Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 5 juin 2023 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2305137 du 31 octobre 2024, le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté attaqué et a enjoint au préfet du Nord de délivrer à M. C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 novembre 2024, le préfet du Nord demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Lille.
Il soutient que :
- les ressortissants marocains ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour obtenir la délivrance d'un titre de séjour " salarié ", laquelle est régie de manière exclusive par les stipulations de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ; M. C... ne remplit aucune des conditions de délivrance d'un titre de séjour, sur le fondement de ces stipulations ou à titre exceptionnel, dès lors qu'il ne présente aucun contrat visé par les autorités compétentes, qu'il ne détient pas de visa de long séjour et qu'il a fait usage de faux documents pour obtenir un contrat de travail ; c'est, dès lors, à tort que les premiers juges se sont fondés sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour prononcer l'annulation de l'arrêté attaqué ;
- aucun des autres moyens soulevés par M. C... n'est fondé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 février 2025, M. C..., représenté par Me Navy, conclut :
1°) à titre principal, au rejet de la requête du préfet du Nord ;
2°) à titre subsidiaire, à l'annulation de l'arrêté du préfet du Nord en date du 5 juin 2023 et à ce qu'il soit enjoint à ce préfet de délivrer le titre de séjour qu'il sollicite ou de procéder à un réexamen de sa situation, sous astreinte de 155 euros par jour de retard, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
3°) à ce qu'il soit mis à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'un défaut d'examen complet et sérieux de sa situation ainsi que d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision relative au délai de départ volontaire est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans est insuffisamment motivée ;
- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Toutias, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... C..., né le 2 juillet 1981, de nationalité marocaine, est entré en France le 29 juin 2014 sous couvert d'un visa de court séjour, valable du 27 juin 2014 au 27 juillet 2014, délivré par les autorités consulaires françaises à Agadir. Il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français au-delà de la date de validité de ce visa. Le 27 janvier 2023, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour pour des motifs tenant à ses activités professionnelles. Par un arrêté du 5 juin 2023, le préfet du Nord a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Le préfet du Nord relève appel du jugement du 31 octobre 2024 par lequel le tribunal administratif de Lille, sur saisine de M. C..., a annulé cet arrêté et lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par les premiers juges :
2. Aux termes de l'article 9 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) ". L'article 3 du même accord stipule : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " (...) ". Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / (...) ".
3. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié. En revanche, en l'absence de stipulations de l'accord franco marocain régissant l'admission au séjour en France des ressortissants marocain au titre de la vie privée et familiale, les ressortissants marocains peuvent utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'appui d'une demande de régularisation exceptionnelle de leur situation sur ce dernier fondement.
4. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, M. C... justifie de neuf ans de présence en situation irrégulière sur le territoire. S'il présente un contrat de travail à durée indéterminée pour un poste d'aide boulanger conclu le 1er septembre 2019 avec une société située en région parisienne, il ne ressort pas des pièces du dossier, l'intéressé n'ayant produit aucun bulletin de salaire postérieur au mois de février 2022, que cette situation était toujours d'actualité à la date de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour ainsi qu'à celle à laquelle le préfet a statué, son employeur ne s'étant au demeurant pas associé à sa démarche et le requérant se prévalant désormais d'une résidence habituelle dans le département du Nord. En outre, si M. C... fait état d'une relation amoureuse avec une ressortissante française, il apparaît que le début de la communauté de vie entre les intéressés et la conclusion d'un pacte civil de solidarité sont intervenus postérieurement à la date de la décision litigieuse. Hormis cette compagne, M. C... ne dispose d'aucune attache familiale sur le territoire. Dans le même temps, il n'est pas contesté que M. C... ne serait pas isolé dans son pays d'origine, où il dispose toujours de ses parents et de ses frères et sœurs, et il n'avance aucune considération de nature à faire obstacle à sa réinsertion socio-professionnelle dans ce pays, où il a en tout état de cause vécu la majeure partie de sa vie. Dans ces conditions et en dépit de la durée du séjour de l'intimé en France et des liens amicaux qu'il aurait noués dans le cadre de ses activités sportives et associatives, le préfet du Nord, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, n'a pas fait une appréciation manifestement erronée de la situation de l'intéressé au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles n'étaient au demeurant applicables à M. C... qu'en tant que sa demande d'admission exceptionnelle au séjour repose en partie sur des éléments ayant trait à sa vie privée et familiale. Le moyen en ce sens doit, dès lors, être écarté.
5. Il s'ensuit que le préfet du Nord est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur ce moyen pour annuler son arrêté du 5 juin 2023. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal administratif de Lille et devant la cour.
