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05/03/2025 | FRANCE | N°22DA01074

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 2ème chambre, 05 mars 2025, 22DA01074


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société d'exploitation du parc éolien Gentiane a demandé à la cour, d'une part, d'annuler l'arrêté du 9 mars 2020 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a refusé de l'autoriser à exploiter un parc éolien, composé de cinq éoliennes et un poste de livraison, situé sur le territoire de la commune de Blessy (Pas-de-Calais) et, d'autre part, de lui délivrer l'autorisation sollicitée.



Par un arrêt n°20DA00724 du 26 octobre 2021, la cour a annulé cet

arrêté, a accordé l'autorisation sollicitée par la société Gentiane et a enjoint au préfet du Pas-de-Cal...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exploitation du parc éolien Gentiane a demandé à la cour, d'une part, d'annuler l'arrêté du 9 mars 2020 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a refusé de l'autoriser à exploiter un parc éolien, composé de cinq éoliennes et un poste de livraison, situé sur le territoire de la commune de Blessy (Pas-de-Calais) et, d'autre part, de lui délivrer l'autorisation sollicitée.

Par un arrêt n°20DA00724 du 26 octobre 2021, la cour a annulé cet arrêté, a accordé l'autorisation sollicitée par la société Gentiane et a enjoint au préfet du Pas-de-Calais d'assortir cette autorisation des prescriptions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement.

Procédure devant la cour :

I.- Sous le n° 22DA01074, par une requête, enregistrée le 23 mai 2022, la commune de Blessy, représentée par Me Homehr, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 12 janvier 2022 du préfet du Pas-de-Calais pris pour l'exécution de cet arrêt du 26 octobre 2021 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué est entaché d'incompétence dès lors que le préfet ne justifie pas que son signataire disposait d'une délégation régulière à cet effet ;

- le dossier de demande d'autorisation déposé par la société Gentiane ne mentionne pas le montant des garanties financières prévues à l'article L. 516-1 du code de l'environnement ;

- il n'est pas établi que les capacités financières de la société Gentiane et que les garanties financières qu'elle est en mesure d'apporter soient suffisantes ;

- les prescriptions de l'arrêté attaqué relatives aux opérations de démantèlement sont insuffisantes au regard des dispositions de l'article R. 515-106 du code de l'environnement ; en effet, elles ne détaillent pas les mesures qui permettront de valoriser les déchets ; le processus de démantèlement qui sera suivi demeure imprécis ; aucun délai n'est imposé à la société pour procéder à ce démantèlement ;

- les prescriptions de l'arrêté attaqué ne sont pas suffisantes pour assurer la conformité de l'exploitation aux dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'environnement ; en effet, aucune prescription ne vient limiter la visibilité du projet depuis les différents monuments et sites classés situés aux alentours ; les prescriptions n'assurent pas une protection suffisante de la biodiversité du site et des zones naturelles situées à proximité ; elles ne concernent pas l'ensemble des espèces observées sur le site ; une étude complémentaire sur les chiroptères aurait dû être réalisée au préalable.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 24 octobre 2022 et 7 novembre 2022, la société Gentiane, représentée par Me Guiheux, conclut :

1°) à titre principal, au rejet de la requête de la commune de Blessy ;

2°) à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer en vue de procéder à la régularisation de l'autorisation attaquée en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement ;

3°) en tout état de cause, à ce qu'une somme 5 000 euros soit mise à la charge de la commune de Blessy au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par la commune de Blessy mettant en cause l'insuffisance du dossier de demande d'autorisation sont inopérants dès lors que seul est attaqué dans le cadre de la présente instance l'arrêté du 12 janvier 2022 énonçant les prescriptions applicables au projet ;

- le signataire de l'arrêté attaqué disposait d'une délégation régulière à cet effet ;

- le dossier de demande mentionne la nature et le montant des garanties financières ; le montant prévu est supérieur à celui désormais exigé par l'arrêté du 26 août 2021 ; le cas échéant, il appartiendrait à la cour de modifier directement les prescriptions de l'arrêté attaqué ou de surseoir à statuer dans l'attente de sa régularisation ;

- le dossier de demande présente de manière suffisamment précise le processus qui sera suivi pour le démantèlement des installations ;

- le dossier de demande comporte des indications circonstanciées relatives aux capacités financières de la société Gentiane ; par ailleurs, sa société-mère s'est engagée, en cas de non-obtention d'un accord de crédit bancaire, à financer en fonds propres l'ensemble des investissements nécessaires au projet ;

- le moyen tiré de l'insuffisance des prescriptions énoncées par l'arrêté attaqué n'est pas assorti de précisions suffisantes ; en tout état de cause, le paysage d'implantation ne présente pas de caractère particulièrement remarquable et les impacts du projet sont faibles, de sorte que l'atteinte aux lieux avoisinants n'est pas établie et qu'aucune mesure de réduction ou de compensation n'était nécessaire ; l'étude chiroptérologique a été complétée et a confirmé que les enjeux sont faibles sur le site ; les prescriptions retenues sont en tout état de cause suffisantes et de nature à rendre l'impact du projet négligeable, tant sur l'avifaune et que sur les chiroptères.

La requête et l'ensemble des pièces de la procédure ont été communiqués au préfet du Pas-de-Calais et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires qui n'ont pas produit de mémoire.

II.- Sous le n° 22DA01162, par une requête en tierce opposition et des mémoires, enregistrés les 2 juin 2022, 5 octobre 2022, 10 novembre 2022, 20 décembre 2022, 29 octobre 2024, 15 novembre 2024 et 10 décembre 2024, M. Y... F..., Mme BK... AS..., M. AN... AD..., Mme N... B..., M. AN... B..., M. AV... AE..., Mme BB... H..., Mme BT... W..., Mme BQ... O..., M. AQ... AB..., Mme AL... AB..., M. BJ... AU..., Mme BP... AU..., Mme S... AF..., Mme P... BR..., M. AR... Q..., M. AY... BV... BX..., M. AI... AG..., M. X... C..., M. BC... G..., Mme BL... G..., Mme BU... AW..., Mme A... BZ... BI..., M. BK... I..., M. U... AJ..., Mme AT... AJ... BY..., M. D... BA..., Mme R... AK..., M. T... BI..., M. AZ... V..., M. AH... J..., Mme BH... AO..., M. AM... AP..., M. E... BN..., Mme BM... BW..., Mme AX... Z..., M. M... K..., Mme S... AC..., M. BS... BF..., Mme AA... BD... et M. BO... L..., qui doivent être regardés en application de l'article R. 411-5 du code de justice administrative comme ayant désigné M. Y... F... comme représentant unique, représentés par Me Frenoy, demandent à la cour :

1°) de déclarer non avenu son arrêt du 26 octobre 2021 ;

2°) à titre principal, de rejeter la requête formée par la société Gentiane contre l'arrêté du 9 mars 2020 du préfet du Pas-de-Calais ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler l'autorisation environnementale délivrée par la cour par l'arrêt du 26 octobre 2021 ;

4°) d'annuler en outre l'arrêté du 12 janvier 2022 du préfet du Pas-de-Calais ;

5°) de mettre en tout état de cause à la charge de l'Etat et de la société Gentiane le versement d'une somme de 4 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la cour est compétente pour connaître de la tierce opposition qu'ils forment à l'encontre de l'autorisation environnementale qu'elle a délivrée par son arrêt du 26 octobre 2021 ;

- cet arrêt n'ayant fait l'objet d'aucun affichage mentionnant de manière régulière et intelligible les voies et délais de recours et l'arrêté du 12 janvier 2022 du préfet du Pas-de-Calais ayant été affiché seulement le 2 février 2022, la requête, enregistrée au greffe de la cour le 2 juin 2022, n'est pas tardive ;

- ils ont intérêt à agir du seul fait de leur lien de voisinage avec le projet et de l'absence de tout relief important ou boisement significatif de nature à atténuer son impact visuel depuis leurs habitations ;

- le préfet du Pas-de-Calais a pu refuser à bon droit le projet par son arrêté du 9 mars 2020 en raison de la méconnaissance des dispositions des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement et compte tenu de la diminution de l'espace de respiration visuelle qu'il emporte ainsi que de sa covisibilité avec des monuments et sites protégés ;

- par substitution de motifs, l'arrêté du 9 mars 2020 aurait pu être fondé sur la méconnaissance par le projet des articles R. 111-26 du code de l'urbanisme et L. 110-1 du code de l'environnement ; en effet, l'évaluation environnementale est insuffisante s'agissant des impacts du projet sur l'avifaune et les chiroptères ; l'impact négatif du projet a été sous-estimé ; les mesures d'évitement, réduction et compensation retenues sont insuffisantes ;

- par substitution de motifs, l'arrêté du 9 mars 2020 aurait pu être fondé sur la méconnaissance par le projet de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ; en effet, le projet porte atteinte à la qualité des lieux environnants compte tenu des phénomènes de saturation, d'encerclement et de surplomb qu'il va contribuer à renforcer ;

- l'autorisation du projet par l'arrêt de la cour du 26 octobre 2021 méconnaît l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme dès lors que l'autorité gestionnaire de la voie publique sur laquelle donnent les futures voies d'accès aux éoliennes n'a pas été consultée ;

- elle méconnaît les dispositions du décret n° 2017-626 du 25 avril 2017 dès lors que toutes les modalités de dématérialisation prévues par ce décret n'ont pas été respectées lors de l'enquête publique ;

- l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, dans sa version issue de l'arrêté du 6 novembre 2014, est illégal en tant qu'il limite, d'une part, les opérations de démantèlement à un rayon de 10 mètres autour des éoliennes et des postes de livraison et, d'autre part, les opérations d'excavation à une profondeur d'un mètre ; il en résulte que les avis des propriétaires et de l'autorité locale compétente en matière d'urbanisme sur l'état dans lequel le site devra être remis lors de l'arrêt définitif de l'installation n'ont pu être recueillis conformément aux dispositions de l'article R. 512-6 du code de l'environnement ;

- l'autorisation du projet méconnaît les articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement dès lors que, compte tenu de son impact sur différentes espèces protégées, dont les chiroptères, aucune dérogation à l'interdiction de la destruction, l'altération ou la dégradation de ces espèces et de leurs habitats n'a été préalablement obtenue et dès lors qu'aucune des conditions de délivrance d'une telle dérogation n'est en l'espèce remplie ; en particulier, l'existence d'un impact même faible suffit à rendre obligatoire l'obtention de cette dérogation ;

- elle méconnaît les dispositions des articles R. 111-26 du code de l'urbanisme et L. 110-1 du code de l'environnement pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment ;

- elle méconnaît les dispositions des articles R. 111-27 du code de l'urbanisme et L. 511-1 du code de l'environnement pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment ;

- elle méconnaît l'article L. 181-3 du code de l'environnement dès lors que ne sont garanties ni la réalisation effective des mesures d'évitement, de réduction, de compensation et d'accompagnement présentées dans le dossier de demande d'autorisation environnementale, ni leur efficacité ;

- l'arrêté du 12 janvier 2022 du préfet du Pas-de-Calais est entaché d'incompétence dès lors que son signataire ne disposait pas d'une délégation régulière à cet effet ;

- les prescriptions qu'il énonce ne permettent pas de garantir le respect des dispositions des articles R. 111-26 et R. 111-27 du code de l'urbanisme ;

