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19/12/2024 | FRANCE | N°22DA02003

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 1ère chambre, 19 décembre 2024, 22DA02003


Vu la procédure suivante :



Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 29 septembre 2022 et le 4 janvier 2024, la société éolienne des Violettes, représentée par Me Yaël Cambus, demande à la cour :



1°) d'annuler l'arrêté du 18 juillet 2022 par lequel le préfet de l'Aisne a rejeté sa demande d'autorisation de construire et d'exploiter un parc éolien de huit aérogénérateurs et trois postes de livraison sur le territoire de la commune de Tavaux-et-Pontséricourt ;



2°) de lui délivrer l'autori

sation sollicitée et de renvoyer au préfet le soin de fixer les prescriptions nécessaires à la préservation...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 29 septembre 2022 et le 4 janvier 2024, la société éolienne des Violettes, représentée par Me Yaël Cambus, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 18 juillet 2022 par lequel le préfet de l'Aisne a rejeté sa demande d'autorisation de construire et d'exploiter un parc éolien de huit aérogénérateurs et trois postes de livraison sur le territoire de la commune de Tavaux-et-Pontséricourt ;

2°) de lui délivrer l'autorisation sollicitée et de renvoyer au préfet le soin de fixer les prescriptions nécessaires à la préservation des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de lui délivrer l'autorisation sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société pétitionnaire soutient que :

- le motif de refus tiré de l'insuffisance du volet paysager de l'étude de l'impact n'est pas fondé ;

- le projet litigieux n'est pas de nature à porter atteinte aux paysages, notamment ceux de la vallée de la Brune, ou au patrimoine environnant, notamment les églises fortifiées de la Thiérache et ne contribue pas à l'encerclement des villages alentour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er décembre 2023, le préfet de l'Aisne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le moyen soulevé par la société requérante à l'encontre de l'unique motif de refus qui lui a été opposé, à savoir l'insuffisance de l'étude d'impact du projet compte tenu des biais affectant les photomontages n°s 7, 9, 16, 17, 18, 19 et 20, n'est pas fondé ;

- en outre, l'étude paysagère est insuffisante en l'absence d'étude de l'impact de nuit du projet depuis la promenade des remparts de Laon et de photomontage réalisé depuis les meurtrières de l'église de Burelles ;

- cette insuffisance de l'étude d'impact ne permet pas de conclure à l'absence d'un impact excessif du projet sur le paysage et le patrimoine ou à l'absence d'un effet d'encerclement.

Par ordonnance du 1er février 2024, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 19 février 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thulard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Eustache, rapporteur public,

- et les observations de Me Cambus, représentant la société éolienne des Violettes.

Une note en délibéré a été présentée par la société éolienne des Violettes par Me Cambus, le 17 décembre 2024 et n'a pas été communiquée.

Considérant ce qui suit :

1. La société éolienne des Violettes a déposé le 7 août 2018 une demande d'autorisation environnementale en vue de construire et exploiter un parc éolien, composé de huit aérogénérateurs et de trois postes de livraison implantés sur le territoire de la commune de Tavaux-et-Pontséricourt (02250). Par un arrêté du 18 juillet 2022, le préfet de l'Aisne a rejeté cette demande au motif de l'insuffisance du volet paysager de l'étude d'impact, au regard des incidences sur les paysages et le patrimoine environnant et des risques d'encerclement des villages alentour. Par la présente requête, la société éolienne des Violettes demande à la cour d'annuler cet arrêté.

