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13/06/2024 | FRANCE | N°23DA00800

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 4ème chambre, 13 juin 2024, 23DA00800


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille, par deux demandes successives, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014, 2016 et 2017 et de mettre à la charge de l'Etat une somme totale de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de même que les entiers dépens.



Par un jugement

nos 2003701, 2102235 du 3 mars 2023, le tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille, par deux demandes successives, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014, 2016 et 2017 et de mettre à la charge de l'Etat une somme totale de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de même que les entiers dépens.

Par un jugement nos 2003701, 2102235 du 3 mars 2023, le tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a de l'article 1729, appliquée aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles Mme A... a été assujettie au titre des années 2016 et 2017 et a rejeté le surplus des conclusions de ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 2 mai 2023 et le 4 septembre 2023, Mme A..., représentée par la SCP BBLM Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il ne lui donne pas entière satisfaction ;

2°) de prononcer, en droit et pénalités, la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de même que les entiers dépens de l'instance.

Elle soutient que :

- c'est à tort, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, que l'administration a remis en cause la déductibilité des frais de double résidence qu'elle avait portés, en application du 3° de l'article 83 du code général des impôts, sur ses déclarations de revenus des années d'imposition en litige, dès lors que la fixation, d'une part, de sa résidence à Lille (Nord) et, d'autre part, de la résidence de son époux, avec lequel elle est mariée sous le régime de la séparation de biens, à Hermival-Les-Vaux (Calvados) étaient la conséquence de contraintes professionnelles de l'un et de l'autre et non de pures convenances personnelles ;

- elle est fondée à invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les énonciations des paragraphes n° 280 et n° 290 de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-RSA-BASE-30-50-30-20, qui confortent son analyse ;

- en faisant droit à plusieurs de ses réclamations portant sur le même chef de contestation au titre d'années antérieures, l'administration a pris formellement, sur sa situation de fait au regard de la loi fiscale, une position dont elle est fondée à se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; la doctrine administrative, reprise en dernier lieu sous la référence BOI-SJ-RES-10-20-10, conforte, en ses paragraphes n° 60, n° 70 et n° 140, son analyse quant à l'invocabilité de cette prise de position ;

- par voie de conséquence, la déductibilité, sur son revenu global, du déficit agricole de 61 599 euros qu'elle avait imputé au titre de l'année 2017 a été remise en cause à tort.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2023, et par un mémoire, enregistré le 6 octobre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- il résulte d'un faisceau d'indices collectés par l'administration que Mme A... devait, en application de l'article 10 du code général des impôts, être regardée comme ayant fixé, au titre des années d'imposition en litige, sa résidence fiscale à Lille ;

- les frais de double résidence que Mme A... a entendu porter en déduction de ses revenus imposables des années en litige doivent être regardés non comme inhérents à son activité professionnelle ainsi qu'à celle de son époux, mais comme relevant de simples convenances personnelles, de sorte que c'est à bon droit que l'administration leur a substitué la déduction forfaitaire pour frais professionnels de 10 % prévue au 3° de l'article 83 du code général des impôts ;

- Mme A... n'est pas fondée à invoquer, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, des décisions de dégrèvement non motivées prises par l'administration en ce qui concerne des années distinctes et, concernant certaines de ces décisions, des chefs de rectification différents, lesquelles décisions ne constituent pas, au sens de ces dispositions, des prises de position formelles susceptibles de lui être opposées ;

- eu égard au bien-fondé des rehaussements appliqués au revenu global de Mme A... au titre de l'année 2017, lequel a été porté au-delà du plafond prévu par le 1° du I de l'article 156 du code général des impôts, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause l'imputation, sur ce revenu global, d'un déficit agricole.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration a remis en cause la déduction, par Mme B... A..., sur les déclarations de revenus qu'elle a souscrites au titre des années 2015, 2016 et 2017, de frais réels de double résidence. L'administration a fait connaître à Mme A... son analyse sur ce point par une proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 18 décembre 2018. Les observations formulées par Mme A... n'ayant pas amené le service à revoir son appréciation, les suppléments d'impôt sur le revenu résultant, au titre des trois années en cause, des rectifications notifiées ont été mis en recouvrement le 30 juin 2019, à hauteur d'un montant total de 51 613 euros, en droits et pénalités. Mme A... a formé une réclamation, qui a fait l'objet d'une admission totale pour ce qui concerne l'année 2015 et d'un rejet pour ce qui concerne les autres années. Un dégrèvement d'un montant de 6 842 euros en droits et pénalités a, en conséquence, été prononcé. Insatisfaite de cette situation, Mme A... a, par une première demande, porté le litige devant le tribunal administratif de Lille, en lui demandant de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2016 et 2017 et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de même que les entiers dépens.

