Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 15 février 2024 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle doit être éloignée.
Par un jugement n° 2401999 du 24 septembre 2024, le tribunal administratif de Rouen, auquel la requête a été transmise en application des dispositions de l'article R. 351-3 du code de justice administrative par une ordonnance n° 2401874 du 6 mai 2024 du président du tribunal administratif de Rennes, a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 octobre 2024, Mme A..., représentée par Me Beguin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime en date du 15 février 2024 ;
3°) d'enjoindre à ce préfet de lui délivrer un titre de séjour ou, subsidiairement, de procéder à un réexamen de sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué n'est pas suffisamment motivé et est entaché d'un défaut d'examen particulier ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 9 de la convention franco-béninoise du 21 décembre 1992 et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il méconnaît les stipulations des articles 6 et 13 du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ;
- l'obligation de quitter le territoire français prononcée à son encontre est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2025, le préfet de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête de Mme A....
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ;
- la convention relative à la circulation et au séjour des personnes entre la République française et la République du Bénin, signée à Cotonou le 21 décembre 1992 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Toutias, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... A..., née le 8 novembre 1992, de nationalité béninoise, est entrée en France le 27 novembre 2020 sous couvert d'un visa de long séjour pour études. Elle a été mise en possession d'un titre de séjour pour ce même motif, renouvelé en dernier lieu jusqu'au 4 novembre 2022. Par un arrêté du 15 février 2024, le préfet de la Seine-Maritime a refusé de faire droit à la nouvelle demande de renouvellement dont elle l'avait saisi, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle doit être éloignée. Mme A... relève appel du jugement du 24 septembre 2024 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, l'arrêté attaqué comporte les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de chacune des décisions qu'il prononce à l'encontre de Mme A.... En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Maritime n'aurait, préalablement au prononcé de ces décisions, pas procédé à l'examen de la situation personnelle de l'intéressée. En particulier, dès lors que Mme A... n'établit pas avoir sollicité le renouvellement de son dernier titre de séjour avant l'expiration de celui-ci ou dans les six mois suivants, le préfet pouvait, contrairement à ce qu'elle soutient, regarder sa demande comme une première demande de délivrance d'un titre de séjour et lui opposer la condition d'obtention préalable d'un visa de long séjour. Également, la motivation de l'arrêté attaqué rend compte des conclusions de l'examen par le préfet de l'ensemble des justificatifs d'études et de formation présentés par Mme A... à l'appui de sa demande. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 9 de la convention franco-béninoise du 21 décembre 1992 relative à la circulation et au séjour des personnes : " Les ressortissants de chacun des États contractants désireux de poursuivre des études supérieures ou d'effectuer un stage de formation de niveau supérieur sur le territoire de l'autre État doivent, outre le visa de long séjour prévu à l'article 4, justifier d'une attestation d'inscription ou de préinscription dans l'établissement d'enseignement choisi, ou d'une attestation d'accueil de l'établissement où s'effectue le stage, ainsi que, dans tous les cas, de moyens d'existence suffisants. / Les intéressés reçoivent un titre de séjour temporaire portant la mention " étudiant ". Ce titre de séjour est renouvelé annuellement sur justification de la poursuite effective des études ou du stage et de la possession de moyens d'existence suffisants. / Ces dispositions ne font pas obstacle à la possibilité d'effectuer dans l'autre État d'autres types d'études ou de stages de formation dans les conditions prévues par la législation applicable dans l'État d'accueil ".