Sur le cadre juridique applicable à l'étude d'impact :

2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) III. L'évaluation environnementale est un processus constitué de l'élaboration, par le maître d'ouvrage, d'un rapport d'évaluation des incidences sur l'environnement, dénommé ci-après " étude d'impact " (...). / L'évaluation environnementale permet de décrire et d'apprécier de manière appropriée, en fonction de chaque cas particulier, les incidences notables directes et indirectes d'un projet sur les facteurs suivants : / 1° La population et la santé humaine ; (...) / 4° Les biens matériels, le patrimoine culturel et le paysage ; / (...). / Lorsqu'un projet est constitué de plusieurs travaux, installations, ouvrages ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage, il doit être appréhendé dans son ensemble, y compris en cas de fractionnement dans le temps et dans l'espace et en cas de multiplicité de maîtres d'ouvrage, afin que ses incidences sur l'environnement soient évaluées dans leur globalité. (...) ". Aux termes de l'article R. 122-5 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, installations, ouvrages, ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. (...) ".

3. D'autre part, il résulte des articles L. 581-3 et L. 511-1 du code de l'environnement que l'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients " pour la commodité du voisinage ", dont relève le phénomène de saturation visuelle qu'est susceptible de générer un projet.

4. En second lieu, il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur le sens de la décision de l'autorité administrative.

5. En l'espèce, il résulte de l'instruction que dix monuments historiques classés et neuf inscrits sont implantés dans un rayon de 12 kilomètres autour du site du parc projeté par la société éolienne des Violettes. Il est ainsi susceptible, compte tenu de son implantation à proximité des vallées de la Brune et de la Serre, d'avoir une incidence sur le patrimoine culturel et le paysage, alors que ceux-ci sont d'un intérêt majeur dans ce secteur de la Thiérache qui regroupe notamment un grand nombre d'églises médiévales fortifiées remarquables, particulièrement typiques de cette région. De même, il résulte de l'instruction, compte tenu notamment de l'existence de plusieurs parcs éoliens en activité ou en projet à proximité du site retenu par la société requérante, qu'un risque de saturation visuelle existe pour les habitants des villages alentour. Dans ces conditions, il y avait lieu pour la société éolienne des Violettes, conformément à l'article R. 122-5 du code de l'environnement, de proportionner l'étude paysagère incluse dans son étude d'impact à ces sensibilités particulières.

Sur le motif initial :

6. Il résulte de la rédaction retenue par le préfet de l'Aisne dans son arrêté litigieux du 18 juillet 2022, éclairée par ses écritures en défense, que l'unique motif de refus d'autorisation qui a été opposé à la société éolienne des Violettes consiste en l'insuffisance de l'étude paysagère jointe à l'étude d'impact. Le préfet a reproché premièrement à cette étude de ne pas permettre d'apprécier l'impact du projet sur les sites et paysages de la seule vallée de la Brune, et, deuxièmement, d'avoir cherché à minimiser le potentiel phénomène de saturation visuelle en n'étudiant pas " concomitamment " l'incidence de son projet avec celle du projet porté par la société éolienne des Primevères.

En ce qui concerne l'étude de l'impact du projet de la société éolienne des Violettes sur les sites et paysages :

7. Le préfet reproche plus particulièrement à la société pétitionnaire l'insuffisance des photomontages n° 7, 9, 16, 17, 18, 19 et 20. Aux termes de la décision attaquée, l'absence de visualisation des églises fortifiées sur ces photomontages résulterait de biais, liés aux choix des angles de prise de vue, aux conditions météorologiques ou à la présence d'un couvert végétal saisonnier, dès lors notamment que le photomontage n°8 démontre bien un impact du site sur certaines églises fortifiées, en l'occurrence celle du village de Gronard.

8. Il résulte toutefois de l'instruction que la société éolienne des Violettes a inclus dans son étude d'impact une étude paysagère spécifique portant sur les églises de Thiérache. Il ne résulte pas de l'instruction et n'est pas allégué par le préfet qu'elle n'aurait pas porté sur l'ensemble des églises de la vallée de la Brune justifiant par leur caractère remarquable une analyse spécifique. Pour chacune des églises étudiées, la société a réalisé un photomontage relatif à la visibilité du parc depuis ses abords (" intervisibilité "). Elle a également réalisé un photomontage relatif à la covisibilité de l'église en cause et des éoliennes projetées. Elle a enfin indiqué dans un tableau de synthèse de son étude paysagère l'impact du projet sur chaque église fortifiée analysée, en le classant comme " nul ", " faible ", " modéré " ou " signifiant ", et en justifiant littéralement chacun de ces classements par un commentaire détaillé de l'intervisibilité et de la covisibilité.