2. Parallèlement, l'administration s'est livrée à un contrôle sur pièce de même objet en ce qui concerne l'année 2014 et a fait connaître son analyse, consistant en la remise en cause de la déductibilité des frais de double résidence portés par l'intéressée sur sa déclaration de revenus de cette année, par une proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 24 mai 2016. Mme A... ayant formulé des observations qui n'ont pas convaincu le service de reconsidérer son analyse, les suppléments d'impôt sur le revenu résultant, au titre de l'année 2014, des rectifications notifiées ont été mis en recouvrement le 31 janvier 2018, à hauteur d'un montant total de 2 539 euros, en droits et pénalités. Sa réclamation ayant été rejetée, Mme A... a, par une seconde demande, porté le litige devant le tribunal administratif de Lille, en lui demandant de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2014 et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de même que les entiers dépens.

3. Par un jugement du 3 mars 2023, le tribunal administratif de Lille, après avoir joint les deux procédures engagées par Mme A..., a prononcé la décharge de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a de l'article 1729, appliquée aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles Mme A... a été assujettie au titre des années 2016 et 2017, et a rejeté le surplus des conclusions de ces demandes. Mme A... relève appel de ce jugement en tant qu'il ne lui donne pas entière satisfaction.

Sur la déductibilité des frais de double résidence :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

4. En vertu des dispositions du 3° de l'article 83 du code général des impôts, les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi exposés par les contribuables doivent, en règle générale, lorsqu'ils excèdent la déduction forfaitaire de 10 % prévue par ces mêmes dispositions et à condition qu'ils ne soient pas couverts par des allocations spéciales, être admis, sur demande, en déduction de leurs rémunérations brutes.

5. Revêtent, notamment, le caractère de frais professionnels, déductibles en vertu de ces dispositions, les dépenses qu'un contribuable occupant un emploi salarié dans une localité éloignée de celle où la résidence de son foyer est établie doit exposer, tant pour se loger à proximité du lieu de son travail que pour effectuer périodiquement les trajets entre l'une et l'autre localités, dès lors que la double résidence ne résulte pas d'un choix de simple convenance personnelle, mais est justifiée par une circonstance particulière. Constitue une telle circonstance l'exercice, par le conjoint de ce contribuable, d'une activité professionnelle en un lieu proche de la résidence commune. Il appartient au contribuable, qui déduit de ses revenus les frais réels résultant de cette double résidence, d'établir l'existence de circonstances particulières justifiant cette situation.

6. Mme A..., qui, mariée sous le régime de séparation de biens et ne résidant pas sous le même toit que son époux, souscrit, en application du a du 4 de l'article 6 du code général des impôts, des déclarations de revenus distinctes de celles de son mari, expose que cette situation de résidence séparée résulte d'une opportunité professionnelle qui lui a été offerte, en 2001, par la société qui l'employait, depuis 1996, au sein d'un établissement situé à Lisieux (Calvados), non loin de la propriété qu'elle avait acquise, avec son époux, également en 1996, à Hermival-les-Vaux (Calvados), où les intéressés ont fixé leur résidence fiscale. Cette opportunité professionnelle, permettant à Mme A..., qui l'a acceptée, de devenir membre du conseil d'administration de la société, impliquait une mutation géographique au siège social situé à Villeneuve d'Ascq (Nord). Mme A... précise que l'éloignement, par rapport au domicile familial, de son nouveau lieu de travail l'a contrainte à devoir se loger, avec les enfants du couple, à proximité de ce lieu, à Lille, et d'effectuer des trajets, en fin de semaine, pour rejoindre la maison familiale à Hermival-les-Vaux, qu'elle considère comme sa résidence familiale et où son foyer est, à ses yeux, demeuré établi.

7. L'appelante ajoute que, dans le même temps, son époux a continué d'exercer sa profession de vétérinaire au sein d'une clinique située à Lisieux, sous le statut d'associé, jusqu'à ce qu'il décide, au cours de l'année 2011, de quitter ses fonctions et de rejoindre sa famille à Lille. Ayant travaillé, jusqu'en 2013, dans une clinique vétérinaire, située à Carvin, non loin de Lille, qui n'a pu lui proposer de contrat d'association, l'époux de Mme A... a alors cherché un lieu d'exercice professionnel lui permettant, à la fois, de valoriser sa spécialisation en médecine interne et chirurgie des petits animaux de compagnie, acquise en 2006, ainsi que son diplôme universitaire de microchirurgie, obtenu en 2013, et d'être associé à la gestion de l'établissement. Mme A... expose qu'aucune opportunité répondant aux attentes de son mari ne s'étant présentée à lui, ce dernier, qui était toujours lié, avec son ancienne clinique de Lisieux, par une clause de non concurrence lui faisant interdiction de s'installer à moins de 50 kilomètres de celle-ci, a été conduit à accepter une proposition d'association au sein d'une clinique située au Grand Quevilly (Seine-Maritime), cette opportunité lui permettant, en outre, de mettre à profit ses compétences dans une structure innovante disposant d'un plateau technique moderne et performant. L'appelante estime que ce nouveau lieu d'exercice professionnel de son époux justifie le maintien du lieu de résidence de ce dernier dans la propriété familiale d'Hermival-les-Vaux. Elle en tire la conséquence que les frais de double résidence, dont l'administration a entendu remettre en cause la déductibilité de ses revenus imposables, étaient justifiés par des sujétions professionnelles indépendantes de sa volonté et de celle de son conjoint, de sorte qu'ils devaient être admis en déduction.

