Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens :
- d'annuler la décision implicite d'acceptation de non-opposition à la déclaration de travaux déposée le 23 juillet 2020, l'arrêté du 25 août 2020 par lequel le maire de Villers-Bretonneux ne s'est pas opposé à la réalisation des travaux déclarés par la société anonyme (SA) Orange le 23 juillet 2020 pour la construction d'une station relais de radiotéléphonie sur un terrain situé 2 bis rue de Corbie sur le territoire de la commune, ainsi que la décision rejetant leur recours gracieux contre cet arrêté ;
- de mettre à la charge de la commune de Villers-Bretonneux la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n°2101628 du 6 décembre 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 février 2023 et des mémoires, enregistrés les 10 février 2023, 24 février 2023 et 12 décembre 2023, M. A... C... et Mme B... C..., représentés par Me Marie-Pierre Abiven, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision implicite d'acceptation de non-opposition à la déclaration de travaux déposée le 23 juillet 2020, l'arrêté du 25 août 2020 et la décision implicite de rejet de leur recours gracieux contre cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Villers-Bretonneux la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leur requête d'appel n'est pas tardive mais est recevable ;
- leur requête de première instance était recevable : d'une part, la localisation irrégulière et le caractère incomplet de l'affichage de la déclaration préalable de travaux n'ont pu faire courir le délai de recours contentieux à l'égard des tiers ; d'autre part, ils ont intérêt à agir contre l'arrêté attaqué en leur qualité de voisins immédiats du projet d'édification de l'antenne-relais en raison de la nuisance visuelle qu'elle leur occasionne, de la perte avérée de valeur vénale de leur bien et des craintes au regard des ondes électromagnétiques émises ;
- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L.421-1 du code de l'urbanisme : dans la mesure où la construction projetée est d'une hauteur supérieure à 12 mètres et crée une emprise au sol supérieure à 20 m², l'autorisation accordée ne pouvait être délivrée selon la procédure de la déclaration préalable mais selon celle du permis de construire ; la circonstance que ce moyen ait fait l'objet d'une cristallisation en première instance sur le fondement de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme ne s'oppose pas à sa recevabilité en appel ;
- le dossier de déclaration préalable est incomplet, en méconnaissance des dispositions combinées du dernier alinéa de l'article R. 431-36 du code de l'urbanisme et du d) de l'article R. 431-10 de ce code dès lors que les documents joints à la déclaration préalable ne décrivent pas fidèlement l'état de l'environnement existant ni l'impact du projet sur les lieux avoisinants ; l'appréciation des services instructeurs a été faussée ;
- l'arrêté attaqué méconnaît le paragraphe 1 applicable à la zone Ua du règlement écrit du plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) de la communauté de commune du Val de Somme qui limite la hauteur maximale des constructions à douze mètres au faîtage, alors qu'il n'est pas établi que l'implantation de l'antenne-relais est nécessaire au fonctionnement des services publics et à l'intérêt collectif ;
- il méconnaît le paragraphe 2 applicable à la zone Ua du règlement écrit du PLUi et l'article L. 151-19 du code de l'urbanisme, dès lors que le projet se situe à proximité d'un élément identifié à protéger ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2023, la société anonyme (SA) Orange, représentée par Me Michel Gentilhomme, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. et Mme C... de la somme de 5 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les cahiers des charges joints aux décisions de l'autorité de régulation des télécommunications électroniques et des postes (ARCEP) autorisant l'établissement et l'exploitation des réseaux ouverts au public de radiotéléphonie mobile comportent des obligations de couverture, de permanence, de qualité et de disponibilité des réseaux et des services, à l'instar de l'obligation d'acheminer gratuitement les appels d'urgence ;
- la requête présentée par M. et Mme C... devant le tribunal administratif d'Amiens est irrecevable ; d'une part, le délai de recours contentieux n'a pas été conservé par le recours gracieux formé tardivement, le 2 février 2021, alors que le panneau du projet a été affiché du 4 septembre au 5 novembre 2020 sur l'une des parcelles d'assiette du terrain à un endroit visible depuis la voie publique ; d'autre part, l'intérêt à agir des époux C... n'est pas établi, dans la mesure où ils ne démontrent pas l'atteinte portée aux conditions de jouissance de leur bien, la dépréciation de sa valeur vénale et les risques pour la santé liés à l'exposition aux champs électromagnétiques, dont les seuils limites, fixés par le décret n° 2002-775 du 3 mai 2002, ont été respectés;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 et 12 octobre 2023, la commune de Villers-Bretonneux, représentée par Me Antoine Tourbier, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge solidaire de M. et Mme C... de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête présentée par M. et Mme C... devant le tribunal administratif d'Amiens est irrecevable ; d'une part, le délai de recours contentieux n'a pas été conservé par le recours gracieux formé tardivement, le 2 février 2021, alors que le panneau du projet a été affiché du 4 septembre au 5 novembre 2020 sur l'une des parcelles d'assiette du terrain à un endroit visible depuis la voie publique ; d'autre part, l'intérêt à agir des époux C... n'est pas établi, dans la mesure où ils ne démontrent pas l'atteinte portée aux conditions de jouissance de leur bien, la dépréciation de sa valeur vénale et les risques pour la santé liés à l'exposition aux champs électromagnétiques ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 14 décembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 16 janvier 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le décret n° 2002-775 du 3 mai 2002 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,
- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,
- et les observations de Me Louis Wacquier, représentant M. et Mme C... et de D..., représentant la SA Orange.
