Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens :
- d'annuler l'arrêté du 30 mai 2023 par lequel le préfet de l'Aisne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;
- d'enjoindre, à titre principal, au préfet de l'Aisne de lui délivrer un titre de séjour, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
- de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2302101 du 3 octobre 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 octobre 2023 et des mémoires enregistrés les 8 et 11 avril 2024, M. A... B..., représenté par Me Patrick Berdugo, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 mai 2023
3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet territorialement compétent de lui délivrer un titre de séjour ou de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de l'admettre à l'aide juridictionnelle provisoire ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 31 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier et complet de sa situation ;
- elle méconnaît les dispositions des articles L. 423-1 et L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il est entré régulièrement sur le territoire français et justifiait, à la date de la décision attaquée, d'une vie commune de plus de six mois avec son épouse française ;
- elle méconnaît les dispositions des articles L. 311-1 et L. 621-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que le préfet n'était pas fondé à lui opposer l'absence de déclaration prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen puisqu'il est entré sur le territoire français avec un visa délivré par les autorités françaises, que l'administration ne met pas en mesure les étrangers d'accomplir cette formalité et qu'en tout état de cause cette déclaration n'est pas une condition de régularité de l'entrée sur le territoire français ;
- elle méconnaît les dispositions des articles L. 435-1 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il remplit les conditions pour se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ;
- la décision de refus de séjour et la décision portant obligation de quitter le territoire français sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation et violent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 novembre 2023, le préfet de l'Aisne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 18 mars 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 12 avril 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;
- l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'arrêté du 9 mars 1995 relatif à la déclaration d'entrée sur le territoire français ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant marocain né le 3 janvier 2000 à Casablanca, est entré sur le territoire français le 28 août 2014 muni de son passeport revêtu d'un visa de court séjour. Par un arrêté du 30 mai 2023, le préfet de l'Aisne a refusé de lui accorder une carte de séjour temporaire en qualité de conjoint de Français ou portant la mention " vie privée et familiale " et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Par la présente requête, M. B... interjette appel du jugement n° 2302101 du 3 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne le refus de délivrance d'un titre de séjour :
Au titre de la légalité externe :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".
3. La décision attaquée vise les textes applicables et mentionne, dans trente paragraphes, les considérations de droit et de fait propres à la situation de M. B..., sur lesquelles elle est fondée. Le moyen tiré de son insuffisance de motivation doit donc être écarté comme manquant en fait.
4. En second lieu, il ressort des motifs mêmes de la décision litigieuse que la situation personnelle de M. B... a été examinée par le préfet de l'Aisne. Le moyen tiré du défaut d'examen particulier et complet de sa situation ne peut donc qu'être écarté.
Au titre de la légalité interne :
5. Aux termes du premier alinéa de l'article 9 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. ". Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour mention " vie privée et familiale " est recevable à invoquer la méconnaissance des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'appui de la contestation du refus qui lui a été opposé.
S'agissant de la méconnaissance des articles L.423-2 et L. 621-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :
6. Aux termes de l'article L.423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, entré régulièrement et marié en France avec un ressortissant français avec lequel il justifie d'une vie commune et effective de six mois en France, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. ".
7. Aux termes de l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen : " Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans les conditions fixées par chaque partie contractante, aux autorités compétentes de la partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque partie contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la partie contractante sur lequel ils pénètrent (...) ".
8. Aux termes de l'article L.621-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger en provenance directe du territoire d'un État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 peut se voir appliquer les dispositions de l'article L. 621-2 lorsqu'il est entré ou a séjourné sur le territoire français sans se conformer aux stipulations des paragraphes 1 et 2 de l'article 19, du paragraphe 1 de l'article 20, et des paragraphes 1 et 2 de l'article 21, de cette convention, relatifs aux conditions de circulation des étrangers sur les territoires des parties contractantes, ou sans souscrire, au moment de l'entrée sur ce territoire, la déclaration obligatoire prévue par l'article 22 de la même convention, alors qu'il était astreint à cette formalité ". Aux termes de l'article R.621-2 de ce code : " Sous réserve des dispositions de l'article R. 621-4, l'étranger souscrit la déclaration d'entrée sur le territoire français mentionnée à l'article L. 621-3 auprès des services de la police nationale ou, en l'absence de tels services, des services des douanes ou des unités de la gendarmerie nationale. A cette occasion, il lui est remis un récépissé qui peut être délivré par apposition d'une mention sur le document de voyage (...). ". Aux termes de l'article R. 621-4 du même code : " N'est pas astreint à la déclaration d'entrée sur le territoire français l'étranger qui se trouve dans l'une des situations suivantes : / 1° N'est pas soumis à l'obligation du visa pour entrer en France en vue d'un séjour d'une durée inférieure ou égale à trois mois ; / 2° Est titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, d'une durée supérieure ou égale à un an, délivré par un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ; toutefois un arrêté du ministre chargé de l'immigration peut désigner les étrangers titulaires d'un tel titre qui demeurent astreints à la déclaration d'entrée ".
9. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que la souscription de la déclaration prévue par l'article 22 de la convention de l'accord de Schengen, et dont l'obligation figure aux dispositions de l'article R. 621-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un Etat partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire. En revanche, une telle déclaration n'est pas requise si l'étranger arrive en France en provenance d'un autre Etat partie à la convention de Schengen qui ne l'a pas admis à séjourner sur son territoire.
10. Il ressort des pièces du dossier que les autorités consulaires françaises ont accordé à M. B... un visa de court séjour " Etats Schengen " lui permettant de séjourner ou de circuler librement dans la zone Schengen pendant une durée de trente jours comprise entre le 19 août et le 18 novembre 2014. L'intéressé est entré le 28 août 2014 sur le territoire français, en provenance directe de l'Espagne, Etat partie à l'accord de Schengen, qui l'a admis à entrer sur son territoire par la voie maritime. Par conséquent, dès lors qu'il n'entrait dans aucun cas de dispense visé à l'article R.621-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M. B... était soumis, lors de son entrée en France, à l'obligation de déclarer son arrivée auprès des services de la police nationale ou, en l'absence de tels services, des services des douanes ou des unités de la gendarmerie nationale, quand bien même, d'une part, le visa " Etats Schengen " lui aurait été délivré par les autorités françaises, d'autre part, il était mineur. S'il fait état d'un courrier du 5 juin 2013 du directeur départemental adjoint de la police aux frontières du Haut-Rhin à l'avocat d'un ressortissant étranger, selon lequel cette formalité déclarative n'aurait jamais été " réellement mise en œuvre ", il n'établit pas qu'à son arrivée en France, il n'aurait pas été soumis à cette formalité et que celle-ci aurait été impossible à accomplir. Dans la mesure où M. B... n'a pas souscrit à la déclaration prévue par l'article 22 de la convention de l'accord de Schengen, il ne démontre pas être entré régulièrement en France en 2014.
11. Dès lors qu'il ne satisfait pas à la condition de l'entrée régulière en France posée par l'article L.423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M. B... n'est pas fondé à invoquer la méconnaissance de cet article.
S'agissant de la méconnaissance des articles L.423-1 et L.411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :
12. Aux termes de l'article L.423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger marié avec un ressortissant français, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an lorsque les conditions suivantes sont réunies : /1° La communauté de vie n'a pas cessé depuis le mariage ; /2° Le conjoint a conservé la nationalité française ; /3° Lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, il a été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. ". Aux termes de l'article L. 412-1 de ce code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance de la carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1. (...) ".
13. Aux termes de l'article L.411-1 du même code, qui a remplacé l'article L.311-1 cité par le requérant, dans sa rédaction alors applicable : " Sous réserve des engagements internationaux de la France ou du livre II, tout étranger âgé de plus de dix-huit ans qui souhaite séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois doit être titulaire de l'un des documents de séjour suivants : /1° Un visa de long séjour ; /2° Un visa de long séjour conférant à son titulaire, en application du second alinéa de l'article L. 312-2, les droits attachés à une carte de séjour temporaire ou à la carte de séjour pluriannuelle prévue aux articles L. 421-9 à L. 421-11 ou L. 421-13 à L. 421-24, ou aux articles L. 421-26 et L. 421-28 lorsque le séjour envisagé sur ce fondement est d'une durée inférieure ou égale à un an ; (...). "
14. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré en France muni de son passeport revêtu d'un visa de court séjour et ne justifie pas de la détention d'un visa de long séjour. Dès lors qu'il ne satisfait pas à la condition de produire un visa de long séjour posée par l'article L. 412-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M. B... n'est pas fondé à invoquer la méconnaissance de cet article.
