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24/04/2025 | FRANCE | N°24DA00423

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 4ème chambre, 24 avril 2025, 24DA00423


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) mis à sa charge au titre de la période allant du 1er février 2012 au 31 mars 2013, d'autre part, de lui accorder " le remboursement des frais de procédure ".



Par un jugement n° 2008930 du 28 décembre 2023, le tribunal administratif de Lille, d'une part, a prononcé une réduction des ba

ses de TVA assignées à M. A... au titre de la période allant du 1er février 2012 au 31 mars 2013, a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) mis à sa charge au titre de la période allant du 1er février 2012 au 31 mars 2013, d'autre part, de lui accorder " le remboursement des frais de procédure ".

Par un jugement n° 2008930 du 28 décembre 2023, le tribunal administratif de Lille, d'une part, a prononcé une réduction des bases de TVA assignées à M. A... au titre de la période allant du 1er février 2012 au 31 mars 2013, après avoir estimé que l'administration avait fait à tort application du taux normal de 19,6 % pour certains biens éligibles au taux réduit de 5,5 %, d'autre part, a diminué, en conséquence de cette réduction de bases, les rappels de TVA en litige de même que les pénalités correspondantes, enfin, a rejeté le surplus des conclusions de cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistré le 28 février 2024, M. A..., représenté par Me Dormieu, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il ne lui donne pas entière satisfaction ;

2°) de prononcer, en droits et pénalités, la décharge des rappels de TVA restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en ne donnant aucune suite à ses demandes tendant à pouvoir avoir accès à son dossier fiscal, l'administration a méconnu son droit à organiser sa défense, tel qu'il est protégé par les stipulations du 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, éclairées par la jurisprudence de la cour européenne des droits de l'homme, ainsi que par plusieurs autres conventions et normes internationales, et violé le principe du contradictoire ;

- il n'a jamais eu pour intention de s'opposer à la vérification de comptabilité de son activité, même s'il peut être regardé comme ayant fait preuve de négligence ;

- il a vu sa confiance abusée par son ancien associé, qui s'occupait des déclarations de TVA et à qui sont imputables les omissions et insuffisances déclaratives qui lui sont reprochées ;

- une part importante des achats dont l'administration a tenu compte pour reconstituer les recettes de son activité n'ont pas été réalisés par lui ;

- il n'est pas l'auteur des factures établies à l'en-tête de sociétés belges et adressées à des clients français ; l'administration n'a pu, sans renverser la charge de la preuve, lui attribuer ces ventes sans prendre en compte l'achat des véhicules correspondants, dont la réalité est établie ;

- l'administration a appliqué à tort, pour établir les rappels de TVA en litige, le taux de taxe de 19,6 % à des recettes issues de ventes de produits alimentaires, alors que le taux de 5,5 % leur était applicable ;

- les rappels de TVA en litige sont atteints par la prescription prévue à l'article L. 274 du livre des procédures fiscales ;

- pour reconstituer les recettes taxables générées par son activité individuelle, l'administration a utilisé, en ce qui concerne les ventes de marchandises autres que des véhicules, un taux de marge qui n'est pas de nature à traduire les conditions réelles de son exploitation ; la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-CR-IOR-10-20 conforte son analyse sur ce point ;

- l'administration a fait abstraction de la possibilité, pour une entreprise, d'avoir recours à la délégation de paiement prévue à l'article 1290 du code civil ;

- l'administration n'a pas suffisamment admis en déduction la TVA ayant grevé plusieurs charges d'exploitation, dont il établit la réalité et le montant ; il s'agit de la taxe se rapportant au loyer du siège de son entreprise individuelle et s'élevant, selon décompte, à un montant de 301,12 euros, ainsi que de la taxe se rapportant à des frais bancaires ; il y aura lieu, en ce qui concerne ces opérations, d'appliquer les mêmes coefficients que ceux appliqués aux prétendues ventes ;

- l'ensemble des achats de matériaux de construction réalisés par lui durant la période vérifiée ayant été effectués pour les besoins de chantiers réalisés en Belgique, par une entreprise de construction qu'il exploitait dans ce pays et en collaboration avec une autre entreprise belge, ces opérations devaient être exclues de la reconstitution des recettes de l'entreprise vérifiée ;

- de même, les marchandises achetées auprès des sociétés ID Group, Argot Construction, Lhoir, Baise et Repamine ont été livrées en Belgique ; à tout le moins, le taux de marge retenu pour ces opérations est excessif ; il en est de même en ce qui concerne l'ensemble des achats de matériaux de construction, le montant total à déduire à ce titre s'élevant à 34 018,04 euros ;

- les achats effectués auprès des sociétés Van Laere International, Ital Bel Service, Galex Belge, NV Agora Outlet Center, Kamel Market et NV Carodel ont été directement revendus à une société belge et n'avaient donc pas à être pris en compte pour la reconstitution des recettes de son activité individuelle ;

