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18/12/2024 | FRANCE | N°24DA00892

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 3ème chambre, 18 décembre 2024, 24DA00892


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 26 décembre 2023 par lequel le préfet de la Seine-Maritime l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination, et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.



Par un jugement n° 2305095 du 25 janvier 2024, la magistrate désignée par le président du tribuna

l administratif de Rouen a accordé l'aide juridictionnelle provisoire à M. A... et a rejeté sa demande d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 26 décembre 2023 par lequel le préfet de la Seine-Maritime l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination, et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par un jugement n° 2305095 du 25 janvier 2024, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Rouen a accordé l'aide juridictionnelle provisoire à M. A... et a rejeté sa demande d'annulation.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 mai 2024, M. A..., représenté par Me Leprince, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 janvier 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 décembre 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est insuffisamment motivée en fait ;

- cette décision a été prise en méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne d'être entendu préalablement à l'édiction d'une décision défavorable ;

- cette décision a été prise au terme d'une procédure irrégulière en l'absence de saisine du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- le préfet de la Seine-Maritime l'a éloigné sans procéder à un examen particulier de sa situation ;

- la mesure d'éloignement méconnaît le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire est insuffisamment motivée ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ;

- cette décision est privée de base légale en raison de l'illégalité dont la mesure d'éloignement est entachée ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision d'interdiction de retour est insuffisamment motivée ;

- cette décision est privée de base légale en raison de l'illégalité dont la mesure d'éloignement est entachée ;

- elle méconnaît l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il justifie de circonstances humanitaires faisant obstacle à une interdiction de retour ;

- cette mesure d'interdiction n'a pas été précédée d'un examen personnalisé de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Maritime qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Par une ordonnance du 8 octobre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 6 novembre 2024, à 12 heures.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 avril 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Guérin-Lebacq, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant nigérian né le 5 août 1973, a été contrôlé par les services de police le 26 novembre 2023 et placé à cette occasion en retenue administrative en vue de la vérification de son droit au séjour sur le territoire français. A l'issue de ce contrôle, le préfet de la Seine-Maritime a pris à son encontre le 26 décembre 2023 un arrêté l'obligeant à quitter le territoire français sans délai à destination de son pays d'origine et lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une année. M. A... relève appel du jugement du 25 janvier 2024 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée (...) ". La décision obligeant M. A... à quitter le territoire français, qui vise les dispositions de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne que l'intéressé est entré irrégulièrement sur le territoire français et s'y maintient en situation irrégulière. Cette décision, qui n'avait pas à reprendre l'ensemble des éléments se rapportant à la situation personnelle et familiale de M. A..., comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est donc suffisamment motivée.

3. En deuxième lieu, il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.

4. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal établi par les services de police le 26 décembre 2023, que M. A... a été mis en mesure de présenter des observations sur sa situation personnelle, familiale et administrative, et a été interrogé sur la perspective qu'une mesure d'éloignement soit prononcée à son encontre. A cet égard, il a eu la possibilité de donner toute information utile sur ses enfants résidant sur le territoire français et sur sa situation médicale. Le moyen tiré d'une méconnaissance du droit d'être entendu ne peut qu'être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Aux termes de l'article R. 611-1 du même code : " Pour constater l'état de santé de l'étranger mentionné au 9° de l'article L. 611-3, l'autorité administrative tient compte d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / (...) ". Aux termes de l'article R. 611-2 de ce code : " L'avis mentionné à l'article R. 611-1 est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu : / 1° D'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement l'étranger ou un médecin praticien hospitalier ; / 2° Des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / (...) ". En application de l'article 9 de l'arrêté précité du 27 décembre 2016, l'étranger qui sollicite le bénéfice de la protection prévue au 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est tenu de faire établir le certificat médical par son médecin traitant. Aux termes de l'article 10 du même arrêté, le demandeur doit communiquer sans délai ce certificat médical, dûment renseigné et accompagné de tous les documents utiles au service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dont l'adresse lui a été préalablement communiquée.

