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02/05/2024 | FRANCE | N°22DA01863

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 4ème chambre, 02 mai 2024, 22DA01863


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge ou la réduction des cotisations primitives d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 à 2016, ainsi que des pénalités correspondantes.



Par un jugement n° 1903811 du 30 juin 2022, le tribunal administratif de Lille a, à ses articles 1er et 2, réduit, en droits et pénalités, les cotisations primitives d'imp

t sur revenu et de contributions sociales auxquelles M. A... a été assujetti au titre des années 2015...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge ou la réduction des cotisations primitives d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 à 2016, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1903811 du 30 juin 2022, le tribunal administratif de Lille a, à ses articles 1er et 2, réduit, en droits et pénalités, les cotisations primitives d'impôt sur revenu et de contributions sociales auxquelles M. A... a été assujetti au titre des années 2015 et 2016 à concurrence de la réduction des bases imposables d'un montant de 18 462 euros au titre de l'année 2015 et de 92 000 euros au titre de l'année 2016, à son article 3, mis à la charge de l'Etat le versement à M. A... de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, enfin, à son article 4, rejeté le surplus des conclusions de cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 août 2022, et des mémoires, enregistrés le 28 avril 2023 et le 17 mai 2023, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement attaqué en tant qu'ils déchargent M. A... de la cotisation d'impôt sur revenu et de contributions sociales à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2016 et des pénalités correspondantes, en conséquence de la réduction de la base d'imposition de 92 000 euros, ainsi que l'article 3 de ce jugement ;

2°) de remettre à la charge de M. A... la cotisation d'impôt sur le revenu et de contributions sociales qui lui avait été assignée, en droits et pénalités, au titre de l'année 2016 dont la décharge a été prononcée par le tribunal administratif de Lille.

Il soutient que :

- les conclusions d'appel incident présentées par M. A... sont irrecevables en ce qu'elles portent sur les impositions des années 2014 et 2015 ;

- en l'absence de tout élément concernant l'origine et la justification d'une créance détenue par M. A... sur l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Maison Bovary, le service pu à bon droit réintégrer un montant de 92 000 euros au résultat imposable de l'exercice 2016 de la société en raison d'un passif non justifié constaté à la suite de la dissolution anticipée de cette société et à sa liquidation en 2016 ; en outre, la créance, à la supposer établie, n'a pu être constituée que par des opérations portées au compte courant d'associé de M. A... au cours de l'exercice clos en 2016 de sorte que c'est à bon droit que le service a procédé à un rehaussement, au titre de cet exercice, d'un passif non justifié de 92 000 euros ; ainsi, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'administration n'était pas fondée à réintégrer dans le revenu imposable de M. A... au titre de l'année 2016, sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, cette distribution ;

- en tout état de cause, M. A... ne justifierait d'une créance sur la société, à la clôture de l'exercice 2015, n'excédant pas 38 428 euros, subsidiairement 45 148 euros ;

- à titre subsidiaire, il entend se prévaloir d'une compensation au titre de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales ; la valeur de 92 000 euros à laquelle l'immeuble a été cédé le 4 août 2016 à M. A... étant très inférieure à sa valeur vénale, le transfert de propriété de l'immeuble doit être regardé comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de revenus au sens du c de l'article 111 du code général des impôts imposable au titre de l'année 2016 ;

- la proposition de rectification du 2 octobre 2017 était suffisamment motivée s'agissant du rehaussement notifié à M. A... sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ;

- aucun rehaussement afférent à des charges non justifiées n'ayant été notifié à M. A... au titre de l'année 2016, son appel incident est sans objet.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 février 2023 et un mémoire, enregistré le 27 avril 2023, M. A..., représenté par Me Guey Balgairies conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident, à la décharge, pour la fraction maintenue à sa charge, des cotisations primitives d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 à 2016 ;

3°) et à ce qu'une somme de 2 400 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, il justifie d'apports en compte courant pour un montant de 49 870 euros de sorte que le passif est justifié à hauteur de ce montant ;

- la proposition de rectification qui lui a été adressée est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne précise ni le montant ni l'année des revenus distribués sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ;

- à titre incident, le principe d'annualité de l'impôt a été méconnu s'agissant de la réintégration, sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, de revenus distribués résultant de charges de l'EURL Maison Bovary regardées comme non justifiées.