- il est illégal par voie de conséquence de l'illégalité de l'autorisation environnementale délivrée par l'arrêt de la cour du 26 octobre 2021 ;

- dès lors que le délai de cristallisation prévu par l'article R. 611-7-2 du code de justice administrative a le caractère d'un délai franc et que le premier mémoire en défense de la société Gentiane leur a été communiqué le 4 août 2022, les moyens nouveaux soulevés dans leur mémoire complémentaire enregistré au greffe de la cour le 5 octobre 2022 sont recevables ;

- dès lors qu'une décision implicite de rejet de la demande d'autorisation environnementale de la société Gentiane était intervenue en application des dispositions des articles R. 181-41 et R. 181-42 du code de l'environnement, l'annulation par l'arrêt de la cour du 26 octobre 2021 de l'arrêté du 9 mars 2020 a eu pour effet de remettre en vigueur la précédente décision implicite de rejet et la cour ne pouvait donc plus se ressaisir de la demande initiale et délivrer l'autorisation sollicitée ;

- l'autorisation du projet par l'arrêt de la cour du 26 octobre 2021 méconnaît les articles R. 181-32 du code de l'environnement, L. 6352-1 du code des transports et R. 425-9 du code de l'urbanisme dès lors que l'accord préalable du ministre chargé de l'aviation civile n'a pas été sollicité, que cet avis présente le caractère d'un avis conforme, qu'il ne peut prendre une forme implicite et, par suite, que l'autorisation délivrée est entachée d'incompétence ; ce vice ne présente pas de caractère régularisable ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article R. 122-5 du code de l'environnement dès lors que l'étude d'impact environnementale est insuffisante ; en effet, elle ne tient pas compte des effets cumulés du projet litigieux et du projet de parc éolien de la chaussée de Brunehaut situé à proximité sur l'avifaune et les chiroptères ; les inventaires concernant l'avifaune et les chiroptères sont insuffisants ; l'étude d'impact ne tient pas compte des effets de sillage générés par les parcs éoliens voisins et susceptibles d'affecter la rentabilité économique du projet et son intérêt au regard de l'objectif d'utilisation rationnelle de l'énergie ; elle ne tient pas davantage compte des interactions et des risques d'accidents du fait des parcs situés à proximité ;

- elle méconnaît les dispositions des articles 7 du décret n° 2014-450 du 2 mai 2014, R. 411-13 du code de l'environnement et 2 de l'arrêté du 19 février 2007 dès lors que le dossier de demande d'autorisation ne comporte aucun des éléments requis pour la délivrance d'une dérogation au titre des dispositions du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement ;

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 181-3 du code de l'environnement et L. 311-5 du code de l'énergie dès lors que les capacités financières de la société pétitionnaire ne sont pas décrites de façon suffisamment précise et certaine au sein du dossier de demande d'autorisation, ni justifiées ;

- elle est illégale dès lors que l'étude acoustique jointe au dossier d'étude d'impact n'analyse pas les effets cumulés engendrés par la présence à proximité du projet du futur parc éolien de la chaussée de Brunehaut ;

- elle méconnaît les dispositions des articles R. 123-8 du code de l'environnement et L. 111-5 du code de l'urbanisme dès lors que la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers n'a pas été consultée alors que le projet a pour effet de réduire les surfaces agricoles ;

- elle méconnaît les articles R. 123-9 et R. 123-11 du code de l'environnement dès lors que l'arrêté prescrivant l'enquête publique et l'avis d'enquête publique ne mentionnent pas précisément les caractéristiques principales du projet, ce qui a eu pour effet d'induire en erreur le public sur la nature exacte de celui-ci ;

- elle méconnaît les dispositions des articles R. 111-2 du code de l'urbanisme et L. 511-1 du code de l'environnement compte tenu des nuisances sonores et visuelles, notamment du fait du balisage lumineux, générées par le projet ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 220-1 du code de l'environnement et le principe d'égalité entre les citoyens compte tenu de la surdensité constatée dans le secteur et qu'elle contribue à aggraver.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 3 août 2022, 17 octobre 2022, 29 novembre 2022, 27 janvier 2023 et 9 décembre 2024, la société Gentiane, représentée par Me Antoine Guiheux, conclut :

1°) à titre principal, au rejet de la requête de M. F... et autres ;

2°) à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer en vue de procéder à la régularisation de l'autorisation attaquée en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement ;

3°) en tout état de cause, à ce qu'une somme 5 000 euros soit mise à la charge solidaire des requérant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêt de la cour du 26 octobre 2021 a été affiché en mairie dès le 24 novembre 2021 et pendant une durée d'un mois ; l'affichage comporte la mention des voies et délais de recours ; la circonstance tirée de ce qu'il mentionne à tort le tribunal administratif de Lille est sans incidence sur l'opposabilité du délai de recours ; l'arrêt a en outre fait l'objet d'une publication sur le site internet de la préfecture le 1er décembre 2021 ; le délai de recours à l'égard des tiers a donc commencé à courir à compter de cette dernière date ; la requête en tierce opposition a été enregistrée au greffe de la cour, le 2 juin 2022, après expiration du délai de recours ; elle est, dès lors, tardive et, par suite, irrecevable ;

- le paysage d'implantation ne présente pas de caractère particulièrement remarquable et les impacts du projet, incluant les effets cumulés avec le parc de la chaussée de Brunehaut située à proximité, sont faibles, de sorte que l'atteinte aux lieux avoisinants n'est pas établie et qu'aucune mesure de réduction ou de compensation n'était nécessaire ; c'est, dès lors, à bon droit que la cour, dans son arrêt du 26 octobre 2021, a accueilli le moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise par le préfet du Pas-de-Calais au regard des dispositions des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement et a annulé le refus d'autorisation lui ayant été opposé ;

- les requérants ne peuvent utilement solliciter, en lieu et place de l'administration, une substitution des motifs ayant fondé la décision de refus du 9 mars 2020 ; en tout état de cause, les études sur les chiroptères et l'avifaune ont été complétées et ont confirmé que les enjeux sont faibles sur le site et des mesures rigoureuses d'évitement, de réduction et de compensation ont été retenues, de sorte que le projet ne méconnaît pas les dispositions des articles R. 111-26 du code de l'urbanisme et L. 110-1 du code de l'environnement ; en outre, les éoliennes projetées ne produiront aucun effet d'encerclement sur les villages alentours et les dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ne sont, dès lors, pas méconnues ;

- l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme n'est pas applicable aux autorisations environnementales ; en tout état de cause, l'accès au site d'implantation n'implique pas de modification de la voie publique ; le gestionnaire de la voirie n'avait dès lors pas à être consulté ; à supposer qu'il ait été obligatoire, son absence n'a exercé aucune une influence sur le sens de la décision et n'a pas privé le public d'une information substantielle ;

- conformément aux articles R. 123-9, R. 123-10 et R. 123-13 du code de l'environnement, un registre dématérialisé a été mis à disposition du public pendant toute la durée de l'enquête publique ;

- l'arrêté du 26 août 2011 n'est pas illégal en tant qu'il limite les opérations de démantèlement et de remise en état du site à un rayon de 10 mètres autour des éoliennes ; par suite, l'avis des propriétaires situés au-delà d'un périmètre de 10 mètres autour de chacune des éoliennes n'avait pas à être sollicité ;

- compte tenu des impacts très faibles du projet sur les chiroptères et l'avifaune, tels qu'identifiés par l'étude environnementale et en tenant y compris compte des effets cumulés avec le parc de la chaussée de Brunehaut situé à proximité, et des mesures d'évitement et de réduction retenues, aucune demande de dérogation au titre des dispositions du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement n'était nécessaire ;

- le projet ne méconnaît pas les dispositions des articles R. 111-26 du code de l'urbanisme et L. 110-1 du code de l'environnement pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment ;

- le projet ne méconnaît pas les dispositions des articles R. 111-27 du code de l'urbanisme et L. 511-1 du code de l'environnement pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment ;

- l'autorité préfectorale a repris, à titre de prescriptions dans l'arrêté du 12 janvier 2022, les mesures d'évitement, réduction, compensation et accompagnement qu'elle s'est engagée à mettre en œuvre et auxquelles elle sera tenue de se conformer, de sorte que les dispositions de l'article L. 181-3 du code de l'environnement ne sont pas méconnues ;

- le signataire de l'arrêté du 12 janvier 2022 du préfet du Pas-de-Calais disposait d'une délégation régulière à cet effet ;

- le moyen tiré de ce que les prescriptions énoncées par l'arrêté attaqué ne permettraient pas de garantir le respect des dispositions des articles R. 111-26 et R. 111-27 du code de l'urbanisme n'est pas assorti de précisions suffisantes ;

- le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'autorisation environnementale qui lui a été délivrée par la cour le 26 octobre 2021 doit être écarté par voie de conséquence ;

- la décision implicite de rejet intervenue le 25 février 2020 a été abrogée ou remplacée par l'arrêté du 9 mars 2020 du préfet du Pas-de-Calais et la cour, après avoir annulé cet arrêté, pouvait régulièrement statuer sur la demande d'autorisation environnementale et décider de la délivrer ;

- le ministre chargé de l'aviation civile a été régulièrement saisi pour avis ; l'absence de réponse de sa part doit, conformément à l'article R. 181-33 du code de l'environnement, conduire à le regarder comme ayant émis un avis favorable ;

- l'étude d'impact environnementale n'est affectée d'aucune insuffisance ; en particulier, le projet du parc éolien de la Chaussée de Brunehaut n'a donné lieu à un avis de l'autorité environnementale que le 16 juillet 2018, soit postérieurement au dépôt de la demande en litige, et n'avait dès lors pas à être pris en compte ; en tout état de cause, les effets cumulés des deux projets n'ont pas été ignorés ; les études sur les chiroptères et l'avifaune ont été réalisées sur le cycle biologique complet de ces espèces et ont été complétées pour donner suite aux observations de l'autorité environnementale ; les effets de sillage générés par les parcs à proximité, dès lors qu'ils ne portent pas atteinte à un intérêt protégé au titre de l'article L. 511-1 du code de l'environnement, n'avaient pas à être analysés ; les effets dominos ont été pris en compte dans l'étude de dangers ;

- le dossier de demande comporte des indications circonstanciées relatives aux capacités financières de la société Gentiane ; par ailleurs, sa société-mère s'est engagée, en cas de non-obtention d'un accord de crédit bancaire, à financer en fonds propres l'ensemble des investissements nécessaires au projet ;

- dès lors que le projet du parc éolien de la Chaussée de Brunehaut n'avait pas à être pris en compte, l'étude acoustique n'est pas insuffisante pour ne pas analyser les effets cumulés des deux parcs ;

- la surface agricole consommée par le projet étant particulièrement faible, la saisine de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers n'était pas requise et l'absence d'avis au dossier d'enquête publique n'a pas privé le public d'une information substantielle ;

- l'arrêté prescrivant l'enquête publique et l'avis d'enquête publique comportent des mentions suffisantes ayant mis le public à même de comprendre la nature et l'ampleur du projet ;

- les émissions sonores respecteront les émergences réglementaires ; des prescriptions ont été énoncées à cet effet ; le balisage n'est pas de nature à entraîner des inconvénients excessifs pour les riverains ; les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ne sont, dès lors, pas méconnues ;

- l'impact du projet sur la qualité de l'air est positif ; le phénomène de saturation invoqué par les requérants n'est pas établi ; les dispositions de l'article L. 220-1 du code de l'environnement ne sont, dès lors, pas méconnues.

