Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... B..., Mme F... B... née E... et Mme A... B..., agissant tant en leur nom personnel qu'en leur qualité d'ayants droits de M. C... B..., ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner l'État à les indemniser des préjudices qu'ils estiment avoir subis à raison, d'une part, des faits de harcèlement dont C... a été victime au sein du lycée professionnel Jean-Charles Peltier, et d'autre part de son décès, à hauteur des sommes respectives de 10 000 et 80 000 euros.
Par un jugement no 2002728 du 7 juillet 2022, le tribunal administratif d'Amiens a condamné l'État à leur verser la somme de 10 000 euros à raison des faits de harcèlement dont C... a été victime, et a rejeté le surplus des conclusions indemnitaires de leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés respectivement les 8 septembre 2022 et 24 octobre 2023, les consorts B..., représentés par la SCP Dumoulin-Chartrelle-Abiven, agissant par Me Chartrelle, demandent à la cour :
1°) de réformer ce jugement en tant qu'il a rejeté leur demande indemnitaire présentée au titre du décès C....
2°) de condamner l'État à leur verser la somme de 80 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 avril 2020, avec capitalisation des intérêts ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la responsabilité de l'État est engagée en raison du défaut de surveillance imputable au personnel de l'établissement scolaire ;
- cette faute, ainsi que le manquement de l'établissement à son obligation de protection à l'égard de M. C... B... à raison des faits de harcèlement dont il a été victime, sont à l'origine de son décès ;
- ils ont dès lors également droit à être indemnisés des sommes de :
* 5 000 euros au titre des frais de concession et d'inhumation
* 25 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral et d'affection ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 avril 2023, le recteur de l'académie d'Amiens conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Delahaye, président-assesseur ;
- les conclusions de Mme Regnier, rapporteure publique ;
- les observations de Me Chartrelle pour les consorts B....
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B..., né le 15 août 2000, alors scolarisé au lycée professionnel Jean-Charles Peltier situé à Ham, a, le 30 mars 2017, été retrouvé sans vie dans un parc public à proximité du lycée. Ses parents, M. D... B... et Mme F... B... née E... ainsi que sa sœur, Mme A... B..., agissant tant en leur nom personnel qu'en leur qualité d'ayants droits C..., ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner l'État à les indemniser des préjudices qu'ils estiment avoir subis à raison, d'une part, des faits de harcèlement dont C... a été victime au sein de l'établissement, et d'autre part de son décès, à hauteur des sommes respectives de 10 000 et 80 000 euros. Par un jugement n° 2002728 du 7 juillet 2022, le tribunal a condamné l'État à leur verser la somme de 10 000 euros à raison des faits de harcèlement dont C... a été victime, et a rejeté le surplus des conclusions indemnitaires de leur demande. Les consorts B... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté leur demande indemnitaire au titre du décès C....
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes du 1. du D. du chapitre II du règlement intérieur du lycée Jean-Charles Peltier dans sa version en vigueur au cours de l'année scolaire 2016-2017 : " (...) Le régime de sortie fait l'objet d'une règlementation particulière qui est remise à chacun soit à l'inscription soit en début d'année scolaire. Les élèves autorisés par leurs représentants légaux à sortir le feront sous la responsabilité de ces derniers ou la leur s'ils sont majeurs. (...) Les élèves sont autorisés à sortir de l'établissement pendant les heures de permanence sauf avis contraire des représentants légaux. Dans ce cas, les représentants légaux devront transmettre un numéro de téléphone permettant de les joindre à toute heure de la journée. ". Ce même règlement comporte en outre des dispositions particulières concernant la classe de 3ème préprofessionnelle et prévoit pour ce qui est du " Régime des sorties " des élèves de cette classe que " Bien que faisant partie des effectifs du lycée, les élèves de la classe de 3ème Préprofessionnelle sont sous le régime collège et ne sont pas autorisés à sortir de l'établissement (...)- Elèves internes : ils doivent être présents dans l'établissement de la première heure de cours de la semaine à la dernière heure de cours de la semaine. Ils doivent se rendre en permanence et/ou au foyer à chaque heure de permanence et après le repas du midi, le soir de 17h30 à 18h00 et le mercredi après-midi sauf en cas de prise en charge par les représentants légaux. (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions, applicables au litige, que les élèves lycéens externes, demi-pensionnaires et internes sont autorisés à sortir de l'établissement pendant les heures de permanence sauf avis contraire des représentants légaux. Les élèves de la classe de 3e préprofessionnelle sont, quant à eux, tenus d'être présents au sein de l'établissement de la première à la dernière heure de cours de la semaine.
4. Il résulte de l'instruction que, lors d'une heure de permanence faisant suite à l'annulation d'un cours, M. C... B..., alors scolarisé en classe de seconde, a quitté le lycée avec d'autres élèves de sa classe le jeudi 30 mars 2017 entre 9 heures 30 et 10 heures 30. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'en sa qualité de lycéen, C... était autorisé à sortir de l'établissement pendant cette heure de permanence sauf avis contraire de ses parents, les appelants ne pouvant utilement se prévaloir sur ce point des dispositions du règlement de la résidence des internes qui n'ont pas vocation à régir les règles de sortie des élèves pendant le temps scolaire. Il ne résulte pas de l'instruction, contrairement à ce que soutiennent les parents C..., qu'ils auraient effectivement informé le lycée, lors de l'inscription de leur fils au titre de l'année scolaire 2016-2017, de leur opposition à toute sortie de ce dernier pendant les heures de permanence. En tout état de cause, à supposer même que l'établissement ait commis une faute en permettant à C... de sortir malgré l'opposition de ses représentants légaux, il ne résulte pas de l'instruction que cette faute, ou le manquement de l'établissement à son obligation de protection à l'égard C... à raison des faits de harcèlement dont il a été victime au sein du lycée, aient eu, en l'espèce, un lien direct de cause à effet avec le décès de celui-ci survenu dans un parc public des suites d'une blessure à l'arme blanche infligée volontairement par un autre élève mineur de l'établissement, lequel a été condamné à raison de ces faits à une peine de quinze ans de réclusion criminelle.
5. Il résulte de ce qui précède que les consorts B... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs conclusions indemnitaires présentées au titre du décès C....
Sur les frais liés à l'instance :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par les consorts B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête des consorts B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié aux consorts B... et à la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale de l'enseignement supérieur et de la recherche
Délibéré après l'audience publique du 25 février 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Benoît Chevaldonnet, président de chambre,
- M. Laurent Delahaye, président-assesseur,
- M. Guillaume Toutias, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 mars 2025.
Le président-rapporteur,
Signé : L. DelahayeLe président de chambre,
Signé : B. Chevaldonnet
La greffière,
Signé : A-S. Villette
La République mande et ordonne à la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
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N°22DA01901