Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2023 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle doit être éloignée.
Par un jugement n° 2401282 du 17 juillet 2024, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 octobre 2024, Mme B..., représentée par Me Leroy, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime en date du 8 novembre 2023 ;
3°) d'enjoindre à ce préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois ou de réexaminer sa situation dans un délai de quatre mois et, dans l'attente de l'une ou de l'autre de ces mesures, de lui remettre une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans un délai de quinze jours ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'erreurs de faits qui ont exercé une influence sur l'examen des moyens dont elle avait saisi le tribunal ;
- l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance du droit à une bonne administration, incluant le droit d'être entendu et les obligations de loyauté, de motivation et d'examen sérieux et complet de sa demande ;
- la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors que la commission du titre de séjour n'a pas été saisie pour avis ;
- elle a été prise en méconnaissance de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration dès lors que le préfet ne l'a pas invitée à produire des pièces complémentaires justifiant de sa résidence en France depuis plus de dix ans ;
- elle méconnaît le droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences pour sa situation personnelle ;
- les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination sont illégales en raison de l'illégalité, invoquée par voie d'exception, de la décision portant refus de séjour sur laquelle elles sont fondées ;
- elles sont entachées d'une erreur de droit dès lors qu'elle devait bénéficier de plein droit de la délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale " ;
- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mars 2025, le préfet de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête d'appel de Mme B....
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 septembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le traité sur l'Union européenne, ensemble la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;
- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;
- la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Toutias, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... C... épouse B..., née le 10 septembre 1979, de nationalité marocaine, déclare être entrée en France en 2013. Le 27 février 2017, elle a fait l'objet d'un arrêté du préfet de la Seine-Maritime portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, confirmé par un jugement n° 1701126 du 13 juillet 2017 du tribunal administratif de Rouen et un arrêt n° 17DA01510 du 29 décembre 2017 de la cour. Le 9 novembre 2020, elle a fait l'objet d'un second arrêté du préfet de la Seine-Maritime portant, notamment, refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, ces décisions ayant été successivement confirmées par un jugement n° 2100170 du 24 juin 2021 du tribunal administratif de Rouen et un arrêt n° 21DA01587 du 7 juin 2022 de la cour. Le 6 novembre 2023, elle a une nouvelle fois sollicité son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 8 novembre 2023, le préfet de la Seine-Maritime a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle doit être éloignée. Mme B... relève appel du jugement du 17 juillet 2024 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. La circonstance que les premiers juges auraient commis des erreurs de faits ayant exercé une influence sur l'examen des moyens dont elle les avait saisis, notamment sur le moyen de vice de procédure tiré du défaut de saisine de la commission du titre de séjour, entacherait seulement le bien-fondé de leur jugement et non sa régularité. Il s'ensuit qu'à supposer même que Mme B... ait entendu contester le jugement attaqué pour ce motif, son moyen doit être écarté. Il appartient en tout état de cause à la cour, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur le bien-fondé des moyens que Mme B... reproche au tribunal de ne pas avoir accueillis dès lors qu'elle les reprend en appel et les dirige contre les décisions attaquées.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne les moyens communs aux décisions attaquées :
3. En premier lieu, la méconnaissance du droit d'être entendu et le droit à une bonne administration reconnu par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et par les principes généraux du droit de l'Union européenne ne peuvent être utilement invoqués à l'encontre d'une décision relative au séjour qui ne peut être regardée comme mettant en œuvre le droit de l'Union européenne ou comme régie par celui-ci.
4. Le droit d'être entendu implique en revanche que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourra être renvoyé en exécution de cette obligation, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, en l'espèce, Mme B..., qui a sollicité la délivrance d'un titre de séjour, a eu l'occasion, dans le cadre de sa demande et avant l'intervention de l'arrêté en cause, de communiquer tous les éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu des mesures contestées. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'elle ait explicitement sollicité un entretien en préfecture.