- les seules recettes qui auraient dû être prises en compte en ce qui concerne la vente de véhicules sont celles perçues par virement bancaires, les recettes perçues en espèces correspondant à des ventes réalisés à son insu par son ancien associé ; les prétendues ventes de six véhicules qu'il aurait réalisées en France ont, en réalité, été facturées, également à son insu, à des sociétés belges, dont l'une d'ailleurs a reconnu n'avoir entretenu aucune relation commerciale avec lui personnellement ; l'administration ne prouve pas la livraison de ces véhicules dans les locaux de son entreprise, alors, en particulier, que la signature figurant sur les bons de livraison produits n'est pas la sienne ; en tout état de cause, ces transactions, dont les clients finaux n'ont pu être identifiés, auraient dû être taxées en Belgique ; à cette époque, il ne disposait pas, eu égard à sa situation financière difficile, de liquidités suffisantes pour effectuer les achats en espèces de véhicules en Allemagne qui lui sont imputés ;

- l'administration n'a pu faire application, aux droits de TVA rappelés, de la majoration de 100 % prévue, en cas d'opposition à contrôle fiscal, à l'article 1732 du code général des impôts sans méconnaître les stipulations de l'article 4 du septième protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors qu'il a fait l'objet d'une condamnation pénale à raison des mêmes faits que ceux qui lui sont imputés pour justifier cette application ;

- l'état de santé précaire qui était le sien au cours de la période vérifiée fait obstacle à ce qu'une intention délibérée d'éluder l'impôt lui soit imputée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 août 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- comme l'ont retenu à bon droit les premiers juges, M. A... n'est pas fondé à soulever une méconnaissance du principe d'égalité des armes, tel que notamment protégé par les stipulations du 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, au motif que l'administration n'a pas fait doit à des demandes, formulées par lui à des dates postérieures à la mise en recouvrement des rappels de TVA en litige, de communication d'une copie de son " dossier fiscal " ;

- l'administration a justifié de diligences suffisantes du service vérificateur pour prendre l'attache de M. A... et faire en sorte que le contrôle sur place de son activité individuelle puisse avoir lieu ; les éléments produits par l'administration devant les premiers juges démontrent également que ce contrôle n'a pu être opéré pour des raisons exclusivement imputables à M. A... et que le service était fondé à regarder comme constitutives d'une opposition à contrôle fiscal, au sens des dispositions de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, de sorte que les recettes générées par cette activité ont été à bon droit évaluées d'office en application de ces dispositions ;

- M. A..., qui a bénéficié, à sa demande, du sursis de paiement prévu à l'article L. 277 du livre des procédures fiscales, de sorte que le délai de prescription de l'action en recouvrement, prévu à l'article L. 274 de ce livre, a été interrompu à compter de la date de réception de sa réclamation pour recommencer à courir à compter de la date de notification du jugement, ne peut sérieusement soutenir que ce délai serait expiré ;

- les rappels de TVA en litige ayant été établis d'office, M. A... supporte la charge de la preuve en application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales ;

- n'ayant eu accès à aucune comptabilité eu égard à la situation d'opposition à contrôle fiscal, le service vérificateur a reconstitué les recettes taxables générées par l'activité individuelle de M. A..., en ayant recours à une consultation des bases informatiques de recoupement à la disposition de l'administration, afin d'identifier les fournisseurs et le montant des achats effectués, et par la mise en œuvre d'une demande d'assistance internationale, qui a permis d'obtenir des renseignements auprès des sociétés belges et luxembourgeoises ayant vendu des biens à M. A... durant la période vérifiée ; le service a distingué les recettes issues des ventes de véhicules de celles résultant de la vente d'autres biens et a appliqué, pour déterminer les premières, un coefficient de marge moyen à partir des factures de ventes obtenues par lui et, pour rétablir les secondes, le coefficient de marge brute moyen pour les commerces de gros publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), laquelle méthode s'est, en définitive, avérée plus favorable au contribuable que l'application de coefficients différenciés par famille de produits ;

- la circonstance, à la supposée même avérée, que M. A... aurait été abusé par un ancien associé est dépourvue d'incidence sur le bien-fondé des rappels de TVA en litige ;

- contrairement à ce que soutient M. A..., les factures obtenues par le service vérificateur à la suite de sa demande d'assistance internationale ont été émises par des sociétés belges à son nom et à l'adresse de son entreprise, avec mention de son numéro de TVA intracommunautaire ;

- il est suffisamment établi par les pièces obtenues par le service dans ce cadre et de l'examen des opérations figurant sur les relevés de comptes bancaires de M. A... que ce dernier n'établissait pas lui-même les factures de vente des véhicules aux clients finaux, mais qu'il encaissait le paiement de ces factures, établies à l'en-tête d'entreprises belges étrangères à ces transactions ;

- si le service a, effectivement, appliqué à tort le taux normal de taxe sur la valeur ajoutée de 19,6 % à des recettes issues de la vente de produits alimentaires passibles du taux réduit de 5,5 %, le tribunal administratif a, par une disposition non contestée du jugement attaqué, rectifié cette erreur, de sorte que le moyen tiré du défaut d'application du taux réduit de taxe est inopérant ;

