Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. J... N... et Mme I... K..., M. G... et Mme B... H..., M. M... O... et Mme A... C... et M. F... L... et Mme D... E... ont demandé au tribunal administratif de Lille :
1°) d'annuler l'arrêté du 13 mars 2023 par lequel le maire de la commune de Mons-en-Pévèle a délivré à la société Norevie un permis de construire un béguinage sur les parcelles cadastrées 411 A 1991 et 411 A 2044 ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Mons-en-Pévèle la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n°2304388 du 30 mai 2024, le tribunal administratif de Lille a, sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, annulé l'arrêté du 13 mars 2023 en tant qu'il autorise l'implantation des bâtiments A, B et C à une distance supérieure à 6 mètres par rapport à la voie d'accès à la parcelle à bâtir et a rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 29 juillet 2024 sous le n°24DA01526, la société Norevie, représentée par Me Deregnaucourt, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 30 mai 2024 ;
2°) à titre principal, de rejeter la demande de M. N... et autres ;
3°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;
4°) de mettre à la charge de M. N... et autres une somme de 3 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens de première instance, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
5°) de mettre à la charge de M. N... et autres une somme de 3 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens d'appel, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société pétitionnaire soutient que :
- le tribunal a écarté à tort sa fin de non-recevoir tirée de l'absence d'intérêt à agir des requérants de première instance à l'encontre du permis de construire qui lui a été délivré le 13 mars 2023 ;
- la voie d'accès au projet borde l'ensemble des bâtiments A, B, C et D, si bien qu'aucune méconnaissance des dispositions de l'article 1AU 6 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) n'est établie en l'espèce, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges ;
- à supposer même une telle illégalité constituée, il appartenait aux premiers juges de prononcer un sursis à statuer sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme afin de lui permettre de régulariser ce vice, et non de prononcer une annulation partielle sur le fondement de l'article L. 600-5 du même code.
Par une requête en appel incident, enregistrée le 10 octobre 2024, M. J... N... et Mme I... K... et M. F... L... et Madame D... E..., représentés par Me Wilinski, demandent à la cour :
1°) à titre principal :
- d'annuler le jugement du 30 mai 2024 en tant qu'il limite l'annulation de l'arrêté du 13 mars 2023 à ce qu'il autorise l'implantation des bâtiments A, B et C à une distance supérieure à 6 mètres par rapport à la voie d'accès à la parcelle à bâtir ;
- d'annuler l'arrêté du 30 mai 2024 par lequel le maire de la commune de Mons-en-Pévèle a délivré à la société Norevie un permis de construire un béguinage sur les parcelles cadastrées 411 A 1991 et 411 A 2044 ;
2°) à titre subsidiaire, de rejeter la requête d'appel de la société Norevie et de confirmer le jugement du 30 mai 2024.
Ils font valoir que :
- ils ont intérêt à agir à l'encontre de l'arrêté de permis de construire litigieux ;
- le tribunal a prononcé à tort une annulation partielle de ce permis alors que le vice qu'il avait retenu, consistant en la méconnaissance des dispositions de l'article 1AU 6 du règlement du PLU, viciait l'autorisation dans son intégralité ;
- le tribunal a écarté à tort les moyens tirés du caractère incomplet du dossier de demande de permis de construire, de l'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et de la méconnaissance des dispositions du règlement du PLU. En ce qui concerne plus particulièrement la méconnaissance des dispositions du règlement du PLU, le tribunal a considéré à tort comme inopérants les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions relatives à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives, à l'aspect extérieur des constructions et aux clôtures.
- l'ensemble de ces moyens justifient l'annulation dans son intégralité du permis de construire délivré à la société Norevie ;
- à titre subsidiaire, compte tenu de la méconnaissance par le projet litigieux de l'article 1AU 6 du règlement du PLU, il y a lieu à tout le moins de confirmer l'annulation partielle prononcée par le tribunal et de rejeter la requête d'appel de la société Norevie.
Par une ordonnance du 7 janvier 2025, la clôture de l'instruction a été fixée au même jour, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1-1 du code de justice administrative.
Un mémoire a été présenté pour la société Norevie par Me Deregnaucourt le 18 février 2025, après la clôture de l'instruction, et n'a pas été communiqué.