Considérant ce qui suit :
1. La société anonyme (SA) Orange a déposé, le 23 juillet 2020, une déclaration préalable en vue de l'installation d'une station-relais de radiotéléphonie sur un terrain situé 2 bis rue de Corbie sur le territoire de la commune de Villers-Bretonneux (Somme) couverte par le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) de la communauté de communes du Val de Somme. Le projet prévoit la construction d'une terrasse de plain-pied en béton sur laquelle seront édifiés deux armoires techniques, un pylône de 35 mètres de hauteur et des antennes de téléphonie. Une décision implicite de non-opposition est née le 23 août 2020. Cependant, par un arrêté du 25 août 2020, le maire de Villers-Bretonneux a pris une décision expresse, qui s'est substituée à la décision implicite, de non-opposition à cette déclaration préalable de travaux. M. A... C... et Mme B... C... interjettent appel du jugement n°2101628 du 6 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande d'annulation de cet arrêté, ainsi que de la décision rejetant leur recours gracieux.
Sur la régularité du jugement :
2. Dès lors qu'il a rejeté au fond la demande des époux C..., le tribunal administratif d'Amiens n'était pas tenu de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par la SA Orange et la commune de Villers-Bretonneux. Par suite, à le supposer invoqué, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement à raison d'une omission à statuer sur celles-ci doit, en tout état de cause, être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme :
3. M. et Mme C... invoquent le moyen tiré de ce que le projet aurait dû faire l'objet d'un permis de construire en vertu de l'article L.421-1 du code de justice administrative.
S'agissant de la recevabilité de ce moyen :
4. Les juges de première instance ont écarté ce moyen en considérant qu'en application de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme, il était irrecevable pour avoir été soulevé au-delà du délai de deux mois suivant le dépôt du premier mémoire en défense produit par la commune de Villers-Bretonneux. Cette cristallisation automatique des moyens, limitée à la première instance, est sans incidence sur le périmètre du débat d'appel. Il s'ensuit que M. et Mme C... sont recevables à invoquer le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L.421-1 du code de l'urbanisme à l'appui de leurs conclusions d'appel, dès lors que celui-ci a été invoqué dans la requête d'appel et que les conditions d'application de l'article R.600-5 du code de l'urbanisme ne sont pas remplies, en l'espèce, pour les échanges intervenus en appel. La fin de non-recevoir opposée à ce moyen par la commune de Villers-Bretonneux et la SA Orange ne saurait donc être accueillie.
S'agissant du bien-fondé du moyen :
5. D'une part, aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme : " Les constructions, même ne comportant pas de fondations, doivent être précédées de la délivrance d'un permis de construire. /Un décret en Conseil d'Etat arrête la liste des travaux exécutés sur des constructions existantes ainsi que des changements de destination qui, en raison de leur nature ou de leur localisation, doivent également être précédés de la délivrance d'un tel permis ". L'article R. 421-1 du code de l'urbanisme dispose que : " Les constructions nouvelles doivent être précédées de la délivrance d'un permis de construire, à l'exception : / a) Des constructions mentionnées aux articles R. 421-2 à R. 421-8-2 qui sont dispensées de toute formalité au titre du code de l'urbanisme ; / b) Des constructions mentionnées aux articles R. 421-9 à R. 421-12 qui doivent faire l'objet d'une déclaration préalable. ". Aux termes de l'article R.421-2 du même code : " Sont dispensées de toute formalité au titre du présent code, en raison de leur nature ou de leur très faible importance, sauf lorsqu'ils sont implantés dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable, dans les abords des monuments historiques ou dans un site classé ou en instance de classement : /a) Les constructions nouvelles répondant aux critères cumulatifs suivants : /-une hauteur au-dessus du sol inférieure ou égale à douze mètres ; /-une emprise au sol inférieure ou égale à cinq mètres carrés ; /-une surface de plancher inférieure ou égale à cinq mètres carrés ; (...) ".