6. Il ressort des pièces du dossier que, si M. A... a sollicité auprès de la préfecture du Calvados, le 19 avril 2022, la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé, il n'apporte aucune contradiction aux éléments apportés en défense dont il ressort qu'il n'a pas répondu à la convocation au rendez-vous médical prévu le 4 août 2022 pour l'instruction de sa demande. Pour soutenir que la décision contestée l'obligeant à quitter le territoire français a été prise au terme d'une procédure irrégulière, il se borne à soutenir que le préfet de la Seine-Maritime était informé de ses problèmes de santé. Toutefois, il n'est pas même allégué que M. A... aurait entendu solliciter la protection prévue par le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en transmettant à cette fin un certificat médical établi par son médecin traitant dans les conditions prévues par l'arrêté du 27 décembre 2016. En outre, l'appelant ne verse au dossier aucun document médical se rapportant à sa situation sanitaire et laissant supposer une impossibilité médicale de l'éloigner. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Maritime l'a obligé à quitter le territoire français sans consulter préalablement le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Pour les mêmes raisons, le moyen tiré d'une prétendue méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 ne peut qu'être écarté.

7. En quatrième lieu, si M. A... fait état de son entrée sur le territoire français au cours de l'année 2013, il ne verse à l'instance aucune pièce de nature à établir une insertion sociale ou professionnelle en France. Après que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 30 juin 2014, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 18 mars 2015, M. A... a fait l'objet de plusieurs mesures d'éloignement, notamment les 8 juillet 2015, 30 juillet 2019 et 21 octobre 2021. Il n'apporte aucune pièce de nature à justifier de liens entretenus avec son frère et sa sœur, qui résident selon lui sur le territoire français en situation régulière. Si l'appelant déclare avoir un premier enfant, né le 26 août 2020, qui réside sur le territoire français, il ressort des pièces du dossier que la mère de cet enfant, également de nationalité nigériane, est en situation irrégulière et a fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 19 juillet 2023, assortie d'une interdiction de retour d'une durée de trois mois. M. A... invoque la présence en France d'un deuxième enfant, né d'une autre union le 22 septembre 2020, et dont la mère, de nationalité nigériane, est en situation régulière. Toutefois, l'intéressé, qui a déclaré vivre avec la mère de son enfant plus âgé, ne donne aucune indication sur les liens qu'il entretiendrait avec la mère de son second enfant, alors que les virements intervenus de juin à septembre 2023 et en novembre et décembre 2023, ainsi que la facture datée du 21 décembre 2023, ne suffisent pas à démontrer une contribution à l'entretien et à l'éducation de ce dernier. M. A... ne verse au dossier aucune pièce médicale se rapportant à son état de santé. Dans ces conditions, eu égard notamment aux conditions du séjour de M. A... sur le territoire français, la mesure d'éloignement contestée n'a pas porté d'atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts poursuivis par une telle décision. Le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté. Pour les mêmes motifs, le requérant n'est pas davantage fondé à soutenir que la décision contestée porte atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant, ni que le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'une mesure d'éloignement sur sa situation.

8. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment de la circonstance que la décision contestée ne comporte aucune mention d'un des deux enfants de M. A..., que le préfet de la Seine-Maritime aurait omis de procéder à un examen particulier de sa situation avant de décider son éloignement.

Sur la légalité de la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :

9. En premier lieu, la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire à M. A... vise les dispositions du 3° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 612-3 du même code, et rappelle que l'intéressé a fait l'objet de trois précédentes mesures d'éloignement qu'il n'a pas exécutées, et ne présente aucun document d'identité ou de voyage en cours de validité, ni aucune garantie de représentation. Par suite, contrairement à ce que soutient M. A..., la décision contestée mentionne les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est suffisamment motivée.

