils constituaient une charge de ces exercices ; que c'est dès lors en vain que la Société immobilière BOCCACE oppose aux redressements correspondants l'intangibilité de ces amortissements au motif qu'ils ont ét effectués en période prescrite ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les bases de l'impôt sur les sociétés des années 1984 et 1985 doivent être, pour ce chef de redressement, respectivement ramenées de 189 910 francs à 126 706 francs et de 641 945 francs à 620 877 francs ;
Sur la correction symétrique des bilans :
Considérant que la Société immobilière BOCCACE demande que la surestimation de la valeur des immobilisations soit corrigée de façon symétrique dans le bilan de clôture du premier exercice non prescrit ; que, toutefois, l'administration n'ayant procédé à aucun redressement au titre des immobilisations, la société invoque en vain le droit à une telle correction symétrique des écritures comptables relatives à ce poste ;
Sur les provisions :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 53 A du code général des impôts, un décret fixe le contenu de la déclaration permettant de déterminer et de contrôler le résultat imposable de l'année ou de l'exercice précédent, ainsi que la liste des documents qui doivent y être joints ; qu'aux termes de l'article 54 quinquies du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux impositions litigieuses : "Pour être admises en franchise d'impôt, les provisions mentionnées au premier alinéa du 5 de l'article 39-1 et les provisions dont la déduction est prévue par les dispositions légales particulières doivent figurer sur le tableau des provisions mentionné à l'article 38-II de l'annexe III au présent code." ; que la Société immobilière BOCCACE ne conteste pas que les provisions pour créances douteuses constituées au titre des deux années en litige ne figuraient pas, comme elles l'auraient dû, sur le relevé spécial des provisions prévu par l'article 54 du code général des impôts, mais elle soutient qu'à la sanction édictée par les dispositions précitées de l'article 54 quinquies, doit être substituée celle, moins sévère, prévue désormais à l'article 1734 bis du code, issu de la loi susvisée du 8 juillet 1987, selon lequel les contribuables qui n'ont pas produit à l'appui de leur déclaration de résultats de l'exercice le tableau des provisions prévu en application des dispositions de l'article 53 A sont punis d'une amende égale à 5 % des sommes ne figurant pas sur le tableau ou le relevé ; que, toutefois, la règle selon laquelle les provisions ne figurant pas sur le tableau mentionné à l'article 38-II de l'annexe III ne pouvaient être admises en franchise d'impôt édictait une condition de forme de la déduction des provisions et non une sanction présentant un caractère pénal ; que, par suite, la société n'est pas fondée à soutenir qu'il y aurait lieu de limiter pour les années en litige la sanction du défaut de mention des dites provisions sur le tableau récapitulatif à l'application d'une pénalité de 5 % ;
Considérant, par ailleurs, que si la société requérante se prévaut, sur le fondement des dispositions de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, d'une instruction administrative 13 N-3-88 du 6 mai 1988 ayant admis que "par mesure de tempérament les nouvelles dispositions (de l'article 1734 bis du code général des impôts) pourront également être appliquées à toutes les infractions relevées postérieurement au 11 juillet 1987 et commises au titre d'exercices antérieurs, ainsi que sur demande du contribuable pour le règlement des litiges en cours", cette instruction, en tant qu'elle prévoit qu'elle s'appliquera aux litiges en cours, ne peut être regardée sur ce point comme interprétant le texte fiscal qui constitue la base légale des impositions contestées et, dès lors, n'est pas susceptible d'être invoquée par les contribuables sur le fondement des dispositions de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ;
Sur les charges à payer :

