Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... F..., Mme E... F... et F... F... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 14 décembre 2020 par lequel le préfet de l'Aisne a autorisé M. B... C... à exploiter une parcelle d'une surface totale de 5 hectares 44 ares et 70 centiares située sur le territoire de la commune de Barisis-aux-Bois.
Par un jugement n° 2100403 du 20 avril 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 juin 2023, M. et Mme F... et F... F..., représentés par la SCP Pinchon, Cacheux, Berthelot, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 14 décembre 2020 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- M. C... ne remplit pas les conditions du 2° de l'article R. 331-1 du code rural et de la pèche maritime dès lors qu'il ne dispose ni d'un diplôme en agriculture ni d'une expérience professionnelle suffisante ;
- leur demande était prioritaire dès lors que celle de M. C... relevait du 5ème rang de priorité tel que prévu par l'article 4 du schéma départemental des structures agricoles de l'Aisne alors que la leur relève du 3ème rang de priorité ;
- la parcelle cadastrée AM 57 se situe au milieu de leur îlot parcellaire de sorte que l'impossibilité de l'exploiter va conduire à un démembrement de leur exploitation agricole ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juillet 2024, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés.
La requête et l'ensemble des pièces de la procédure ont été communiqués à M. C..., qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code rural et de la pêche maritime ;
- la loi n°2014-1170 du 13 octobre 2014 ;
- le décret n° 2015-713 du 22 juin 2015 ;
- l'arrêté du préfet de l'Aisne en date du 25 janvier 2008 approuvant le schéma directeur départemental des structures agricoles de l'Aisne ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Vandenberghe, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Regnier, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par acte notarié du 5 décembre 1988, M. et Mme F... ont pris à bail une parcelle cadastrée AM n° 57 d'une surface de 5 hectares 44 ares 70 centiares située sur le territoire de la commune de Barisis-aux-Bois. Le 28 février 2014, M. C..., propriétaire des terres, leur a délivré congé de ce bail à son profit. Puis le 16 septembre 2014, il a demandé l'autorisation d'exploiter la parcelle concernée. Par décision du 1er octobre 2014, le préfet de l'Aisne l'a informé de ce que sa demande n'était pas soumise à autorisation préalable au titre du contrôle des structures agricoles. Toutefois, par jugement du 28 mars 2017, confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 24 septembre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a annulé cette décision au motif que la reprise envisagée par M. C... relevait bien du régime de l'autorisation préalable. Par un arrêté du 6 février 2018, le préfet de la région Hauts-de-France a délivré à M. C... l'autorisation sollicitée. Toutefois, cet arrêté a été annulé par un jugement du 6 mars 2020 du tribunal administratif d'Amiens du fait de l'application erronée des dispositions du schéma directeur régional des exploitations agricoles de Picardie, entré en vigueur le 29 juin 2016, soit postérieurement à la demande du 16 septembre 2014. À la suite de ce jugement, le préfet de l'Aisne a de nouveau autorisé M. C... à exploiter la parcelle concernée par un arrêté du 14 décembre 2020. M. et Mme F..., ainsi que F... F... relèvent appel du jugement du 23 mars 2023 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, la loi du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt a modifié l'article L. 312-1 du code rural et de la pêche maritime en substituant au schéma directeur départemental des structures agricoles prévu par la loi du 1er février 1995 de modernisation de l'agriculture, un schéma directeur régional des exploitations agricoles. Le IX de l'article 93 de la loi du 13 octobre 2014 a prévu, au titre des dispositions transitoires, que : " Jusqu'à l'entrée en vigueur du schéma directeur régional des exploitations agricoles, le contrôle des structures s'applique selon les modalités, les seuils et les critères définis par le schéma directeur des structures agricoles de chaque département ". Si, en vertu du décret du 22 juin 2015 relatif au schéma directeur régional des exploitations agricoles et au contrôle des structures des exploitations agricoles, les dispositions de l'article 1er de ce décret relatives aux modalités d'élaboration des schémas directeurs régionaux des exploitations agricoles entrent en vigueur le lendemain de sa publication, soit le 25 juin 2015, ses articles 2 et 3, relatifs au contrôle des structures des exploitations agricoles, entrent en vigueur, en vertu du I de l'article 4 de ce décret, à la même date que le schéma directeur régional des exploitations agricoles. Enfin, en vertu du II de cet article 4, les demandes d'autorisation et les déclarations préalables déposées en application des I ou II de l'article L. 331-2 du code, dans sa rédaction antérieure à la loi du 13 octobre 2014, avant la date d'entrée en vigueur du schéma directeur régional des exploitations agricoles demeurent soumis aux dispositions des articles R. 331-1 à R. 331-12 relatives au contrôle des structures agricoles dans leur rédaction antérieure au décret du 22 juin 2015.