M. et Mme H..., M. O... et Mme C..., à qui la présente procédure a été communiquée, n'ont pas produit de mémoire.
II. Par une requête, enregistrée le 2 août 2024 sous le n°24DA01592, la commune de Mons-en-Pévèle, représentée par la SELARL Ingelaere et Partners Avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 30 mai 2024 ;
2°) de rejeter la demande de M. N... et autres ;
3°) de mettre à la charge de M. N... et autres une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune soutient que :
- les requérants de première instance sont dépourvus d'intérêt à agir à l'encontre du permis de construire en date du 13 mars 2023 et leur demande est par suite irrecevable ;
- aucune méconnaissance des dispositions de l'article 1AU 6 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) n'est établie en l'espèce, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges.
Par une requête en appel incident, enregistrée le 10 octobre 2024, M. J... N... et Mme I... K... et M. F... L... et Madame D... E..., représentés par Me Wilinski, demandent à la cour :
1°) à titre principal :
- d'annuler le jugement du 30 mai 2024 en tant qu'il limite l'annulation de l'arrêté du 13 mars 2023 à ce qu'il autorise l'implantation des bâtiments A, B et C à une distance supérieure à 6 mètres par rapport à la voie d'accès à la parcelle à bâtir ;
- d'annuler l'arrêté du 30 mai 2024 par lequel le maire de la commune de Mons-en-Pévèle a délivré à la société Norevie un permis de construire un béguinage sur les parcelles cadastrées 411 A 1991 et 411 A 2044 ;
2°) à titre subsidiaire, de rejeter la requête d'appel de la commune de Mons-en-Pévèle et de confirmer le jugement du 30 mai 2024.
Ils font valoir que :
- ils ont intérêt à agir à l'encontre de l'arrêté de permis de construire litigieux,
- le tribunal a prononcé à tort une annulation partielle de ce permis dès lors que le vice qu'il avait retenu, consistant en la méconnaissance des dispositions de l'article 1AU 6 du règlement du PLU, viciait l'autorisation dans son intégralité ;
- le tribunal a écarté à tort les moyens tirés du caractère incomplet du dossier de demande de permis de construire, de l'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et de la méconnaissance des dispositions du règlement du PLU. En ce qui concerne plus particulièrement la méconnaissance des dispositions du règlement du PLU, le tribunal a considéré à tort comme inopérants les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions relatives à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives, à l'aspect extérieur des constructions et aux clôtures ;
- l'ensemble de ces moyens justifient l'annulation dans son intégralité du permis de construire délivré à la société Norevie ;
- à titre subsidiaire, compte tenu de la méconnaissance par le projet litigieux de l'article 1AU 6 du règlement du PLU, il y a lieu à tout le moins de confirmer l'annulation partielle prononcée par le tribunal et de rejeter la requête d'appel de la commune de Mons-en-Pévèle.
Par une ordonnance du 7 janvier 2025, la clôture de l'instruction a été fixée au même jour, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1-1 du code de justice administrative.
M. et Mme H..., M. O... et Mme C..., à qui la présente procédure a été communiquée, n'ont pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'urbanisme,
- le plan local d'urbanisme de Mons-en-Pévèle,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thulard, premier conseiller,
- les conclusions, de M. Eustache, rapporteur public,
- et les observations de Me Deregnaucourt pour la société Norevie, de Me Ingelaere pour la commune de Mons-en-Pévèle et de Me Wilinski pour M. N..., Mme K... et M. L... et Mme E....
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 13 mars 2023, le maire de la commune de Mons-en-Pévèle (59246) a délivré à la société Norevie un permis de construire un béguinage sur les parcelles cadastrées 411 A 1991 et 411 A 2044. M. N..., Mme K..., M. et Mme H..., M. O..., Mme C..., M. L... et Mme E... ont demandé l'annulation de cet arrêté au tribunal administratif de Lille. Par un jugement du 30 mai 2024, le tribunal a, sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, annulé l'arrêté du 13 mars 2023 en tant qu'il autorise l'implantation des bâtiments A, B et C à une distance supérieure à 6 mètres par rapport à la voie d'accès à la parcelle à bâtir, en méconnaissance de l'article 1AU 6 du règlement du plan local d'urbanisme de Mons-en-Pévèle alors applicable, et a rejeté le surplus des conclusions des parties. Par deux requêtes, qui ont été enregistrées respectivement sous les n°24DA01526 et 24DA01592 et qu'il y a lieu de joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt, la société Norevie et la commune de Mons-en-Pévèle interjette appel de ce jugement. Dans chacune de ces deux affaires, M. N..., Mme K... et M. L... et Mme E... présentent des conclusions d'appel incident.
