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09/04/2025 | FRANCE | N°24DA01157

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 2ème chambre, 09 avril 2025, 24DA01157


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... C... veuve B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 19 avril 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour.



Par un jugement n° 2104013 du 12 mars 2024, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 13 juin 2024, Mme C..., représentée par Me Vergnole, demande à la cou

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1°) d'annuler ce jugement ;



2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Nord en date du 19 avril 2021 ;



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... veuve B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 19 avril 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2104013 du 12 mars 2024, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 juin 2024, Mme C..., représentée par Me Vergnole, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Nord en date du 19 avril 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard ou à défaut de réexaminer sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un vice de procédure en tant que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ne résulte pas d'une délibération collégiale ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'un vice de procédure en raison de l'impossibilité d'identifier les médecins membres de ce collège ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations des 5° et 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux et particulier de la situation de l'appelante.

Par un mémoire, enregistré le 11 mars 2025, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête et s'en remet à ses écritures produites en première instance.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 mai 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Vandenberghe, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante algérienne née le 30 avril 1947, est entrée sur le territoire français le 16 décembre 2017 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. Elle relève appel du jugement du 21 mars 2024 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 avril 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un certificat de résidence.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de l'insuffisante motivation de l'arrêté attaqué et de l'absence d'examen particulier opéré par le préfet par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 2 et 8 du jugement attaqué.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...) Il transmet son rapport médical au collège des médecins. / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège des médecins le rapport médical. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. (...). Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 2 mars 2021 a été rendu à la suite d'une délibération collégiale de trois médecins, les docteurs Truze, Gerlier et Baril qui sont identifiés sur cet avis. Dès lors les moyens tirés de ce que cet avis ne résulterait pas d'une délibération collégiale et que les médecins ayant participé à cette délibération ne seraient pas identifiés doivent être écartés.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. / (...) ".

6. Il ressort du rapport médical rédigé par le médecin de Mme C... que celle-ci souffre de plusieurs pathologies dont un diabète de type 2, une hypertension artérielle, un goître, une gonarthrose, un glaucome, une hernie abdominale et des fuites urinaires. Ce rapport mentionne, en outre, que le glaucome dont l'appelante est affectée a été opéré. Le rapport médical du 30 janvier 2021 destiné au collège de médecins de l'OFII indique quant à lui que le diabète est équilibré notamment par la prise de Metformine, médicament qui est disponible en Algérie, qu'afin de soigner la gonarthrose dont souffre Mme C..., des prothèses aux deux genoux ont été posées au cours des mois de mars et septembre 2019 et qu'une radiographie réalisée le 27 octobre 2020 ne montre pas de signe de descellement. Au vu de ces éléments, le collège de médecins de l'OFII a estimé, par son avis du 2 mars 2021, que si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Si Mme C..., compte tenu de son âge et de son état de santé, est en situation de dépendance, il n'est toutefois pas établi qu'elle ne pourrait pas être prise en charge dans une maison de retraite en Algérie. Il ressort en outre des pièces du dossier que le Ramipril, un hypertenseur, est disponible en Algérie et qu'il en est de même du Fénofibrate, destiné à abaisser le taux des graisses dans le sang. Il n'est par ailleurs pas établi que la maladie de peau évoquée par Mme C... dans ses écritures nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité. L'existence de pénuries dans l'approvisionnement en médicaments en Algérie ne permet pas de considérer, à elle seule, que Mme C..., qui a vécu pendant soixante-dix ans dans ce pays, ne pourrait pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé. Dès lors, le préfet du Nord n'a pas fait une inexacte application des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien en rejetant la demande de l'appelante tendant à la délivrance d'un certificat de résidence à raison de son état de santé.

7. En quatrième lieu, Mme C... n'ayant pas sollicité la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, elle ne peut utilement soutenir que l'arrêté attaqué méconnaîtrait ces stipulations.

8. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que si la plupart des enfants de Mme C... résident en France, l'intéressée a vécu la majeure partie de sa vie en Algérie et a fait l'objet, le 19 décembre 2018, d'un arrêté par lequel le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande de délivrance d'un certificat de résidence et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Il est constant que Mme C... n'a pas exécuté cette mesure d'éloignement. Hormis ses relations avec ses enfants, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressée aurait noué des liens d'une particulière intensité sur le territoire français. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, il n'apparaît pas que son état de santé justifie son séjour en France et qu'elle ne sera pas en mesure de bénéficier des soins adéquats dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le préfet du Nord, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet du Nord n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision de refus de séjour sur la situation personnelle de Mme C....

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Nord en date du 19 avril 2021. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... veuve B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 25 mars 2025 à laquelle siégeaient :

- M. Benoît Chevaldonnet, président de chambre,

- M. Laurent Delahaye, président-assesseur,

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 avril 2025.

Le rapporteur,

Signé : G. VandenbergheLe président de chambre,

Signé : B. Chevaldonnet

La greffière,

Signé : A-S. Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

par délégation,

La greffière

2

N°24DA01157


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24DA01157
Date de la décision : 09/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chevaldonnet
Rapporteur ?: M. Guillaume Vandenberghe
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : VERGNOLE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-09;24da01157 ?
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