3. L'article 1er du schéma directeur départemental des structures agricoles de l'Aisne, dans sa version applicable au litige, définit comme priorité, notamment, d'éviter les démembrements préjudiciables à l'économie des exploitations agricoles. Son article 3 précise que, s'agissant des exploitations comprises entre 0,3 et 1,5 unité de référence, le taux de démembrement supportable est calculé de façon linéaire et compris entre 5 et 10 %.
4. En l'espèce, l'arrêté contesté du 14 décembre 2020 par lequel le préfet de l'Aisne a autorisé M. C... à exploiter une parcelle d'une surface totale de 5 hectares 44 ares et 70 centiares située sur le territoire de la commune de Barisis-aux-Bois a été pris au seul motif que l'autorisation sollicitée ne risquait pas de démembrer l'exploitation du fermier en place. Le préfet a ainsi apprécié les conséquences de l'autorisation délivrée à M. C... sur la viabilité économique de l'exploitation F... F... et a estimé que le fermier en place, qui exploitait jusque-là 103 ha, n'allait perdre que 5,28 % de sa surface ce qui représente un taux de démembrement inférieur au plafond de 10 %. En se bornant à soutenir que la parcelle cadastrée AM 57 se situe au milieu de leur îlot parcellaire sans que cette allégation ne soit au demeurant corroborée par aucune pièce, les appelants ne démontrent pas que l'autorisation accordée à M. C... excéderait le taux de démembrement supportable fixé par les dispositions précitées du schéma directeur départemental des structures agricoles de l'Aisne et que le préfet de l'Aisne en aurait fait une inexacte application. Par suite, le moyen doit être écarté.
5. En second lieu, eu égard au seul motif sur lequel le préfet s'est fondé pour délivrer l'autorisation litigieuse tel qu'il est mentionné au point précédent, les appelants ne peuvent utilement soutenir que M. C... ne remplit pas les conditions de capacité ou d'expérience professionnelle mentionnées au 3° de l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime, cette condition ne constituant pas le motif sur lequel le préfet de l'Aisne s'est fondé pour édicter l'arrêté attaqué. Ils ne peuvent pas davantage utilement soutenir que le préfet de l'Aisne aurait inexactement apprécié les règles de priorité fixées par l'article 4 du schéma directeur départemental des structures agricoles de l'Aisne, dès lors qu'en l'absence de demande d'autorisation d'exploiter concurrente et alors qu'il n'est pas établi ni même allégué qu'une autorisation aurait déjà été délivrée, l'administration ne s'est pas fondée sur cet ordre de priorité pour octroyer l'autorisation sollicitée.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme F... et F... F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 décembre 2020.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme F... et F... F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... F..., à Mme E... F..., à F... F... et à la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt.
Copie en sera transmise au préfet de l'Aisne.
Délibéré après l'audience publique du 10 septembre 2024 à laquelle siégeaient :
- M. Benoît Chevaldonnet, président de chambre,
- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller,
- M. Guillaume Toutias, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 septembre 2024.
Le rapporteur,
Signé : G. VandenbergheLe président de la chambre,
Signé : B. ChevaldonnetLa greffière,
Signé : Villette
La République mande et ordonne à la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et la forêt en ce qui la concerne et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière
2
N°23DA01142