Sur le cadre juridique applicable à l'appel dirigé contre un jugement ayant prononcé l'annulation partielle d'un permis de construire :
2. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle est motivé. ". Son article L. 600-5-1 dispose : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".
3. Lorsqu'un tribunal administratif, après avoir écarté comme non fondés les autres moyens de la requête, a retenu l'existence d'un ou plusieurs vices entachant la légalité du permis de construire, de démolir ou d'aménager dont l'annulation lui était demandée et, après avoir estimé que ce ou ces vices étaient régularisables par un permis modificatif, a décidé de faire usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme en prononçant une annulation partielle du permis attaqué et en fixant, le cas échéant, le délai dans lequel le titulaire du permis en cause pourra en demander la régularisation, l'auteur du recours formé contre le permis est recevable à faire appel du jugement en tant qu'en écartant certains de ses moyens et en faisant usage de l'article L. 600-5, il a rejeté sa demande d'annulation totale du permis, le titulaire du permis et l'autorité publique qui l'a délivré étant pour leur part recevables à contester le jugement en tant qu'en retenant l'existence d'un ou plusieurs vices entachant la légalité du permis attaqué, il n'a pas complètement rejeté la demande du requérant. Lorsque le juge d'appel est saisi dans ces conditions d'un appel contre le jugement du tribunal administratif et qu'un permis modificatif a été délivré aux fins de régulariser les vices du permis relevés par ce jugement, il résulte des dispositions de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme précité que le bénéficiaire ou l'auteur de cette mesure de régularisation la lui communique sans délai, les parties de première instance comme les tiers, en application des dispositions de l'article R. 345-1 du code de justice administrative, ne pouvant contester cette mesure que devant lui tant que l'instance d'appel est en cours. Par suite, si un recours pour excès de pouvoir a été formé contre cette mesure de régularisation devant le tribunal administratif, ce dernier la transmet, en application des articles R. 351-3 et, le cas échéant, R. 345-2 du code de justice administrative, à la cour administrative d'appel saisie de l'appel contre le permis initial.
4. Il appartient alors au juge d'appel de se prononcer, dans un premier temps, sur la légalité du permis initial tel qu'attaqué devant le tribunal administratif. S'il estime qu'aucun des moyens dirigés contre ce permis, soulevés en première instance ou directement devant lui, n'est fondé, le juge d'appel doit annuler le jugement, rejeter la demande d'annulation dirigée contre le permis et, s'il est saisi de conclusions en ce sens, statuer également sur la légalité de la mesure de régularisation. Si au contraire, il estime fondés un ou plusieurs des moyens dirigés contre le permis initial mais que les vices affectant ce permis ne sont pas régularisables, le juge d'appel doit annuler le jugement en tant qu'il ne prononce qu'une annulation partielle du permis et annuler ce permis dans son ensemble, alors même qu'une mesure de régularisation est intervenue postérieurement au jugement de première instance, cette dernière ne pouvant alors, eu égard aux vices affectant le permis initial, avoir pour effet de le régulariser. Il doit par suite également annuler cette mesure de régularisation par voie de conséquence.
5. Dans les autres cas, c'est à dire lorsque le juge d'appel estime que le permis initialement attaqué est affecté d'un ou plusieurs vices régularisables, il statue ensuite sur la légalité de ce permis en prenant en compte les mesures prises le cas échéant en vue de régulariser ces vices, en se prononçant sur leur légalité si elle est contestée. Au terme de cet examen, s'il estime que le permis ainsi modifié est régularisé, le juge rejette les conclusions dirigées contre la mesure de régularisation. S'il constate que le permis ainsi modifié est toujours affecté d'un vice, il peut faire application des dispositions de l'article L. 600-5 ou de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour permettre sa régularisation.