5. En deuxième lieu, l'arrêté attaqué vise et mentionne les dispositions qui constituent les fondements légaux de chacune des décisions qu'il prononce à l'encontre de Mme B.... Il comporte des considérations de faits suffisantes ayant mis l'intéressée à même de comprendre les motifs de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour qui lui est opposée. En particulier, contrairement à ce que soutient Mme B..., il ressort des mentions de l'arrêté attaqué que le préfet de la Seine-Maritime a porté une appréciation sur la qualité de son insertion dans la société française. Par ailleurs, dès lors qu'elle est fondée sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire français qui est également prononcée à l'encontre de Mme B... n'avait, quant à elle, pas à faire l'objet d'une motivation distincte en application des dispositions du second alinéa de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Enfin, pour décider que cette mesure d'éloignement pourra être exécutée à l'encontre du pays dont elle a la nationalité, à savoir le Maroc, ou de tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où elle est légalement admissible, l'arrêté attaqué rappelle que Mme B... a la nationalité marocaine et qu'elle n'établit ni qu'elle serait isolée en cas de retour dans ce pays, ni qu'elle y serait exposée à des peines ou traitements inhumains ou dégradants au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
6. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Maritime n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la demande et de la situation personnelle de Mme B.... En particulier, les énonciations de l'arrêté attaqué rendent compte des conclusions de l'examen de la situation privée et familiale de Mme B... effectué par le préfet de la Seine-Maritime au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment de ce qu'il a porté une appréciation sur la qualité de l'insertion de l'intéressée dans la société française. Il s'ensuit que, si l'arrêté attaqué a été pris sans que Mme B... ne soit reçue en entretien et dans les deux jours suivant la présentation de sa demande, il ne peut être regardé comme procédant d'un défaut d'examen sérieux et complet.
7. En quatrième lieu, ni la circonstance que Mme B..., dont ce n'était pas la première demande, n'a pas été reçue en entretien, ni celle que l'arrêté a été prononcé dans les deux jours suivant la présentation de la demande n'établit un manquement du préfet de la Seine-Maritime au principe de loyauté ou une atteinte au droit à une bonne administration.
8. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance du droit à une bonne administration, incluant le droit d'être entendu et les obligations de loyauté, de motivation et d'examen sérieux et complet de la demande, doit être écarté en toutes ses branches.
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative : / 1° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles (...) L. 423-23 (...) à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance ; / (...) / 4° Dans le cas prévu à l'article L. 435-1 ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 435-1 du même code : " (...) / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que la commission du titre de séjour est obligatoirement saisie pour avis, entre autres, lorsque l'autorité administrative envisage de rejeter la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans.
10. Il ressort des pièces du dossier que, si Mme B... est entrée en Espagne le 21 octobre 2013 sous couvert d'un visa de court séjour délivré par les autorités consulaires espagnoles à Casablanca et si elle déclare avoir rejoint immédiatement le territoire français, elle ne s'est toutefois jamais déclarée auprès des autorités françaises dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen et celles des articles R. 621-2 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, anciennement codifiées aux articles R. 211-32 et suivants du même code. Pour justifier de sa date d'entrée en France, Mme B... se prévaut d'une attestation de domicile datée du 27 novembre 2013, de l'ouverture de ses droits à l'aide médicale de l'État à compter du 27 février 2014, d'une attestation de son beau-frère déclarant l'avoir hébergée à son domicile lors de son arrivée en France le 21 octobre 2013 et de diverses attestations des structures associatives l'ayant assistée lors de son arrivée, datant le début de leurs interventions, selon les cas, de novembre 2013 ou décembre 2013. Elle produit en outre pour la première fois en appel la copie d'une réservation effectuée auprès d'une agence de voyage le 11 juillet 2013 pour un voyage Casablanca - Paris prévu le 19 octobre 2013. Ces éléments, qui ne sont pas convergents quant à la date précise d'entrée en France de Mme B..., ne suffisent pas à établir que celle-ci totalisait dix ans révolus de présence en France à la date à laquelle la décision attaquée a été prise. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision attaquée a été prise au terme d'une procédure irrégulière, à défaut de saisine de la commission du titre de séjour, doit être écarté.
11. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration : " Lorsqu'une demande adressée à l'administration est incomplète, celle-ci indique au demandeur les pièces et informations manquantes exigées par les textes législatifs et réglementaires en vigueur. Elle fixe un délai pour la réception de ces pièces et informations. / (...) ".
12. Les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile constituant des dispositions spéciales régissant le traitement par l'administration des demandes de titres de séjour, en particulier les demandes incomplètes, que le préfet peut refuser d'enregistrer, la procédure prévue à l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration n'est pas applicable à ces demandes. Au demeurant, il ne ressort pas des pièces du dossier que, pour rejeter la demande de titre de séjour de Mme B..., le préfet de la Seine-Maritime se soit fondé sur l'absence de documents ou de justificatifs nécessaires à l'instruction de sa demande mais sur la circonstance que l'intéressée ne remplissait pas les conditions d'une admission exceptionnelle au séjour. Le moyen tiré de ce que le préfet de la Seine-Maritime, en n'invitant pas Mme B... à justifier de sa résidence en France depuis plus de dix ans, aurait méconnu les dispositions de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration doit, dès lors, être écarté comme inopérant.