- le coefficient moyen de marge brute de 3,1 retenu par le service pour reconstituer les rappels de TVA se rapportant aux ventes de biens autres que des véhicules s'avère favorable au contribuable, de sorte que la contestation, par M. A..., de la pertinence de ce taux n'est pas fondée ;

- M. A... n'apporte aucun élément probant au soutien de ses allégations selon lesquelles plusieurs de ces biens ont été revendus en Belgique ;

- l'appelant n'apporte pas davantage qu'en première instance de précisions suffisantes pour que la cour puisse apprécier le bien-fondé de son moyen relatif à la possibilité, pour les entreprises, de faire application de l'article 1290 du code civil ;

- si M. A... demande la déduction de la TVA afférente à des frais bancaires, il n'apporte aucun élément de nature à justifier du droit à déduction qu'il revendique ;

- si, concernant les loyers se rapportant au siège de son entreprise, M. A... a produit trois factures comportant la mention d'une taxe sur la valeur ajoutée, il ne justifie pas du paiement de ces factures qui ne comportent aucune mention afférente à l'option pour les débits ; dans ces conditions, la déduction de cette taxe, d'ailleurs à raison d'un montant inférieur à celui invoqué par l'appelant, ne peut être admise ; au surplus, il ne peut être tenu pour établi que ces dépenses, qui se rapportent à un local dans lequel sont installés les sièges de plusieurs entreprises, concernent l'activité individuelle de M. A... ;

- dès lors que la situation d'opposition de contrôle fiscal dans laquelle s'est placé M. A... est suffisamment établie, l'administration était fondée à appliquer aux droits rappelés la majoration de 100 % prévue, dans une telle situation, par le a de l'article 1732 du code général des impôts, qui est d'une nature différente de celle de la sanction pénale prononcée à son encontre et qui sanctionne, en outre, des faits différents, la majoration en litige ayant été prononcée au regard, exclusivement, du comportement adopté par M. A... au cours du contrôle.

Par une décision du 19 septembre 2024, M. A... a été admis à l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les protocoles qui y sont joints ;

- la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 ;

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

Sur l'objet du litige :

1. M. A... a exercé, à titre individuel, une activité de négoce de véhicules sous l'enseigne commerciale " Inter Europe ". L'administration a entendu soumettre cette activité à une vérification de comptabilité portant sur la période s'étendant du 1er février 2012 au 31 mars 2013. Mais ce contrôle n'a pu se tenir pour des raisons que l'administration a regardées comme imputables à M. A... et comme constitutives d'une opposition à contrôle fiscal.

2. N'ayant, dans ces conditions, pu avoir accès à aucune comptabilité se rapportant à la période vérifiée, le vérificateur a procédé à l'évaluation d'office des recettes taxables générées par l'activité individuelle de M. A... à partir de la consultation des applications informatiques à la disposition de l'administration, des relevés de compte bancaires, ainsi que des copies de chèques et d'ordres de virement obtenus par le service dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès des deux établissements détenteurs de ces comptes. Le service a, en outre, pu obtenir, par une demande d'assistance internationale, des éléments d'information auprès des sociétés belges et luxembourgeoises qui avaient vendu des biens, durant la période vérifiée, à M. A.... Il est apparu, au terme de l'analyse du vérificateur, que M. A... s'était livré, au cours de la période vérifiée, à des acquisitions intracommunautaires de véhicules et d'autres biens passibles de la TVA en France, la base taxable étant constituée de l'intégralité du prix de ces biens et non seulement de la marge réalisée.

3. L'administration a fait connaître cette analyse et le montant des rappels de TVA en résultant, s'agissant des ventes, d'une part, de véhicules et, d'autre part, d'autres biens, et moyennant la prise en compte, après application de coefficients de marge regardés comme cohérents avec les données de l'exploitation, de la TVA déductible sur les opérations en cause, à M. A... par une proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 20 mars 2014 et aux termes de laquelle elle précisait que les droits rappelés se verraient appliquer la majoration de 100 % prévue, en cas d'opposition à contrôle fiscal, par l'article 1732 du code général des impôts. Ces rappels ont été mis en recouvrement le 25 mai 2015, à hauteur d'un montant, en droits et pénalités, de 220 154 euros.