Considérant que ne peuvent être portées dans un compte de charges à payer que les charges, non encore payées, se rattachant à l'exercice en cours, lorsqu'elles sont certaines dans leur principe et leur montant ; que la société immobilière BOCCACE a, au cours de l'exercice clos en 1985, inscrit à un compte "charges à payer" une somme de 245 135 francs correspondant pour 45 135 francs à des "impôts locaux 1984" et pour 200 000 francs aux taxes foncière de l'année 1985 ; que le vérificateur a réintégré la différence entre la somme de 245 135 francs et l'impôt foncier de l'année 1985, qui était d'un montant de 177 396 francs ; que l'administration, qui est en droit à tout moment de la procédure d'invoquer de nouveaux moyens de nature à justifier l'imposition mise en recouvrement, fait valoir que les charges des exercices antérieurs, ainsi que celles de l'exercice dont le montant n'est pas connu avec certitude ne peuvent être portées au compte de charges à payer ; que, dès lors, si le vérificateur s'est abstenu de mentionner dans la notification de redressements que ceux-ci concernaient les impôts locaux de 1984, cette omission reste sans incidence sur le bien-fondé du redressement ; qu'en admettant, comme le soutient la société, que l'avis d'imposition des taxes foncières de l'année 1985 ne lui était pas parvenu à la clôture de l'exercice, cette circonstance ne l'autorisait pas à comptabiliser en charge à payer une somme ne correspondant pas à une dette certaine dans son montant ; qu'elle n'est, par suite, pas fondée à se plaindre de la réintégration des sommes excédant l'impôt réellement dû au titre de cet exercice ;
Sur les frais financiers :
Considérant que la société immobilière BOCCACE, à qui incombe la charge de démontrer dans leur principe comme dans leur montant l'exactitude des charges comptabilisées, soutient avoir acquitté, au titre d'un emprunt souscrit les 30 juin et 1er juillet 1977 pour la réalisation de la construction de l'immeuble, des intérêts dont elle conteste la réintégration ; que, cependant, en se bornant à produire le contrat de prêt et une lettre du créancier, en date du 30 juin 1988, faisant état de prorogations elle ne justifie pas les dates et les montants des sommes échues conformément à ces actes, au cours des années 1984 et 1985 ; que, dans ces conditions, elle n'établit pas la réalité des frais financiers comptabilisés ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la Société immobilière BOCCACE est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté en totalité sa demande ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant que la demande de la Société immobilière BOCCACE tendant au remboursement des frais exposés tant en première instance qu'en appel n'est pas chiffrée ; qu'elle ne peut, dès lors, être accueillie ;
Article 1er : La base de l'impôt sur les sociétés des années 1984 et 1985 mis à la charge de la Société immobilière BOCCACE au titre des années 1984 et 1985 sont réduites respectivement de soixante-trois mille deux cent quatre francs (63 204 francs) et vingt- et-un mille soixant-huit francs (21 068 francs).
Article 2 : La Société immobilière BOCCACE est déchargée de la différence entre le montant des cotisations d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre des exercices clos en 1984 et 1985 et celui qui résulte de l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 9 février 1995 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la Société immobilière BOCCACE est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 95LY01190
Date de la décision : 22/10/1997
Sens de l'arrêt : Réformation réduction
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - TEXTE APPLICABLE (DANS LE TEMPS ET DANS L'ESPACE) - Application de la loi répressive plus douce - Absence - Pénalités pour absence de relevé spécial des provisions (art - 1734 bis du CGI).

19-01-01-02, 19-04-02-01-04-04 L'amende prévue par l'article 1734 bis du code général des impôts issu de la loi du 8 juillet 1987, égale à 5 % du montant des sommes omises dans le relevé spécial des provisions, s'est substituée au régime antérieurement prévu par l'article 38-II de l'annexe III selon lequel les sommes ainsi omises ne pouvaient être admises en franchise d'impôt. La règle antérieure édictant une condition de forme de la déduction des provisions et non une sanction présentant un caractère pénal, un contribuable ne peut demander, en se prévalant du principe de l'application de la loi répressive plus douce, que soit substituée à la non-admission des provisions non inscrites, l'application de la pénalité de 5 %.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - PROVISIONS - Conditions de forme - Amende de l'article 1734 bis du CGI en cas d'absence ou d'insuffisance du relevé spécial des provisions - Application de la loi pénale nouvelle plus douce - Absence.


Références :

CGI 39, 39 B, 209, 53 A, 54 quinquies, 54, 1734 bis
CGI Livre des procédures fiscales L80 A
Instruction du 06 mai 1988 13N-3-88
Loi 87-502 du 08 juillet 1987


Composition du Tribunal
Président : M. Lukaszewicz
Rapporteur ?: M. Richer
Rapporteur public ?: M. Bonnaud

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1997-10-22;95ly01190 ?
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