6. En l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas allégué qu'une mesure de régularisation du vice relevé par le jugement du 30 mai 2024 et tenant à la méconnaissance par les bâtiments A, B et C des dispositions de l'article 1AU 6 du règlement du PLU de Mons-en-Pévèle alors applicable, serait depuis lors intervenue.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la recevabilité de la requête de première instance :
7. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne (...) n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation (...) ".
8. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
9. Ainsi que l'a jugé à raison le tribunal, il ressort des pièces du dossier que toutes les propriétés des requérants de première instance sont contigües au terrain d'assiette du projet de la société Norevie et que ceux-ci avaient ainsi bien la qualité de voisins immédiats. Les intéressés ont par ailleurs mentionné des éléments relatifs à la nature, à l'importance et à la localisation du projet de construction de la société Norevie, en indiquant qu'il s'agissait d'un projet important, comprenant la construction de 15 logements collectifs, de 11 logements individuels et d'un local commun résidentiel, en mentionnant la proximité de ce projet avec leur habitation et l'impossibilité dans un premier temps tout du moins de prévenir toute vue directe sur leurs parcelles par la plantation d'arbres et l'implantation de clôtures et en faisant état d'un trafic supplémentaire sur la voie publique que certains d'entre eux empruntent également. Les requérants de première instance ont également mentionné les nuisances nécessairement générées par ce projet lors des travaux de construction. Dans ces conditions, compte tenu des nuisances alléguées, lesquelles apparaissent suffisamment établies contrairement à ce qui est soutenu par les appelantes, les intimés justifient bien d'un intérêt à agir contre le permis de construire délivré à la société Norevie. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la commune et la société pétitionnaire et tirée du défaut d'un tel intérêt doit être écartée.
En ce qui concerne le bien-fondé du moyen retenu par le tribunal et tenant à la méconnaissance de l'article 1AU 6 du règlement du plan local d'urbanisme de Mons-en-Pévèle applicable à la date du 13 mars 2023 :
10. Le permis de construire litigieux a été délivré à la société Norevie le 13 mars 2023, si bien qu'il y a lieu de faire application des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Mons-en-Pévèle dans leur version antérieure à celle adopté le 23 mars 2023 par le conseil municipal. Le règlement graphique alors applicable classait le terrain d'assiette du projet en zone 1 AU. Il en en résulte que l'implantation des constructions projetées par rapport aux voies et emprises publiques était régie par l'article 1AU 6, qui disposait que " Tout ou partie de la façade des constructions principales doit être implantée : / - soit à la limite d'emprise de la voie d'accès à la parcelle à bâtir, qu'elle soit publique ou privée, existante ou à créer. / - soit avec un recul maximal de 6 m par rapport à la limite d'emprise de la voie d'accès à la parcelle à bâtir, qu'elle soit publique ou privée, existante ou à créer ". Par ailleurs, son article 1AU 3 alors applicable précisait que n'était pas considérée comme une voie au sens de cet article un cheminement qui était partie intégrante de l'unité foncière et qui permettait la desserte automobile d'une ou deux constructions principales situées en arrière-plan.
11. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier, notamment d'un plan de masse de la voirie joint au dossier de demande, que le terrain d'assiette du projet sera desservi par une voie qui sera créée à partir de la rue Emile Thibaut et qui se terminera au droit de la limite de la parcelle 411 A 1991, en un point indiqué sur ce plan comme " Borne ". Contrairement à ce que soutiennent la commune de Mons-en-Pévèle et la société pétitionnaire, le cheminement interne à la parcelle 411 A, qui sera séparé de la voie de desserte du projet par une barrière et qui sera réservé aux seuls résidents des immeubles A, B, C et D, ne constitue pas une voie d'accès au sens des dispositions du règlement du PLU précitées. Il ressort ainsi des pièces du dossier et notamment du plan de masse du projet que les bâtiments A, B et C sont implantés à une distance supérieure à six mètres par rapport à la limite d'emprise de la voie d'accès à créer.
12. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les premiers juges ont estimé à tort que l'implantation des bâtiments A, B et C méconnaissait les dispositions de l'article 1AU 6 du règlement du PLU alors applicables.