15. Il résulte de ce qui précède que c'est sans commettre d'erreur de droit que le préfet de l'Aisne a refusé de délivrer à M. B... un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 423-1 et L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en dépit de son mariage avec une ressortissante française.
S'agissant de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L.423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation :
16. Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
17. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales (...) ".
18. M. B... se prévaut de l'ancienneté de sa présence en France, où il est scolarisé depuis l'âge de quatorze ans et où il a obtenu un baccalauréat professionnel avec mention en 2021, et de son impossibilité de poursuivre ses études à défaut de titre de séjour. Toutefois, il n'établit ni même n'allègue avoir demandé son admission au séjour antérieurement au 15 février 2023, alors qu'il était majeur depuis le 3 janvier 2018 et était donc soumis à l'obligation de régulariser sa situation. Par ailleurs, s'il se prévaut de la présence en France de sa sœur jumelle et de ses deux parents, il ressort des pièces du dossier que ses parents ne séjournent pas régulièrement sur le territoire et que son père a d'ailleurs fait l'objet de plusieurs mesures d'éloignement, dont la dernière date du 13 avril 2022, et que sa sœur jumelle, majeure comme lui, disposait d'une carte de séjour temporaire d'une durée de seulement un an à la date de la décision attaquée. En outre, s'il a épousé le 25 juin 2022 une ressortissante française, qui dispose d'un contrat de travail à durée indéterminée et d'un contrat de location d'un logement loué meublé à son nom à Saint-Quentin dans l'Aisne, il ne justifie pas de l'ancienneté, de la stabilité et de l'intensité de leur vie commune, au demeurant récente à la date de la décision attaquée, en se bornant à produire des relevés de compte et des factures, dont certaines concernent un club de sport situé à Clichy-la-Garenne dans les Hauts-de-Seine. Enfin, s'il produit une promesse d'embauche pour exercer les fonctions de " rayonniste " au sein d'une pharmacie située à Deuil-la-Barre dans le Val-d'Oise, cette circonstance n'est pas suffisante pour établir une intégration ancienne, intense et stable dans la société française, alors même qu'il a déjà fait l'objet d'une première mesure d'éloignement le 20 septembre 2021 à laquelle il n'a pas déféré. Enfin, s'il produit un document faisant état de la grossesse de son épouse dont la date présumée de début est le 15 septembre 2023, cette pièce, dont l'auteur n'est pas identifié, est postérieure à la décision attaquée et ne peut être prise en compte. Dans ces conditions, et alors que M. B... ne fait état d'aucun obstacle à ce qu'il retourne au Maroc pour accomplir les démarches permettant son entrée régulière en France, l'intéressé n'est pas fondé à reprocher au préfet de l'Aisne d'avoir, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale ", méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Les moyens tirés de la méconnaissance de ces deux articles doivent donc être écartés ainsi que celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
S'agissant de la méconnaissance de l'article L.435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation :
19. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".
20. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 435-1 précité n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord. Toutefois, en l'espèce, l'intéressé a demandé la délivrance, non d'un titre salarié, mais d'un titre en qualité de conjoint de Français ou mention " vie privée et familiale ". Le préfet de l'Aisne pouvait donc faire application de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
21. Pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, M. B... ne justifie pas de circonstances humanitaires ou de motifs exceptionnels de nature à lui ouvrir droit au séjour en France au titre de la vie privée et familiale sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il s'ensuit que les moyens tirés de la méconnaissance de cet article et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés comme non fondés.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
22. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 18 du présent arrêt, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français.
23. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 3 octobre 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mai 2023 par lequel le préfet de l'Aisne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
Sur les autres conclusions de la requête :
24. En premier lieu, le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B... n'implique aucune mesure d'exécution. Les conclusions présentées par l'appelant et tendant à ce que la cour enjoigne, sous astreinte, au préfet territorialement compétent de lui délivrer un titre de séjour ou de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour doivent, par suite, être rejetées.
25. En deuxième lieu, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de prononcer, en application des dispositions de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991, l'admission provisoire de M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
26. En troisième lieu, partie perdante à la présente instance, M. B... ne peut voir accueillies ses conclusions présentées en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Aisne.
Délibéré après l'audience publique du 6 juin 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,
- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,
- M. Denis Perrin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 juin 2024.
La présidente-rapporteure,
Signé : I. LegrandLa présidente de la 1ère chambre,
Signé : G. Borot
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Nathalie Roméro
N°23DA02025 2