Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2023 par lequel la préfète de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite en cas d'exécution d'office de cette mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2303173 du 29 décembre 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 9 février 2024, Mme A... B..., représentée par Me Nouvian, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 29 décembre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2023 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de cette notification et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans cette attente, sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision de refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision méconnaît les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la mesure d'éloignement méconnaît les articles 3 et 8 de cette convention, ainsi que l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
La requête a été communiquée à la préfète de l'Oise qui n'a pas produit d'observations.
Par une ordonnance du 28 août 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 17 septembre 2024 à 12 heures.
Mme A... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 mars 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Guérin-Lebacq, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... B..., ressortissante de la république démocratique du Congo née le 17 mai 2005, déclare être entrée en France le 18 août 2019, accompagnée de son frère mineur. Prise en charge par l'aide sociale à l'enfance le 25 octobre 2021, entre l'âge de seize ans et celui de dix-huit ans, elle a saisi la préfète de l'Oise le 12 mai 2023 d'une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 27 juillet 2023, la préfète de l'Oise a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite en cas d'exécution d'office de cette mesure d'éloignement. Mme A... B... relève appel du jugement du 29 décembre 2023 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2023.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance ou à un tiers digne de confiance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable ".
3. Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation ainsi portée.
4. Pour demander l'annulation de l'arrêté contesté, Mme A... B..., inscrite au cours de l'année 2022-2023 en première année de baccalauréat professionnel, fait état de l'attestation établie en sa faveur à la suite de son stage dans un office notarial de mai à juin 2023 et de l'obtention d'une mention de réussite intermédiaire au baccalauréat, en dépit de nombreuses absences justifiées par une hospitalisation du 13 janvier au 23 février 2023, ainsi que de la conclusion d'un contrat " jeune majeur " le 16 mai 2023 et des avis positifs de la structure d'accueil sur son comportement et sa capacité à s'intégrer dans la société française. Toutefois, si Mme A... B... soutient être dépourvue de tout lien avec sa famille restée dans le pays d'origine, et se trouver isolée avec son frère mineur sur le territoire français, la préfète de l'Oise a produit devant le tribunal administratif les demandes présentées aux autorités consulaires belges à Kinshasa le 5 juillet 2019 en vue d'obtenir un visa de court séjour pour la requérante, sa mère et son jeune frère, ainsi qu'une photographie prise au cours de l'année 2018, sur laquelle ils figurent tous les trois avec d'autres membres de la famille. Si la mère de la requérante, revenue en France pour y demander l'asile sous couvert d'un nouveau visa délivré par les autorités espagnoles le 29 juillet 2022, indique avoir perdu tout contact avec elle à la suite d'un divorce, l'attestation établie sur ce point le 31 janvier 2024 pour être produite en appel est dépourvue de valeur probante. Dans ces conditions, eu égard en outre aux résultats très moyens obtenus par Mme A... B... depuis l'année scolaire 2021-2022, la préfète de l'Oise n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, commis d'erreur manifeste dans l'appréciation globale de la situation de l'intéressée en refusant de lui accorder un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En deuxième lieu, Mme A... B... fait état de la durée de sa résidence en France, de son entrée dans un processus de formation, et de sa capacité d'intégration. Toutefois, eu égard à ce qui a été dit au point précédent, il n'est pas établi que les décisions refusant un titre de séjour à la requérante et l'obligeant à quitter le territoire français auraient porté à son droit à une vie privée et familiale normale une atteinte disproportionnée eu égard aux objectifs poursuivis par de telles décisions. Le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté.
6. En troisième lieu, si Mme A... B... soutient que son éloignement aurait pour effet de la séparer de son frère mineur, né en 2007, il n'est pas établi que ce dernier serait isolé sur le territoire français, sur lequel réside sa mère et deux autres membres de la fratrie depuis 2022. Le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
7. En dernier lieu, Mme A... B... n'apporte à l'instance aucun élément laissant supposer l'existence de risques pour sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine. Le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions présentées à fin d'injonction, ainsi que ses conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... B..., au ministre de l'intérieur et à Me Nouvian.
Copie en sera adressée à la préfète de l'Oise.
Délibéré après l'audience publique du 15 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,
- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,
- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 novembre 2024.
Le président-rapporteur,
Signé : J.-M. Guérin-LebacqLa présidente de chambre,
Signé : M.-P. Viard
La greffière,
Signé : C. Huls-Carlier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
Par délégation,
La greffière
C. Huls-Carlier
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N° 24DA00256