10. En second lieu, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le préfet de la Seine-Maritime aurait omis de procéder à un examen particulier de la situation de M. A... avant de refuser l'octroi d'un délai de départ volontaire. Il n'est pas établi non plus que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

11. En premier lieu, la décision contestée, qui vise l'article L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne que M. A... est un ressortissant nigérian et précise qu'il sera reconduit à destination du pays dont il a la nationalité en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement. Cet arrêté rappelle également les conditions dans lesquelles il est entré et a séjourné sur le territoire français, ainsi que les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile rejetant sa demande d'asile. Il ne ressort pas du procès-verbal d'audition du 26 décembre 2023 que M. A..., invité par le préfet de la Seine-Maritime à présenter ses observations sur un éventuel retour au Nigéria, aurait exprimé des craintes pour sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine. Dans ces conditions, alors que le préfet n'avait pas à préciser les raisons l'ayant conduit à estimer qu'un tel retour ne présentait pas de risque pour l'intéressé, sa décision fixant le pays de destination n'est entachée d'aucune insuffisance de motivation.

12. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 8 que M. A... n'établit pas que la décision l'obligeant à quitter le territoire français serait illégale. Il n'est donc pas fondé à se prévaloir de la prétendue illégalité de cette décision pour soutenir que, par voie d'exception, la décision fixant le pays de destination serait elle-même illégale.

13. En dernier lieu, M. A... ne donne aucune précision sur la nature des risques qu'il dit encourir en cas de retour dans son pays d'origine. Le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut donc qu'être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :

14. En premier lieu, la décision contestée, qui n'avait pas à rappeler l'intensité des liens familiaux entretenus sur le territoire français, mentionne les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est suffisamment motivée.

15. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit plus haut que M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est illégale et doit être annulée. Par suite, il n'est pas plus fondé à soutenir que la décision lui interdisant le retour sur le territoire français doit être annulée en conséquence de l'annulation de la mesure d'éloignement.

16. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour (...) ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

17. Si le requérant soutient résider en France depuis dix ans à la date de la décision contestée, il se maintient sur le territoire français en dépit du rejet de sa demande d'asile et de plusieurs mesures d'éloignement prises à son encontre en 2015, 2019 et 2021. M. A... ne justifie pas d'une insertion sociale particulière sur le territoire français. Il a déclaré vivre avec la mère de son premier enfant, né le 26 août 2020, également de nationalité nigériane, qui se trouve en situation irrégulière sur le territoire français et fait l'objet d'une mesure d'éloignement. Le requérant ne justifie pas contribuer à l'entretien et à l'éducation de son deuxième enfant né le 22 septembre 2020. Dans ces conditions, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas méconnu les dispositions précitées en interdisant le retour sur le territoire français à M. A... pendant une durée d'un an.

18. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux qui sont indiqués plus haut, notamment au point 7, la décision par laquelle le préfet de la Seine-Maritime a interdit à M. A... le retour en France pendant un an ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale, eu égard aux buts poursuivis par une telle mesure d'interdiction. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté. Pour les mêmes raisons, il n'est pas plus établi que le préfet aurait méconnu l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ou fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en interdisant le retour de M. A... sur le territoire français pendant une durée d'un an.

19. En dernier lieu, il n'est pas établi que le préfet de la Seine-Maritime a omis de procéder à un examen de la situation de M. A... avant de lui interdire le retour sur le territoire français. Par suite, le moyen tiré d'une erreur de droit sur ce point doit être écarté.

20. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions présentées à fin d'injonction, ainsi que ses conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et à Me Leprince.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 3 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,

- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,

- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 décembre 2024.

Le président-rapporteur,

Signé : J.-M. Guérin-LebacqLa présidente de chambre,

Signé : M.-P. Viard

La greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière

C. Huls-Carlier

2

N° 24DA00892


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24DA00892
Date de la décision : 18/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Viard
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Guerin-Lebacq
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-18;24da00892 ?
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