La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/03/2025 | FRANCE | N°23DA02249

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 2ème chambre, 12 mars 2025, 23DA02249


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... C... épouse A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler les décisions des 7 mars 2022 et 29 mars 2022 par lesquelles le président du conseil départemental de la Somme lui a retiré son agrément d'assistante familiale et a prononcé son licenciement.



Par un jugement n° 2201571 du 12 octobre 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une

requête, enregistrée le 5 décembre 2023, Mme B... A..., représentée par Me Guimfak, demande à la cour :



1°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... épouse A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler les décisions des 7 mars 2022 et 29 mars 2022 par lesquelles le président du conseil départemental de la Somme lui a retiré son agrément d'assistante familiale et a prononcé son licenciement.

Par un jugement n° 2201571 du 12 octobre 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 décembre 2023, Mme B... A..., représentée par Me Guimfak, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler les décisions des 7 mars 2022 et 29 mars 2022 du président du conseil départemental de la Somme ;

3°) d'enjoindre au président du conseil départemental de la Somme de la réintégrer dans son activité d'assistante familiale, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du département de la Somme une somme de 3 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- pour retirer son agrément en qualité d'assistante familiale, le président du conseil départemental de la Somme s'est fondé sur des faits dont la matérialité n'est pas établie ;

- cette décision de retrait d'agrément est disproportionnée ;

- la décision du 29 mars 2022 prononçant son licenciement doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité du retrait de son agrément.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 mars 2024, le département de la Somme, représenté par Me Poulain, demande à la cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de Mme A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par l'appelante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Caroline Regnier, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Poulain, représentant le département de la Somme.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A... a bénéficié d'un agrément en qualité d'assistante familiale à compter du 16 janvier 2012 qui a été renouvelé le 11 mai 2017. Par une décision du 7 mars 2022, le président du conseil départemental de la Somme a prononcé le retrait de cet agrément motifs pris que la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis au domicile de l'intéressée n'étaient plus garantis en raison de faits de violence commis à l'encontre d'un enfant qui lui était confié, de négligences dans l'acquisition des fournitures scolaires d'un autre enfant à quelques jours de la rentrée scolaire, de difficultés de communication avec le service de l'aide sociale à l'enfance et de manquements professionnels. L'intéressée a par la suite été licenciée par décision du 29 mars 2022. Mme A... relève appel du jugement n° 2201571 du 12 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'action sociale et des familles : " L'assistant familial est la personne qui, moyennant rémunération, accueille habituellement et de façon permanente des mineurs et des jeunes majeurs de moins de vingt et un ans à son domicile. Son activité s'insère dans un dispositif de protection de l'enfance, un dispositif médico-social ou un service d'accueil familial thérapeutique. Il exerce sa profession comme salarié de personnes morales de droit public ou de personnes morales de droit privé dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre ainsi que par celles du chapitre III du présent livre, après avoir été agréé à cet effet. / L'assistant familial constitue, avec l'ensemble des personnes résidant à son domicile, une famille d'accueil. ". Aux termes de l'article L. 421-3 du même code : " " L 'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil départemental du département où le demandeur réside. / Un référentiel approuvé par décret en Conseil d'Etat fixe les critères d'agrément. / (...) L'agrément est accordé à ces deux professions si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne, (...) ". Aux termes du troisième alinéa de l'article L. 421-6 du même code : " Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil départemental peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il incombe au président du conseil départemental de s'assurer que les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis et de procéder au retrait de l'agrément si ces conditions ne sont plus remplies. À cette fin, dans l'hypothèse où il est informé de suspicions de comportements susceptibles de compromettre la santé, la sécurité ou l'épanouissement d'un enfant de la part du bénéficiaire de l'agrément ou de son entourage, il lui appartient de tenir compte de tous les éléments portés à la connaissance des services compétents du département ou recueillis par eux et de déterminer si ces éléments sont suffisamment établis pour lui permettre raisonnablement de penser que l'enfant est victime des comportements en cause ou risque de l'être.

