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02/04/2025 | FRANCE | N°24DA01040

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 2ème chambre, 02 avril 2025, 24DA01040


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 30 octobre 2023 par lequel la préfète de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné.



Par un jugement n° 2304054 du 26 mars 2024, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.



Procédure devant

la cour :



Par une requête, enregistrée le 28 mai 2024, M. B..., représenté par Me Pereira, demande à la cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 30 octobre 2023 par lequel la préfète de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné.

Par un jugement n° 2304054 du 26 mars 2024, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 mai 2024, M. B..., représenté par Me Pereira, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté de la préfète de l'Oise en date du 30 octobre 2023 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l'Oise de lui délivrer un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil désigné au titre de l'aide juridictionnelle d'une somme de 1 000 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est entaché d'erreur de fait dès lors qu'il retient que son oncle se maintient en situation irrégulière sur le territoire alors qu'il est en réalité de nationalité française ; cette erreur a exercé une influence sur le sens des décisions prises par la préfète de l'Oise à son encontre dès lors que cet élément important participait au faisceau d'indices qui justifiait sa régularisation ;

- il porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît à ce titre les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de l'ancienneté de son séjour en France, de la présence de nombreux membres de sa famille sur le territoire, de son mariage avec une ressortissante française et de ses perspectives d'insertion professionnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2024, la préfète de l'Oise conclut au rejet de la requête d'appel de M. B....

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 mai 2024 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Toutias, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., né le 26 juin 2002, de nationalité algérienne, est entré en France à l'âge de 13 ans le 4 février 2016 sous couvert d'un visa de court séjour de circulation, valable du 4 février 2016 au 3 février 2018. Il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire en méconnaissance des droits au séjour ouverts par ce visa. Le 11 mai 2022, il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale ". Par un arrêté du 30 octobre 2023, la préfète de l'Oise a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné. M. B... relève appel du jugement du 26 mars 2024 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6, paragraphe 5, de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; / (...) ".

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, si M. B..., à la date de l'arrêté attaqué, vivait au domicile de sa mère à Creil, avec deux de ses frères et sœurs, tous se maintiennent en situation irrégulière sur le territoire. S'il compte un oncle de nationalité française qui l'avait pris en charge sous le régime de la kafala lorsqu'il est arrivé en France en 2016, il n'apporte aucun élément de nature à établir le maintien de liens avec lui, notamment depuis que sa mère l'a rejoint ou depuis son accession à la majorité. S'il s'est pour la première fois prévalu, dans le cadre de l'instance devant le tribunal administratif d'Amiens puis devant la cour, de sa relation avec une ressortissante française, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué celle-ci était encore récente et qu'il n'existait alors pas de communauté de vie effective entre les intéressés. En outre, bien qu'ayant été scolarisé sans interruption depuis son arrivée en France, M. B... justifie seulement de l'obtention d'un certificat d'aptitude professionnelle, spécialité " employé de vente spécialisé ", mais d'aucune expérience professionnelle particulière ni ancienneté dans un emploi. Dans le même temps, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, il n'aurait pas été isolé dans son pays d'origine où résidaient toujours au moins deux de ses frères et sœurs. Il ne démontre pas davantage qu'il n'aurait pas pu s'y réinsérer socialement et professionnellement, à la faveur notamment des qualifications qu'il a acquises en France. Dans ces conditions, en dépit de l'ancienneté de son séjour en France, M. B... ne pouvait, à la date de l'arrêté attaqué, être regardé comme ayant établi le centre principal de sa vie privée et familiale sur le territoire français et c'est donc sans porter d'atteinte disproportionnée au respect de son droit à la vie privée et familiale que la préfète de l'Oise a alors pu lui refuser la délivrance d'un titre de séjour et l'obliger à quitter le territoire français. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations citées au point 2 doit, dès lors, être écarté.

4. En second lieu, si la préfète de l'Oise a entaché son arrêté d'une erreur de fait en retenant que l'oncle de M. B... se maintient en situation irrégulière en France alors qu'il détient en réalité la nationalité française, il résulte de l'instruction qu'elle aurait pris les mêmes décisions si elle avait correctement pris en compte cette considération. En effet, en l'état de la législation et de la réglementation en vigueur, les liens de M. B... avec un oncle de nationalité française ne lui conféraient aucun droit automatique à la délivrance d'un titre de séjour. En outre, compte tenu des autres aspects de la situation personnelle de M. B... pris en compte par l'arrêté attaqué et tels que mentionnés ci-dessus, ses liens avec son oncle français n'auraient pas conduit la préfète de l'Oise à considérer que le centre de sa vie privée et familiale s'est solidement et durablement établi en France et qu'un refus de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français, était de nature à porter une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale, constitutive d'une méconnaissance des stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 6, paragraphe 5, de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié.

5. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 octobre 2023 de la préfète de l'Oise ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction. Les conclusions dans le même sens qu'il réitère en appel doivent, à leur tour, être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et à Me Pereira.

Copie sera adressée au préfet de l'Oise.

Délibéré après l'audience publique du 11 mars 2025 à laquelle siégeaient :

- M. Benoît Chevaldonnet, président de chambre,

- M. Laurent Delahaye, président-assesseur,

- M. Guillaume Toutias, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 avril 2025.

Le rapporteur,

Signé : G. ToutiasLe président de chambre,

Signé : B. Chevaldonnet

La greffière,

Signé : A-S. Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

par délégation,

La greffière

2

N°24DA01040


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24DA01040
Date de la décision : 02/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chevaldonnet
Rapporteur ?: M. Guillaume Toutias
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : PEREIRA

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-02;24da01040 ?
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