Par une ordonnance du 2 mai 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pin, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

Sur l'objet du litige :

1. L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Maison Bovary, créée le 12 avril 2012 et dont M. A... était le gérant et l'associé unique, avait pour activité le commerce de gros de boissons et les prestations de conseil pour les affaires. Cette société, qui a été radiée le 23 septembre 2016, a fait l'objet en 2017 d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er octobre 2013 au 4 août 2016, à l'issue de laquelle l'administration a réintégré dans le revenu imposable de M. A..., dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, d'une part, les omissions de recettes rapportées aux bénéfices de la société, qui ont été imposées entre ses mains sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts au titre des années 2014, 2015 et 2016, et, d'autre part, une somme de 92 000 euros, se rapportant à une somme créditée sur son compte courant d'associé au titre de l'exercice clos en 2016, qui a été imposée, au titre de l'année 2016, sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du même code.

2. En conséquence de ce contrôle, M. A... a été assujetti, selon la procédure contradictoire, à des cotisations primitives d'impôt sur le revenu, dans la catégorie des revenus des capitaux mobiliers, et de contributions sociales, auxquelles ont été appliquées des intérêts de retard et des majorations de 10 % prévues aux articles 1728 et 1758 A du code général des impôts. Les impositions ont été mises en recouvrement le 31 décembre 2017.

3. Par un jugement du 30 juin 2022, le tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux assignées à M. A... résultant de revenus distribués issus, d'une part, de recettes omises au titre de l'exercice 2015 à hauteur de 18 462 euros et, d'autre part, de l'inscription au titre de l'exercice 2016 d'une somme de 92 000 euros au crédit de son compte courant d'associé, ainsi que des majorations correspondantes et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

4. Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique relève appel de ce jugement en tant qu'il a prononcé la réduction de 92 000 euros des bases d'imposition à l'impôt sur le revenu et de contributions sociales de M. A... au titre de l'année 2016 et qu'il a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

5. Par la voie de l'appel incident, M. A... conclut à l'annulation de ce jugement en tant qu'il n'a fait intégralement droit à sa demande de décharge.

Sur la recevabilité de l'appel incident :

6. Un appel incident est recevable, sans condition de délai, s'il ne soumet pas au juge un litige distinct de celui soulevé par l'appel principal, portant notamment sur des années d'imposition différentes.

7. Le ministre a relevé appel du jugement du tribunal administratif de Lille en tant que celui-ci a prononcé la réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle M. A... a été assujettie au titre de l'année 2016.

8. Les conclusions de M. A... formées par la voie d'un appel incident enregistré le 16 février 2023, postérieurement à l'expiration du délai d'appel, en tant qu'elles tendent à la décharge de la fraction des cotisations primitives d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015 et qui ont été maintenues à sa charge par le jugement attaqué, soulèvent un litige distinct de celui soulevé par l'appel formé par le ministre. Par suite, les conclusions d'appel incident de M. A... doivent, dans cette mesure, être rejetées.

Sur le motif de décharge retenu par le tribunal administratif :

9. Aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) ". Il résulte de ces dispositions que des sommes inscrites au crédit de comptes courants d'associés ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus distribués, imposables, par suite, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre de l'année de leur inscription.

10. Au cours de la vérification de comptabilité de l'EURL Maison Bovary, l'administration a constaté, qu'en vertu d'une délibération de l'assemblée générale de la société du 4 août 2016, un immeuble lui appartenant a été transféré à son gérant et unique associé " au titre de recouvrement de créances dues à M. A... à hauteur de 92 000 euros ". La société n'ayant pas été en mesure de justifier de la dette contractée à l'égard de son associé, l'administration a réintégré cette somme de 92 000 euros dans les résultats imposables de l'EURL Maison Bovary comme un passif injustifié, sur le fondement du 2 de l'article 38 du code général des impôts, et a regardé M. A... comme le bénéficiaire des revenus distribués correspondants, en vertu des dispositions rappelées ci-dessus du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts.

11. M. A... soutient que le compte courant qu'il détenait dans les écritures de l'EURL Maison Bovary était déjà créditeur d'un montant de 85 286 euros à la clôture de l'exercice 2014 et de 92 381 euros à la clôture de l'exercice 2015 et, qu'ainsi, la dette de ce montant à son égard n'a pas été constatée au bilan de clôture de l'exercice 2016 mais n'est que la reprise de soldes antérieurs de sorte que la somme de 92 000 euros ne pouvait être regardée, sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, comme un revenu distribué au titre de l'année 2016.