8. Toutefois, d'une part, il n'est pas contesté par Mme A... que celle-ci était, au cours des années d'imposition en litige, propriétaire des deux logements dans lesquels elle a successivement résidé à Lille, à proximité du lieu d'exercice de son activité salariée, qui lui procurait la totalité de ses revenus, ainsi que la majeure partie de ceux de son foyer. Il n'est pas davantage contesté que les deux enfants du couple, nés en 1998 et en 2008, ont été constamment rattachés, au titre des années 2014 à 2017, au foyer fiscal de Mme A..., avec laquelle ils vivaient à Lille, ville dans laquelle ils étaient scolarisés, à l'exception de l'aînée, partie étudier à l'étranger à compter de l'année 2016. Enfin, la majeure partie des comptes bancaires dont disposait Mme A... au cours des années d'imposition en litige était domiciliée à Lille. Eu égard à l'ensemble de ces indices, d'ordre familial, économique et professionnel, avancés par le ministre et non contestés, l'intéressée doit être regardée, au titre des années d'imposition en litige, comme ayant à Lille, et non à Hermival-les-Vaux, le lieu de son principal établissement, au sens de l'article 10 du code général des impôts. Ainsi, au regard des mêmes indices, l'adresse de Lille constituait aussi le lieu de vie principal de la famille, que la propriété d'Hermival-les-Vaux n'accueillait, en réalité, qu'en fin de semaine.

9. D'autre part, l'opportunité professionnelle qui s'est ouverte à l'époux de Mme A..., d'ailleurs à une date non précisée, au Grand Quevilly, consistant à pouvoir exercer dans une clinique mettant à sa disposition un grand nombre de moyens techniques de haut niveau, ne peut justifier, même en tenant compte de la clause de non concurrence à laquelle il restait astreint, que Mme A... ait aussi entendu fixer sa résidence à Hermival-les-Vaux, commune distante de plus de 90 kilomètres de Grand Quevilly et de 350 kilomètres de Lille, ville dont celle du Grand Quevilly n'est distante que de 262 kilomètres, alors que la famille pouvait limiter ses déplacements à des allers-retours de l'époux de Mme A... entre Hermival-les-Vaux et Grand Quevilly pendant la semaine et entre Grand Quevilly et Lille en fin de semaine.

10. Eu égard à ce qui vient d'être dit aux deux points précédents, la situation de double résidence dans laquelle était placée Mme A... au cours des années 2014, 2016 et 2017 doit être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme résultant d'un choix de simple convenance personnelle. Dès lors, l'administration était fondée à remettre en cause la déduction portée par Mme A..., dans les déclarations de revenus qu'elle a souscrites au titre de ces années, des frais réels résultant de cette situation et à y substituer la déduction forfaitaire de 10 % pour frais professionnels prévue au 3° de l'article 83 du code général des impôts.

En ce qui concerne l'invocation de l'interprétation administrative de la loi fiscale :

11. En vertu du dernier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente.

12. Les énonciations des paragraphes n° 280 et n° 290 de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-RSA-BASE-30-50-30-20 ne comportant aucune interprétation formelle de la loi fiscale qui soit différente de celle dont le présent arrêt fait application, Mme A... n'est pas fondée à s'en prévaloir sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

En ce qui concerne l'invocation d'une prise de position formelle de l'administration :

13. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. ". En vertu du 1° de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, la garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal.

14. Si, par une décision du 28 février 2005, l'administration a partiellement admis une précédente réclamation de Mme A... afférente à la déduction de frais réels au titre des années 2002 et 2003 et a prononcé, en conséquence, le dégrèvement correspondant, il ressort des termes mêmes de cette décision, versée à l'instruction, que les frais admis en déduction par l'administration concernent exclusivement des dépenses liées au suivi d'un stage de marketing en langue anglaise, ainsi que des dépenses de téléphone qui sont sans lien avec la situation de double résidence faisant l'objet du présent litige.

