Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la délibération du 5 juillet 2021 par laquelle le jury académique a estimé qu'elle n'était pas apte à se voir délivrer le certificat d'aptitude de professeur des écoles et qu'une année supplémentaire de stage ne lui permettrait pas d'acquérir les compétences suffisantes à la délivrance de ce certificat, ainsi que l'arrêté du 20 juillet 2021 par lequel le recteur de l'académie d'Amiens a prononcé son licenciement.
Par un jugement n° 2103180 du 12 avril 2024, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 11 juin 2024, et un mémoire en réplique enregistré le 14 février 2025, Mme B..., représentée par Me Bellanger, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 12 avril 2024 ;
2°) d'annuler la délibération du jury du 5 juillet 2021 et l'arrêté du 20 juillet 2021 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la motivation du jugement est entachée de plusieurs erreurs ;
- l'autorité administrative a omis de procéder à un examen complet de sa situation dès lors que le jury devait se prononcer sur son aptitude en décembre 2020 au vu de rapports favorables, que le jury s'est prononcé en juillet 2021 au vu du seul rapport établi à la suite de l'inspection du 31 mai 2021, que cette inspection s'est tenue en dépit de la prolongation illégale de son stage au-delà de la durée maximale de deux ans sans l'accord du jury, et que l'administration a omis de tenir compte de la période de février 2020 à août 2020 ;
- le rapport établi à l'issue de l'inspection du 31 mai 2021 est irrégulier dès lors qu'elle n'a pas été informée de la visite de l'inspecteur contrairement aux autres stagiaires, que ce rapport relève l'absence de documents de préparation de son cours alors que ces éléments ont été transmis à l'inspecteur, que l'avis de la directrice de l'institut national supérieur du professorat et de l'éducation et les témoignages versés au dossier contredisent les conclusions du rapport, que l'inspecteur n'a pu porter une appréciation sur les retards, la ponctualité ou la mise en danger des enfants, qu'il n'a pas tenu compte de l'évaluation périodique des enfants, qu'il ne s'est pas entretenu avec la directrice de l'établissement, et que la présence d'un râteau dans la classe le jour de l'inspection est imputable à la collègue avec laquelle elle se trouve en binôme ;
- que le jury s'est prononcé dans une composition irrégulière, en méconnaissance des dispositions de l'article 4 de l'arrêté du 22 août 2014 fixant les modalités de stage, d'évaluation et de titularisation des professeurs des écoles stagiaires ;
- l'administration n'a pas produit la décision permettant au jury de se prononcer en sous-commission ;
- l'arrêté du recteur de l'académie d'Amiens du 31 mai 2021 crée des sous-commissions pour entendre les stagiaires pour lesquels le jury envisage de ne pas proposer une titularisation, de sorte que ces stagiaires sont écartés avant même la délibération du jury et qu'ils sont privés d'une garantie faute d'être entendus par l'ensemble de ce jury ;
- il n'est pas établi que l'inspecteur à l'origine du rapport du 31 mai 2021, qui fait partie du jury, s'est déporté avant que celui-ci ne délibère ;
- son stage de formation s'est déroulé dans des conditions irrégulières dès lors qu'elle n'a pas reçu de formation théorique, que ses tuteurs ne lui ont pas donné les attendus d'observations, qu'un dispositif personnalisé d'accompagnement et de soutien a été mis en place au cours de sa deuxième année de stage, et qu'elle n'a pas été accompagnée dans le cadre de ce dispositif, en méconnaissance des dispositions des arrêtés du 28 juillet 1999 et du 15 juin 2012 ;
- l'administration a méconnu son obligation de sécurité dès lors qu'elle a été victime de harcèlement ;
- la délibération du jury est entachée d'erreurs de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 janvier 2025, le recteur de l'académie d'Amiens conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la requête est irrecevable dès lors que Mme B... se borne à reprendre ses écritures exposées en première instance sans exposer de moyens d'appel ;
- les moyens soulevés ne sont pas fondés, ainsi qu'il ressort du mémoire en défense déposé devant le tribunal administratif.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la fonction publique ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le décret n° 90-680 du 1er août 1990 ;
- l'arrêté du 15 juin 2012 fixant le cahier des charges de la formation des professeurs, documentalistes et conseillers principaux d'éducation ;
- l'arrêté du 22 août 2014 fixant les modalités de stage, d'évaluation et de titularisation des professeurs des écoles stagiaires ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guérin-Lebacq, président-assesseur,