La requête et l'ensemble des pièces de la procédure ont été communiqués au préfet du Pas-de-Calais et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires qui n'ont pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'énergie ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code des transports ;

- le décret n° 2014-450 du 2 mai 2014 ;

- le décret n° 2017-626 du 25 avril 2017 ;

- l'arrêté du 25 juillet 1990 relatif aux installations dont l'établissement à l'extérieur des zones grevées de servitudes aéronautiques de dégagement est soumis à autorisation ;

- l'arrêté du 19 février 2007 fixant les conditions de demande et d'instruction des dérogations définies au 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement portant sur des espèces de faune et de flore sauvages protégées ;

- l'arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent ;

- l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- l'arrêté du 6 novembre 2014 modifiant l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement et l'arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent ;

- l'arrêté du 11 juillet 2023 modifiant l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guillaume Toutias, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Caroline Regnier, rapporteure publique,

- les observations de Me Frenoy, représentant M. F... et autres,

- et les observations de Me Rochard, représentant la société Gentiane.

Une note en délibéré présentée pour M. F... et autres a été enregistrée le 13 février 2025.

Considérant ce qui suit :

1. La société d'exploitation du parc éolien Gentiane a sollicité, le 22 janvier 2018, une autorisation environnementale pour la réalisation d'un parc éolien composé de cinq machines et d'un poste de livraison d'une puissance totale de 11,75 MW situé sur le territoire de la commune de Blessy (Pas-de-Calais). Par un arrêté du 9 mars 2020, le préfet du Pas-de-Calais a refusé l'autorisation environnementale sollicitée. Par un arrêt n° 20DA00724 du 26 octobre 2021, la cour, sur saisine de la société Gentiane, a annulé cet arrêté, a accordé l'autorisation environnementale sollicitée et a enjoint au préfet d'assortir cette autorisation des prescriptions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement. Par un arrêté du 12 janvier 2022, le préfet du Pas-de-Calais a fixé ces prescriptions. Par sa requête n° 22DA01162 susvisée, un ensemble de riverains fait tierce opposition à l'arrêt de la cour. Il demande en outre l'annulation de l'arrêté du 12 janvier 2022 du préfet du Pas-de-Calais pris pour son application. Par sa requête susvisée n° 22DA01074, la commune de Blessy conclut également à l'annulation de ce même arrêté préfectoral. Les requêtes de M. Y... F... et autres et de la commune de Blessy présentant à juger des questions semblables et étant pour partie dirigées contre la même décision, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la tierce opposition à l'arrêt de la cour du 26 octobre 2021 :

En ce qui concerne l'office du juge :

2. D'une part, lorsque le juge administratif annule un refus d'autoriser une installation classée pour la protection de l'environnement et accorde lui-même l'autorisation aux conditions qu'il fixe ou, le cas échéant, en renvoyant le bénéficiaire devant le préfet pour la fixation de ces conditions, la voie de la tierce opposition est ouverte contre cette décision. Afin de garantir le caractère effectif du droit au recours des tiers en matière d'environnement et eu égard aux effets sur les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement de la décision juridictionnelle délivrant une autorisation d'exploiter, la voie de la tierce opposition est, dans cette configuration particulière, ouverte aux tiers qui justifieraient d'un intérêt suffisant pour demander l'annulation de la décision administrative d'autorisation, sans qu'ils aient à justifier d'un droit lésé. Le tiers peut invoquer à l'appui de sa tierce opposition tout moyen.

3. D'autre part, il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles relatives à la forme et la procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation, et d'appliquer les règles de fond applicables au projet en cause en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme, qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation. Lorsqu'il relève que l'autorisation environnementale contestée devant lui méconnaît une règle de fond applicable à la date à laquelle il se prononce, le juge peut, dans le cadre de son office de plein contentieux, lorsque les conditions sont remplies, modifier ou compléter l'autorisation environnementale délivrée afin de remédier à l'illégalité constatée, ou faire application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement.

En ce qui concerne l'annulation par l'arrêt du 26 octobre 2021 de l'arrêté du 9 mars 2020 portant refus d'autorisation environnementale :

4. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I.- L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas. / (...) ". Figurent, parmi les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, la commodité du voisinage, la protection de la nature, de l'environnement et des paysages ainsi que la conservation des sites, des monuments et des éléments du patrimoine archéologique.

S'agissant de l'atteinte aux paysages :

5. Il résulte de l'instruction que le projet présenté par la société Gentiane, consistant en l'édification d'un parc éolien composé d'un poste de livraison et de cinq machines dont la hauteur en bout de pale culminera entre 184 et 189 mètres, sera implanté sur le territoire de la commune de Blessy (Pas-de-Calais). Le site, situé au sud de cette commune, est délimité, au nord, par l'autoroute A26 et, au sud, par la route départementale RD341, dite " chaussée de Brunehaut ". Le secteur, assurant la transition entre les plateaux du haut pays d'Aire et de la plaine de la Lys, présente un caractère principalement rural et est occupé par de vastes parcelles agricoles ouvertes, de type openfields, ponctuées par de rares boisements et haies végétales. En outre, il s'insère dans un contexte éolien déjà fortement marqué et supporte aussi une occupation de type industrielle, puisqu'une carrière d'exploitation de marnes est située juste à l'est du terrain d'assiette du projet. Il en résulte qu'en dépit de l'attrait que pourrait présenter le relief légèrement vallonné du secteur, les paysages préexistants, largement anthropisés, ne présentent pas par eux-mêmes de caractère particulièrement remarquable. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction, notamment des nombreux photomontages joints au dossier de demande d'autorisation, que le projet, qui prévoit en particulier une implantation en grappe de nature à atténuer son impact visuel, soit, par lui-même ou en raison de ses effets cumulés aux parcs existants, autorisés ou en projet, dont celui dit " de la chaussée de Brunehaut ", situé à proximité immédiate, autorisé par l'arrêt de la cour n° 22DA02122 du 1er février 2024, de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des paysages.

S'agissant de la commodité du voisinage et de l'atteinte aux villages alentours :

6. Il résulte de l'instruction que le site d'implantation du projet est entouré par plusieurs villages à caractère rural, notamment Blessy, Marthes, Estrée-Blanche, Enguinegatte et Thérouane. Si cette localisation est de nature à créer des vues directes sur le projet depuis les propriétés qui sont situées en bordure de ces villages et s'ouvrent sur le secteur agricole d'implantation, d'une part, les éoliennes seront implantées à bonne distance des habitations, la plus proche étant située à 750 mètres et le bourg le plus proche, celui de Blessy, étant situé à environ un kilomètre, et, d'autre part, le relief et le couvert végétal des bourgs et habitations est de nature à atténuer ces vues directes. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que le projet, même combiné avec les autres parcs éoliens déjà existants, autorisés ou en projet, dont celui dit " de la chaussée de Brunehaut ", situé à proximité immédiate, autorisé par l'arrêt de la cour n° 22DA02122 du 1er février 2024, soit de nature à occasionner une saturation visuelle et à rendre l'activité éolienne omniprésente depuis les villages considérés. En effet, il ressort de l'étude d'impact jointe au dossier de demande d'autorisation soumis à l'enquête publique, dont les analyses ne sont sur ce point pas sérieusement contestées, que la ligne d'horizon, même après construction du projet en litige et de celui de la chaussée de Brunehaut, restera libre de toute éolienne sur 225° à Blessy, 100° à Estrée-Blanche, 115° à Enguinegatte et 166° à Thérouane. Enfin, si les éoliennes de ces deux projets seront visibles depuis le cœur même des villages, les vues au cours de la déambulation dans les bourgs resteront néanmoins intermittentes et elles ne créeront aucun effet de surplomb ou d'écrasement tel qu'il les rendrait omniprésentes. Il s'ensuit que le projet litigieux ne peut être regardé comme présentant, par lui-même ou en raison de ses effets cumulés aux parcs existants, autorisés ou en projet, des inconvénients pour la commodité du voisinage ou comme portant atteinte au caractère ou à l'intérêt des villages avoisinants.

S'agissant de l'atteinte aux monuments et sites classés environnants :

7. Il résulte de l'instruction que le site d'implantation du projet est situé à l'extrême ouest du bassin minier et à 9,7 kilomètres du beffroi d'Aire-sur-la-Lys, lesquels sont tous deux inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l'organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO). En outre, une dizaine d'autres monuments historiques inscrits ou classés sont situés dans un périmètre de six kilomètres autour du site, en particulier le château de Crémesnil à Estrée-Blanche et l'église Saint-Quentin à Aire-sur-la-Lys. Si le projet est implanté dans le cône de vue depuis le château de Crémesnil qui avait été retenu par le service départemental de l'architecture et du patrimoine au moment de l'élaboration du dernier schéma régional éolien, il résulte toutefois de l'instruction que ce cône est entièrement obstrué par le couvert végétal entourant le château. Le projet, qui sera éloigné de plus de deux kilomètres, ne sera pas visible depuis le monument. Les covisibilités entre le projet et le monument et son parc ne seront pas préjudiciables à la conservation de ceux-ci et à leur mise en valeur. Si les éoliennes du projet, d'une part, et le beffroi ou l'église Saint-Quentin d'Aire-sur-la-Lys, d'autre part, sont susceptibles de se trouver dans une situation de covisibilité, il résulte de l'instruction, notamment des photomontages joints au dossier de demande d'autorisation, que, du fait en particulier de la distance relativement importante les séparant, la concurrence faite par les éoliennes ne sera pas de nature à porter atteinte à l'attrait ou à la conservation de ces deux monuments. Également, dès lors qu'il ne sera visible que dans le lointain et n'occupera qu'un angle très réduit, le projet n'aura pas davantage pour effet de dénaturer les panoramas depuis le beffroi d'Aire-sur-la-Lys ou les biens du bassin minier, dont la vocation industrielle lui ayant valu l'inscription sur la liste de l'UNESCO n'est au demeurant pas incompatible avec le développement de l'activité éolienne dans ses alentours. Enfin, il résulte de l'instruction, notamment des photomontages joints au dossier de demande d'autorisation que les éoliennes du projet ne s'implanteront pas dans l'axe de la rue principale d'Estrée-Blanche et que leur covisibilité avec l'église de ce village n'est pas davantage de nature à porter atteinte à l'attrait ou à la conservation de ce monument. Il s'ensuit que le projet, y compris en tenant compte de ses effets cumulés avec ceux du parc dit " de la chaussée de Brunehaut " qui s'implantera dans sa continuité immédiate, ne peut être regardé comme présentant des inconvénients pour la conservation des sites, des monuments et des éléments du patrimoine archéologique.

8. Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que, par l'arrêt attaqué, la cour a estimé que le projet ne porterait pas d'atteinte excessive aux paysages, à la commodité du voisinage, aux villages et aux monuments environnants et que, par suite, l'arrêté du 9 mars 2020 méconnaissait les dispositions précitées des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement. En outre, les requérants ne peuvent utilement soutenir que la cour aurait dû procéder à une substitution de motifs et fonder le refus d'autorisation environnementale opposé au projet de la société Gentiane sur la méconnaissance des articles R. 111-26 et R. 111-27 du code de l'urbanisme dès lors que le préfet du Pas-de-Calais ne l'avait saisi d'aucun moyen en ce sens dans le cadre de l'instance et qu'il n'entre pas dans l'office du juge d'y procéder d'office. Il s'ensuit que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'arrêt attaqué, la cour a annulé l'arrêté du 9 mars 2020 du préfet du Pas-de-Calais refusant la délivrance de l'autorisation environnementale sollicitée par la société Gentiane.