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment des échanges qui ont eu lieu le 30 août 2021 entre une éducatrice du service départemental de l'aide sociale à l'enfance et une enfant auparavant accueillie au domicile de Mme A... ainsi que du témoignage de l'enfant concerné recueilli le 24 novembre 2021 que l'appelante a emmené ce dernier, qui refusait de faire sa toilette et était alors âgé de huit ans, de force dans la salle de bain, en le tirant dans les escaliers et en le forçant à se laver à l'eau froide. Les témoignages que Mme A... produit, s'ils permettent d'attester de la complexité de la prise en charge de l'enfant en question, ne remettent pas en cause la matérialité des faits qui lui sont reprochés.

5. En deuxième lieu, il ressort d'un compte rendu d'un entretien qui s'est tenu le 30 août 2021 avec la coordinatrice enfance du département qu'à cette même date, Mme A... n'avait pas acheté les fournitures scolaires d'une enfant qui lui était confiée en prévision de la rentrée, pourtant prévue le 2 septembre 2021. Si l'appelante produit un ticket de caisse, daté du 27 août 2021, d'une grande surface dans laquelle elle a acheté des vêtements pour cette enfant, elle ne justifie toutefois pas avoir acquis ses fournitures scolaires avant qu'elle ne change de famille d'accueil le 30 août 2021, alors qu'il est par ailleurs constant que les assistantes familiales bénéficient notamment d'indemnités d'entretien pour les enfants qui leur sont confiés.

6. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment d'une note d'information du 3 septembre 2020, et du rapport sur sa manière de servir du 11 août 2020 que des difficultés de communication entre Mme A... et l'administration ont été relevées, l'intéressée n'acceptant pas les remarques formulées par les agents du département et ne remettant pas en cause ses pratiques, notamment en ce qui concerne le recours à des punitions inappropriées. Des entretiens de recadrage ont eu lieu les 15 et 24 mars 2021 et ont été suivis d'un accompagnement de proximité du coordinateur de l'accueil familial, sans que l'intéressée ne modifie son comportement. Une visite domiciliaire diligentée le 9 novembre 2021 a en outre mis en évidence les lacunes théoriques de l'assistante familiale dans la prise en charge des enfants confiés à l'aide sociale à l'enfance, l'appelante ayant au demeurant reconnu au cours de la séance de la commission consultative paritaire départementale du 8 février 2022 n'avoir suivi aucune formation entre 2013 à 2021.

7. Ainsi, le président du conseil départemental de la Somme pouvait légalement, pour les motifs énoncés aux points 4 à 6 et dont la matérialité est établie, retirer l'agrément de Mme A..., les conditions d'accueil des enfants à son domicile ne garantissant plus leur sécurité, leur santé et leur épanouissement au sens des dispositions citées au point 2 du présent arrêt. Il n'en a ainsi pas fait une inexacte application et l'appelante n'est donc pas fondée à soutenir que le retrait contesté serait disproportionné par rapport à la gravité des faits qui lui sont reprochés. Ses allégations quant à la discrimination dont elle ferait l'objet en raison de ses origines ne sont par ailleurs nullement étayées.

8. Enfin, l'ensemble des moyens dirigés contre la décision portant retrait de l'agrément de Mme A... ayant été écarté, l'intéressée n'est pas fondée à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision la licenciant.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 7 mars 2022 et 29 mars 2022.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

10. Le présent arrêt, qui rejette la requête de Mme A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge du département de la Somme qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 000 euros à verser au département de la Somme au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Mme A... versera au département de la Somme une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au département de la Somme.

Délibéré après l'audience publique du 25 février 2025 à laquelle siégeaient :

- M. Benoît Chevaldonnet, président de chambre

- M. Laurent Delahaye, président-assesseur,

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mars 2025.

Le rapporteur,

Signé : G. VandenbergheLe président de chambre,

Signé : B. Chevaldonnet

La greffière,

Signé : A-S. Villette

La République mande et ordonne au préfet de la Somme en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, d pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

par délégation,

La greffière

2

N°23DA02249


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA02249
Date de la décision : 12/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chevaldonnet
Rapporteur ?: M. Guillaume Vandenberghe
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : DONGMO GUIMFAK

Origine de la décision
Date de l'import : 13/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-12;23da02249 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award