Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du maire de la commune de Ronchin n° 432/2021 du 19 avril 2021 refusant de reconnaître sa maladie comme imputable au service en tant que rechute de l'accident de service survenu le 16 juin 2014, ainsi que la décision du 5 mai 2021 rejetant son recours gracieux et refusant d'ordonner une contre-expertise aux fins du réexamen de sa demande.
Par un jugement n° 2108685 du 31 mars 2023, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 12 juillet 2023, et un mémoire en réplique enregistré le 23 septembre 2024, lequel n'a pas été communiqué, M. B..., représenté par Me Stienne-Duwez, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 31 mars 2023 ;
2°) d'annuler les décisions des 19 avril et 5 mai 2021 ;
3°) d'enjoindre à la commune de Ronchin de le placer en congé imputable au service à compter du 5 février 2020 en raison de la rechute de l'accident de service du 16 juin 2014, dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Ronchin une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté du 19 avril 2021 est insuffisamment motivé ;
- il a présenté sa demande d'imputabilité dans le délai requis par l'article 37-17 du décret du 30 juillet 1987 dès lors que la rechute, à compter du 5 février 2020, n'a été médicalement constatée que le 6 novembre suivant ;
- au demeurant, le délai d'un mois prévu par l'article 37-17 n'est pas prescrit à peine de tardiveté de la déclaration de rechute ;
- il ressort des certificats médicaux que les arrêts de travail à compter du 5 février 2020 doivent être pris en charge au titre de la rechute de l'accident du 16 juin 2014.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2024, la commune de Ronchin, représentée par Me Vitse-Bœuf, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 28 août 2024, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 24 septembre 2024 à 12 heures.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 11 mai 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 juillet 1984 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guérin-Lebacq, président-assesseur,
- les conclusions de M. Carpentier-Daubresse, rapporteur public,
- et les observations de Me Playoust, représentant la commune de Ronchin.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., adjoint technique de 2ème classe employé par la commune de Ronchin, a été placé en congé de maladie à compter du 17 juin 2014, reconnu imputable au service en raison d'une agression subie dans le cadre du service. Les conséquences de l'accident de service ont été déclarées consolidées le 7 novembre 2016 avec une incapacité permanente partielle pour névrose traumatique de 5 % et une prise en charge au titre de l'accident de service jusqu'au 31 août 2017. Après une période de reprise de service, M. B... a été de nouveau placé en congé de maladie à compter du 5 février 2020. Requalifié en congé de longue maladie, ce congé a été renouvelé au moins jusqu'au 31 janvier 2022. Par un courrier du 16 juin 2020, M. B... a sollicité l'imputabilité au service de sa maladie, invoquant une " nouvelle pathologie ". A la suite d'échanges avec l'administration, il a précisé dans un courrier du 6 novembre 2020 qu'il entendait se prévaloir d'une rechute de la maladie contractée après l'agression du 17 juin 2014. Après un avis défavorable de la commission de réforme le 16 avril 2021, le maire de la commune de Ronchin a, par un arrêté du 19 avril 2021, refusé la reconnaissance d'une rechute de l'accident de service du 17 juin 2014 et a maintenu le requérant en congé de longue maladie. M. B... a sollicité l'annulation de cet arrêté et du courrier du 5 mai 2021 confirmant le rejet de sa demande d'imputabilité devant le tribunal administratif de Lille. Par un jugement du 31 mars 2023 dont M. B... relève appel, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques (...) ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation (...) doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
3. L'arrêté du 19 avril 2021 comporte les considérations de droit qui en constituent le fondement. Par ailleurs, il n'est pas contesté que cet arrêté a été notifié à M. B... avec, en pièce jointe, le procès-verbal de la commission de réforme du 16 avril 2021 mentionnant un avis défavorable avec pour motif " CMI fourni lors d'un CLM (l'agent étant en arrêt de travail en cours de CLM) ". Ces mentions, justifiant un avis défavorable par la circonstance que le certificat médical initial a été produit au cours d'un congé de longue maladie, alors que l'agent se trouvait en arrêt de travail, constituent une motivation suffisante en fait, ainsi qu'il ressort d'ailleurs des écritures produites en première instance par M. B..., indiquant qu'il a identifié le motif de rejet retenu par la commission de réforme, dont la commune de Ronchin a entendu s'approprier les termes.