En ce qui concerne l'autorisation environnementale délivrée par la cour :

S'agissant de la compétence de la cour :

9. D'une part, aux termes de l'article R. 181-41 du code de l'environnement : " Le préfet statue sur la demande d'autorisation environnementale dans les deux mois à compter du jour de l'envoi par le préfet du rapport et des conclusions du commissaire enquêteur au pétitionnaire en application de l'article R. 123-21, sous réserve des dispositions de l'article R. 214-95, ou dans le délai prévu par le calendrier du certificat de projet lorsqu'un tel certificat a été délivré et que l'administration et le pétitionnaire se sont engagés à le respecter. / (...) ". Aux termes de l'article R. 181-42 du même code : " Le silence gardé par le préfet à l'issue des délais prévus par l'article R. 181-41 pour statuer sur la demande d'autorisation environnementale vaut décision implicite de rejet ".

10. D'autre part, dans le cadre d'un litige relevant, comme en l'espèce, d'un contentieux de pleine juridiction, le juge administratif a le pouvoir d'autoriser la création et le fonctionnement d'une installation classée pour la protection de l'environnement en l'assortissant des conditions qu'il juge indispensables à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 de ce code. Il a, en particulier, le pouvoir d'annuler la décision par laquelle l'autorité administrative a refusé l'autorisation sollicitée puis, après avoir, si nécessaire, régularisé ou complété la procédure, d'accorder lui-même cette autorisation aux conditions qu'il fixe ou, le cas échéant, en renvoyant le bénéficiaire devant le préfet pour la fixation de ces conditions.

11. Même à supposer que la demande d'autorisation environnementale présentée par la société Gentiane le 22 janvier 2018 ait donné lieu, dans les conditions prévues aux articles R. 181-41 et R. 181-42 du code de l'environnement précitées, à une décision implicite de rejet, cette décision a été substituée par l'arrêté pris par le préfet du Pas-de-Calais le 9 mars 2020 et n'a pas été remise en vigueur du simple fait de l'annulation de cet arrêté, prononcée par l'arrêt de la cour du 26 octobre 2021. Il s'ensuit qu'après avoir annulé l'arrêté du 9 mars 2020 au seul motif de l'illégalité du motif de refus sur lequel le préfet du Pas-de-Calais s'était fondé, la cour, en application des principes rappelés au point 10, pouvait régulièrement se saisir de la demande initialement présentée par la société Gentiane et délivrer l'autorisation environnementale sollicitée. Le moyen tiré de ce qu'elle aurait, ce faisant, méconnu sa compétence et entaché l'autorisation qu'elle a délivrée d'incompétence doit, dès lors, être écarté.

S'agissant de la procédure d'instruction de la demande d'autorisation :

Quant aux avis sur l'état dans lequel le site devra être remis :

12. Aux termes de l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement : " Lorsque l'autorisation environnementale concerne un projet relevant du 2° de l'article L. 181-1, le dossier de demande est complété dans les conditions suivantes. / I.- Le dossier est complété des pièces et éléments suivants : / (...) / 11° Pour les installations à implanter sur un site nouveau, l'avis du propriétaire, lorsqu'il n'est pas le pétitionnaire, ainsi que celui du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme, sur l'état dans lequel devra être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation ; ces avis sont réputés émis si les personnes consultées ne se sont pas prononcées dans un délai de quarante-cinq jours suivant leur saisine par le pétitionnaire ; / (...) ". A cet égard, l'article R. 515-106 du même code dispose que : " Les opérations de démantèlement et de remise en état d'un site après exploitation comprennent : / 1° Le démantèlement des installations de production ; / 2° L'excavation d'une partie des fondations ; / 3° La remise en état des terrains sauf si leur propriétaire souhaite leur maintien en l'état ; / 4° La valorisation ou l'élimination des déchets de démolition ou de démantèlement dans les filières dûment autorisées à cet effet. / Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe les conditions techniques de remise en état ".

13. Aux termes de l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 susvisé : " I.- Les opérations de démantèlement et de remise en état prévues à l'article R. 515-106 du code de l'environnement comprennent : / - le démantèlement des installations de production d'électricité, des postes de livraison ainsi que les câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison ; / - l'excavation de la totalité des fondations jusqu'à la base de leur semelle, à l'exception des éventuels pieux. Par dérogation, la partie inférieure des fondations peut être maintenue dans le sol sur la base d'une étude adressée au préfet démontrant que le bilan environnemental du décaissement total est défavorable, sans que la profondeur excavée ne puisse être inférieure à 2 mètres dans les terrains à usage forestier au titre du document d'urbanisme opposable et 1 m dans les autres cas. Les fondations excavées sont remplacées par des terres de caractéristiques comparables aux terres en place à proximité de l'installation ; / - la remise en état du site avec le décaissement des aires de grutage et des chemins d'accès sur une profondeur de 40 centimètres et le remplacement par des terres de caractéristiques comparables aux terres à proximité de l'installation, sauf si le propriétaire du terrain sur lequel est sise l'installation souhaite leur maintien en l'état. / (...) ".

14. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, en imposant un démantèlement des installations dans un rayon de 10 mètres autour des éoliennes et des postes de livraison et sur une profondeur minimale d'un mètre lorsque le terrain est, comme en l'espèce, à usage agricole, les dispositions de l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 n'ont pas méconnu celles de l'article R. 515-106 du code de l'environnement. Il s'ensuit que, pour l'application des dispositions du 11° du I. de l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement précitées, la société Gentiane avait seulement à verser à son dossier les avis des propriétaires des parcelles situées dans le périmètre de 10 mètres autour de chacune des éoliennes projetées et du poste de livraison. Il n'est ni établi ni même allégué que ces avis n'auraient pas été joints au dossier de demande. Il résulte même au contraire de l'instruction, notamment de l'étude d'impact, que la société Gentiane a en réalité contractualisé non seulement avec les propriétaires des parcelles sur lesquelles les éoliennes seront implantées mais également avec tous les autres propriétaires alentours, dont les parcelles sont incluses dans le périmètre d'ensemble du projet. Le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de l'arrêté du 26 août 2011 et de la méconnaissance, par voie de conséquence, des dispositions du 11° du I. de l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement doit, dès lors, être écarté.

Quant à la présentation des capacités financières :

15. Aux termes de l'article L. 181-27 du code de l'environnement : " L'autorisation prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en œuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité ". En outre, l'article L. 181-3 du même code prévoit que, en tant qu'elle vaut également autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité au sens de l'article L. 311-1 du code de l'énergie, l'autorisation environnementale doit prendre en compte les critères mentionnés à l'article L. 311-5 du code précité, parmi lesquels figure : " Les capacités techniques, économiques et financières du candidat ou du demandeur ". Aux termes de l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement : " Lorsque l'autorisation environnementale concerne un projet relevant du 2° de l'article L. 181-1, le dossier de demande est complété dans les conditions suivantes. / I.- Le dossier est complété des pièces et éléments suivants : / (...) / 3° Une description des capacités techniques et financières mentionnées à l'article L. 181-27 dont le pétitionnaire dispose, ou, lorsque ces capacités ne sont pas constituées au dépôt de la demande d'autorisation, les modalités prévues pour les établir au plus tard à la mise en service de l'installation ; / (...) ".

16. Il résulte de l'instruction que la société Gentiane a indiqué dans sa demande d'autorisation que le montant total de l'investissement à réaliser s'élèverait à 19 375 000 euros et que celui-ci, à l'instar des huit autres parcs éoliens déjà développés par la société par actions simplifiée Intervent qui est son associée unique, serait financé à hauteur de 70 % par un emprunt bancaire et, pour le surplus, en fonds propres. Elle a joint à son dossier un plan de financement faisant apparaître, pour chacune des vingt années d'exploitation prévues, le chiffre d'affaires prévisionnel, les charges d'exploitation et l'amortissement de la dette. Dès lors, les moyens tirés de l'insuffisante présentation des capacités financières et de la méconnaissance des articles L. 181-3 et L. 181-27 du code de l'environnement et L. 311-5 du code de l'énergie doivent être écartés.

Quant à l'absence de demande de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées :

17. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'environnement : " Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits : / 1° (...) la mutilation, la destruction, (...), la perturbation intentionnelle, (...) d'animaux de ces espèces (...) ; / (...) / 3° La destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces (...) ". Aux termes de l'article L. 411-2 du même code : " I.- Un décret en Conseil d'État détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : / (...) / 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1 (...) ". Les conditions de demande et d'instruction des dérogations sont fixées par l'arrêté du 19 février 2007 susvisé, pris en application de l'article R. 411-13 du code de l'environnement. En outre, l'article L. 181-2 du code de l'environnement dispose que l'autorisation environnementale, lorsque le projet y est soumis ou le nécessite, tient lieu de la dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats en application du 4° du I. de l'article L. 411-2. Dans cette hypothèse, le dossier de demande d'autorisation environnementale doit être complété des pièces énumérées à l'article D. 181-15-5 du code de l'environnement.

18. Il résulte des dispositions précitées que la destruction ou la perturbation des espèces animales concernées, ainsi que la destruction ou la dégradation de leurs habitats, sont interdites. Toutefois, l'autorité administrative peut déroger à ces interdictions dès lors que sont remplies trois conditions distinctes et cumulatives tenant d'une part, à l'absence de solution alternative satisfaisante, d'autre part, à la condition de ne pas nuire au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle et, enfin, à la justification de la dérogation par l'un des cinq motifs limitativement énumérés et parmi lesquels figure le fait que le projet réponde, par sa nature et compte tenu des intérêts économiques et sociaux en jeu, à une raison impérative d'intérêt public majeur. Le système de protection des espèces résultant des dispositions citées ci-dessus, qui concerne les espèces de mammifères terrestres et d'oiseaux figurant sur les listes fixées par les arrêtés du 23 avril 2007 et du 29 octobre 2009 des ministres chargés de l'agriculture et de l'environnement, impose d'examiner si l'obtention d'une dérogation est nécessaire dès lors que des spécimens de l'espèce concernée sont présents dans la zone du projet, sans que l'applicabilité du régime de protection dépende, à ce stade, ni du nombre de ces spécimens, ni de l'état de conservation des espèces protégées présentes. Le pétitionnaire doit obtenir une dérogation " espèces protégées " si le risque que le projet comporte pour les espèces protégées est suffisamment caractérisé. A ce titre, les mesures d'évitement et de réduction des atteintes portées aux espèces protégées proposées par le pétitionnaire doivent être prises en compte. Dans l'hypothèse où les mesures d'évitement et de réduction proposées présentent, sous le contrôle de l'administration, des garanties d'effectivité telles qu'elles permettent de diminuer le risque pour les espèces au point qu'il apparaisse comme n'étant pas suffisamment caractérisé, il n'est pas nécessaire de solliciter une dérogation " espèces protégées ".

19. Il résulte de l'instruction, notamment de l'étude d'impact dont la préparation a donné lieu à une étude écologique incluant des déplacements sur le site par un bureau d'études en environnement, que le site d'implantation du projet est situé en dehors de toute zone naturelle protégée. Le secteur n'est en outre pas identifié comme particulièrement sensible. Notamment, aucun espace, réservoir ou corridor de biodiversité n'a été identifié à l'occasion de l'établissement du dernier schéma régional de cohérence écologique.