- les conclusions de M. Malfoy, rapporteur public,
- et les observations de Me Cortes, représentant Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Admise au concours de recrutement de professeur des écoles, Mme B... a été nommée en qualité de professeure stagiaire le 1er septembre 2018 dans une école élémentaire de l'académie d'Amiens. Placée successivement, à compter de septembre 2018, en congé de maladie, en congé de maternité puis en congé parental, Mme B... n'a repris le service que le 26 mars 2019, conduisant l'administration à prolonger son stage de septembre 2019 à février 2020. Eu égard à ses résultats au terme de cette première année de formation, l'intéressée a été autorisée à effectuer une seconde année de stage à compter du 19 février 2020. Sa situation n'ayant pu être examinée par le jury académique réuni au mois de décembre 2020, ce stage a été prolongé jusqu'au 31 août 2021. Par une délibération du 5 juillet 2021, le jury académique d'évaluation et de titularisation des professeurs des écoles de l'académie d'Amiens a proposé de ne pas titulariser Mme B... à l'issue de cette dernière année de stage. Par un arrêté du 20 juillet 2021, le recteur de l'académie d'Amiens a prononcé son licenciement. Mme B... a demandé l'annulation de la délibération du 5 juillet 2021 et de l'arrêté du 20 juillet 2021 au tribunal administratif d'Amiens. Elle relève appel du jugement du 12 avril 2024 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Si Mme B... relève, dans la rédaction du jugement attaqué, des imprécisions portant sur les lieux où elle a accompli son stage, les dates de renouvellement ou de prolongation de ce stage et les dates de ses congés, les erreurs ainsi alléguées n'ont pas pour effet d'entacher ce jugement d'un défaut de motivation.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article 10 du décret du 1er août 1990 relatif au statut particulier des professeurs des écoles : " Les professeurs stagiaires accomplissent un stage d'un an. Au cours de leur stage, les professeurs stagiaires bénéficient d'une formation organisée, dans le cadre des orientations définies par l'Etat, par un établissement d'enseignement supérieur, visant l'acquisition des compétences nécessaires à l'exercice du métier. Cette formation alterne des périodes de mise en situation professionnelle dans une école et des périodes de formation au sein de l'établissement d'enseignement supérieur. Elle est accompagnée d'un tutorat (...) ". Aux termes de l'article 12 du même décret : " A l'issue du stage, les professeurs des écoles stagiaires sont titularisés (...) sur proposition du jury (...). La titularisation confère le certificat d'aptitude au professorat des écoles (...) ". Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 22 août 2014 fixant les modalités de stage, d'évaluation et de titularisation des professeurs des écoles stagiaires : " Il est constitué un jury académique de cinq à huit membres nommés par le recteur. / Le recteur ou son représentant préside le jury. / A la demande de son président, le jury peut se constituer en groupes d'examinateurs en fonction des effectifs. / (...) / Chaque jury académique institué pour une session demeure compétent jusqu'à la date à laquelle est nommé le jury de la session suivante. / Les stagiaires bénéficiant d'une prolongation de stage et qui n'ont pas pu être évalués à cette date le sont par le nouveau jury compétent ". Aux termes de l'article 5 du même arrêté : " Le jury se prononce (...) après avoir pris connaissance des avis suivants : / I. - Pour les professeurs des écoles stagiaires qui effectuent leur stage dans les écoles (...) : / 1° L'avis de l'inspecteur de l'éducation nationale désigné par le recteur, établi sur la base d'une grille d'évaluation et après consultation du rapport du tuteur désigné par le recteur, pour accompagner le fonctionnaire stagiaire pendant sa période de mise en situation professionnelle. L'avis peut également résulter d'une inspection ; / 2° L'avis du directeur de l'école supérieure du professorat et de l'éducation responsable de la formation du stagiaire ". Aux termes de l'article 6 du même arrêté : " Le jury entend au cours d'un entretien chaque fonctionnaire stagiaire pour lequel il envisage de ne pas proposer la titularisation ". Aux termes de l'article 8 de cet arrêté : " Après délibération, le jury établit la liste des fonctionnaires stagiaires qu'il estime aptes à être titularisés (...) / Les stagiaires qui n'ont pas été jugés aptes à être titularisés à l'issue de la première année de stage et qui accomplissent une seconde année de stage bénéficient obligatoirement d'une inspection ".
