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20/02/2025 | FRANCE | N°24DA01127

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 4ème chambre, 20 février 2025, 24DA01127


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 25 février 2022 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour.



Par un jugement n° 2200923 du 15 février 2024, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 7 juin 2024, et des mémoires, enregistrés les 1er août et 30

octobre 2024, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, M. C..., représenté par Me Minet, demande à la cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 25 février 2022 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2200923 du 15 février 2024, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 juin 2024, et des mémoires, enregistrés les 1er août et 30 octobre 2024, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, M. C..., représenté par Me Minet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) d'enjoindre au préfet du Calvados de lui délivrer une autorisation de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- le préfet n'a pas tenu compte de l'ancienneté de sa présence et de ses attaches sur le territoire français ni du lien qu'il entretient avec son fils et ses belles-filles ;

- il est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- il méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il porte atteinte à sa liberté d'aller et venir et de travailler ;

- son comportement ne représente pas une menace à l'ordre public ;

- sa situation révèle l'existence de circonstances exceptionnelles ou de motifs humanitaires justifiant la délivrance d'un titre de séjour ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2024, le préfet de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 mai 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. François-Xavier Pin, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C..., ressortissant camerounais, né le 24 mai 1989 est entré en France en 2003. Par un arrêté du 25 février 2022, le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer le titre de séjour qu'il avait sollicité sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. C... relève appel du jugement du 15 février 2024 par lequel tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait, touchant tant à la situation administrative de l'intéressé qu'à sa situation personnelle et familiale, qui en constituent le fondement, conformément à l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté.

3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas des motifs de l'arrêté attaqué qui font état en particulier de l'absence de communauté de vie de l'intéressé avec son épouse et de son absence de relation avec son enfant né en 2011, que le préfet de la Seine-Maritime, compte tenu des éléments alors portés à sa connaissance, se soit abstenu de procéder à un examen particulier de la situation familiale de M. C....

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".

5. Pour refuser de délivrer un titre de séjour à M. C... sur le fondement de ces dispositions, le préfet de la Seine-Maritime a notamment relevé que, par un avis du 7 septembre 2021, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) avait estimé que l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'au vu des éléments du dossier et à la date de cet avis, M. C... pouvait voyager sans risque vers son pays d'origine.

6. Le requérant fait valoir que le préfet aurait dû recueillir, préalablement à l'adoption de la mesure contestée, un nouvel avis du collège de médecins de l'OFII, dès lors que son état de santé s'était aggravé depuis que ce collège s'était prononcé sur sa situation. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de M. C..., qui n'a produit aucun élément médical postérieur à 2020, se serait aggravé ou, à tout le moins, aurait évolué de manière significative depuis l'avis rendu par le collège de médecins de l'OFII le 7 septembre 2021.

7. Dans ces conditions, M. C... n'apporte aucun élément de nature à infirmer l'appréciation portée par le collège de médecins de l'OFII et par le préfet. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

8. En quatrième lieu, M. C... fait valoir qu'il est entré en France en 2003 à l'âge de quatorze ans, qu'il est le père d'un enfant français né en 2011 et qu'il a épousé une ressortissante française en 2018.

9. Toutefois, d'une part, le requérant, qui est en situation irrégulière au regard de son droit au séjour depuis 2010, a fait l'objet de neuf condamnations pénales entre 2007 et 2021, représentant une durée totale d'emprisonnement de sept ans et huit mois, pour des faits notamment de dégradation ou détérioration d'un bien d'autrui, de menaces de mort, d'escroquerie en bande organisée, d'outrage à magistrat, de port d'arme blanche sans motif légitime, de violences habituelles suivies d'incapacité supérieure à huit jours sur sa conjointe et de contrefaçon de monnaie.

10. D'autre part, l'intéressé qui, ainsi qu'il vient dit, a été condamné pour avoir commis des faits de violence sur son épouse, ne justifie pas d'une communauté de vie avec cette dernière, avec laquelle au demeurant, il a été interdit d'entrer en contact. Le requérant n'apporte aucun élément de nature à démontrer la réalité de la relation qu'il entretiendrait avec ses belles-filles, alors qu'il a lui-même indiqué devant le tribunal administratif qu'il n'avait jamais été accepté par l'une d'elles.

11. Enfin, M. C..., qui ne conteste pas ne pas avoir rencontré son fils, né en 2011, au parloir ni n'avoir eu de contact téléphonique avec lui au cours de ses différentes périodes d'incarcération, ne justifie pas, par la seule production d'une facture émise en 2019 au nom de son épouse et de sept bordereaux d'envois de lettres ou de colis établis entre décembre 2018 et mars 2022 et dont au surplus le nom du destinataire est, pour certains d'entre eux, illisible, contribuer de manière effective à l'entretien et à l'éducation de cet enfant, lequel vit avec sa mère à Aix-en-Provence, ni même de l'existence d'une relation avec celui-ci.

12. Dans ces conditions, compte tenu des conditions de séjour de M. C..., l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de celui-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts, notamment d'ordre public, en vue desquels il a été pris. Il n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le préfet de la Seine-Maritime, dont la décision opposée au requérant n'a d'ailleurs ni pour objet, ni pour effet de le séparer de son fils, n'a pas porté, à l'intérêt supérieur de celui-ci, une atteinte méconnaissant les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant.

13. En cinquième lieu, pour les motifs qui ont été exposés aux points précédents, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé en refusant de l'admettre au séjour.

14. En sixième lieu, la situation personnelle et familiale de M. C..., telle que décrite ci-dessus, ne permet pas de caractériser des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels de nature à lui ouvrir droit au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, en refusant de l'admettre exceptionnellement au séjour, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

15. En dernier lieu, si le requérant soutient que le refus de titre de séjour porte atteinte à sa liberté d'aller et de venir, cette liberté s'exerce dans le cadre de la loi et, en particulier, s'agissant des étrangers, dans le cadre des dispositions légales et réglementaires relatives à l'entrée et au séjour des étrangers en France. Or, ainsi qu'il vient d'être dit, la décision de refus de séjour ne méconnaît pas ces dispositions. Par suite, M. C... n'est pas fondé à se prévaloir d'une atteinte à cette liberté.

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, sous astreinte, et celles présentées sur le fondement de fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Me Minet.

Copie en sera transmise au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 30 janvier 2025 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- M. François-Xavier Pin, président-assesseur,

- Mme Alice Minet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 février 2025.

Le président-rapporteur,

Signé : F.-X. Pin

Le président de chambre,

Signé : M. A...

La greffière,

Signé : E. Héléniak

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Elisabeth Héléniak

2

N°24DA01127


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24DA01127
Date de la décision : 20/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. François-Xavier Pin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : MINET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-20;24da01127 ?
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