En ce qui concerne la critique, au titre de l'appel principal, de l'application faite par le tribunal des dispositions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme :
13. Il résulte de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme que lorsque le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme dont l'annulation est demandée, sont susceptibles d'être régularisés, le juge doit surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation.
14. Le juge n'est toutefois pas tenu de surseoir à statuer si les conditions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme sont réunies et qu'il fait le choix d'y recourir.
15. Par suite, la société Norevie, qui ne conteste pas dans ses écritures que les conditions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme étaient réunies, n'est pas fondée à faire valoir que le tribunal administratif de Lille aurait été dans l'obligation de surseoir à statuer sur les conclusions de la requête de M. N... et autres, conformément aux dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.
16. Il résulte ainsi des points 7 à 15 du présent arrêt que les requêtes d'appel principal présentées par la société Norevie et la commune de Mons-en-Pévèle doivent être rejetées.
En ce qui concerne les conclusions d'appel incident présentées par les intimés :
S'agissant des moyens d'annulation écartés par les premiers juges :
17. En premier lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 5 à 15 de leur jugement, les moyens pouvant être regardés comme repris en appel par les intimés, sans aucune autre précision, tirés du caractère incomplet du dossier de demande de permis de construire.
18. En deuxième lieu, il y a également lieu d'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 16 à 19 de leur jugement, le moyen pouvant être regardé comme repris en appel par les intimés, sans aucune autre précision, tiré de la méconnaissance manifeste des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme par le permis de construire.
19. En troisième lieu, il résulte des écritures des intimés que ces derniers ont fait valoir dans leur requête introductive de première instance, comme l'a d'ailleurs estimé le tribunal, que le permis de construire litigieux serait illégal en ce qu'il méconnaîtrait les dispositions du règlement du plan local d'urbanisme adopté le 23 mars 2023 par le conseil municipal de Mons-en-Pévèle relatives à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives, aux places de stationnement, à l'aspect extérieur des constructions et aux clôtures. En première instance, les intimés ont par ailleurs fait valoir dans un mémoire complémentaire enregistré le 25 octobre 2023 au greffe du tribunal administratif de Lille que ce permis méconnaîtrait le règlement du PLU communal applicable à la zone 1AU, dans ses dispositions antérieures au 23 mars 2023 relatives à la hauteur maximale des constructions et à aux places de stationnement, outre celles issues de l'article 1AU 6 qui ont déjà été analysées ci-dessus.
20. Ainsi que l'a estimé à raison le tribunal dans son jugement contesté, les dispositions du règlement du plan local d'urbanisme adopté le 23 mars 2023 par le conseil municipal de Mons-en-Pévèle n'étaient pas applicables au permis de construire en litige, qui a été délivré le 13 mars 2023 à la société Norevie, si bien que les moyens tirés de la méconnaissance desdites dispositions relatives à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives, aux places de stationnement, à l'aspect extérieur des constructions et aux clôtures doivent être rejetés comme inopérants.
21. En outre, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 25 à 29 de leur jugement, les moyens repris en appel par les intimés, sans autre précision, tirés de la méconnaissance du règlement du PLU communal, dans ses dispositions antérieures au 23 mars 2023, applicable à la zone 1AU relativement aux places de stationnement (article 1AU 12) et à la hauteur maximale des constructions (article 1AU 10)
S'agissant des moyens d'annulation nouveaux en appel :
22. Les intimés doivent être regardés comme faisant valoir pour la première fois en appel que le permis de construire litigieux méconnaîtrait le règlement du PLU communal, dans ses dispositions antérieures au 23 mars 2023, applicable à la zone 1AU, relativement à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives, à l'aspect extérieur des constructions et aux clôtures. Toutefois, alors qu'ils ne citent pas même les articles de ce règlement applicables et qu'ils se contentent de faire valoir l'opérance de ces moyens sans apporter le moindre élément de nature à en justifier le bien-fondé dans leur mémoire enregistré au greffe de la cour le 10 octobre 2024, ils ne les assortissent pas des précisions suffisantes et il y a dès lors lieu de les écarter.
23. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le tribunal était fondé à retenir comme seul vice affectant le permis de construire délivré à la société Norevie la méconnaissance par les bâtiments A, B et C des dispositions de l'article 1AU 6 du règlement du PLU communal applicable à sa date de délivrance.