4. En premier lieu, par un arrêté du 31 mai 2021, le recteur de l'académie d'Amiens a constitué un jury académique d'évaluation et de titularisation des professeurs des écoles stagiaires, composé de huit membres, dans les conditions prévues par les dispositions précitées de l'article 4 de l'arrêté interministériel du 22 août 2014. Conformément à ces mêmes dispositions, l'arrêté du 31 mai 2021 prévoit à son article 3 la possibilité pour le jury de " se constituer en sous-commissions pour entendre au cours d'un entretien les stagiaires pour lesquels il envisage de ne pas proposer la titularisation ". Dès lors, si Mme B... a été entendue, lors de son entretien du 2 juillet 2021, par deux membres seulement du jury, cette circonstance n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la délibération contestée, quand bien même la décision de procéder à son audition dans le cadre d'une sous-commission n'a pas donné lieu à un acte formalisé. Par ailleurs, l'audition est prévue pour les seuls stagiaires qu'il est envisagé de ne pas titulariser, de sorte que, contrairement à ce que soutient la requérante, l'absence d'audition par la formation plénière du jury ne constitue aucunement une privation de garantie. Enfin, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'inspecteur d'académie qui, après avoir procédé à une inspection du cours de Mme B... le 31 mai 2021, a rédigé un rapport défavorable à sa titularisation, aurait fait preuve de partialité dans l'appréciation de ses mérites professionnels. La participation de cet inspecteur, membre du jury académique, à la délibération du 5 juillet 2021 n'est donc pas de nature à démontrer à elle seule que la requérante n'aurait pas été évaluée en toute impartialité. Par suite, le moyen tiré de la composition irrégulière du jury doit être écarté.
5. En deuxième lieu, il résulte des dispositions citées au point 3, notamment l'article 12 du décret du 1er août 1990, que la titularisation des professeurs des écoles stagiaires est prononcée sur proposition d'un jury. Dans ces conditions, si l'aptitude de Mme B..., autorisée à effectuer une seconde année de stage à compter du 19 février 2020, n'a pas été évaluée par le jury au cours de la session prévue en décembre 2020, au vu d'un rapport d'inspection établi selon la requérante en novembre précédent, l'absence de consultation du jury lors de cette session impliquait nécessairement la prolongation de son stage afin de permettre au jury de la session suivante, prévue en juillet 2021, de se prononcer sur sa situation. Il ressort des pièces du dossier que le jury académique s'est prononcé au vu d'un dossier composé de l'avis et du rapport de l'inspecteur de l'éducation nationale rédigé après l'inspection du 31 mai 2021, des rapports des deux tuteurs de l'éducation nationale ayant suivi Mme B... tout le long de sa période de stage, et de l'avis de la directrice de l'institut national supérieur du professorat et de l'éducation, conformément aux dispositions précitées de l'article 5 de l'arrêté ministériel du 22 août 2014. A cet égard, le courrier de l'inspecteur d'académie du 29 juin 2021 indiquant à Mme B... que seul le dernier rapport établi à la suite de l'inspection du 31 mai 2021 serait soumis au jury, sans tenir compte de la visite de l'inspectrice d'académie du 17 novembre 2020, ne contredit pas les éléments apportés en défense, dont il ressort que le jury a pris connaissance du dossier complet de l'intéressée incluant, notamment, le rapport de l'inspection du 31 mai 2021, dont elle devait obligatoirement faire l'objet en application de l'article 8 de l'arrêté du 22 août 2014. Au demeurant, il ressort des déclarations de Mme B..., jointes à sa plainte pour harcèlement du 26 avril 2024, que l'inspectrice d'académie a proposé, à l'issue de sa visite du 17 novembre 2020, de ne pas la titulariser. Par ailleurs, il n'est pas contesté que Mme B... a été entendue au cours d'un entretien par le jury académique le 2 juillet 2021, dans les conditions prévues par l'article 6 du même arrêté, et a ainsi été mise à même de présenter ses observations. Par suite, Mme B..., qui ne saurait utilement se prévaloir d'une prolongation illégale de son stage, n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait omis de procéder à un examen complet de sa situation.
6. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme B... a bénéficié au cours de sa seconde année de stage d'une formation au sein de l'institut national supérieur du professorat et de l'éducation de l'académie d'Amiens, en alternance avec l'exercice de fonctions au sein d'un établissement scolaire et a bénéficié d'un accompagnement par deux enseignants désignés en qualité de tuteurs. Les éléments produits à l'instance par Mme B... indiquent que, conscients de ses insuffisances, les deux tuteurs ont demandé en janvier 2021 la mise en place d'un dispositif personnalisé d'accompagnement et de soutien afin de lui permettre de progresser dans sa pratique professionnelle et ont procédé dans le cadre de ce dispositif à une mise au point en mars 2021, prévoyant la construction et l'utilisation d'une grille d'observation sur les gestes de l'enseignant et la mise en œuvre des apprentissages, une analyse de séance, des visites supplémentaires par les tuteurs et l'envoi des préparations à ces derniers. Elle n'apporte aucun élément démontrant que ses tuteurs ont négligé de lui faire un retour écrit sur ses travaux ou qu'ils ont omis de lui remettre les outils nécessaires à son suivi, alors qu'il ressort au contraire des pièces soumises au jury que les tuteurs ont été présents tout au long de son stage durant lequel ils lui ont prodigué de nombreux conseils. Par le dispositif d'accompagnement précité, dont elle n'établit pas qu'il aurait été défaillant, Mme B... a été mise en mesure d'appréhender les difficultés récurrentes rencontrées dans sa pratique pédagogique et la gestion de sa classe, et a bénéficié de conseils afin d'y remédier. Il n'est pas établi que l'inscription dans le réseau d'éducation prioritaire de l'établissement où Mme B... exerçait ses fonctions ainsi que la présence de deux élèves en situation de handicap dans sa classe auraient caractérisé des conditions anormales de stage au regard des fonctions que les professeurs des écoles ont vocation à exercer, alors au demeurant que la classe de l'intéressée comptait une quinzaine d'élèves. Enfin, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, l'arrêté du 12 mai 2010 fixant les modalités d'évaluation et de titularisation des professeurs des écoles stagiaires a abrogé l'arrêté du 28 juillet 1999 fixant les modalités de déroulement de la deuxième année de stage des professeurs des écoles stagiaires autorisés à renouveler leur stage, dont la requérante ne saurait par conséquent utilement se prévaloir. Par suite, le moyen tiré de ce que Mme B... n'a pas bénéficié de conditions de stage lui permettant de faire preuve de ses capacités doit être écarté.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dont les dispositions ont été reprises depuis aux articles L. 133-2 et L. 133-3 du code général de la fonction publique : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l'appréciation de la valeur professionnelle (...) ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa (...) ". Si Mme B... soutient que ses tuteurs lui ont vivement reproché d'avoir alerté le directeur académique des services de l'éducation nationale sur les conditions de déroulement de son stage et d'évaluation par le jury académique, elle ne produit sur ce point qu'un courriel du 6 février 2021, dont elle est l'auteur, qui ne fait pas état de ces reproches. Les certificats médicaux établis à compter du 26 août 2021, postérieurement à la délibération refusant sa titularisation, ne permettent pas de supposer que le dispositif personnalisé d'accompagnement et de soutien aurait été mis en œuvre tardivement afin de lui nuire au cours du stage. Mme B... ne produit aucun élément étayant ses allégations selon lesquelles l'accompagnement de ce stage a été insuffisant et malveillant. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la visite de l'inspecteur d'académie, le 31 mai 2021, se serait déroulée dans des conditions anormales, en dehors du cadre administratif habituel prévu pour de telles visites d'inspection, quand bien même elle n'a pas été annoncée à Mme B.... Enfin, le rapport établi par l'inspecteur d'académie ne comporte pas de termes excédant l'exercice normal par l'intéressé de ses fonctions d'inspection, même s'il est défavorable à la titularisation de la requérante. Par suite, Mme B... ne produit pas à l'instance d'éléments de fait laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral dont résulterait la mesure contestée refusant sa titularisation.
8. En dernier lieu, les jurys académiques, appelés notamment à se prononcer en vue de la titularisation des professeurs stagiaires nommés dans certains corps, statuent à l'issue d'une période de formation et de stage. S'agissant non d'un concours ou d'un examen mais d'une procédure tendant à l'appréciation de la manière de servir qui doit être faite en fin de stage, cette appréciation est contrôlée par le juge de l'excès de pouvoir et peut être censurée en cas d'erreur manifeste.