En ce qui concerne les autres moyens :
S'agissant des moyens communs aux décisions attaquées :
6. En premier lieu, par un arrêté du 31 mars 2023, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du Nord n° 080 le 31 mars 2023, le préfet a donné à M. D... B..., sous-préfet de Valenciennes, signataire de l'arrêté attaqué, délégation à l'effet de signer notamment : les " décisions portant retrait ou refus de délivrance ou de renouvellement d'un titre de séjour ", les " décisions portant obligation de quitter le territoire français ", les " décisions relatives au délai de départ volontaire ", les " décisions fixant le pays à destination duquel un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement doit être éloigné " et les " décisions d'interdiction de retour sur le territoire français ". Dès lors, les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur des décisions attaquées doivent être écartés.
7. En deuxième lieu, l'arrêté attaqué vise et mentionne les dispositions qui constituent les fondements légaux de chacune des décisions qu'il prononce à l'encontre de M. C.... Il comporte des considérations de faits suffisantes ayant mis l'intéressé à même de comprendre les motifs de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour qui lui est opposée. Dès lors qu'elle est fondée sur cette décision de refus de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'avait, quant à elle, pas à faire l'objet d'une motivation distincte en application des dispositions du second alinéa de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet du Nord n'avait pas à motiver spécifiquement le choix du délai de trente jours qu'il a accordé à M. C... pour quitter volontairement le territoire français, dès lors que ce délai correspond au délai de droit commun prévu par les dispositions de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé ait fait valoir devant lui des éléments spécifiques justifiant qu'un délai supérieur lui soit accordé. Pour décider que la mesure d'éloignement pourra être exécutée à l'encontre du pays dont il a la nationalité, à savoir le Maroc, ou de tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible, l'arrêté attaqué rappelle que M. C... a la nationalité marocaine, qu'il est venu depuis ce pays en 2014, qu'il n'établit pas y être isolé ni ne pas pouvoir s'y réinsérer et qu'il n'établit pas davantage y être exposé en cas de retour à des peines ou traitements inhumains ou dégradants au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Enfin, pour décider de prononcer une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans, le préfet du Nord a procédé à un examen de la situation de M. C... au regard des critères de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce dont rendent compte les mentions de l'arrêté attaqué. Dès lors, les moyens tirés de ce que les décisions attaquées sont insuffisamment motivées doivent être écartés.
8. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Nord n'aurait, préalablement au prononcé des décisions attaquées, pas procédé à l'examen de la situation personnelle de M. C.... En particulier, il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet du Nord a apprécié la qualité de son insertion professionnelle et les conditions dans lesquelles il a obtenu son contrat de travail ainsi que la nature et l'intensité de ses liens privés et familiaux en France et dans son pays d'origine. Les moyens tirés de ce que les décisions attaquées seraient entachées d'erreur de droit pour procéder d'un défaut d'examen doivent, dès lors, être écartés.
9. En quatrième lieu, la méconnaissance du droit d'être entendu, reconnu par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et par les principes généraux du droit de l'Union européenne, ne peut être utilement invoquée à l'encontre d'une décision refusant la délivrance d'un titre de séjour qui ne peut être regardée comme mettant en œuvre le droit de l'Union européenne ou comme étant régie par celui-ci. Quant aux autres décisions attaquées, et alors que le préfet du Nord a statué sur une demande dont il l'avait saisi, M. C... ne précise pas la nature des informations tenant à sa situation personnelle dont il aurait été empêché de porter à la connaissance de l'administration. Dès lors, les moyens tirés de ce que le préfet du Nord a méconnu son droit d'être entendu doivent être écartés.
S'agissant des moyens dirigés contre la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
10. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
11. En premier lieu, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C... ait invoqué le bénéfice des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'appui de sa demande de délivrance d'un titre de séjour ou que le préfet du Nord aurait spontanément examiné sa situation au regard de ces dispositions, ce qu'il n'était au demeurant nullement tenu de faire, le moyen soulevé par M. C... tiré de la méconnaissance des dispositions de cet article doit être écarté comme inopérant.
12. En second lieu, les moyens tirés de ce que le préfet du Nord aurait méconnu les stipulations citées au point 10 et commis une erreur manifeste d'appréciation au regard, d'une part, de son pouvoir général de régularisation mentionné au point 3 et, d'autre part, des conséquences de la décision attaquée sur la situation personnelle de M. C... doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4.
13. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour.
S'agissant des moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français :
14. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) / 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents (...) ".
15. En premier lieu, M. C... ne peut utilement invoquer, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui régissent les conditions de délivrance d'une carte de séjour temporaire pour des motifs tenant à la vie privée et familiale. Son moyen en ce sens doit, dès lors, être écarté comme inopérant.
16. En second lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation, au soutien desquels M. C... n'apporte pas d'arguments différents de ceux qu'il a avancés au soutien des moyens équivalents dirigés contre la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 4 et 12.
17. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas davantage fondé à demander l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
S'agissant des moyens dirigés contre la décision fixant le délai de départ volontaire :
18. Aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas (...) ".
19. En premier lieu, ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, M. C... n'établit pas que l'arrêté attaqué, en tant qu'il l'oblige à quitter le territoire français, serait illégal. Par suite, il n'est pas davantage fondé à soutenir que la décision fixant le délai de départ volontaire est illégale au motif qu'elle a été prise sur le fondement de cette obligation de quitter le territoire français et son moyen en ce sens doit, dès lors, être écarté.
20. En second lieu, ainsi qu'il a été dit au point 4, M. C... n'établit pas que le centre de sa vie privée et familiale devait, à la date de la décision attaquée, être regardé comme étant principalement établi en France et qu'il ne puisse pas se réinsérer dans son pays d'origine. Dans ces conditions, il n'établit pas que son départ volontaire ne pouvait pas être organisé dans le délai de droit commun de trente jours et c'est donc sans méconnaître les dispositions de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet du Nord ne lui a pas accordé, à titre exceptionnel, un délai d'une durée supérieure. Le moyen soulevé en ce sens par M. C... doit, dès lors, être écarté.
21. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas davantage fondé à demander l'annulation de la décision fixant le délai de départ volontaire.
S'agissant des moyens dirigés contre la décision fixant le pays de destination :
22. Ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, M. C... n'établit pas que l'arrêté attaqué, en tant qu'il l'oblige à quitter le territoire français, serait illégal. Par suite, il n'est pas davantage fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination est illégale au motif qu'elle a été prise sur le fondement de cette obligation de quitter le territoire français et son moyen en ce sens doit, dès lors, être écarté. Il en résulte que M. C... n'est pas davantage fondé à demander l'annulation de la décision fixant le pays de destination.
S'agissant des moyens dirigés contre la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans :
23. Aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11 ".
24. Si, ainsi qu'il a été dit au point 4, M. C... s'est toujours maintenu en situation irrégulière sur le territoire, s'il ne justifiait pas être en situation d'emploi à la date de la décision attaquée et si le centre de sa vie privée et familiale ne peut être regardé à cette date comme étant principalement établi en France, en revanche, M. C... a vécu neuf années sur le territoire, il y a tissé des liens amicaux et affectifs, il présente des perspectives d'emploi susceptibles de permettre un retour en situation régulière et il n'est pas contesté par le préfet qu'il ne représente pas une menace pour l'ordre public. Compte tenu de ces éléments, si le préfet pouvait prononcer une interdiction de retour sur le territoire français à l'encontre de l'intéressé, il a en revanche commis une erreur d'appréciation en fixant la durée de cette mesure à deux ans, soit la durée maximale qui était possible dans ce cas de figure à la date à laquelle la décision a été prise. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait entachée d'une erreur d'appréciation doit être accueilli.
25. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens dirigés contre la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, que M. C... est fondé à en demander l'annulation.
26. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Nord est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 31 octobre 2024, le tribunal administratif de Lille a annulé ses décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour à M. C..., obligeant ce dernier à quitter le territoire français, lui octroyant à cette fin un délai de départ volontaire de trente jours et fixant le pays à destination duquel il devra être éloigné. En revanche, il n'est pas fondé à se plaindre de ce qu'ils ont annulé sa décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Il convient donc de prononcer l'annulation de ce jugement uniquement en tant qu'il prononce l'annulation des décisions de refus de séjour, portant obligation de quitter le territoire français, accordant un délai de départ volontaire de trente jours et fixant le pays de destination et, par voie de conséquence, en tant qu'il prononce une injonction à destination du préfet du Nord, de rejeter les demandes présentées en ce sens par M. C... devant le tribunal administratif de Lille et de rejeter les conclusions d'appel du préfet du Nord pour le surplus.
Sur les frais liés au litige :
27. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. C... présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2305137 du tribunal administratif de Lille en date du 31 octobre 2024 est annulé en tant qu'il annule les décisions du 5 juin 2023 par lesquelles le préfet du Nord a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. C..., a obligé ce dernier à quitter le territoire français, lui a octroyé à cet effet un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il devra être éloigné et en tant qu'il enjoint à ce préfet de délivrer à l'intéressé un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. C... devant le tribunal administratif de Lille tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Nord en date du 5 juin 2023 en tant qu'il lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français, lui a octroyé à cet effet un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné et celles à fin d'injonction sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions des parties devant la cour sont rejetées pour le surplus.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... C....
Copie en sera adressée au préfet du Nord.
Délibéré après l'audience publique du 8 juillet 2025 à laquelle siégeaient :
- M. Benoît Chevaldonnet, président de chambre,
- M. Laurent Delahaye, président-assesseur,
- M. Guillaume Toutias, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 juillet 2025.
Le rapporteur,
Signé : G. ToutiasLe président de chambre,
Signé : B. Chevaldonnet
La greffière,
Signé : A. Vigor
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
par délégation,
La greffière
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N°24DA02381