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12/02/2025 | FRANCE | N°24DA00712

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 3ème chambre, 12 février 2025, 24DA00712


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler les décisions révélées par les nouvelles fiches de poste du 7 janvier 2021, du 2 octobre 2021 et du 22 décembre 2021 par lesquelles le maire de la commune d'Orival a modifié son affectation, d'autre part, d'enjoindre à la commune d'Orival, à titre principal, de la rétablir dans ses fonctions dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, et, à titre subsidiaire, de r

examiner sa situation, en toute hypothèse sous astreinte de 100 euros par jour de retar...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler les décisions révélées par les nouvelles fiches de poste du 7 janvier 2021, du 2 octobre 2021 et du 22 décembre 2021 par lesquelles le maire de la commune d'Orival a modifié son affectation, d'autre part, d'enjoindre à la commune d'Orival, à titre principal, de la rétablir dans ses fonctions dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, en toute hypothèse sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 2101448, 2103862 et 2203242 du 1er mars 2024, le tribunal administratif de Rouen a annulé les décisions des 14 janvier et 2 octobre 2021 par lesquelles le maire de la commune d'Orival a modifié l'affectation de Mme A..., a enjoint à la commune d'Orival de réintégrer Mme A... dans l'emploi qu'elle occupait antérieurement à la note de service du 14 janvier 2021, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, sauf à ce que celle-ci accepte d'être affectée dans un emploi équivalent, a mis à la charge de la commune d'Orival la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté la requête n° 2203242 et le surplus des conclusions de la requête n° 2101448.

Procédure devant la cour :

Par deux requêtes enregistrées le 12 avril 2024, sous les n° 24DA00712 et 24DA00713, et un mémoire enregistré le 29 octobre 2024, la commune d'Orival, représentée par Me Dettori, doit être regardée comme demandant à la cour :

1°) de réformer ce jugement ;

2°) de confirmer les décisions du 14 janvier et 2 octobre 2021 en tout point ;

3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son appel est recevable ;

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que la note de service du 14 janvier 2021 était intervenue au terme d'une procédure irrégulière, dans la mesure où la décision a été prise dans l'intérêt du service ;

- aucun des autres moyens soulevés en première instance par Mme A... n'est fondé.

Par deux mémoires en défense enregistrés les 30 septembre et 9 décembre 2024, Mme A..., représentée par Me Languil, conclut au rejet de la requête et à ce soit mis à la charge de la commune d'Orival la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que la requête d'appel est irrecevable, le maire ne justifiant pas de sa qualité pour ester en justice, et subsidiairement que les moyens contenus dans la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général de la fonction publique ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi du 22 avril 1905 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marie-Pierre Viard,

- et les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 24DA00712 et 24DA00713, qui concernent la situation administrative d'une même fonctionnaire territoriale, présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.

2. Mme A... a été recrutée à compter du 9 octobre 2018 en qualité d'adjointe administrative territoriale, pour exercer les fonctions de secrétaire de mairie au sein de la commune d'Orival. Par une note de service du 14 janvier 2021, Mme A... s'est d'abord vu retirer les fonctions de gestion du personnel qu'elle exerçait. Puis, par une nouvelle fiche de poste en date du 2 octobre 2021, le maire de la commune d'Orival a réduit les missions qui lui étaient confiées à la gestion des listes électorales et à la préparation des scrutins. La commune d'Orival relève appel du jugement du 1er mars 2024 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé les décisions des 14 janvier et 2 octobre 2021, modifiant l'affectation de Mme A....

Sur la recevabilité des requêtes d'appel :

3. Aux termes de l'article L. 2132-1 du code général des collectivités territoriales : " Sous réserve des dispositions du 16° de l'article L. 2122-22 le conseil municipal délibère sur les actions à intenter au nom de la commune ". L'article L. 2132-2 de ce code dispose que : " Le maire, en vertu de la délibération du conseil municipal, représente la commune en justice ". L'article L. 2122-22 du même code dispose que : " Le maire peut (...) par délégation du conseil municipal, être chargé (...) pour la durée de son mandat : (...) 16° D'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle (...) ". Il résulte de ces dispositions que le conseil municipal peut légalement donner au maire une délégation générale pour représenter la commune en justice, en demande comme en défense, pendant la durée de son mandat.