4. Sa réclamation ayant été rejetée, M. A... a porté le litige devant le tribunal administratif de Lille, en lui demandant, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de TVA mis à sa charge au titre de la période allant du 1er février 2012 au 31 mars 2013, d'autre part, de lui accorder " le remboursement des frais de procédure ". Par un jugement du 28 décembre 2023, le tribunal administratif de Lille, d'une part, a prononcé une réduction des bases de TVA assignées à M. A... au titre de la période allant du 1er février 2012 au 31 mars 2013, après avoir estimé que, l'administration avait fait à tort application du taux normal de 19,6 % pour certains biens éligibles au taux réduit de 5,5 %, d'autre part, a diminué, en conséquence de cette réduction de bases, les rappels de TVA en litige, de même que les pénalités correspondantes, enfin, a rejeté le surplus des conclusions de cette demande. M. A... relève appel de ce jugement en tant qu'il ne lui donne pas entière satisfaction.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne l'égalité des armes et le principe du contradictoire :

5. Si M. A... reproche à l'administration de n'avoir donné aucune suite à ses demandes tendant à obtenir la communication d'une copie de son " dossier fiscal ", il résulte des éléments avancés en défense par le ministre et non contestés que ces demandes ont été présentées les 25 avril 2016, 6 août 2016 et 5 décembre 2017, c'est-à-dire après la mise en recouvrement, le 25 mai 2015, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige.

6. Par suite et à supposer même que ces demandes n'aient effectivement reçu aucune suite, cette situation demeurerait sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition à l'issue desquels les rappels de TVA en litige ont été établis, dans un contexte dans lequel M. A..., qui ne soutient pas que la proposition de rectification qui lui a été adressée le 20 mars 2014 ne comportait pas suffisamment d'éléments d'information pour le mettre à même de faire utilement valoir son point de vue tant dans sa réclamation que devant le juge de l'impôt, a présenté une contestation argumentée devant le tribunal administratif comme devant la cour.

7. Dès lors, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la procédure d'imposition mise en œuvre à son égard n'aurait pas garanti l'égalité des armes, de même que son droit à organiser sa défense et le principe du contradictoire, ni, en tout état de cause, que cette procédure aurait été diligentée en méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de celles des articles 14 et 26 du pacte international relatif aux droits civils et politiques ou encore des préconisations émises par le comité des droits de l'homme de l'organisation des nations unies.

En ce qui concerne l'opposition à contrôle fiscal :

8. Aux termes de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers. / (...) ".

9. Il ressort des mentions de la proposition de rectification envoyée le 20 mars 2014 à l'adresse du siège de l'entreprise individuelle de M. A... que, par un avis de vérification expédié à la même adresse, qui était la dernière adresse connue de l'administration pour cette entreprise, le service a entendu porter à la connaissance de M. A... la tenue prochaine d'une vérification de comptabilité de celle-ci pour la période s'étendant du 1er février 2012 au 31 mars 2013 et lui proposer la date du 23 mai 2013 pour une première intervention du vérificateur sur place. Cependant, le pli recommandé avec avis de réception contenant cet avis de même qu'un exemplaire de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, a été retourné au service expéditeur avec une mention selon lequel son destinataire, quoique avisé le 14 mai 2013, ne l'avait pas retiré avant l'expiration du délai de mise à disposition.

10. Dans ce contexte, le vérificateur indique avoir alors expédié, le 3 juin 2013, à M. A..., à la même adresse, par courrier recommandé avec avis de réception et par courrier simple, une première mise en garde afin de lui faire connaître que cette situation, si elle perdurait, serait susceptible d'être regardée comme constitutive d'une opposition à contrôle fiscal et de l'informer des conséquences qui pourraient résulter de cette analyse. La proposition de rectification a précisé que ce courrier, accompagné d'une copie de l'avis de vérification et d'un nouvel exemplaire de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, recommandait à M. A... de prendre toutes dispositions pour se rendre présent, muni de tous les documents utiles, au siège de son entreprise le 19 juin 2013, pour la première intervention sur place du vérificateur ou, en cas d'impossibilité, de s'y faire représenter par une personne dûment mandatée. Mais, comme le rapporte le vérificateur, le pli recommandé a été retourné au service avec une mention selon laquelle bien qu'ayant été avisé, le 4 juin 2013, de la mise à disposition du pli au bureau de distribution désigné, son destinataire ne l'avait pas retiré avant l'expiration du délai de conservation. Le vérificateur a ajouté que le même courrier avait parallèlement été expédié, en recommandé et en envoi simple, à l'adresse personnelle de M. A... en Belgique, que le pli recommandé n'avait pas été distribué et avait été retourné au service avec la mention d'une date de présentation le 4 juin 2013 et d'une absence de retrait avant l'expiration du délai de mise à disposition, mais que le pli simple n'avait pas été retourné au service expéditeur.

11. Le vérificateur a rapporté s'être rendu, à la date annoncée du 19 juin 2013 et à l'heure fixée, au siège de l'entreprise de M. A..., mais que ce dernier n'était ni présent ni représenté et que les personnes présentes à cette adresse, à laquelle sont établis les sièges de plusieurs entreprises, ne connaissaient pas l'intéressé. La proposition de rectification a précisé que le vérificateur avait alors expédié le 27 juin 2013, à cette adresse et à l'adresse personnelle de M. A... et selon les mêmes modalités que précédemment, une seconde mise en garde, comportant les mêmes informations et annexes que la précédente et proposant une nouvelle date d'intervention sur place le 17 juillet 2013 au siège de l'entreprise. Le vérificateur a rapporté que les plis recommandés adressés à l'adresse du siège de l'entreprise et à l'adresse personnelle de M. A... avaient tous deux été retournés au service avec une mention d'une date de présentation, les 30 juin et 4 juillet 2013, et d'une absence de retrait dans le délai de mise à disposition.