20. S'agissant plus particulièrement de l'avifaune, le site est situé en dehors des couloirs de migration qui avaient été recensés dans le schéma régional éolien du Nord-Pas-de-Calais. Les relevés de terrain réalisés dans le cadre de la préparation de l'étude d'impact ont mis en évidence que l'occupation du site par les espèces protégées est très faible et se manifeste principalement par des déplacements à caractère local et se faisant à faible altitude. Or le projet prévoit l'implantation d'éoliennes de grande hauteur avec des pales surplombant largement l'espace où les déplacements ont été majoritairement observés. La distance entre les éoliennes est de nature à éviter la création de tout effet barrière. Il en résulte que l'impact du projet sur les différentes espèces d'oiseaux protégées est évalué entre nul à faible par l'étude écologique, sans que les requérants n'apportent d'éléments de nature à infirmer cette analyse. En outre, des mesures d'évitement et de réduction ont été prévues par le pétitionnaire et reprises par le préfet du Pas-de-Calais dans son arrêté du 12 janvier 2022. Ainsi, il est prescrit d'implanter les éoliennes en dehors de la zone de reproduction certaine du Vanneau huppé identifiée au cours de l'étude avifaunistique. Il est également prescrit de, si possible, ne pas débuter les travaux pendant la période de nidification des espèces sensibles ou, dans le cas contraire, de réaliser une recherche de nids et, en cas de découverte, de décaler les travaux dans le temps ou l'espace jusqu'à l'envol des jeunes. Il est aussi prescrit de préserver les boisements, haies, talus, accotements enherbés et prairies existants.

21. S'agissant des chiroptères, il résulte de l'étude chiroptérologique qui a également été réalisée dans le cadre de la préparation de l'étude d'impact que le site est situé dans la zone d'enjeux faibles de la cartographie établie par la coordination mammalogique du Nord de la France. La cartographie établie par le bureau de recherches géologiques et minières n'y recense en outre aucune cavité. En revanche, le site comporte des espaces, tels que des boisements et haies, propices au gîte ou à l'activité de chasse. Les relevés sur le site ont d'ailleurs mis en évidence une activité modérée, principalement dans un périmètre de 100 mètres autour des boisements ou haies et à une faible altitude. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'implantation des éoliennes projetées ménage une distance de plus de 100 mètres entre les boisements et haies, d'une part, et les pales, d'autre part. Les pales seront, de plus, à une hauteur située entre 87 et 189 mètres du sol, soit à une hauteur où l'activité constatée a été extrêmement faible. Des mesures d'évitement et de réduction ont, là encore, été prévues par le pétitionnaire et reprises par le préfet du Pas-de-Calais dans son arrêté du 12 janvier 2022. Ainsi, pour éviter de renforcer l'attractivité du site pour les espèces de chiroptères, il est prescrit de s'abstenir de tout éclairage en dehors du balisage réglementaire obligatoire et de tout aménagement de haies nouvelles à proximité immédiate des éoliennes. Également, il est prescrit, lors de la mise en exploitation du site, d'installer un mat de mesure pour mesurer l'activité à une hauteur de 95 mètres et de définir, au vu des relevés, un plan de bridage adapté à la protection des espèces. Dans l'attente, il est prescrit de respecter un bridage préventif dès la mise en exploitation du site, dont l'arrêté du 12 janvier 2022 définit précisément les conditions. Au bénéfice de ces mesures de réduction, l'étude chiroptérologique conclut à un risque réduit à presque zéro, sans que les requérants n'apportent d'élément de nature à remettre en cause cette analyse

22. Dans ces conditions, le projet, par lui-même comme par ses effets cumulés avec ceux du parc dit " de la chaussée de Brunehaut " qui ont été pris en compte par la société pétitionnaire, ne peut être regardé comme emportant un risque suffisamment caractérisé pour les différentes espèces d'oiseaux et de chiroptères mentionnées par les requérants. Il s'ensuit que l'obtention d'une dérogation en application des dispositions du 4° du I. de l'article L. 411-2 du code de l'environnement n'était pas nécessaire. Le moyen tiré de l'incomplétude du dossier de demande d'autorisation au motif qu'en méconnaissance des dispositions de l'article D. 181-15-5 du code de l'environnement, il ne comporterait pas les pièces nécessaires à l'instruction et l'obtention de cette dérogation doit, dès lors, être écarté.

Quant à l'étude d'impact :

23. Aux termes de l'article R. 122-5 du code de l'environnement : " I.- Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, installations, ouvrages, ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. / (...) / II.- En application du 2° du II de l'article L. 122-3, l'étude d'impact comporte les éléments suivants, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et du type d'incidences sur l'environnement qu'il est susceptible de produire : / (...) / 2° Une description du projet, (...) / 3° Une description des aspects pertinents de l'état initial de l'environnement (...) ; / 4° Une description des facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 susceptibles d'être affectés de manière notable par le projet : la population, la santé humaine, la biodiversité, les terres, le sol, l'eau, l'air, le climat, les biens matériels, le patrimoine culturel, y compris les aspects architecturaux et archéologiques, et le paysage ; / 5° Une description des incidences notables que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement résultant, entre autres : / a) De la construction et de l'existence du projet, y compris, le cas échéant, des travaux de démolition ; / (...) / c) De l'émission de polluants, du bruit, de la vibration, de la lumière, la chaleur et la radiation, de la création de nuisances et de l'élimination et la valorisation des déchets ; / d) Des risques pour la santé humaine, pour le patrimoine culturel ou pour l'environnement ; / e) Du cumul des incidences avec d'autres projets existants ou approuvés, en tenant compte le cas échéant des problèmes environnementaux relatifs à l'utilisation des ressources naturelles et des zones revêtant une importance particulière pour l'environnement susceptibles d'être touchées. / Les projets existants sont ceux qui, lors du dépôt du dossier de demande comprenant l'étude d'impact, ont été réalisés. / Les projets approuvés sont ceux qui, lors du dépôt du dossier de demande comprenant l'étude d'impact, ont fait l'objet d'une décision leur permettant d'être réalisés. / Sont compris, en outre, les projets qui, lors du dépôt du dossier de demande comprenant l'étude d'impact : / - ont fait l'objet d'une étude d'incidence environnementale au titre de l'article R. 181-14 et d'une consultation du public ; / - ont fait l'objet d'une évaluation environnementale au titre du présent code et pour lesquels un avis de l'autorité environnementale a été rendu public. / (...) / 6° Une description des incidences négatives notables attendues du projet sur l'environnement (...) ; / (...) / 8° Les mesures prévues par le maître de l'ouvrage pour : / (...) ". Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure, et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

24. En premier lieu, il résulte de l'instruction que, dans le cadre de la préparation de l'étude d'impact, la société Gentiane a fait procéder à une étude avifaunistique et chiroptérologique par un bureau d'études en environnement, incluant en particulier des investigations sur le site lui-même. L'étude de l'avifaune a ainsi donné lieu à 17 sorties réalisées entre le 10 mars 2016 et le 20 janvier 2017, représentant un cycle biologique complet : 5 sorties en période pré-nuptiale, 4 en période post-nuptiale, 6 en période de nidification et 2 en hiver. De même, l'étude chiroptérologique a donné lieu à 10 sorties sur le terrain en 2016 avec écoutes, dont deux campagnes d'écoutes en altitude à l'aide d'un ballon, et à deux journées de recherche de gîtes dans les environs du site du projet. En outre, pour tenir compte des observations de la mission régionale d'autorité environnementale dans son avis du 4 juin 2019, les inventaires avifaunistiques ont été complétés par deux sorties supplémentaires en phase post-nuptiale les 27 juin et 1er juillet 2019 et les inventaires chiroptérologiques ont été complétés par trois sorties en période de mise-bas les 24 juin, 1er juillet et 10 juillet 2019. Les résultats de ces sorties complémentaires ont été intégrés à l'étude d'impact environnementale qui a été soumise à l'enquête publique. Les requérants n'apportent aucun élément de nature à établir que les relevés, ainsi complétés, n'auraient pas permis d'avoir une appréciation correcte de l'état initial du site du point de vue avifaunistique et chiroptérologique et des impacts du projet.

25. En deuxième lieu, il résulte des dispositions précitées du e) du 5° du II. de l'article R. 122-5 du code de l'environnement que l'étude d'impact doit inclure une analyse des effets cumulés du projet et des autres projets existants ou approuvés mais que seuls doivent être pris en compte les projets réalisés, autorisés ou ayant fait l'objet d'une évaluation environnementale et d'un avis de l'autorité environnementale à la date du dépôt de la demande. Si les requérants font grief à l'étude d'impact du projet de la société Gentiane de ne pas tenir compte des effets cumulés avec le projet de parc éolien dit " de la chaussée de Brunehaut " situé à proximité immédiate, il résulte de l'instruction que ce dernier projet n'a donné lieu à un avis de l'autorité environnementale que le 16 juillet 2018 tandis que le dossier de demande d'autorisation de la société Gentiane avait été déposé en préfecture dès le 22 janvier 2018. Il en résulte que l'étude d'impact du projet de la société Gentiane, y compris son volet acoustique, n'était pas réglementairement tenue de tenir compte du projet de la chaussée de Brunehaut et d'examiner les effets cumulés. Néanmoins, il résulte de l'instruction qu'en vue de l'enquête publique, l'étude d'impact a été complétée en juillet 2019 pour tenir compte des effets cumulés de ces deux projets, en particulier sur les paysages et sur les chiroptères. Quant à l'étude de dangers, qui a été considérée comme satisfaisante par la mission régionale d'autorité environnementale, elle a écarté tout effet dominos en l'absence d'autres installations classées pour la protection de l'environnement dans un rayon de 100 mètres.

26. En troisième lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il résulte de l'étude d'impact que les effets de sillage entre les éoliennes du projet ont bien été étudiés et pris en compte pour déterminer l'implantation des machines. L'étude retient ainsi que les distances entre les éoliennes du projet sont conformes aux recommandations du constructeur. Si, compte tenu de ce qui a été dit au point précédent, le projet de la chaussée de Brunehaut situé à proximité n'avait pas à être pris en compte, il ne résulte en tout état de cause pas de l'instruction que le fonctionnement de ce parc soit susceptible de perturber celui du parc projeté par la société Gentiane alors, d'une part, que les deux parcs seront distants d'au moins 300 mètres et, d'autre part, que les éoliennes du parc de la société Gentiane seront nettement plus hautes que celles du parc voisin. Les requérants n'établissent pas que cette configuration serait de nature à créer un effet de sillage tel qu'il affecterait sensiblement la productivité du parc projeté par la société Gentiane et que ce parc pourrait être regardé comme présentant des inconvénients pour l'utilisation rationnelle de l'énergie au sens des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'environnement.

27. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact doit être écarté.