4. Par une délibération du 24 octobre 2024, produite aux débats, le conseil municipal d'Orival a autorisé le maire, pour la durée du mandat, " d'ester en justice dans le cadre des procédures n° 24DA00570, 24DA00713 et 24DA00712 actuellement pendantes devant la Cour administrative d'appel de Douai ". La fin de non-recevoir opposée par Mme A... tirée de l'absence de qualité pour agir du maire ne peut donc qu'être écartée.

Sur le moyen d'annulation accueilli par le tribunal administratif :

5. Aux termes de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905, dans sa rédaction applicable au litige : " Tous les fonctionnaires civils et militaires, tous les employés et ouvriers de toutes administrations publiques ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d'être l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office, soit avant d'être retardé dans leur avancement à l'ancienneté ". En vertu de ces dispositions, un agent public faisant l'objet d'une mesure prise en considération de sa personne, qu'elle soit ou non justifiée par l'intérêt du service, doit être mis à même de demander la communication de son dossier, en étant averti en temps utile de l'intention de l'autorité administrative de prendre la mesure en cause.

6. Il résulte de l'instruction que les décisions en litige résultent de la volonté de la commune de mettre fin à une situation conflictuelle s'étant développée au sein des services de la mairie, dégradant le climat de travail, en raison de difficultés relationnelles reprochées à Mme A... avec les élus et ses collègues, et qui compromettait le bon fonctionnement des services. Eu égard aux circonstances dans lesquelles elles sont intervenues, ces deux décisions sont dépourvues de caractère disciplinaire. Dans ces conditions, les modifications significatives et successives, par la note de service du 14 janvier 2021 et la fiche de poste modifiée du 2 octobre 2021, de l'affectation de Mme A..., notamment la perte de ses fonctions de gestion du personnel, puis la réduction de ses missions à la gestion des listes électorales et à la préparation des scrutins, résultent bien d'une appréciation subjective de son comportement et doivent par suite être regardées comme des mesures prises en considération de la personne. Or, ainsi que l'invoque l'intéressée, il ne résulte pas des pièces du dossier que la commune d'Orival l'aurait mise à même de demander la communication de son dossier individuel, en l'avertissant en temps utile de son intention de modifier son affectation. Ainsi, Mme A... a été privée de la garantie que constitue le respect de cette formalité procédurale. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que les décisions attaquées méconnaissaient les dispositions précitées de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905.

7. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Orival n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé les décisions des 14 janvier et 2 octobre 2021 au motif que l'intéressée n'a pas été avertie en temps utile de l'intention du maire de prendre ces mesures et mise à même de demander la communication de son dossier, la privant ainsi de la garantie que constitue le respect de cette formalité procédurale.

Sur les frais liés à l'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée à ce titre par la commune d'Orival.

9. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune d'Orival une somme de 1 500 euros à verser à Mme A... sur le même fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de la commune d'Orival sont rejetées.

Article 2 : La commune d'Orival versera à Mme A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Orival et à Mme B... A....

Délibéré après l'audience publique du 28 janvier 2025 à laquelle siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,

- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,

- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 février 2025.

Le président-assesseur,

Signé : J.-M. Guérin-Lebacq

La présidente de chambre,

Présidente-rapporteure,

Signé : M.-P. Viard

La greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Pour la greffière en chef,

par délégation,

La greffière,

C. Huls-Carlier

N° 24DA00712, 24DA00713

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24DA00712
Date de la décision : 12/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Viard
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre Viard
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : DETTORI;DETTORI;LANGUIL

Origine de la décision
Date de l'import : 23/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-12;24da00712 ?
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