12. Si M. A... soutient avoir changé à la fois d'adresse personnelle et l'adresse du siège social de son entreprise à compter du 1er décembre 2012, le courrier électronique que lui a adressé le directeur général de la société de droit belge Repamine, auquel il se réfère, aux termes duquel cette société a vainement cherché à joindre M. A... au siège de son entreprise en France, alors que l'intéressé s'est révélé inconnu des responsables des autres entreprises disposant de locaux à cette adresse, ne peut suffire à l'établir, d'autant plus que ce courrier électronique est daté du 3 septembre 2012.

13. Il en est de même d'un rapport administratif établi le 5 janvier 2016 par un inspecteur du service de la police locale de Beloeil Leuze Ht (Belgique), qui expose que M. A... a été " radié " des registres à l'adresse de son domicile personnel, situé dans le secteur de compétence de ce service, à compter du 15 octobre 2012, avant d'y être réinscrit, à sa demande, à la même adresse, dès le 24 novembre 2012.

14. En outre, en soutenant dans sa requête, non sans contradiction, avoir avisé " tous les organismes officiels " de ces changements d'adresse, ce qui n'est établi par aucune des pièces versées à l'instruction, et avoir omis d'en aviser " le greffe de Valenciennes ", M. A... ne conteste pas sérieusement que les différents plis qui lui ont été successivement adressés par le service vérificateur afin de faire en sorte que le contrôle de son activité individuelle puisse se tenir ont été expédiés à la dernière adresse du siège de cette entreprise et de son domicile connues de l'administration.

15. Dans les conditions exposées précédemment, dont M. A... ne conteste pas utilement la matérialité en soutenant n'avoir pas eu l'intention de s'opposer au contrôle et avoir seulement fait preuve de négligence dans la gestion de son courrier, c'est sans commettre d'irrégularité de procédure que l'administration a estimé que la vérification de comptabilité entreprise à l'égard de l'activité individuelle de l'intéressé n'avait pu utilement se poursuivre du fait du contribuable, que cette situation caractérisait une opposition à contrôle fiscal et qu'il y avait en conséquence lieu d'évaluer d'office, en application des dispositions de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, les bases assujetties à la TVA qu'il convenait d'assigner à M. A..., à raison de cette activité, au titre de la période vérifiée.

Sur le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige :

En ce qui concerne la prescription :

16. Si M. A... soutient que le délai de prescription de l'action en recouvrement, tel que prévu à l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, lequel est de quatre ans à compter de la date de mise en recouvrement de l'impôt dont le paiement est réclamé par le comptable public, serait expiré, il ne peut utilement soulever ce moyen, qui se rattache au contentieux du recouvrement de l'impôt, dans le cadre du présent litige d'assiette.

17. En tout état de cause, il est constant que M. A... a demandé, dans sa réclamation, le bénéfice du sursis de paiement prévu à l'article L. 277 du même livre, qu'il a été fait droit à cette demande et que le délai de l'action en recouvrement a ainsi été suspendu jusqu'à ce que le tribunal administratif se prononce, par le jugement attaqué, sur sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige. Dès lors, le moyen ainsi invoqué doit être écarté.

En ce qui concerne la charge de la preuve :

18. En vertu de l'article L. 193 de ce livre, dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. Les dispositions de l'article R. 193-1 du même livre précisent que, dans le cas prévu à l'article L. 193 de ce livre, le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré.

19. Ainsi qu'il a été dit, les rappels de TVA en litige ont été établis, à bon droit, selon la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, dès lors que l'administration était fondée à regarder le contrôle de l'entreprise individuelle de M. A... comme n'ayant pu avoir lieu pour des raisons imputables à ce dernier. Il s'ensuit que l'intéressé supporte, en application de l'article L. 193 du même livre, la charge de la preuve et qu'il lui appartient, en vertu de l'article R. 193-1 de ce livre, d'établir que les rappels de TVA mis ainsi à sa charge présentent un caractère exagéré.

En ce qui concerne le montant des rappels de TVA :

S'agissant de la TVA collectée :

20. En vertu du I de l'article 256 du code général des impôts, les livraisons de biens effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel, sont soumises à la TVA, le III du même article précisant qu'est assimilé à une livraison de biens, le transfert, c'est-à-dire l'expédition ou le transport, par un assujetti ou pour son compte, d'un bien meuble corporel pour les besoins de son entreprise à destination d'un autre Etat membre de l'Union européenne.

21. En outre, en vertu du 1° du I de l'article 256 bis du code général des impôts, sont également soumises à la TVA les acquisitions intracommunautaires de biens meubles corporels effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel, le 2° bis du même I précisant cependant que les acquisitions intracommunautaires de biens d'occasion effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ne sont pas soumises à la TVA lorsque le vendeur est un assujetti revendeur qui a appliqué dans l'Etat membre de départ de l'expédition ou du transport du bien les dispositions de la législation de cet Etat prises pour la mise en œuvre des articles 312 à 325 ou 333 à 341 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006.

