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18/09/2024 | FRANCE | N°24DA00264

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 3ème chambre, 18 septembre 2024, 24DA00264


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B..., épouse C..., a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 12 avril 2023 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure.



Par un jugement n° 2303148 du 9 janvier 2024, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.



Pr

océdure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 9 février 2024, Mme C... représentée par Me A...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B..., épouse C..., a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 12 avril 2023 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure.

Par un jugement n° 2303148 du 9 janvier 2024, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 février 2024, Mme C... représentée par Me Antoine Mary, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 avril 2023 du préfet de la Seine-Maritime ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire valable un an ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de trente jours et sous astreinte journalière de 100 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la décision portant refus du titre de séjour :

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance du titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle.

Sur la décision fixant le pays de destination :

- cette décision méconnaît son droit d'être entendue ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de délivrance du titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juillet 2024, le préfet de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B..., épouse C..., ressortissante russe, née le 19 février 1998, est entrée en France le 14 janvier 2019 sous couvert d'un visa de court séjour. Elle relève appel du jugement du 9 janvier 2024 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 avril 2023 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure.

2. Aux termes de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger marié avec un ressortissant français, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an lorsque les conditions suivantes sont réunies : / 1° La communauté de vie n'a pas cessé depuis le mariage ; / 2° Le conjoint a conservé la nationalité française ; / 3° Lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, il a été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ". L'article L. 423-2 du même code dispose que : " L'étranger, entré régulièrement et marié en France avec un ressortissant français avec lequel il justifie d'une vie commune et effective de six mois en France, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable ". Enfin, aux termes de l'article L. 412-1 du même code : " (...) la première délivrance d'une carte de séjour temporaire (...) est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1 ".

3. Mme C... qui s'est mariée le 21 janvier 2023 avec un ressortissant français, est entrée régulièrement en France le 14 janvier 2019 sous couvert d'un visa de court séjour. Il ressort des pièces du dossier, notamment des nombreuses factures de gaz et d'électricité établies au nom des époux ainsi que d'une attestation de contrat de fourniture d'énergie à leur nom depuis le 6 décembre 2021, qu'à la date de l'arrêté attaqué, la requérante justifiait d'une vie commune avec son compagnon français de plus d'un an. Ainsi, elle satisfait aux conditions posées par les dispositions de l'article L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers. Par suite, le moyen tiré de ce qu'en subordonnant la régularisation de sa situation à la possession d'un visa de long séjour, le préfet de la Seine-Maritime a entaché la décision du 12 avril 2023 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour d'une erreur de droit, doit être accueilli et cette décision doit dès lors être annulée.

4. Par voie de conséquence de l'annulation de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour, les décisions du préfet de la Seine-Maritime obligeant Mme C... à quitter le territoire français et fixant le pays de destination doivent être également annulées.

5. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".

7. L'exécution du présent arrêt implique qu'il soit enjoint, sauf changement dans les circonstances de droit ou de fait, au préfet de la Seine-Maritime de délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à Mme C... dans un délai de deux mois. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par Mme C... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2303148 du 9 janvier 2024 du tribunal administratif de Rouen et l'arrêté du 12 avril 2023 du préfet de la Seine-Maritime sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Maritime de délivrer à Mme C... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme C... la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., épouse C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 3 septembre 2024 à laquelle siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,

- M. Guérin-Lebacq président-assesseur,

- M. Malfoy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 septembre 2024.

Le président-assesseur,

Signé : J.-M. Guérin-LebacqLa présidente-rapporteure,

Signé : M.-P. Viard

La greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière

C. Huls-Carlier

N° 24DA00264 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24DA00264
Date de la décision : 18/09/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Viard
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre Viard
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : SELARL MARY & INQUIMBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 29/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-09-18;24da00264 ?
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