12. Toutefois, pour justifier que la somme de 92 000 euros avait été portée au crédit de son compte courant d'associé au cours d'un exercice antérieur à celui clos le 4 août 2016, M. A... s'est borné à produire des extraits du grand livre général de la société au titre des exercices clos entre 2013 et 2016 qui ont été édités, ainsi que le relève le ministre, le 3 mars 2021, soit postérieurement à la fois aux exercices auxquels ils se rapportent et à la vérification de comptabilité de l'EURL Maison Bovary. Si M. A... fait valoir en appel que ces extraits sont identiques à ceux que la société avait présentés au vérificateur, il n'en justifie pas alors qu'il résulte des mentions non contestées de la proposition de rectification du 22 septembre 2017 adressée à la société que son mandataire n'avait remis, au cours du contrôle, et en dépit de demandes en ce sens de l'administration, que les seuls fichiers des écritures comptables de l'exercice clos en 2014 d'ailleurs sous un format ne respectant pas les exigences fixées par l'article A. 47 A-1 du livre des procédures fiscales. Ainsi, par les seuls éléments qu'il produit, M. A... n'établit pas qu'un solde créditeur de 92 000 euros de ce compte courant apparaissait déjà dans la comptabilité des exercices antérieurs à celui clos en 2016 de la société.

13. Au surplus, le solde du compte courant d'associé de M. A... enregistré à la clôture de l'exercice 2016, tel qu'il figure sur l'état " provisoire " de l'extrait du grand livre versé par la société, fait état d'une dette de la société de 93 383,47 euros, et donc d'un montant différent du passif injustifié de 92 000 euros retenu par l'administration sans que l'intéressé ne justifie de cette différence.

14. Dès lors, c'est à tort que le tribunal administratif de Lille s'est fondé sur le moyen tiré de ce que M. A... apportait la preuve que la somme de 92 000 euros n'avait pas été inscrite au crédit de son compte courant d'associé au titre de l'année 2016 et ne pouvait, en conséquence, être imposée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre de cette année pour réduire les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales assignées à M. A... au titre de l'année 2016 à concurrence de la somme de 92 000 euros, et prononcer la décharge partielle des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi que des pénalités correspondantes, mises à sa charge au titre de cette année.

15. Il appartient, toutefois, à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... tant en première instance qu'en appel.

Sur les autres moyens soulevés par M. A... :

En ce qui concerne la motivation de la proposition de rectification du 2 octobre 2017 :

16. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ". Selon l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés ainsi que les années d'imposition concernées. Hormis le cas où elle se réfère à un document qu'elle joint à la proposition de rectification ou à la réponse aux observations du contribuable, l'administration peut satisfaire cette obligation en se bornant à se référer aux motifs retenus dans une proposition de rectification ou une réponse aux observations du contribuable, consécutive à un autre contrôle et qui lui a été régulièrement notifiée, à la condition qu'elle identifie précisément la proposition ou la réponse en cause et que celle-ci soit elle-même suffisamment motivée

17. La proposition de rectification du 2 octobre 2017 relative à la situation personnelle de M. A... mentionne que les rehaussements envisagés, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sont imposés sur deux fondements, à savoir le 1° et le 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts et s'élèvent à un montant total de 17 281 euros, 26 337 euros et 110 467 euros au titre respectivement des années 2014, 2015 et 2016. Concernant les revenus distribués au titre du 1° du 1 de l'article 109, la proposition de rectification, qui précise leur origine, indique qu'ils s'élèvent pour 2014, 2015 et 2016, à des montants respectifs de 17 281 euros, 26 337 euros et 18 467 euros.

18. Si l'intimé fait valoir que la proposition de rectification ne mentionne ni le montant ni l'année d'imposition des distributions fondées sur le 2° du 1 de l'article 109, il résulte de ce qui vient d'être dit, que le contribuable pouvait déduire de l'ensemble de mentions de cette proposition de rectification que ces revenus se rapportaient nécessairement à l'année 2016 et s'élevait à la différence entre le montant total des rehaussements et ceux résultant de l'autre fondement, soit 92 000 euros.

19. Au surplus, la proposition de rectification notifiée à l'adresse du contribuable par lettre recommandée dont l'avis de réception signé, versé à l'instance, établit qu'elle lui est parvenue le 10 octobre 2017, précise que les revenus distribués imposés sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts trouvent leur origine dans des sommes non justifiées inscrites au compte courant d'associé de M. A... et mises à la disposition de celui-ci et se réfère expressément aux rehaussements envisagés par l'administration dans la proposition de rectification du 22 septembre 2017 destinée à l'EURL Maison Bovary à la suite de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet et qui a été notifiée à son mandataire ad hoc, M. A..., le 2 octobre 2017. La proposition de rectification destinée à la société, dont le caractère suffisamment motivé est constant, mentionne que la somme portée au crédit du compte courant d'associé de l'intéressé au cours de l'exercice clos en 2016 pour un montant de 92 000 euros constitue un passif injustifié.