6. D'autre part, aux termes de l'article R.421-9 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " En dehors du périmètre des sites patrimoniaux remarquables, des abords des monuments historiques et des sites classés ou en instance de classement, les constructions nouvelles suivantes doivent être précédées d'une déclaration préalable, à l'exception des cas mentionnés à la sous-section 2 ci-dessus : / a) Les constructions dont soit l'emprise au sol, soit la surface de plancher est supérieure à cinq mètres carrés et répondant aux critères cumulatifs suivants : / - une hauteur au-dessus du sol inférieure ou égale à douze mètres ;/ - une emprise au sol inférieure ou égale à vingt mètres carrés ; / - une surface de plancher inférieure ou égale à vingt mètres carré ; /(...) c) Les constructions répondant aux critères cumulatifs suivants : /- une hauteur au-dessus du sol supérieure à douze mètres ; /- une emprise au sol inférieure ou égale à cinq mètres carrés ; /- une surface de plancher inférieure ou égale à cinq mètres carrés. /Toutefois, ces dispositions ne sont applicables ni aux éoliennes (...), ni aux antennes-relais de radiotéléphonie mobile ; (...) / j) Les antennes-relais de radiotéléphonie mobile et leurs systèmes d'accroche, quelle que soit leur hauteur, et les locaux ou installations techniques nécessaires à leur fonctionnement dès lors que ces locaux ou installations techniques ont une surface de plancher et une emprise au sol supérieures à 5 m2 et inférieures ou égales à 20 m2. ".
7. Enfin, aux termes de l'article R. 420-1 du code de l'urbanisme, dont la teneur est reprise dans le lexique annexé au règlement écrit du PLUi de la communauté de communes du Val de Somme : " L'emprise au sol au sens du présent livre est la projection verticale du volume de la construction, tous débords et surplombs inclus. / Toutefois, les ornements tels que les éléments de modénature et les marquises sont exclus, ainsi que les débords de toiture lorsqu'ils ne sont pas soutenus par des poteaux ou des encorbellements ". Aux termes de l'article R.111-22 du même code : " La surface de plancher de la construction est égale à la somme des surfaces de plancher de chaque niveau clos et couvert, calculée à partir du nu intérieur des façades après déduction : (...) / 6° Des surfaces de plancher des locaux techniques nécessaires au fonctionnement d'un groupe de bâtiments ou d'un immeuble autre qu'une maison individuelle au sens de l'article L. 231-1 du code de la construction et de l'habitation (...). ".
8. En premier lieu, dès lors que le projet porte sur l'installation d'un mât tubulaire haut de 35 mètres, supérieur à la hauteur maximale de 12 mètres prévue par l'article R. 421-2 précité du code de l'urbanisme, il n'était pas dispensé de toute formalité au titre de ce code.
9. En deuxième lieu, le projet ne relève pas du a) de l'article R. 421-9 précité du code de l'urbanisme, compte tenu de sa hauteur excédant la hauteur maximale de 12 mètres prévue par ces dispositions.
10. En troisième lieu, le projet ne relève pas du c) de l'article R. 421-9 précité du code de l'urbanisme, dans la mesure où ses dispositions excluent expressément les antennes de radiotéléphonie mobile.
11. En quatrième lieu, d'une part, la construction composée d'une dalle de béton, de deux armoires techniques, d'un pylône et d'antennes téléphoniques ne crée pas de surface de plancher au sens de l'article R.111-22 du code de l'urbanisme. D'autre part, si les époux C... font valoir que la dalle de béton est d'une superficie d'environ 50m2, supérieure au maximum admis par le j) de l'article R. 421-9 du code de l'urbanisme, il ressort des plans joints au dossier de déclaration préalable que cette dalle se situera au niveau du sol et ne le dépassera pas. Si les appelants produisent des photographies non datées correspondant au chantier en cours d'exécution, qui témoignent de ce que la dalle réalisée dépasse le niveau du sol, le non-respect éventuel de la déclaration préalable est sans incidence sur la légalité de celle-ci, alors que l'autorisation d'urbanisme n'est donnée que pour le projet figurant dans le dossier de demande. Ainsi, si cette dalle forme avec les autres équipements un ensemble fonctionnel indissociable, elle ne crée pas, compte tenu de ses caractéristiques propres, un volume au sens de l'article R. 420-1 du code de l'urbanisme, dont la projection verticale devrait être prise en compte pour le calcul de l'emprise au sol de l'ensemble. Dès lors, l'emprise au sol du projet correspond, en l'espèce, seulement à la surface cumulée du pylône, à savoir 1,90 m2 et de la zone technique nécessaire à son fonctionnement, soit 1,64 m2, ainsi que cela ressort du dossier de déclaration préalable. Elle est ainsi inférieure à 20 m² et entre dans les prévisions du j) de l'article R. 421-9 du code l'urbanisme précitées. Il en résulte que le projet litigieux ne relevait pas du champ d'application du permis de construire, mais de celui de la déclaration préalable. Le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme n'est ainsi pas fondé et doit être écarté.