22. Enfin, en vertu du 1 de l'article 269 du code général des impôts, le fait générateur de la TVA se produit, selon le a) de ce 1, au moment où la livraison, l'acquisition intracommunautaire du bien est effectuée, et, en vertu du a) du 2 du même article, la taxe est exigible, en ce qui concerne les livraisons et les achats visés au a) du 1, lors de la réalisation du fait générateur.

23. Il résulte de l'instruction, notamment des mentions de la proposition de rectification adressée le 20 mars 2014 à M. A..., que dans un contexte dans lequel il n'a pu avoir accès, en raison de la situation d'opposition à contrôle fiscal, à aucune comptabilité se rapportant à l'activité vérifiée, le vérificateur a procédé, afin de pouvoir évaluer d'office les bases taxables qu'il conviendrait d'assigner, à raison de cette activité, à M. A... au titre de la période vérifiée, à une reconstitution des recettes générées par l'entreprise durant cette période.

24. Pour ce faire, le vérificateur a consulté les applications informatiques de recoupement dont dispose l'administration et qui permettent de recenser les transactions intracommunautaires réalisées sur une période donnée, d'identifier les fournisseurs des biens ou services concernés et de connaître le montant de ces transactions. Les clients et les fournisseurs établis en Belgique et au Luxembourg concernés par les transactions intracommunautaires réalisées par M. A... au cours de la période vérifiée et que le service a ainsi pu mettre en évidence ont ensuite été interrogés par le service vérificateur à la suite de demandes d'assistance internationale formées auprès des autorités belges et luxembourgeoises.

25. Les entreprises ayant vendu des biens à M. A... durant cette période ayant ainsi pu être identifiées, le vérificateur s'est efforcé de déterminer, en examinant les opérations figurant sur les relevés de compte bancaire et les ordres de virements obtenus dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, les recettes générées par l'entreprise individuelle de M. A... sur la revente des biens acquis auprès de ces fournisseurs, en distinguant celles issues de la vente de véhicules de celles résultant de la vente d'autres biens. Pour ce faire, le vérificateur a appliqué, aux prix d'achats des véhicules, un coefficient de marge moyen déterminé à partir des mentions des factures d'achat et de revente obtenues par lui, à la suite des demandes d'assistance internationale et de l'exercice de son droit de communication auprès de clients de M. A..., et, aux prix des autres biens, le coefficient de marge brute moyen pour les commerces de gros publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). La mise en œuvre de cette méthode a permis de constater que les chiffres d'affaires portés sur les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée souscrites au nom de M. A... au titre de cette activité avaient, sur la période vérifiée, été minorés.

26. Si M. A... conteste la pertinence du coefficient de marge brut moyen de 3,1 utilisé par l'administration pour établir ses bases taxables en ce qui concerne les ventes de biens autres que des véhicules, effectuées dans le cadre de l'exploitation de son entreprise au titre de la période d'imposition en litige, il n'apporte, alors que la charge de la preuve lui incombe ainsi qu'il a été dit, aucun élément probant au soutien de cette critique, alors que le ministre fait valoir, sans être contredit, que la méthode consistant à reconstituer les recettes issues de ces ventes au moyen d'un coefficient unique s'est, en définitive, avérée plus favorable au contribuable que l'application, aux prix des biens en cause, de coefficients de marge différenciés par famille de produits, comme le vérificateur l'avait initialement envisagé.

27. Compte tenu de l'absence de comptabilité tenue par le contribuable, le fait que le coefficient ainsi appliqué a consisté en une donnée moyenne publiée dans une étude statistique à portée nationale ne faisait pas obstacle à ce que le vérificateur y ait recours, après s'être assuré de sa pertinence pour les besoins de la vérification en cause, et ne peut suffire, par lui-même, à établir que ce coefficient ne serait pas de nature à traduire avec un niveau d'approximation suffisant la réalité des conditions d'exploitation de l'entreprise.

28. Ne sont également pas de nature à priver de pertinence le coefficient ainsi retenu les circonstances que celui-ci a été choisi au vu de factures établies par les fournisseurs de l'entreprise et que les biens concernés par ces factures étaient pour partie destinés à être vendus à des particuliers ou disponibles à la vente dans des magasins accessibles au grand public.

29. En outre, si M. A... soutient que certains des achats de marchandises en cause concernaient des matériaux de construction livrés, en définitive, à des entreprises belges pour les besoins de l'exécution de chantiers en Belgique et que d'autres marchandises ont été également revendues à des entreprises belges, ces circonstances, à en supposer même la réalité établie par des copies de factures émises durant la période vérifiée à l'en-tête de l'entreprise de M. A... et portant sur la vente de matériaux à des entreprises belges, ne seraient pas de nature, par elles-mêmes, à établir que les recettes correspondantes auraient été à tort incluses dans la reconstitution des recettes de l'activité individuelle de M. A....