9. Ont également été jointes à l'étude d'impact des études d'encerclement réalisées pour chacun des villages susceptibles d'être impactés par le projet. Il résulte de l'instruction que ceux-ci comportent parfois des photomontages complémentaires à ceux critiqués par le préfet de l'Aisne, notamment dans le cas du village de Rogny.

10. Il résulte de l'instruction que ces éléments ont été soumis à l'enquête publique qui s'est tenue du 15 juin au 15 juillet 2020.

11. Par ailleurs, en réponse aux critiques qui avaient été formulées par l'administration au cours de l'instruction de sa demande relativement aux photomontages n° 7, 9, 17, 18 et 19 de son étude paysagère, la société éolienne des Violettes a réalisé des photomontages complémentaires N7, N9, N17, N18 et N19 qu'elle a intégrés dans un document daté du 10 décembre 2021 et réceptionné le 7 janvier 2022 par le préfet de l'Aisne. Il lui a également été communiqué à cette occasion cinq vidéomontages permettant d'apprécier l'impact paysager du projet depuis le point de vue d'un automobiliste se rendant des points de prise de vue 7, 9, 17, 18 et 19 aux nouveaux points N7, N9, N17, N18 et N19.

12. Les nouveaux photomontages N7 et N9 ont précisément cherché à apprécier une éventuelle covisibilité entre les aérogénérateurs et les églises fortifiées de Burelles et de Prisces. Le préfet de l'Aisne n'a apporté aucune critique quant à la qualité et à la pertinence de ces vues. Il résulte également de l'instruction que les vidéomontages 7 et 9 permettent d'apprécier pleinement l'impact paysager du projet sur ces deux églises.

13. En ce qui concerne le photomontage n°17, réalisé depuis la route reliant Braye-en-Thiérache au site d'implantation des éoliennes, le préfet de l'Aisne lui reprochait à raison d'avoir opté pour un angle de prise de vue centré sur le projet et ne permettant pas d'apprécier pleinement sa covisibilité avec la vallée de la Brune. Toutefois, le photomontage N17, qui est tourné vers ladite vallée, ainsi que le vidéomontage n°17, permettent de pallier cette insuffisance.

14. En ce qui concerne les photomontages n°s 18 et 19, le préfet de l'Aisne leur reprochait d'être pris depuis un point de vue trop éloigné de la vallée de la Brune, situé sur le plateau qui conduit jusqu'à la ville de Vervins, et estimait qu'ils ne permettaient pas d'apprécier l'impact visuel du projet sur les monuments situés dans cette vallée. Toutefois, là encore, cette insuffisance a été palliée par la transmission au préfet des nouveaux photomontages N18 et N19 et des vidéomontages 18 et 19, lesquels ont été réalisés depuis la route conduisant du plateau à la vallée de la Brune.

15. En ce qui concerne le photomontage n°16, il résulte de l'instruction qu'il vise à étudier l'impact potentiel du projet depuis le sud du village de Dagny. Ce village est situé à la lisière du périmètre d'étude rapproché, à environ 12 kilomètres des futures éoliennes, et ne comprend pas d'église faisant l'objet d'une protection au titre des monuments historiques. S'il est vrai que la vue a été prise en période de pleine végétation, elle démontre également que le rideau végétal est particulièrement dense et qu'une covisibilité entre le projet et certaines églises fortifiées depuis cette route est soit inexistante, soit très limitée. Dans ces conditions, le préfet de l'Aisne n'était pas fondé à considérer insuffisant ce photomontage. Au surplus, l'impact des aérogénérateurs projetés sur le patrimoine a pu être également apprécié au regard des développements de l'étude paysagère spécifiques aux églises de Renneval et Vigneux-Hocquet, situées dans l'axe du photomontage n°16, entre le point de prise de vue et le site d'implantation des éoliennes.