En ce qui concerne le moyen tiré du caractère incomplet et tronqué du dossier de déclaration préalable :
12. Aux termes de l'article R. 431-36 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au litige : " Le dossier joint à la déclaration comprend : /a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l'intérieur de la commune ; /b) Un plan de masse coté dans les trois dimensions lorsque le projet a pour effet de créer une construction ou de modifier le volume d'une construction existante ; / c) Une représentation de l'aspect extérieur de la construction faisant apparaître les modifications projetées et si le projet a pour effet de modifier celui-ci ; /d) Le justificatif de dépôt de la demande d'autorisation prévue à l'article R. 244-1 du code de l'aviation civile lorsque le projet porte sur une construction susceptible, en raison de son emplacement et de sa hauteur, de constituer un obstacle à la navigation aérienne. / Il est complété, s'il y a lieu, par les documents mentionnés aux a et b de l'article R. 431-10, à l'article R. 431-14, aux b et g de l'article R. 431-16 et aux articles R. 431-18, R. 431-18-1, R. 431-21, R. 431-23-2, R. 431-25, R. 431-31 à R. 431-33 et R. 431-34-1. / (...) /Lorsque la déclaration porte sur un projet de création ou de modification d'une construction et que ce projet est visible depuis l'espace public ou que ce projet est situé dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques, le dossier comprend également les documents mentionnés aux c et d de l'article R. 431-10. ". Aux termes de ce dernier article : " Le projet architectural comprend également : (...) / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; /d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse ".
13. La circonstance qu'un dossier de déclaration préalable de travaux ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité la déclaration préalable de travaux à laquelle l'autorité administrative ne s'est pas opposée que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
14. Il n'est pas contesté que le projet, qui comporte notamment un pylône de 35 mètres de hauteur, est visible depuis l'espace public. Le dossier de déclaration préalable devait donc comporter, outre les éléments mentionnés à l'article R. 431-36 du code de l'urbanisme, un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain et deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et dans le paysage lointain, conformément aux dispositions de l'article R. 431-10 précité.
15. D'une part, il ressort du dossier de déclaration préalable que celui-ci comporte divers documents graphiques et photographiques qui permettent de rendre compte de l'état des lieux avant et après la réalisation du projet et de son insertion dans l'environnement proche et lointain.
16. D'autre part, aucune disposition du code de l'urbanisme n'impose de faire figurer dans le dossier de déclaration préalable la justification de la prise en compte des éléments identifiés par un plan local d'urbanisme au titre des dispositions de l'article L. 151-19 du code de l'urbanisme. Ainsi, la circonstance que le dossier déposé par la SA Orange ne mentionne pas la présence, à proximité du projet envisagé, d'un bâtiment identifié par le PLUi comme ayant un intérêt architectural particulier justifiant sa protection au sens de l'article L.151-19 du code de l'urbanisme ne caractérise pas une incomplétude du dossier, alors que les photographies jointes permettent d'apprécier la visibilité du pylône depuis l'espace public et son intégration par rapport au bâti urbain qui jouxte cet espace. Si les époux C... font valoir que le plan de coupe des arbres et les photographies jointes minorent la hauteur du pylône et sa prégnance par rapport au bâti et aux arbres avoisinants, ces documents mettent en évidence le caractère urbain du secteur dans lequel le projet doit s'insérer, les caractéristiques de la plupart des constructions qui y sont implantées et l'effet de surplomb du pylône sur celles-ci. En tout état de cause, il n'apparaît pas que les inexactitudes mineures qui affectent le plan de coupe des arbres aient été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable. Il suit de là que le moyen tiré de l'incomplétude du dossier de déclaration préalable doit être écarté comme non fondé.
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du paragraphe 1 de la sous-section 2 de la section 1 applicable au secteur Ua du règlement du PLUi :
17. Aux termes du paragraphe 1 de la sous-section 2 de la section 1 applicable à la zone urbaine U du règlement du PLUi : " Les hauteurs des constructions sont mesurées à partir du niveau moyen du terrain naturel. (...) / Dans le secteur Ua : (...) La hauteur maximale des constructions [à usage d'habitation] est fixée à 12 mètres du faîtage. / La hauteur des autres constructions principales est limitée à 12 mètres au faîtage. (...) / L'ensemble des dispositions du paragraphe 1 ne s'applique pas : (...) aux constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif (...) ".
