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29/01/2025 | FRANCE | N°24DA01509

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 2ème chambre, 29 janvier 2025, 24DA01509


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme E... C... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2023 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2311294 du 27 juin 2024, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 26 juillet 2024, Mme C... A..., représentée par Me Navy, demande à la cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2023 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2311294 du 27 juin 2024, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 juillet 2024, Mme C... A..., représentée par Me Navy, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Nord en date du 22 novembre 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer le titre de séjour sollicité ou à défaut de réexaminer sa situation, sous astreinte de 155 euros par jour de retard, ainsi que de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un défaut d'examen complet et sérieux de sa situation ;

- il méconnaît les articles L. 200-5 et L. 233-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation au regard de l'objectif poursuivi ;

- elle est contraire à l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle peut bénéficier de plein droit d'un titre de séjour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 novembre 2024, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête d'appel de Mme C... A... et s'en remet à ses écritures de première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus, au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Vandenberghe, premier conseiller,

- et les observations de Me Guillaud, représentant Mme C... A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... C... A..., ressortissante de la République démocratique du Congo née le 18 février 1997, est entrée en France le 25 août 2021. Le 26 novembre 2021, elle a sollicité la délivrance d'une carte temporaire de séjour en sa qualité de membre de la famille d'une citoyenne européenne. Par un arrêté du 22 novembre 2023, le préfet du Nord a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français sous trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. Mme C... A... relève appel du jugement du 27 juin 2024 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part aux termes de l'article L. 200-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le présent livre détermine les règles applicables à l'entrée, au séjour et à l'éloignement : / (...) / 4° Des étrangers entretenant avec les citoyens de l'Union européenne et les étrangers qui leur sont assimilés des liens privés et familiaux, tels que définis à l'article L. 200-5. ". Aux termes de cet article L. 200-5 du même code : " Par étranger entretenant des liens privés et familiaux avec un citoyen de l'Union européenne on entend le ressortissant étranger, quelle que soit sa nationalité, ne relevant pas de l'article L. 200-4 et qui, sous réserve de l'examen de sa situation personnelle, relève d'une des situations suivantes : / (...) / 3° Étranger qui atteste de liens privés et familiaux durables, autres que matrimoniaux, avec un citoyen de l'Union européenne. ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 233-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les citoyens de l'Union européenne ont le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'ils satisfont à l'une des conditions suivantes : / 1° Ils exercent une activité professionnelle en France ; / 2° Ils disposent pour eux et pour leurs membres de famille de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie (...) ". Aux termes de l'article L. 233-2 dudit code : " Les ressortissants de pays tiers, membres de famille d'un citoyen de l'Union européenne satisfaisant aux conditions énoncées aux 1° ou 2° de l'article L. 233-1, ont le droit de séjourner sur le territoire français pour une durée supérieure à trois mois (...) ". Aux termes de l'article L. 233-3 du code précité : " Les ressortissants étrangers mentionnés à l'article L. 200-5 peuvent se voir reconnaître le droit de séjourner sur l'ensemble du territoire français pour une durée supérieure à trois mois dans les mêmes conditions qu'à l'article L. 233-2. ".

4. D'une part, il est constant que la sœur de l'appelante, Mme D... A... épouse B..., de nationalité belge, dispose d'un droit de séjour en France en application des dispositions du 1° de l'article L. 233-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle exerce une activité professionnelle en qualité d'ingénieure dans l'industrie pharmaceutique et qu'au surplus elle est mariée avec un ressortissant français.

5. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, et notamment d'une attestation du 19 novembre 2021, que la sœur de Mme C... A... l'héberge à son domicile de Lompret dont elle est propriétaire depuis le 9 septembre 2021, après l'avoir hébergée pendant plusieurs années alors qu'elles résidaient toutes deux en Belgique. Il apparaît en outre que les intéressées, au vu notamment des photographies et attestations de proches produites par l'appelante, entretiennent des liens privés et familiaux, autres que matrimoniaux, avérés, intenses et durables pour l'application du 3° de l'article L. 200-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Au demeurant, Mme B... et son mari, qui ont déclaré un revenu brut global supérieur à 100 000 euros au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2023, sont en mesure de subvenir aux besoins de Mme C... A.... Dès lors, le préfet a fait une inexacte application des dispositions mentionnées aux points 2 et 3 du présent arrêt. Par suite, l'arrêté du 22 novembre 2023 rejetant la demande de titre de séjour de Mme C... A..., lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trois mois et fixant le pays de destination doit être annulé, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête.

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 novembre 2023.

Sur les conclusions à fin d'injonction ;

7. Le présent arrêt, qui annule l'arrêté préfectoral du 22 novembre 2023, implique nécessairement que le préfet du Nord délivre à Mme C... A... le titre de séjour qu'elle sollicite. Dès lors, il y a lieu d'enjoindre à l'administration de lui délivrer une carte de séjour temporaire sur le fondement de l'article L. 233-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement, sous réserve d'un changement de circonstances de droit et de fait à la date de la nouvelle décision du préfet du Nord. En revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à Mme C... A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2311294 du 27 juin 2024 du tribunal administratif de Lille et l'arrêté du préfet du Nord en date du 22 novembre 2023 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Nord de délivrer à Mme C... A... une carte de séjour temporaire, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme C... A... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C... A..., au ministre de l'intérieur et au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 7 janvier 2025 à laquelle siégeaient :

- M. Benoît Chevaldonnet, président de chambre,

- M. Laurent Delahaye, président-assesseur,

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 janvier 2025.

Le rapporteur,

Signé : G. VandenbergheLe président de chambre,

Signé : B. Chevaldonnet

La greffière,

Signé : A.-S. Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

par délégation,

La greffière

2

N°24DA01509


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24DA01509
Date de la décision : 29/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chevaldonnet
Rapporteur ?: M. Guillaume Vandenberghe
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : NAVY

Origine de la décision
Date de l'import : 13/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-29;24da01509 ?
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