Quant à la consultation du ministre chargé de l'aviation civile :

28. Aux termes de l'article R. 181-32 du code de l'environnement : " Lorsque la demande d'autorisation environnementale porte sur un projet d'installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, le préfet saisit pour avis conforme : / 1° Le ministre chargé de l'aviation civile : / a) Pour ce qui concerne les radars primaires, les radars secondaires et les radiophares omnidirectionnels très haute fréquence (VOR), sur la base de critères de distance aux aérogénérateurs ; / b) Pour les autres aspects de la circulation aérienne, sur tout le territoire et sur la base de critère de hauteur des aérogénérateurs. / Ces critères de distance et de hauteur sont fixés par un arrêté des ministres chargés des installations classées et de l'aviation civile ; / (...) / Ces avis sont rendus dans le délai de deux mois. / (...) ". Aux termes de l'article R. 181-33 du même code : " Les avis prévus par les articles R. 181-21 à R. 181-32 sont, sauf disposition contraire prévue dans la présente sous-section et sous réserve des dispositions de l'article R. 181-53-1, rendus dans un délai de quarante-cinq jours à compter de la saisine de ces instances par le préfet. Ils sont réputés favorables, sauf disposition contraire prévue dans la présente sous-section, au-delà du délai dans lequel ils auraient dû être rendus ". Aux termes de l'article R. 181-34 du même code : " Le préfet est tenu de rejeter la demande d'autorisation environnementale dans les cas suivants : / (...) / 2° Lorsque l'avis de l'une des autorités ou de l'un des organismes consultés auquel il est fait obligation au préfet de se conformer est défavorable ; / (...) ".

29. Aux termes de l'article R. 425-9 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet porte sur une construction susceptible, en raison de son emplacement et de sa hauteur, de constituer un obstacle à la navigation aérienne, le permis de construire ou le permis d'aménager tient lieu de l'autorisation prévue par l'article R. 244-1 du code de l'aviation civile dès lors que la décision a fait l'objet d'un accord du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre de la défense ". Aux termes de l'article R. 423-63 du même code : " Par exception aux dispositions de l'article R. 423-59, le délai à l'issue duquel le ministre chargé de l'aviation civile, le ministre de la défense ou leur délégué, consultés en application de l'article R. 425-9, sont réputés avoir émis un avis favorable est de deux mois ".

30. Aux termes de l'article L. 6352-1 du code des transports : " A l'extérieur des zones grevées de servitudes de dégagement, l'établissement de certaines installations qui, en raison de leur hauteur, pourraient constituer des obstacles à la navigation aérienne, est soumis à l'autorisation spéciale de l'autorité administrative. / Les catégories d'installations et les conditions auxquelles peuvent être soumises leur établissement sont fixées par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article R. 6352-2 du même code : " Les installations qui, en raison de leur hauteur ou de leur localisation, sont susceptibles de constituer un danger pour la navigation aérienne, sont soumises à l'autorisation spéciale prévue par l'article L. 6352-1. / Ces critères de hauteur et de localisation sont définis par arrêté conjoint du ministre chargé de l'aviation civile, du ministre de la défense et, le cas échéant, des autres ministres intéressés ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 25 juillet 1990 susvisé : " Les installations dont l'établissement à l'extérieur des zones grevées de servitudes aéronautiques de dégagement est soumis à autorisation du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre chargé des armées comprennent : / a) En dehors des agglomérations, les installations dont la hauteur en un point quelconque est supérieure à 50 mètres au-dessus du niveau du sol ou de l'eau ; / (...) ".

31. Il résulte de l'instruction que la demande d'autorisation environnementale de la société Gentiane a été transmise, le 25 mars 2018, aux services de la direction générale de l'aviation civile, lesquels sont habilités à prendre position au nom et pour le compte du ministre chargé de l'aviation civile. En l'absence de retour de leur part au terme du délai de deux mois qui leur est laissé par les dispositions précitées des articles R. 181-32 du code de l'environnement et R. 423-63 du code de l'urbanisme, ils doivent être regardés comme ayant émis un avis favorable tacite, en application des dispositions des articles R. 181-33 du code de l'environnement et R. 423-63 du code de l'urbanisme. A cet égard, ni les dispositions du code des transports citées au point 30, ni aucune de celles de l'arrêté du 25 juillet 1990 susvisé ne s'opposent à ce que l'autorisation du ministre chargé de l'aviation civile prenne une forme implicite. Dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité de la consultation du ministre chargé de l'aviation civile doit être écarté.

Quant à la consultation de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers :

32. Aux termes de l'article L. 111-5 du code de l'urbanisme : " La construction de bâtiments nouveaux mentionnée au 1° de l'article L. 111-4 et les projets de constructions, aménagements, installations et travaux mentionnés aux 2° et 3° du même article ayant pour conséquence une réduction des surfaces situées dans les espaces autres qu'urbanisés et sur lesquelles est exercée une activité agricole ou qui sont à vocation agricole doivent être préalablement soumis pour avis par l'autorité administrative compétente de l'Etat à la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l'article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime. / (...) ". Aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'environnement : " Le dossier soumis à l'enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet, plan ou programme. / Le dossier comprend au moins : / (...) / 4° Lorsqu'ils sont rendus obligatoires par un texte législatif ou réglementaire préalablement à l'ouverture de l'enquête, les avis émis sur le projet plan, ou programme ; / (...) ".

33. Il ne résulte pas de l'instruction que le projet ait pour effet de compromettre la vocation agricole des parcelles sur lesquelles les éoliennes seront implantées ou d'empêcher la poursuite de leur exploitation agricole. En outre, le prélèvement sur la surface agricole utile de la commune de Blessy sera particulièrement modeste dès lors que l'emprise des constructions sera limitée à 0,6 hectares, soit 0,15 % du total de l'espace agricole communal. Dans ces conditions, en admettant même qu'elle eut été requise en application de l'article L. 111-5 du code de l'urbanisme, l'absence de consultation de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, laquelle ne constitue pas une garantie, n'a, en l'espèce, pas été susceptible de nuire à la parfaite information du public ou d'exercer une influence sur le sens de la décision prise. Le moyen tiré d'un vice de procédure soulevé en ce sens doit, dès lors, être écarté.

Quant à la consultation du gestionnaire de la voie publique :

34. Aux termes de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet aurait pour effet la création ou la modification d'un accès à une voie publique dont la gestion ne relève pas de l'autorité compétente pour délivrer le permis, celle-ci consulte l'autorité ou le service gestionnaire de cette voie, sauf lorsque le plan local d'urbanisme ou le document d'urbanisme en tenant lieu réglemente de façon particulière les conditions d'accès à ladite voie ".

35. Il résulte de l'instruction que l'accès au site se fera au moyen des voies publiques et chemins agricoles préexistants. Il n'est pas établi que les travaux nécessiteront la création ou la modification d'un accès à une ou plusieurs voies publiques. En outre, le préfet du Pas-de-Calais a même prescrit, par son arrêté du 12 janvier 2022, l'utilisation des chemins existants et leur remise en état. Il en résulte qu'aucune consultation au titre des dispositions précitées de l'article R. 423-23 du code de l'urbanisme n'était nécessaire. Le moyen tiré d'un vice de procédure soulevé en ce sens doit, dès lors, être écarté.

Quant à la publicité de l'ouverture de l'enquête publique :

36. Aux termes de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme : " I.- Quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête et durant celle-ci, l'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête informe le public. L'information du public est assurée par voie dématérialisée et par voie d'affichage sur le ou les lieux concernés par l'enquête, ainsi que, selon l'importance et la nature du projet, plan ou programme, par voie de publication locale. / Cet avis précise : / -l'objet de l'enquête ; / - la ou les décisions pouvant être adoptées au terme de l'enquête et des autorités compétentes pour statuer ; / - le nom et les qualités du commissaire enquêteur ou des membres de la commission d'enquête ; / - la date d'ouverture de l'enquête, sa durée et ses modalités ; / - l'adresse du ou des sites internet sur lequel le dossier d'enquête peut être consulté ; / - le (ou les) lieu (x) ainsi que les horaires où le dossier de l'enquête peut être consulté sur support papier et le registre d'enquête accessible au public ; / - le ou les points et les horaires d'accès où le dossier de l'enquête publique peut être consulté sur un poste informatique ; / - la ou les adresses auxquelles le public peut transmettre ses observations et propositions pendant le délai de l'enquête. S'il existe un registre dématérialisé, cet avis précise l'adresse du site internet à laquelle il est accessible. / L'avis indique en outre l'existence d'un rapport sur les incidences environnementales, d'une étude d'impact ou, à défaut, d'un dossier comprenant les informations environnementales se rapportant à l'objet de l'enquête, et l'adresse du site internet ainsi que du ou des lieux où ces documents peuvent être consultés s'ils diffèrent de l'adresse et des lieux où le dossier peut être consulté. Il fait état, lorsqu'ils ont été émis, de l'existence de l'avis de l'autorité environnementale mentionné au V de l'article L. 122-1 et à l'article L. 122-7 du présent code ou à l'article L. 104-6 du code de l'urbanisme, et des avis des collectivités territoriales et de leurs groupements mentionnés au V de l'article L. 122-1 du présent code, ainsi que du lieu ou des lieux où ils peuvent être consultés et de l'adresse des sites internet où ils peuvent être consultés si elle diffère de celle mentionnée ci-dessus. / II.- La personne responsable du projet assume les frais afférents à ces différentes mesures de publicité de l'enquête publique ". Les modalités d'application de ces dernières dispositions sont précisées par les articles R. 123-9 et R. 123-11 du code de l'environnement. S'il appartient à l'autorité administrative de procéder à l'ouverture de l'enquête publique et à la publicité de celle-ci dans les conditions fixées par ces dispositions, leur méconnaissance n'est toutefois de nature à vicier la procédure et donc à entraîner l'illégalité de la décision prise à l'issue de l'enquête publique que si elle n'a pas permis une bonne information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ou si elle a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision de l'autorité administrative.

37. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport du commissaire enquêteur, que l'ouverture de l'enquête publique sur la demande d'autorisation environnementale présentée par la société Gentiane a donné lieu à un avis qui a fait l'objet de quatre publications dans deux journaux à diffusion locale les 6, 10 et 27 septembre et 1er octobre 2019, d'un affichage en mairie de Blessy, dans les mairies de 24 communes environnantes et sur le terrain d'assiette du projet ainsi que d'une publication sur le site internet de la préfecture du Pas-de-Calais. Cet avis mentionne que le projet porte sur un parc éolien comprenant cinq aérogénérateurs, dont la hauteur, la puissance et le lieu d'implantation sont précisés. La circonstance tirée de ce que l'avis ne précise pas le modèle des éoliennes qui allait être installé n'est pas de nature à avoir induit le public en erreur sur la nature du projet, son ampleur et ses enjeux. De même, alors que le projet de la chaussée de Brunehaut situé à proximité résulte de la demande d'autorisation environnementale présentée par une autre société et que les deux projets sont indépendants l'un de l'autre, l'enquête publique ne pouvait réglementairement pas être commune et l'avis ne peut être regardé comme ayant induit le public en erreur en ne faisant pas référence à cet autre projet. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'avis d'ouverture de l'enquête publique ne présentait pas suffisamment les caractéristiques du projet doit être écarté.