16. En ce qui concerne le photomontage n°20, réalisé depuis l'ouest de Rogny, le préfet lui reproche d'occulter la covisibilité entre le parc éolien projeté et l'église fortifiée de ce village en raison de la présence d'un bois. Toutefois, cette vue démontre que les arbres en cause ne sont pas à feuilles caduques, si bien que ce rideau végétal a vocation à perdurer toute l'année. Dans ces conditions, le préfet de l'Aisne n'était pas fondé à considérer insuffisant ce photomontage. Par ailleurs et ainsi qu'il a été dit, l'étude d'encerclement de Rogny présente une vue complémentaire, prise depuis l'est du village, qui permet également d'apprécier l'éventuelle covisibilité entre le parc éolien projeté et l'église fortifiée et qui n'a fait l'objet d'aucune critique par le préfet de l'Aisne.

17. Enfin, contrairement à ce que fait valoir le préfet de l'Aisne, il ne résulte pas de l'instruction que les prises de vue qu'il conteste auraient été réalisées dans des conditions météorologiques de nature à fausser l'appréciation de l'impact du projet sur les paysages et les monuments, particulièrement ceux de la vallée de la Brune.

18. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que, contrairement à ce qu'a estimé le préfet de l'Aisne dans son arrêté en litige, l'administration disposait à la date du 18 juillet 2022 de l'ensemble des éléments utiles et nécessaires à l'appréciation de l'impact du projet de la société éolienne des Violettes sur les sites et paysages de la vallée de la Brune.

En ce qui concerne l'étude de l'impact du projet de la société éolienne des Violettes sur une potentielle saturation visuelle :

19. Aux termes du III de l'article L. 122-1 du code de l'environnement : " Lorsqu'un projet est constitué de plusieurs travaux, installations, ouvrages ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage, il doit être appréhendé dans son ensemble, y compris en cas de fractionnement dans le temps et dans l'espace et en cas de multiplicité de maîtres d'ouvrage, afin que ses incidences sur l'environnement soient évaluées dans leur globalité. ".

20. Il résulte de l'instruction que les études d'encerclement produites en août 2019 font clairement apparaître sur leurs diagrammes les douze éoliennes projetées alors par la société pétitionnaire et la société éolienne des Primevères. Ainsi, contrairement à ce qu'a estimé le préfet de l'Aisne dans son arrêté en litige, aucune insuffisance de l'étude d'impact tenant à ce qu'elle n'aurait pas évalué les incidences sur l'environnement dans leur globalité, en méconnaissance des dispositions précitées, ne résulte de l'instruction.

21. La société éolienne des Violettes est, par conséquent, fondée à soutenir que le motif initial de la décision de refus qui lui a été opposée le 18 juillet 2022 est entaché d'illégalité.

Sur la demande de substitution de motifs :

22. L'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

23. En l'espèce, le préfet de l'Aisne mentionne dans son mémoire en défense l'avis de l'Unité départementale de l'architecture et du paysage (UDAP), ainsi qu'une remarque consignée par le commissaire-enquêteur dans son rapport, qui sont relatifs à l'absence de réalisation par la société pétitionnaire d'une vue depuis la promenade des remparts de Laon de nature à apprécier l'impact du projet de nuit, ainsi qu'à l'absence d'un photomontage depuis les meurtrières de l'église fortifiée de Burelles, situées à 30 mètres de hauteur. Il doit être regardé comme sollicitant que ces motifs soient substitués au motif initial de refus.

24. Toutefois, le dossier d'étude d'impact comprend un photomontage réalisé de jour depuis la promenade des remparts de Laon, dont il résulte que l'impact visuel du parc projeté par la société éolienne des Violettes sera nécessairement très limité de nuit depuis ce point de vue.