4. En outre, aux termes de l'article R. 431-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / 1° L'étranger qui dispose d'un document de séjour mentionné aux 2° à 8° de l'article L. 411-1 présente sa demande de titre de séjour entre le cent-vingtième jour et le soixantième jour qui précède l'expiration de ce document de séjour lorsque sa demande porte sur un titre de séjour figurant dans la liste mentionnée à l'article R. 431-2. Lorsque sa demande porte sur un titre de séjour ne figurant pas dans cette liste, il présente sa demande dans le courant des deux mois précédant l'expiration du document dont il est titulaire (...) ". Aux termes de l'article R. 431-8 de ce code : " L'étranger titulaire d'un document de séjour doit, en l'absence de présentation de demande de délivrance d'un nouveau document de séjour six mois après sa date d'expiration, justifier à nouveau, pour l'obtention d'un document de séjour, des conditions requises pour l'entrée sur le territoire national lorsque la possession d'un visa est requise pour la première délivrance d'un document de séjour (...) ". A cet égard, l'article L. 412-1 du même code dispose que : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1 ". Aux termes de l'article L. 412-3 de ce code : " Par dérogation à l'article L. 412-1 l'autorité administrative peut, sans que soit exigée la production du visa de long séjour mentionné au même article, accorder les cartes de séjour suivantes : / 1° La carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" prévue à l'article L. 422-1 ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 422-1 dudit code : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" d'une durée inférieure ou égale à un an. / En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sous réserve d'une entrée régulière en France et sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que, si Mme A... a été détentrice d'un titre de séjour en qualité d'étudiante jusqu'au 4 novembre 2022, elle n'établit pas, par les pièces qu'elle produit, en avoir sollicité le renouvellement dans les délais prévus par les dispositions précitées de l'article R. 431-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni même dans les six mois ayant suivi la date de son expiration. Il s'ensuit qu'en application des dispositions précitées de l'article R. 431-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Seine-Maritime était fondé à opposer à Mme A... les conditions posées pour une première délivrance d'un titre de séjour, dont celle tenant à l'obtention préalable d'un visa de long séjour. A cet égard, il est constant que Mme A... n'était détentrice d'un tel visa ni à la date de sa demande, ni à la date à laquelle le préfet a statué. Elle n'établit pas non plus avoir sollicité le bénéfice d'une dérogation et ne présente pas davantage les motifs susceptibles de la justifier. Il s'ensuit que c'est sans entacher son arrêté d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation que, pour lui refuser la délivrance du titre de séjour qu'elle sollicitait, le préfet de la Seine-Maritime lui a opposé qu'elle ne satisfaisait pas à la condition d'obtention préalable d'un visa de long séjour. Au surplus, il ressort des pièces du dossier que Mme A... ne justifie de l'obtention d'aucun diplôme depuis son arrivée en France, qu'elle a travaillé sous couvert des précédents titres dont elle a bénéficié au-delà de la quotité à laquelle ceux-ci lui donnaient droit et qu'à la date de l'arrêté attaqué elle était sur le point de s'engager dans une relation de travail avec un centre hospitalier pour exercer la médecine sous le statut de stagiaire associé. Il s'ensuit qu'à la date de l'arrêté attaqué, ainsi que le préfet de la Seine-Maritime l'a retenu, le suivi d'études ne pouvait pas être regardé comme étant le principal motif du séjour de l'intéressée en France. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 9 de la convention franco-béninoise du 21 décembre 1992 relative à la circulation et au séjour des personnes doit, dès lors, être écarté.
6. En troisième lieu, les stipulations des articles 6 et 13 du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui sont dépourvus d'effet direct à l'égard des particuliers, ne peuvent être utilement invoquées par Mme A... pour contester la légalité de l'arrêté attaqué.
7. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, Mme A... est présente en France depuis à peine plus de trois ans. Elle ne justifie de l'obtention d'aucun diplôme depuis son arrivée sur le territoire. Alors qu'elle est diplômée en médecine dans son pays d'origine, elle n'apporte pas de précision sur les motifs de sa réorientation vers des études d'infirmière non plus que le bénéfice qu'elle est susceptible d'en retirer pour l'exercice de la médecine dans son pays d'origine. A cet égard, elle ne fait état d'aucune considération qui serait de nature à empêcher sa réinsertion professionnelle au Bénin. Par ailleurs, Mme A... est célibataire, sans charge de famille et sans attache familiale en France. Elle n'établit pas qu'elle serait isolée en cas de retour dans son pays d'origine. Dans ces conditions, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et en lui faisant obligation de quitter le territoire français, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas entaché ses décisions d'erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences de celles-ci sur sa situation personnelle. Le moyen que Mme A... soulève en ce sens doit, dès lors, être écarté.
8. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreintes et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 27 mai 2025 à laquelle siégeaient :
- M. Benoît Chevaldonnet, président de chambre,
- M. Laurent Delahaye, président-assesseur,
- M. Guillaume Toutias, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juin 2025.
Le rapporteur,
Signé : G. ToutiasLe président de chambre,
Signé : B. Chevaldonnet
La greffière,
Signé : A. Vigor
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
par délégation,
La greffière
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N°24DA02148