Quant aux modalités de dématérialisation de l'enquête publique :

38. Aux termes de l'article R. 123-9 du code de l'environnement : " I.- L'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête précise par arrêté les informations mentionnées à l'article L. 123-10, quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête et après concertation avec le commissaire enquêteur ou le président de la commission d'enquête. Cet arrêté précise notamment : / (...) / 3° L'adresse électronique à laquelle le public peut transmettre ses observations et propositions pendant la durée de l'enquête, ainsi que, le cas échéant, l'adresse du site internet comportant le registre dématérialisé sécurisé mentionné à l'article L. 123-10 ; / (...) / II.- Un dossier d'enquête publique est disponible en support papier au minimum au siège de l'enquête publique. / Ce dossier est également disponible depuis le site internet mentionné au II de l'article R. 123-11 ". Aux termes de l'article R. 123-11 du même code : " (...) / II.- L'avis mentionné au I est publié sur le site internet de l'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête. Si l'autorité compétente ne dispose pas d'un site internet, cet avis est publié, à sa demande, sur le site internet des services de l'Etat dans le département. Dans ce cas, l'autorité compétente transmet l'avis par voie électronique au préfet au moins un mois avant le début de la participation, qui le met en ligne au moins quinze jours avant le début de la participation. / (...) ".

39. Si les requérants soutiennent que toutes les modalités de dématérialisation des enquêtes publiques introduites par le décret n° 2017-626 du 25 avril 2017 n'auraient pas été respectées, ils n'assortissent pas leur moyen de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. En particulier, ils ne précisent pas la ou les modalités auxquelles ils prétendent se référer. En tout état de cause, il résulte de l'instruction, notamment du rapport du commissaire enquêteur, que l'avis d'enquête publique a été consultable sur le site internet de la préfecture du Pas-de-Calais, qu'il mentionne les adresses des sites internet sur lesquels le dossier pouvait être consulté et les observations pouvaient être déposées et que la consultation du dossier en format numérique a également été possible dans les mairies des communes incluses dans le périmètre de l'enquête. En outre, il résulte de l'instruction que trois observations ont été réceptionnées par voie électronique et qu'elles ont été prises en compte et analysées par le commissaire enquêteur. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante dématérialisation de l'enquête publique doit être écarté.

S'agissant de la légalité du projet :

Quant à la méconnaissance de l'article L. 181-3 du code de l'environnement en raison de la prévention insuffisante des dangers et inconvénients pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du même code :

40. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I.- L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas. / (...) ". Aux termes de l'article L. 511-1 du même code : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. / (...) ".

41. Si les requérants soutiennent que le projet litigieux méconnaît l'article L. 181-3 du code de l'environnement dès lors que ne sont garanties ni la réalisation effective des mesures d'évitement, de réduction, de compensation et d'accompagnement présentées dans le dossier de demande d'autorisation environnementale, ni l'efficacité de ces mesures, leur moyen n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. En particulier, ils ne précisent pas la ou les mesures d'évitement, de réduction, de compensation et d'accompagnement auxquelles ils prétendent se référer, ni quel danger ou inconvénient en lien avec les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ces mesures ne permettraient pas de prévenir. Il résulte en tout état de cause de ce qui a été dit aux points 4 à 8 que le projet ne porte en lui-même pas d'atteinte excessive aux paysages, à la commodité du voisinage, aux villages et aux monuments environnants. Ainsi qu'il a également déjà été dit aux points 17 à 22, les mesures d'évitement et de réduction envisagées par la société pétitionnaire ont été rendues opposables par l'arrêté du 12 janvier 2022 du préfet du Pas-de-Calais fixant les prescriptions et permettent d'écarter tout risque caractérisé pour les différentes espèces d'oiseaux et de chiroptères protégées. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions combinées des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement doit être écarté.

Quant à la méconnaissance des articles L. 181-3, L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement en raison des atteintes aux espèces protégées et de l'absence d'obtention d'une dérogation :

42. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " (...) / II.- L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent également : / (...) / 4° Le respect des conditions, fixées au 4° du I de l'article L. 411-2, de délivrance de la dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, des espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, lorsque l'autorisation environnementale tient lieu de cette dérogation ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 411-1 du même code : " Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits : / 1° (...) la mutilation, la destruction, (...), la perturbation intentionnelle, (...) d'animaux de ces espèces (...) ; / (...) / 3° La destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces (...) ". Aux termes de l'article L. 411-2 du même code : " I.- Un décret en Conseil d'État détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : / (...) / 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1 (...) ".

43. Il résulte de ce qui a été dit aux points 17 à 22 que le projet, compte tenu, d'une part, de l'état initial du terrain d'assiette et, d'autre part, des mesures d'évitement et de réduction envisagées par la société pétitionnaire et rendues opposables par l'arrêté du 12 janvier 2022 du préfet du Pas-de-Calais fixant les prescriptions, ne présente pas de risque caractérisé pour les différentes espèces d'oiseaux et de chiroptères protégées. Par suite, l'obtention d'une dérogation en application des dispositions du 4° du I. de l'article L. 411-2 du code de l'environnement n'était pas nécessaire. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions combinées des articles L. 181-3, L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement doit être écarté.

Quant à la méconnaissance des articles R. 111-2 du code de l'urbanisme et L. 511-1 du code de l'environnement en raison des nuisances sonores et visuelles occasionnées par le projet :

44. Aux termes de l'article R.111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". En outre, la santé, la sécurité et la salubrité publiques figurent au nombre des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement auxquels un projet ne doit pas porter atteinte pour permettre la délivrance d'une autorisation environnementale en application de l'article L. 181-3 du même code.

45. Il résulte de l'instruction, notamment de l'étude acoustique réalisée dans le cadre de la préparation de l'étude d'impact, que les émergences sonores des éoliennes du projet de la société Gentiane respecteront les seuils réglementaires, à l'exception d'un point de relevé situé à proximité immédiate du projet, en période nocturne et pour une vitesse de vent de 6 m/s. Par son arrêté du 12 janvier 2022, le préfet du Pas-de-Calais a toutefois prescrit à la société pétitionnaire de refaire une campagne acoustique dans les six mois suivant la mise en exploitation du parc et, dans l'attente, de respecter un plan de bridage de nature à empêcher les émergences non réglementaires identifiées au moment de la préparation de l'étude d'impact. En outre, si un balisage réglementaire sera mis en place au sommet de chaque éolienne, l'impact visuel en résultant ne peut être regardé comme entraînant par lui-même des inconvénients excessifs pour la tranquillité des riverains. L'étude d'impact retient également que les ombres projetées par les éoliennes resteront, elles-aussi, en dessous des seuils réglementaires. Enfin, les autres risques sur la santé, la sécurité et la salubrité publiques envisagées par l'étude de dangers, dont la mission régionale d'autorité environnementale a souligné la qualité, sont décrits comme restant à un niveau acceptable. Les requérants n'apportent aucun élément de nature à infirmer l'ensemble de ces analyses. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 111-2 du code de l'urbanisme et L. 511-1 du code de l'environnement doit être écarté.

Quant à la méconnaissance des articles R. 111-26 du code de l'urbanisme et L. 110-1 du code de l'environnement en raison des conséquences dommageables du projet pour l'environnement :

46. Aux termes de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme : " Le permis ou la décision prise sur la déclaration préalable doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. Ces prescriptions spéciales tiennent compte, le cas échéant, des mesures mentionnées à l'article R. 181-43 du code de l'environnement ". Aux termes de l'article L. 110-1 du code de l'environnement : " I.- Les espaces, ressources et milieux naturels terrestres et marins, les sons et odeurs qui les caractérisent, les sites, les paysages diurnes et nocturnes, la qualité de l'air, la qualité de l'eau, les êtres vivants et la biodiversité font partie du patrimoine commun de la nation. Ce patrimoine génère des services écosystémiques et des valeurs d'usage. / Les processus biologiques, les sols et la géodiversité concourent à la constitution de ce patrimoine. / II.- Leur connaissance, leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état, leur gestion, la préservation de leur capacité à évoluer et la sauvegarde des services qu'ils fournissent sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. (...) / (...) ". Aux termes de l'article L. 110-2 du même code : " Les lois et règlements organisent le droit de chacun à un environnement sain. Ils contribuent à assurer un équilibre harmonieux entre les zones urbaines et les zones rurales ainsi que la préservation et l'utilisation durable des continuités écologiques. / Il est du devoir de chacun de veiller à la sauvegarde et de contribuer à la protection de l'environnement, y compris nocturne. / Les personnes publiques et privées doivent, dans toutes leurs activités, se conformer aux mêmes exigences ".

47. Au soutien de leur moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles R. 111-26 du code de l'urbanisme et L. 110-1 du code de l'environnement, les requérants réitèrent les considérations qu'ils ont avancées au soutien de leurs moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 411-1, L. 411-2 et D. 181-15-5 du code de l'environnement, à savoir que le projet portera, selon eux, atteinte aux espèces d'oiseaux et de chiroptères protégées. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit aux points 17 à 22 et 43 que le projet, compte tenu, d'une part, de l'état initial du terrain d'assiette et, d'autre part, des mesures d'évitement et de réduction envisagées par la société pétitionnaire et rendues opposables par l'arrêté du 12 janvier 2022 du préfet du Pas-de-Calais fixant les prescriptions, ne présente pas de risque caractérisé pour les différentes espèces mentionnées par les requérants. Dès lors, leur moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles R. 111-26 du code de l'urbanisme et L. 110-1 du code de l'environnement doit être écarté.

Quant à la méconnaissance de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme en raison de l'atteinte au caractère et à l'intérêt des lieux avoisinants :

48. Aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ". Il résulte de ces dispositions que, si les constructions projetées portent atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ou encore à la conservation des perspectives monumentales, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site. Les dispositions de cet article excluent qu'il soit procédé, dans le second temps du raisonnement, à une balance d'intérêts divers en présence, autres que ceux mentionnés par cet article et, le cas échéant, par le plan local d'urbanisme de la commune. Pour apprécier aussi bien la qualité du site que l'impact de la construction projetée sur ce site, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, de prendre en compte l'ensemble des éléments pertinents et notamment, le cas échéant, la covisibilité du projet avec des bâtiments remarquables, quelle que soit la protection dont ils bénéficient par ailleurs au titre d'autres législations.

49. Au soutien de leur moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme, les requérants réitèrent les considérations qu'ils ont avancées au soutien de leur moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement, à savoir que le projet portera, selon eux, atteinte aux paysages, aux villages et aux monuments environnants. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 8, d'une part, que le secteur naturel et patrimonial dans lequel s'implante le projet ne présente pas de caractère particulièrement remarquable ou s'opposant par principe à toute évolution de l'occupation spatiale et, d'autre part, que le projet, en lui-même et compte tenu de ses effets cumulés avec les autres parcs existants, autorisés ou en projet, ne porte pas d'atteinte excessive aux paysages, aux villages et aux monuments environnants. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme doit être écarté.

Quant à la méconnaissance de l'article L. 220-1 du code de l'environnement et du principe d'égalité entre les citoyens :

50. Aux termes de l'article L. 220-1 du code de l'environnement : " L'Etat et ses établissements publics, les collectivités territoriales et leurs établissements publics ainsi que les personnes privées concourent, chacun dans le domaine de sa compétence et dans les limites de sa responsabilité, à une politique dont l'objectif est la mise en œuvre du droit reconnu à chacun à respirer un air qui ne nuise pas à sa santé. / Cette action d'intérêt général consiste à prévenir, à surveiller, à réduire ou à supprimer les pollutions atmosphériques, à préserver la qualité de l'air et, à ces fins, à économiser et à utiliser rationnellement l'énergie. La protection de l'atmosphère intègre la prévention de la pollution de l'air et la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre ".