15. Par une autre décision, prise le 10 mai 2011, l'administration, statuant sur une autre réclamation de Mme A..., concernant l'impôt sur le revenu de l'année 2006, a prononcé le dégrèvement total des suppléments d'impôt sur le revenu résultant de la remise en cause de la déductibilité des frais réels afférents à la situation de double résidence que Mme A... avait portés sur sa déclaration de revenus. Toutefois, le service s'est borné à indiquer dans cette décision : " Vous avez sollicité le bénéfice de la déduction de vos frais de double résidence au titre des frais réels soit 32 287 Euros en ligne AK de votre déclaration sur les revenus. / Après vérification des articles 83-3° et 6-4 du Code Général des Impôts, ces derniers sont admis en totalité. ". En l'absence de motivation suffisante de ce dégrèvement, la décision d'admission partielle invoquée ne peut être regardée comme comportant, sur ce point, une prise de position formelle de l'administration sur l'application de la loi fiscale à la situation de Mme A....

16. Enfin, si Mme A... se prévaut d'une décision de dégrèvement se rapportant aux années 2011, 2012 et 2013 et qui aurait trait à ses frais de double résidence, elle ne produit pas plus cette décision en appel qu'en première instance.

17. Eu égard à ce qui vient d'être dit aux trois points précédents, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait précédemment pris, sur l'application de la loi fiscale à sa situation de fait, une position formelle dont elle serait susceptible de se prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales. Mme A... n'est pas fondée à invoquer, à cet égard, les énonciations des paragraphes n° 60, n° 70 et n° 140 de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-SJ-RES-10-20-10, qui, en tout état de cause, ne comportent pas une interprétation des dispositions des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales qui soit différente de celle retenue par le présent arrêt.

Sur l'imputation d'un déficit agricole :

18. Aux termes de l'article 156 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année 2017 : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé eu égard aux propriétés et aux capitaux que possèdent les membres du foyer fiscal désignés aux 1 et 3 de l'article 6, aux professions qu'ils exercent, aux traitements, salaires, pensions et rentes viagères dont ils jouissent ainsi qu'aux bénéfices de toutes opérations lucratives auxquelles ils se livrent, sous déduction : / I. du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la sixième année inclusivement. / Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation : / 1° des déficits provenant d'exploitations agricoles lorsque le total des revenus nets d'autres sources excède 107 826 euros ; ces déficits peuvent cependant être admis en déduction des bénéfices de même nature des années suivantes jusqu'à la sixième inclusivement. / Le montant mentionné au premier alinéa est révisé chaque année selon les mêmes modalités que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu. / (...) ".

19. Mme A... a porté, sur la déclaration de revenus qu'elle a souscrite au titre de l'année 2017, dans la rubrique 5 HF " déficits agricoles ", un montant de 61 599 euros dont elle entendait ainsi obtenir l'imputation sur son revenu global. Toutefois, eu égard à ce que, comme il a été dit précédemment, c'est à bon droit que l'administration a réintégré, aux revenus imposables déclarés par Mme A... au titre de la même année, le montant des frais réels correspondant à sa situation de double résidence portés par elle en déduction et qu'elle a substitué, à ces frais, la déduction forfaitaire de 10 % prévue au 3° de l'article 83 du code général des impôts, il en résulte que le montant du revenu global de Mme A... s'en est trouvé, tout autant à bon droit, rehaussé. Dès lors que ce revenu global a, en conséquence, été porté au montant de 113 787 euros, lequel s'avère supérieur au plafond de 107 826 euros fixé, pour l'année 2017, par les dispositions précitées de l'article 156 du code général des impôts, c'est à bon droit que l'administration a refusé l'imputation de ce déficit agricole de 61 599 euros sur le revenu global de Mme A... au titre de l'année 2017.

20. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille n'a fait que partiellement droit à sa demande.

Sur les frais liés au litige :

21. Par voie de conséquence de l'ensemble de ce qui précède, les conclusions que Mme A... présente sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées et il doit en être de même, en tout état de cause, de ses conclusions afférentes à la charge des dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera transmise à l'administratrice de l'Etat chargée de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 30 mai 2024 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- M. François-Xavier Pin, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juin 2024.

Le rapporteur,

Signé : J.-F. PapinLe président de chambre,

Signé : M. HeinisLe président de la formation de jugement,

F.-X. Pin

La greffière,

Signé : E. Héléniak

La greffière,

E. Héléniak

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Sophie Cardot

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N°23DA00800

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3

N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA00800
Date de la décision : 13/06/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SCP BBLM AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-13;23da00800 ?
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