25. Par ailleurs, la société pétitionnaire fait valoir sans être contestée que l'église de Burelles ne fait l'objet que de visites occasionnelles, si bien qu'un point de vue réalisé depuis ses meurtrières n'était pas nécessaire, le pétitionnaire n'étant pas tenu de réaliser des photomontages depuis l'ensemble des points de vue concernés par le projet en l'absence de particularités nécessitant une information spécifique du public. La société éolienne des Violettes indique également, en tout état de cause, sans être contredite, que le photomontage n°7, qui consiste en une vue depuis le sud du village et qui comporte des lignes de niveaux topographiques, permet d'apprécier ce que serait le point de vue d'un observateur situé dans la tour de cette église.

26. Par suite, les éléments rapportés par le préfet de l'Aisne dans son mémoire en défense ne sont pas non plus de nature à établir des inexactitudes, omissions ou insuffisances au sein de l'étude d'impact qui auraient été de nature à exercer une influence sur le sens de sa décision. Il n'y a donc pas lieu de procéder à la substitution de motifs sollicitée.

27. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête de la société éolienne des Violettes, lesquels sont au demeurant inopérants en ce qu'ils critiquent des motifs de refus qui ne lui ont été opposés par le préfet de l'Aisne ni dans sa décision attaquée ni dans son mémoire en défense, que la société éolienne des Violettes est fondée à demander à la cour d'annuler l'arrêté du 18 juillet 2022 portant rejet de sa demande de construire et d'exploiter un parc éolien de huit aérogénérateurs et trois postes de livraison sur le territoire de la commune de Tavaux-et-Pontséricourt.

Sur les conclusions aux fins de délivrance et d'injonction :

28. S'il est vrai que le dossier soumis à enquête publique comportait quelques photomontages présentant des biais ou des insuffisances qui auraient pu justifier dès ce stade des vues complémentaires, il ne résulte pas des éléments transmis par la société pétitionnaire et réceptionnés par l'administration le 7 janvier 2022 et n'est d'ailleurs pas même allégué en défense que l'impact du projet sur les sites et paysages de la vallée de la Brune tel que décrit dans l'étude d'impact initiale et notamment dans l'étude paysagère spécifique portant sur les églises de Thiérache serait erroné. Dans ces conditions, les quelques insuffisances mineures ayant entaché le dossier d'enquête publique n'ont pas pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population et il n'est pas nécessaire d'organiser une nouvelle enquête publique sur le projet de la société éolienne des Violettes.

29. Eu égard au motif qui le fonde, le présent arrêt implique seulement mais nécessairement qu'il soit enjoint au préfet de l'Aisne de statuer à nouveau sur la demande d'autorisation présentée par la société éolienne des Violettes, dans un délai de trois mois à compter de sa notification.

Sur les frais de l'instance :

30. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par la société éolienne des Violettes et non compris dans les dépens, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêté du 18 juillet 2022 par lequel le préfet de l'Aisne a refusé de délivrer à la société éolienne des Violettes l'autorisation de construire et d'exploiter un parc éolien de huit aérogénérateurs et trois postes de livraison sur le territoire de la commune de Tavaux-et-Pontséricourt est annulé.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Aisne de statuer à nouveau sur la demande d'autorisation présentée par la société éolienne des Violettes, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à la société éolienne des Violettes la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société éolienne des Violettes, au préfet de l'Aisne et à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Vincent Thulard, premier conseiller,

- M. Damien Vérisson, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 décembre 2024.

Le rapporteur,

Signé : V. Thulard

La présidente de la formation de jugement

Signé : I. Legrand

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques en ce qui la concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Nathalie Roméro

2

N°22DA02003


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22DA02003
Date de la décision : 19/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Legrand
Rapporteur ?: M. Vincent Thulard
Rapporteur public ?: M. Eustache
Avocat(s) : CABINET LEFEVRE PELLETIER ET ASSOCIES ET CGR LEGAL

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-19;22da02003 ?
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