30. Enfin, ce dernier n'est pas fondé à invoquer sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, en ce qui concerne le recours à un coefficient de marge pertinent par l'administration, la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des finances publiques sous la référence BOI-CR-IOR-10-20, qui n'ajoute pas à la loi fiscale et n'en constitue donc pas une interprétation formelle au sens de cette disposition.

31. M. A... soutient que, pour établir les rappels de TVA en litige, l'administration a fait application à tort, à des denrées alimentaires figurant parmi les biens autres que des véhicules achetés par lui auprès d'entreprises belges ou luxembourgeoises et revendues, du taux de taxe normal de 19,6 %, alors que ces denrées alimentaires avaient vocation à se voir appliquer le taux réduit de 5,5 %. Toutefois, il ressort des motifs énoncés au point 23 du jugement attaqué que, pour prononcer une réduction des bases taxables assignées à M. A... au titre de la période d'imposition en litige, le tribunal administratif a fait entièrement droit à ce moyen. Par suite, il ne subsiste plus de litige en cause d'appel sur ce point et, dans le cadre de la présente instance, ce moyen ainsi invoqué doit être écarté comme inopérant.

32. Si M. A... soutient qu'il a vu sa confiance abusée par un ancien associé, qui s'occupait des déclarations de TVA et à qui sont imputables les omissions et insuffisances déclaratives qui lui sont reprochées, ces circonstances, à les supposer avérées, dans une situation dans laquelle, d'ailleurs, il résulte de l'instruction et n'est aucunement contesté que l'entreprise vérifiée faisait l'objet d'une exploitation directe dans le cadre d'une activité individuelle et non d'une société par M. A..., sont dépourvues d'incidence sur le bien-fondé des rappels de TVA en litige.

33. Il en est de même de la circonstance, en en tenant également la réalité pour établie, qu'une part importante des achats dont l'administration a tenu compte pour reconstituer les recettes de cette activité individuelle, en particulier les achats de véhicules réglés en espèces, n'aurait pas été personnellement conclue par M. A..., dès lors que l'appelant ne conteste pas que ces transactions ont, en tout état de cause, été conclues en son nom et pour le compte de son entreprise, le ministre confirmant que les factures correspondantes, obtenues par le service, font mention du nom commercial, de l'adresse du siège et du numéro de TVA communautaire de l'entreprise individuelle de M. A....

34. Au cours de l'examen des documents communiqués au service vérificateur à la suite de ses demandes d'assistance internationale, il a pu être constaté qu'en ce qui concerne les transactions portant sur des véhicules, M. A... avait pour pratique, au cours de la période vérifiée, de remettre aux acquéreurs finaux de ces véhicules, qui ont été identifiés, c'est-à-dire le plus souvent à des particuliers résidant en France ou en Belgique, des factures établies à l'en-tête de sociétés belges n'ayant pas fourni les véhicules en cause et qui se sont avérées étrangères à ces opérations. Cependant, un examen des relevés des comptes bancaires utilisés par M. A... pour les besoins de son activité et obtenus par le service dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès des établissements détenteurs, a permis de constater que les paiements de ces factures étaient encaissés par M. A.... L'administration a tiré de ces constats la conclusion que ce dernier avait agi, dans le cadre de ces transactions, comme un intermédiaire opaque ayant effectivement acquis les véhicules en cause en dépit des apparences créées par lui.

35. En soutenant qu'il n'a pas lui-même établi les factures émises à l'en-tête de sociétés belges et adressées à des clients français, que la signature figurant sur les bons de livraison des véhicules n'est pas la sienne et que l'administration n'a pu lui attribuer ces ventes sans prendre en compte l'achat des véhicules correspondants, qui est établi, M. A... ne conteste pas sérieusement la réalité du fonctionnement qui lui est imputé par l'administration à partir d'indices concordants collectés par le service.

36. Dans ces conditions, l'administration était fondée à prendre en compte les recettes correspondant à ces reventes de véhicules dans le cadre de la reconstitution, à laquelle elle s'est livrée, des recettes taxables de l'entreprise, sans faire abstraction des achats de ces véhicules, et le moyen tiré, par M. A..., de ce que ces opérations auraient dû être taxées en Belgique doit donc être écarté.

S'agissant de la TVA déductible :

37. En vertu du 1 du I de l'article 271 du code général des impôts, la TVA qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la TVA applicable à cette opération. Le 2 du même I précise que le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. En vertu du 2 de l'article 269 du même code, la taxe est exigible, en ce qui concerne les prestations de services, envisagées au c) de ce 2, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits. Le 1 du II de l'article 271 du même code ajoute que, dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le a) de ce 1, celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ou, selon le d) de ce même 1, celle qui correspond aux factures d'acquisition intracommunautaire établies conformément à la réglementation communautaire dont le montant figure sur la déclaration de recettes conformément au b du 5 de l'article 287.