13. En troisième lieu, aux termes de l'article 9 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) ". L'article 3 du même accord stipule : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " (...) ". Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / (...) ".
14. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié. En revanche, en l'absence de stipulations de l'accord franco-marocain régissant l'admission au séjour en France des ressortissants marocain au titre de la vie privée et familiale, les ressortissants marocains peuvent utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'appui d'une demande de régularisation exceptionnelle de leur situation sur ce dernier fondement.
15. En outre, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
16. Il ressort des pièces du dossier que, si Mme B... justifie d'un peu moins de dix années de présence en France à la date de la décision attaquée, elle s'y est maintenue en toute irrégularité, malgré les deux précédentes décisions d'éloignement prises à son encontre et les décisions juridictionnelles ayant rejeté ses recours. Outre la présence à ses côtés de son époux qui fait l'objet d'une décision comparable, elle a pour seule attache familiale sur le territoire un beau-frère, avec lequel elle n'établit toutefois pas avoir de liens privilégiés ou d'une particulière intensité. En outre, malgré la durée de son séjour en France, elle ne présente aucune insertion professionnelle stable et justifie seulement d'une activité d'aide-cuisinière exercée depuis avril 2023 dans le cadre d'actions de réinsertion lui ayant procuré de très faibles ressources. Sa situation matérielle et financière en France est d'ailleurs des plus précaires, Mme B... et son époux étant incapables de subvenir à leurs besoins élémentaires sans l'assistance de diverses structures associatives ou sans les aides que la collectivité leur octroie. Dans le même temps, Mme B... n'établit pas être dépourvue d'attache familiale dans son pays d'origine, où elle a vécu la majeure partie de sa vie, jusqu'à l'âge de 34 ans, et elle n'avance aucune considération qui serait de nature à faire obstacle à sa réinsertion sociale et professionnelle. Il s'ensuit qu'en dépit de la durée de son séjour en France et des liens amicaux qu'elle aurait noués dans le cadre de ses activités associatives, le centre principal de sa vie privée et familiale ne peut être regardé comme s'étant établi en France. Enfin, la seule circonstance qu'elle bénéficie d'une prise en charge médicale pour ses problèmes d'infertilité et ses difficultés de procréation ne suffit pas, même à supposer que cette prise en charge lui soit financièrement inaccessible dans son pays d'origine, à caractériser des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour. Dans ces conditions, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de la Seine-Maritime n'a ni méconnu les stipulations et dispositions citées au point 15, ni commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard, d'une part, des dispositions citées au point 13 et, d'autre part, des conséquences de la décision attaquée sur sa situation personnelle. Les moyens en ce sens doivent, dès lors, être écartés.
17. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision portant refus de séjour.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
18. En premier lieu, ainsi qu'il a été exposé aux points 3 à 17, Mme B... n'établit pas que l'arrêté attaqué, en tant qu'il lui refuse la délivrance d'un titre de séjour, serait illégal. Par suite, le moyen tiré de l'illégalité, invoquée par voie d'exception, de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
19. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 16 que Mme B... n'établit pas être en situation de se voir attribuer de plein droit un titre de séjour au titre de ses liens privés et familiaux sur le territoire. Par suite, son moyen tiré de ce que le préfet de la Seine-Maritime aurait commis une erreur de droit en prononçant à son encontre une obligation de quitter le territoire français et aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
20. En troisième lieu, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 16.
21. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas davantage fondée à demander l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
22. Mme B... se borne, à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, à reprendre les mêmes moyens que ceux soulevés à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Ces moyens doivent, dès lors, être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés aux point 18 à 21. Il en résulte que Mme B... n'est pas davantage fondée à demander l'annulation de la décision fixant le pays de destination.
23. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
24. Les dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans les présentes instances d'appel, verse à Me Leroy, avocate désignée au titre de l'aide juridictionnelle, la somme que celle-ci réclame au titre des frais non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... épouse B..., au ministre de l'intérieur et à Me Leroy.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 27 mai 2025 à laquelle siégeaient :
- M. Benoît Chevaldonnet, président de chambre,
- M. Laurent Delahaye, président-assesseur,
- M. Guillaume Toutias, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juin 2025.
Le rapporteur,
Signé : G. ToutiasLe président de chambre,
Signé : B. Chevaldonnet
La greffière,
Signé : A. Vigor
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
par délégation,
La greffière
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N°24DA02184