S'agissant de la critique, au titre de l'appel incident, de l'application faite par le tribunal des dispositions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme ;
24. Lorsque les éléments d'un projet de construction ou d'aménagement auraient pu faire l'objet d'autorisations distinctes, le juge de l'excès de pouvoir peut prononcer l'annulation partielle de l'autorisation d'urbanisme en raison de la divisibilité des éléments composant le projet litigieux. En dehors de cette hypothèse, les dispositions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme permettent au juge de l'excès de pouvoir de procéder à l'annulation partielle d'une autorisation d'urbanisme dans le cas où l'illégalité affecte une partie identifiable du projet et peut être régularisée par un permis modificatif. L'application de ces dispositions n'est pas subordonnée à la condition que la partie du projet affectée par le vice soit matériellement détachable du reste du projet.
25. La régularisation ne peut légalement faire l'objet d'un permis modificatif que si, d'une part, les travaux autorisés par le permis initial ne sont pas achevés et si, d'autre part, les modifications apportées au projet initial pour remédier au vice d'illégalité ne peuvent être regardées comme en changeant la nature.
26. La seule circonstance que les modifications apportées au projet initial pour remédier au vice d'illégalité portent sur des éléments tels que son implantation, ses dimensions ou son apparence ne fait ainsi pas, par elle-même, obstacle à ce qu'elles fassent l'objet d'un permis modificatif.
27. En l'espèce, au titre de l'appel incident, M. N... et autres font valoir que le vice relevé à raison par le tribunal et tenant à la méconnaissance par les bâtiments A, B et C des dispositions de l'article 1AU 6 ne lui permettait pas de prononcer une annulation partielle sur le fondement de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme dès lors qu'aucune régularisation ne serait possible au regard du nouveau plan local d'urbanisme applicable.
28. Ils ne contestent pas ce faisant que les travaux autorisés par le permis initial ne seraient pas achevés. Cette circonstance ne ressort d'aucune pièce du dossier.
29. Par ailleurs, eu égard au caractère laconique des écritures des intimés sur ce point et alors que le terrain d'assiette du projet est désormais classé en zone UB par le règlement graphique du plan local d'urbanisme, que sont autorisées dans cette zone les constructions à usage d'habitation et les établissements recevant du public et, enfin, que son article 2.1.3 permet une implantation des constructions avec un recul de tout ou partie de leur façade allant jusqu'à 25 mètres par rapport à la limite d'emprise de la voie d'accès à la parcelle, il ne ressort en rien des pièces du dossier qu'une régularisation de l'implantation des bâtiments A, B et C par rapport à cette emprise serait en l'espèce impossible.
30. Les intimés ne sont par conséquent pas fondés à soutenir que le tribunal aurait prononcé à tort une annulation seulement partielle du permis de construire litigieux compte tenu de la nature du vice l'affectant.
31. Il résulte des points 17 à 30 qui précèdent que doivent être rejetées les conclusions d'appel incident présentées par les intimés à l'encontre du jugement du 30 mai 2024 en tant qu'en écartant certains de ses moyens et en faisant usage de l'article L. 600-5, il a rejeté leur demande d'annulation totale du permis litigieux.
Sur les frais des instances :
32. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les sommes demandées à ce titre par la société Norevie et la commune de Mons-en-Pévèle, parties perdantes, soient mises à la charge de M. N... et autres.
33. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par M. N... et autres sur le même fondement au titre des frais non compris dans les dépens de l'instance d'appel.
DECIDE :
Article 1er : Les requêtes de la société Norevie et de la commune de Mons-en-Pévèle sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions de M. N... et autres présentées par la voie de l'appel incident et leurs conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Norevie, à la commune de Mons-en-Pévèle et à M. J... N..., représentant unique de Mme I... K..., M. F... L... et Mme D... E... en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à M. G... et Mme B... H..., à M. M... O... et à Mme A... C....
Délibéré après l'audience du 30 avril 2025 à laquelle siégeaient :
- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,
- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,
- M. Vincent Thulard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mai 2025.
Le rapporteur,
Signé : V. Thulard
La présidente de la 1ère chambre
Signé : G. Borot
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Nathalie Roméro
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N°24DA01526, 24DA01592