38. M. A... reproche à l'administration d'avoir insuffisamment tenu compte, dans le cadre de l'évaluation d'office de ses bases taxables, de la TVA ayant grevé les charges d'exploitation de son entreprise individuelle, et plus précisément d'avoir omis de tenir compte de la taxe se rapportant au loyer du siège de cette entreprise individuelle et de celle se rapportant à des frais bancaires.

39. Toutefois, si, pour justifier des charges de loyer dont il fait état, M. A... a versé à l'instruction deux factures de loyer se rapportant aux mois d'avril et d'octobre 2012, ainsi qu'une troisième facture destinée à lui transférer la charge définitive de la taxe foncière due pour les locaux en cause au titre de l'année 2012, il n'apporte, alors que la charge de la preuve du caractère exagéré des rappels de TVA en litige lui incombe comme il a été dit, aucun élément de nature à justifier du paiement de ces factures, qui se rapportent à des prestations de service et qui, si elles font mention d'une TVA, ne font aucunement référence à une option pour les débits.

40. Par suite, l'administration était fondée à ne pas admettre en déduction la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée par ces factures, dans un contexte dans lequel, d'ailleurs, les locaux en cause étaient pris en location par plusieurs entreprises de sorte que l'administration était fondée à douter de l'utilisation, pour les besoins exclusifs de l'exploitation de M. A..., des dépenses facturées.

41. Par ailleurs, M. A... n'a apporté aucun élément de nature à justifier du droit à déduction qu'il revendique en ce qui concerne la taxe ayant grevé des frais bancaires.

42. Dès lors que M. A... n'apporte ainsi pas la preuve, qui lui incombe, de la réalité même des dépenses dont il fait état, il n'est, en tout état de cause, par fondé à revendiquer, en ce qui concerne ces opérations, l'application des mêmes coefficients que ceux utilisés par l'administration pour reconstituer le chiffre d'affaires de son activité individuelle.

43. Enfin, M. A... n'a pas davantage en appel qu'en première instance apporté de précisions suffisantes au soutien de son moyen tiré de ce que l'administration avait fait abstraction de la possibilité, pour une entreprise, d'avoir recours à la " délégation de paiement " prévue " à l'article 1290 " du code civil. Dès lors, la cour n'est pas plus que le tribunal administratif mise en mesure d'apprécier la portée de ce moyen.

Sur les pénalités :

44. Aux termes de l'article 1732 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " La mise en œuvre de la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales entraîne : / a. L'application d'une majoration de 100 % aux droits rappelés ou aux créances de nature fiscale qui doivent être restituées à l'Etat ; / (...) ".

45. Ainsi qu'il a été dit, pour reconstituer les recettes taxables issues de l'activité individuelle de M. A... au titre de la période allant du 1er février 2012 au 31 mars 2013, l'administration a mis, à bon droit, en œuvre la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, après avoir retenu que la vérification de comptabilité entreprise à l'égard de cette activité n'avait pu utilement se tenir du fait du contribuable.

46. Dès lors qu'ainsi qu'il a également été dit, M. A... ne conteste pas utilement la matérialité des circonstances ayant conduit l'administration à porter cette appréciation et à décider l'application aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu en litige de la majoration de 100 % prévue par l'article 1732 du code général des impôts, qui n'est pas subordonnée à la démonstration d'une intention délibérée d'éluder l'impôt, le service doit être regardé comme ayant rapporté la preuve lui incombant du bien-fondé de cette majoration.

47. Cette pénalité fiscale, qui a pour seul objet de sanctionner le comportement de M. A... au cours du contrôle de son entreprise individuelle, pouvait, sans méconnaissance de l'article 4 du septième protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, être appliquée par l'administration nonobstant la condamnation de l'intéressé, d'ailleurs par un jugement du 27 janvier 2016 du tribunal correctionnel d'Avesnes-sur-Helpe prononcé à une date postérieure à celle de la mise en recouvrement des rappels et de la majoration en litige, à une peine d'emprisonnement avec sursis à raison de faits distincts, constitutifs de soustraction à l'établissement et au paiement de l'impôt et de fraude fiscale.

48. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille n'a fait que partiellement droit aux conclusions de sa demande et que ses conclusions tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rappels de TVA demeurant à sa charge au titre de la période allant du 1er février 2012 au 31 mars 2013 doivent être rejetées.

Sur les frais de procédure :

49. Par voie de conséquence de l'ensemble de ce qui précède, les conclusions de M. A... tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre chargée des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administratrice de l'Etat chargée de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 3 avril 2025 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- M. François-Xavier Pin, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 avril 2025.

Le rapporteur,

Signé : J.-F. PapinLe président de chambre,

Signé : M. HeinisLe président de la formation de jugement,

F.-X. Pin

La greffière,

Signé : E. Héléniak

La greffière,

E. Héléniak

La République mande et ordonne à la ministre chargée des comptes publics, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Elisabeth HELENIAK

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N°24DA00423

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3

N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24DA00423
Date de la décision : 24/04/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : DORMIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-24;24da00423 ?
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