20. Il suit de là que M. A... a disposé des informations lui permettant de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation en application de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition établie au titre de l'année 2016 :

S'agissant des revenus distribués sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts :

21. Si M. A... fait valoir, à titre subsidiaire, qu'il a effectué des apports en compte courant d'associé au titre des exercices clos entre 2012 et 2014 à hauteur de 49 870 euros, ce montant ne correspond pas, en tout état de cause, à celui de la somme de 92 000 euros inscrite à son compte courant d'associé à la date de clôture de l'exercice 2016. Ainsi, M. A... n'apportant aucun autre élément, l'administration était, dès lors, fondée à estimer que les inscriptions portées, à ce titre, au crédit de son compte courant d'associé n'étaient pas justifiées dans leur principe et à regarder la somme correspondante de 92 000 euros comme ayant la nature d'un revenu distribué imposable entre les mains de M. A... sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts au titre de l'année 2016.

S'agissant des revenus distribués sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts :

22. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; (...) ". Pour l'application de ces dispositions les bénéfices sociaux visés par cette disposition sont présumés distribués à la date de clôture de l'exercice au terme duquel leur existence a été constatée, sauf si le contribuable ou l'administration apportent des éléments de nature à établir que la distribution a été, en fait, soit postérieure, soit antérieure à cette date. Le principe d'annualité de l'impôt sur le revenu ne fait pas obstacle à l'application de cette règle, dès lors que ni l'administration ni le contribuable, qui est imposé sur la base de fonds sociaux qu'il a appréhendés, ne sont en mesure d'établir qu'il doit être procédé à la répartition de ces sommes en fonction de la date à laquelle le contribuable en a effectivement disposé.

23. En se bornant à soutenir, alors que les exercices comptables de l'EURL Maison Bovary ne coïncident pas avec l'année civile, celui de 2016 ayant été clôturé au 4 août, que l'administration ne pouvait pas, sans méconnaître le principe d'annualité de l'impôt, rattacher les distributions résultant de charges afférentes à l'année 2015, M. A... ne démontre pas que la distribution des revenus dont il a bénéficié se serait pas, en fait, intervenue à la date de clôture de l'exercice 2016 au terme duquel leur existence a été constatée. Il s'ensuit que l'administration doit être regardée comme établissant l'appréhension des bénéfices par M. A..., en sa qualité de maître de l'affaire qu'il ne conteste pas, dans la limite des sommes réintégrées dans le résultat imposable de l'EURL Maison Bovary, et, par voie de conséquence, l'existence de distributions à hauteur de ce même bénéfice réintégré, soit 18 467 euros au titre de l'année 2016.

24. Il résulte de qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la demande de compensation qu'il présente à titre subsidiaire, que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé, d'une part, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a réduit les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales assignées à M. A... au titre de l'année 2016 à concurrence de la somme de 92 000 euros, et a en conséquence prononcé la décharge partielle, en droits et pénalités, de la cotisation d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mise à sa charge au titre de cette année et, d'autre part, à demander que cette cotisation soit remise à la charge de M. A.... En revanche, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

25. Le ministre est, de même, fondé à demander l'annulation de l'article 3 du jugement mettant à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante pour l'essentiel, le versement à M. A... d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administratif.

26. En revanche, ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat à verser à M. A... que celui-ci réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Les articles 1er à 3 du jugement n° 1903811 du tribunal administratif de Lille du 30 juin 2022 sont annulés.

Article 2 : La fraction de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle M. A... a été assujetti au titre de l'exercice clos en 2016 et dont le tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge, est remise à sa charge à raison de l'intégralité des droits et pénalités qui lui ont été assignés.

Article 3 : Les conclusions de la demande de M. A... devant le tribunal administratif de Lille relatives aux impositions et pénalités mentionnées à l'article 2 ainsi que l'ensemble de ses conclusions présentées devant la cour sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à M. B... A....

Copie en sera transmise à l'administratrice de l'Etat chargée de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience du 11 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- M. François-Xavier Pin, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Bertrand Baillard, premier conseiller,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 mai 2024.

Le président-rapporteur,

Signé : F.-X. Pin

L'assesseur le plus ancien,

Signé : B. BaillardLa greffière,

Signé : E. Héléniak

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Elisabeth Héléniak

2

N°22DA01863


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01863
Date de la décision : 02/05/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Pin
Rapporteur ?: M. François-Xavier Pin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : GUEY BALGAIRIES

Origine de la décision
Date de l'import : 26/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-02;22da01863 ?
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