51. Si les requérants soutiennent que le projet méconnaît l'objectif d'utilisation rationnelle de l'énergie énoncé à l'article L. 220-1 du code de l'environnement et le principe d'égalité tel que garanti par l'article 6 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, ils se bornent à faire état de la concentration des parcs éoliens dans leur secteur et du caractère intermittent de la production d'énergie d'origine éolienne, sans fournir d'élément précis et probant à l'appui de leurs allégations. Leur moyen doit, dès lors, être écarté.

52. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'arrêt attaqué, la cour a délivré l'autorisation environnementale sollicitée par la société Gentiane. Par suite, et sans qu'il soit même besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense par la société Gentiane et de surseoir à statuer en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, leur tierce opposition et leurs conclusions tendant à l'annulation de l'autorisation environnementale délivrée le 26 octobre 2021 doivent être rejetées.

Sur l'arrêté du 12 janvier 2022 du préfet du Pas-de-Calais :

53. En premier lieu, par un arrêté n° 2020-10-19 du 24 août 2020, régulièrement publié au recueil des actes administratifs n° 50 de la préfecture du Pas-de-Calais le 25 août 2020 et dont le caractère exécutoire n'est pas contesté, le préfet du Pas-de-Calais a donné à M. E... BG..., administrateur général détaché en qualité de sous-préfet hors classe, secrétaire général de la préfecture du Pas-de-Calais, signataire de l'arrêté attaqué, délégation à l'effet de signer " tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents, en toutes matières " à l'exclusion de six catégories de décisions au nombre desquelles ne figurent pas les autorisations environnementales et les prescriptions susceptibles de leur être assorties. Les moyens de M. F... et autres et de la commune de Blessy, tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué, doivent, dès lors, être écartés.

54. En deuxième lieu, la commune de Blessy, au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 janvier 2022 par lequel le préfet du Pas-de-Calais se borne à fixer les prescriptions rendues nécessaires par l'autorisation environnementale délivrée par la cour dans son arrêt du 26 octobre 2021, ne peut utilement se prévaloir de ce que le dossier de demande d'autorisation environnementale ne mentionnerait pas le montant des garanties financières prévues à l'article L. 516-1 du code de l'environnement. En tout état de cause, il résulte de l'instruction que la demande d'autorisation environnementale présentée par la société Gentiane ainsi que l'étude d'impact qui y était jointe mentionnaient précisément les garanties financières que la société pétitionnaire entend constituer au cours de l'exploitation du parc éolien projeté. Le moyen de la commune de Blessy tiré de l'insuffisance du dossier de demande d'autorisation quant aux garanties financières doit, dès lors, être écarté.

55. En troisième lieu, ainsi qu'il a été exposé aux points 4 à 52, M. F... et autres n'établissent pas que l'autorisation environnementale délivrée à la société Gentiane par l'arrêt de la cour du 26 octobre 2021 est illégale. Par suite, ils ne sont pas davantage fondés à soutenir que l'arrêté du 12 janvier 2022 du préfet du Pas-de-Calais est illégal au motif qu'il a été pris pour l'exécution de cette autorisation environnementale. Leur moyen en ce sens doit, dès lors, être écarté.

56. En quatrième lieu, il résulte de ce qui a déjà été dit au point 16 que le dossier initial de demande d'autorisation environnementale comportait une présentation suffisante des capacités financières de la société Gentiane. La commune de Blessy n'apporte aucun élément précis et circonstancié de nature à établir que cette présentation devait conduire à mettre manifestement en doute la capacité de la société à obtenir les moyens financiers indispensables à la réalisation du projet et au respect de l'ensemble de ses obligations. Il en résulte qu'aucune prescription n'était requise sur ce point. La société Gentiane produit même dans le cadre de la présente instance une lettre du 14 octobre 2022 par laquelle sa société-mère, la société Alterric Internationale Beteiligungs Gmbh, s'engage à financer l'intégralité du projet sur ses fonds propres dans l'hypothèse où elle ne parviendrait pas à obtenir les emprunts bancaires sollicités. Dès lors, le moyen de la commune de Blessy tiré de l'absence de prescriptions relatives aux capacités financières doit être écarté.

57. En cinquième lieu, il résulte de l'instruction que, pour fixer à 304 956 euros le montant initial des garanties financières minimales imposées par l'article L. 516-1 du code de l'environnement, l'arrêté attaqué a fait application de la formule énoncée à l'annexe I à l'arrêté du 26 août 2011 susvisé, dans une version qui n'était plus applicable à la date du 12 janvier 2022. De plus, cette formule a depuis été modifiée par l'arrêté du 11 juillet 2023 susvisé. Il s'ensuit qu'il y a lieu pour la cour, conformément aux pouvoirs dévolus au juge du plein contentieux, de faire application des dispositions applicables à la date à laquelle elle statue et de fixer elle-même le montant initial des garanties financières minimales dont il y a lieu de prescrire la constitution. Ainsi, l'annexe I à l'arrêté du 26 aout 2011, dans sa rédaction résultant de l'arrêté du 11 juillet 2023, prévoit que le montant initial de la garantie financière est égal au nombre d'éoliennes multiplié par un coût unitaire qui varie selon la puissance de l'éolienne considérée. Lorsque la puissance unitaire de l'éolienne est supérieure à 2 MW, ce coût unitaire est calculé selon la formule suivante : Cu = 75 000 + 25 000 x (P-2), où " Cu " désigne le montant initial de la garantie financière correspondant à une éolienne et " P " la puissance unitaire de l'éolienne considérée exprimée en mégawatt. En l'espèce, dès lors que le projet consiste en l'édification d'un parc constitué de cinq éoliennes d'une puissance de 2,35 MW chacune, le montant initial de la garantie financière doit être fixée à : 5 x (75 000 + 25 000 x (2,35 - 2)) = 418 750 euros. Ainsi que l'a déjà prévu l'arrêté attaqué, ce montant sera revalorisé tous les cinq ans en application de la formule mentionnée en annexe II à l'arrêté du 26 août 2011 susvisé. Dès lors, le moyen de la commune de Blessy tiré de l'insuffisance des garanties financières minimales prescrites par l'arrêté attaqué doit être accueilli dans cette seule mesure.

58. En sixième lieu, il résulte de l'instruction que la société Gentiane a, dans son dossier initial de demande d'autorisation environnementale et notamment dans l'étude d'impact qui y était jointe, fourni une estimation du coût du démantèlement des éoliennes, présenté les conditions de réalisation du chantier de construction et d'élimination et valorisation des déchets et indiqué que le chantier de démantèlement serait réalisé dans les mêmes conditions. En outre, la société a mentionné le montant des réserves financières qu'elle entend constituer afin de garantir, en toutes circonstances, la bonne conduite des opérations de démantèlement, lequel est d'ailleurs près de deux fois supérieur au montant initial de la garantie financière minimale fixée au point précédent en application des dispositions de l'arrêté du 26 août 2011 susvisé. Contrairement à ce que soutient la commune de Blessy, ces mentions ne sont pas imprécises et aucun élément ne démontre que la société Gentiane ne présenterait aucune garantie effective quant aux futures opérations de démantèlement. De plus, alors que ces opérations sont entièrement régies et soumises au respect des dispositions de l'article R. 515-106 du code de l'environnement et de l'arrêté du 26 août 2011 susvisé, qui n'imposent à ce jour ni aucun délai, ni aucune méthode particulière pour la valorisation des déchets, le préfet du Pas-de-Calais ne pouvait pas régulièrement énoncer d'autres prescriptions que celle consistant à rappeler les dispositions applicables. Dans ces conditions, aucune prescription complémentaire à celles qui ont déjà été énoncées par l'arrêté attaqué n'était nécessaire au titre des opérations de démantèlement. Le moyen de la commune de Blessy tiré de l'insuffisance des prescriptions à cet égard doit, dès lors, être écarté.

59. En septième lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 8, 41 et 49, d'une part, que le secteur naturel et patrimonial dans lequel s'implante le projet ne présente pas de caractère particulièrement remarquable ou s'opposant par principe à toute évolution de l'occupation spatiale et, d'autre part, que le projet ne porte en lui-même pas d'atteinte excessive aux paysages, à la commodité du voisinage, aux villages et aux monuments environnants. Il s'ensuit qu'aucune prescription n'était requise à cet égard. En outre, il résulte de ce qui a été dit aux points 17 à 22, 41, 43 et 47 que le projet n'emporte en lui-même, pour les espèces d'oiseaux et de chiroptères protégées, que des risques faibles, lesquels ont été suffisamment et correctement évalués, ainsi qu'il a été dit aux points 23 à 27, dans le cadre des inventaires réalisés sur site à l'occasion de la préparation de l'étude d'impact, complétés en juin et juillet 2019 à la suite de l'avis de la mission régionale d'évaluation environnementale. Par ailleurs, les mesures d'évitement et de réduction prescrites par le préfet du Pas-de-Calais par l'arrêté attaqué sont de nature à écarter tout risque caractérisé pour lesdites espèces. Les moyens de M. F... et autres et de la commune de Blessy, tirés de ce que les prescriptions énoncées par l'arrêté attaqué seraient insuffisantes pour prévenir les dangers et inconvénients pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement et pour assurer le respect des dispositions des articles R.111-26 et R. 111-27 du code de l'urbanisme, doivent, dès lors, être écartés.

60. Il résulte de ce qui précède que M. F... et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté du 12 janvier 2022 pris par le préfet du Pas-de-Calais pour assurer l'exécution de l'arrêt de la cour du 26 octobre 2021. En revanche, la commune de Blessy est fondée à demander la réformation de cet arrêté en tant qu'il fixe le montant initial des garanties financières minimales. Il y a cet égard lieu pour la cour, dans le cadre de son office de juge de plein contentieux, d'y procéder directement, sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement.

Sur les frais liés au litige :

En ce qui concerne l'instance n° 22DA01074 :

61. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Blessy, qui n'est pas la partie perdante dans l'instance n° 22DA01074, la somme que la société Gentiane demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de celle-ci la somme demandée par la commune de Blessy au même titre.

En ce qui concerne l'instance n° 22DA01162 :

62. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat et de la société Gentiane, qui ne sont pas les parties perdantes dans l'instance n° 22DA01162, les sommes que M. F... et autres demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en revanche, au titre des frais exposés par la société Gentiane et non compris dans les dépens, de mettre une somme de 3 000 euros à la charge solidaire de M. F... et autres.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête n° 22DA01162 de M. F... et autres est rejetée.

Article 2 : L'article 2.2 de l'arrêté du 12 janvier 2022 du préfet du Pas-de-Calais définissant le montant des garanties financières à constituer par la société Gentiane est modifié conformément au point 57 du présent arrêt.

Article 3 : M. F... et autres verseront solidairement à la société Gentiane une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Blessy, à M. Y... F... en qualité de représentant unique, à la société d'exploitation du parc éolien Gentiane, au préfet du Pas-de-Calais et à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Délibéré après l'audience publique du 4 février 2025 à laquelle siégeaient :

- M. Laurent Delahaye, président-assesseur assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller,

- M. Guillaume Toutias, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 mars 2025.

Le rapporteur,

Signé : G. ToutiasLe président de la formation

de jugement,

Signé : L. DelahayeLa greffière,

Signé : A-S. Villette

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche, en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

par délégation,

La greffière

2

N°22DA01074,22DA01162


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01074
Date de la décision : 05/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chevaldonnet
Rapporteur ?: M. Guillaume Toutias
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : SCP BRIOT;SCP BRIOT;CABINET D' AVOCATS PHILIPPE AUDOUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 13/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-05;22da01074 ?
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