4. En second lieu, aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable : " I. - Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article (...) / II. - Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service (...) ". Aux termes de l'article 37-17 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " Lorsqu'il est guéri ou que les lésions résultant de l'accident de service, de l'accident de trajet ou de la maladie professionnelle sont stabilisées, le fonctionnaire transmet à l'autorité territoriale un certificat médical final de guérison ou de consolidation. / Toute modification de l'état de santé du fonctionnaire constatée médicalement postérieurement à la date de guérison apparente ou de consolidation de la blessure qui nécessite un traitement médical peut donner lieu à un nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. / La rechute est déclarée dans le délai d'un mois à compter de sa constatation médicale. La déclaration est transmise dans les formes prévues à l'article 37-2 à l'autorité territoriale dont relève le fonctionnaire à la date de cette déclaration (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter la demande présentée par M. B... le 6 novembre 2020 tendant à obtenir un congé d'invalidité imputable au service, la commune de Ronchin s'est appropriée le motif retenu par la commission de réforme dans son avis défavorable du 16 avril 2021, selon lequel le certificat médical initial a été produit par l'intéressé alors qu'il se trouvait en arrêt de travail, placé en congé de longue maladie. Toutefois, ainsi que le prévoient les dispositions précitées de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, tout fonctionnaire placé dans une position d'activité, et notamment dans la position de congé de longue maladie, peut prétendre au bénéfice d'un congé d'invalidité imputable au service. Il ne résulte pas des dispositions de l'article 37-17 du décret du 30 juillet 1987, ni d'aucune autre disposition, qu'un agent placé en congé de longue maladie ne pourrait pas demander que la pathologie pour laquelle il bénéficie de ce congé soit prise en charge au titre de la rechute d'une maladie antérieurement reconnue imputable au service, lui ouvrant droit à un congé d'invalidité imputable au service.
6. Toutefois, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il ressort des pièces du dossier que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.
7. Pour justifier sa décision, la commune de Ronchin se prévaut de ce que la demande d'imputabilité au service de la rechute lui a été tardivement transmise par M. B..., en méconnaissance des dispositions de l'article 37-17 du décret du 30 juillet 1987. Il résulte de ces dispositions, citées au point 5, que la déclaration de la rechute doit être transmise, dans les formes prévues à l'article 37-2 du même décret, à l'autorité territoriale dans le délai d'un mois à compter de la constatation médicale de la rechute. S'il ressort des pièces du dossier que la première constatation médicale de la rechute résulte d'un certificat établi le 6 novembre 2020, que le requérant a transmis à l'administration par un courrier du même jour en sollicitant la prise en charge de ses arrêts de travail comme imputables au service au titre de cette rechute, l'article 37-2 du décret du 30 juillet 1987 prévoit que la déclaration comporte, outre le certificat médical, un formulaire précisant les circonstances de l'accident ou de la maladie. Ce formulaire, accompagné du certificat médical du 6 novembre 2020, n'a été communiqué à l'administration que le 18 décembre 2020, plus d'un mois après la constatation médicale de la rechute. Dès lors, la commune de Ronchin pouvait légalement rejeter la demande de M. B... pour méconnaissance des dispositions de l'article 37-17 du décret du 30 juillet 1987. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Cette substitution de motifs ne privant l'intéressé d'aucune garantie procédurale liée au motif substitué, il y a donc lieu d'y faire droit et d'écarter le moyen tiré d'une erreur de droit.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions présentées à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Ronchin, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. B... demande le versement au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme dont la commune de Ronchin demande le versement sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Ronchin sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la commune de Ronchin et à Me Stienne-Duwez.
Délibéré après l'audience publique du 5 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,
- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,
- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 novembre 2024.
Le président-rapporteur,
Signé : J.-M. Guérin-LebacqLa présidente de chambre,
Signé : M.-P. Viard
La greffière,
Signé : C. Huls-Carlier
La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
C. Huls-Carlier
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N° 23DA01369