9. Pour contester la délibération du 5 juillet 2021 proposant de ne pas la titulariser au terme de sa deuxième année de stage, Mme B... se prévaut de plusieurs témoignages émanant de collègues, de parents d'élèves et de cheffes des établissements dans lesquels elle a exercé ses fonctions, qui attestent notamment de son implication dans ses fonctions de professeur des écoles, de ses qualités professionnelles et de sa disponibilité. Toutefois, il ressort de l'appréciation générale rédigée à la suite de l'entretien du 2 juillet 2021 que Mme B... n'est pas en mesure d'exposer ses difficultés professionnelles qu'elle impute à des évènements extérieurs, qu'elle peut citer les domaines d'activité et d'apprentissage de l'école maternelle sans pouvoir tenir un discours structuré sur sa pratique professionnelle, qu'elle n'évoque pas ses élèves et leurs apprentissages et qu'elle ne peut expliciter ses démarches pédagogiques et didactiques. Il ressort encore des pièces du dossier, et notamment du rapport de l'inspecteur de l'éducation nationale du 31 mai 2021, de l'avis de la directrice de l'institut national supérieur du professorat et de l'éducation et des avis de ses deux tuteurs que le niveau de Mme B... reste insuffisant quant à la maitrise des contenus disciplinaires et de leur didactique, et des compétences éducatives et pédagogiques nécessaires à l'exercice des fonctions de professeur des écoles, en dépit d'un stage accompli, dans le cadre d'un renouvellement, dans une classe de grande-section comportant seulement treize élèves, avec un accompagnement adapté à ses difficultés. Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, les rapports et avis émis sur la manière de servir de Mme B... lui font reproche de ne pas maîtriser les contenus disciplinaires et les concepts essentiels utiles à son enseignement, de ne pas mettre en œuvre de transpositions didactiques appropriées, de ne pas fixer les objectifs à atteindre et les moyens d'y parvenir et de ne pas donner du sens aux apprentissages. Si ces mêmes rapports font état de progrès réalisés par Mme B..., notamment dans sa façon de s'adresser à ses élèves, ils relèvent également la difficulté de l'intéressée à mettre en œuvre les conseils et recommandations qui lui sont prodigués. La circonstance que la requérante a transmis ses documents de préparation à l'inspecteur d'académie après la visite du 31 mai 2021 n'est pas de nature à contredire les termes du rapport établi à l'issue de l'inspection, selon lesquels elle n'a pas été en mesure de présenter ces documents au début de son cours. Il n'est pas établi que l'inspecteur d'académie se serait mépris, dans son appréciation, sur la ponctualité de Mme B..., l'évaluation périodique des enfants ou leur sécurité pendant le cours. Les quelques divergences, relevées par la requérante à la lecture des documents précités évaluant ses capacités et se rapportant à l'évaluation de sa participation au travail d'équipe ou à l'utilisation d'un langage clair et adapté à son interlocuteur, ne suffisent pas à en contredire les appréciations générales qui, de façon unanime, confirment les difficultés rencontrées dans le développement de ses aptitudes professionnelles. Enfin, si Mme B... fait état d'un avis favorable que l'inspectrice d'académie aurait rendu à l'issue de la visite du 17 novembre 2020, il résulte de ses propres déclarations, ainsi qu'il a été dit plus haut, que l'inspectrice n'a pas proposé de la titulariser.
10. Par suite, tenant compte du rapport établi à l'issue de l'inspection du 31 mai 2021 dont il n'est pas démontré qu'il serait entaché d'erreurs de fait, le jury académique n'a pas, au regard de la nature et de l'importance des lacunes de Mme B..., entaché sa délibération du 5 juillet 2021 d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de proposer sa titularisation. Dans la mesure où Mme B... ne figure pas sur la liste des stagiaires proposés par le jury académique pour une titularisation et ne peut donc être retenue pour l'accomplissement d'une nouvelle année de stage, le recteur de l'académie d'Amiens était tenu de prononcer son licenciement.
11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions présentées à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées, ainsi que ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Copie en sera adressée au recteur de l'académie d'Amiens.
Délibéré après l'audience publique du 18 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,
- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,
- Mme Dominique Bureau, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 avril 2025.
Le président-rapporteur,
Signé : J.-M. Guérin-LebacqLa présidente de chambre,
Signé : M.-P. Viard
La greffière,
Signé : C. Huls-Carlier
La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
C. Huls-Carlier
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N° 24DA01139