18. Eu égard à leur objet, les dispositions précitées, qui excluent de l'application de la règle de hauteur maximale de 12 mètres les " constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif ", doivent être regardées comme s'appliquant aux antennes et aux pylônes installés par les opérateurs, dès lors qu'ils sont nécessaires à l'exploitation d'un réseau de télécommunication. La circonstance que, d'après les données issues de l'autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP), le département de la Somme est couvert en 4G à 99% par au moins un opérateur de téléphonie mobile ne suffit pas à remettre en cause le caractère nécessaire de l'antenne-relais envisagée par la SA Orange. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance du paragraphe 1 de la sous-section 2 de la section 1 applicable au secteur Ua du règlement du PLUi doit être écarté.
En ce qui concerne les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du paragraphe 2 de la sous-section 2 de la section 1 applicable au secteur U du règlement du PLUi et de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme :
19. Aux termes du paragraphe 2 de la sous-section 2 de la section 1 applicable à la zone urbaine U du règlement du PLUi consacré à la " qualité urbaine, architecturale, environementale et paysagère " : " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ". Il prévoit pour les " élements identifiés au titre de l'article L. 151-19 du code de l'urbanisme " que " les abords immédiats du patrimoine doivent être maintenus dégagés " et que " les vues sur ces édifices depuis l'espace public doivent être préservées ". Mais ce paragraphe 2 prévoit in fine qu'il ne s'applique pas aux " constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif ". Pour les motifs exposés au point 18, le projet en cause entre dans le champ des exceptions à ce paragraphe 2 et le moyen tiré de la méconnaissance de ses dispositions doit être écarté.
20. Aux termes de l'article R.111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ".
21. Pour rechercher l'existence d'une atteinte notamment au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants et aux paysages urbains de nature à fonder une décision d'opposition à déclaration préalable ou des prescriptions spéciales accompagnant la délivrance d'une décision de non-opposition, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site. L'ensemble des éléments pertinents doivent être pris en compte, notamment, le cas échéant, la covisibilité du projet avec des bâtiments remarquables, quelle que soit la protection dont ils bénéficient par ailleurs au titre d'autres législations.
22. Il ressort des pièces du dossier que l'antenne-relais est prévue pour s'implanter derrière un front de maisons mitoyennes situées en bordure des rues de la Corbie et de Péronne, dans une zone urbanisée de la ville de Villers-Bretonneux, de part et d'autre d'un rond-point. Si le site d'implantation ne présente globalement pas de caractère particulier, il jouxte une parcelle sur laquelle est édifiée la villa habitée par les époux C... qui est identifiée en annexe du règlement du PLUi au titre des éléments du patrimoine à préserver, en ce qui concerne " la forme et l'aspect des façades et des toitures, la forme et le rythme des ouvertures ". La présence de cette villa confère donc au site d'implantation un intérêt particulier.
23. Toutefois, il ne ressort pas des pièces versées aux débats que la station-relais de téléphonie mobile projetée sera, au regard de ses caractéristiques et du choix d'implantation retenu par la société pétitionnaire, de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux et paysages avoisinants, dès lors, d'une part, qu'elle s'ajoute à d'autres accessoires urbains présents lors de l'édiction de l'arrêté attaqué, à l'instar de lampadaires, cheminées hautes et câbles aériens, d'autre part, que sa covisibilité avec la villa protégée est largement atténuée par la présence d'arbres implantés au premier plan sur son terrain. Dans ces conditions, l'atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants n'est pas telle que le maire doive être regardé comme ayant commis une erreur manifeste d'appréciation en ne s'opposant pas au projet. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme doit donc être écarté.
24. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la SA Orange, que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n°2101628 du 6 décembre 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Villers-Bretonneux, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. et Mme C... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
26. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des appelants les sommes que la commune de Villers-Bretonneux et la société Orange demandent sur ce même fondement.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Villers-Bretonneux et par la SA Orange au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et Mme B... C..., à la SA Orange et à la commune de Villers-Bretonneux.
Délibéré après l'audience publique du 4 juillet 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,
- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,
- M. Denis Perrin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 août 2024.
La présidente-rapporteure,
Signé : I. Legrand
La présidente de la 1ère chambre,
Signé : G. Borot La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au préfet de la Somme en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Nathalie Roméro
N°23DA00231 2