Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2019 par lequel le maire de Saint-Georges-sur-Fontaine a délivré à M. et Mme E... un permis de construire une maison individuelle sur une parcelle cadastrée A 816 dans cette commune, ainsi que la décision rejetant son recours gracieux contre cet arrêté.
Par une ordonnance n°1903583 du 25 novembre 2019, la présidente de la 2e chambre du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Par un arrêt n°20DA00130 du 25 mai 2021, la cour a annulé cette ordonnance et renvoyé l'affaire devant le tribunal administratif de Rouen.
Par un jugement n°1903583 avant dire droit du 27 janvier 2022, le tribunal administratif de Rouen a sursis à statuer sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme afin que puisse être régularisé le vice entachant l'arrêté du 16 juillet 2019 du maire de Saint-Georges-sur-Fontaine.
Par un jugement n°1903583 du 7 juillet 2022, le tribunal administratif de Rouen, estimant que le vice identifié dans son jugement avant dire droit avait été régularisé par un arrêté du 21 avril 2022 du maire de Saint-Georges-sur-Fontaine, a rejeté la demande de Mme C....
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 8 mars 2022 sous le n°22DA00579 et des mémoires enregistrés les 17 juillet 2023 et 11 septembre 2023, Mme A... B... épouse C..., représentée par Me Audray Sarfati, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement avant dire droit du 27 janvier 2022 du tribunal administratif de Rouen ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2019 du maire de Saint-Georges-sur-Fontaine et sa décision rejetant son recours gracieux contre cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Georges-sur-Fontaine la somme de 3 000 euros et à la charge de M. et Mme E... une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa demande est recevable ;
- les premiers juges n'ont pas invité les parties à présenter leurs observations sur le caractère régularisable du vice qu'ils ont retenu ;
- ils ont écarté à tort le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions combinées de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime et de l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental de la Seine-Maritime.
Par un mémoire en défense enregistré le 26 juin 2023, la commune de Saint-Georges-sur-Fontaine, représentée par G..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme B... de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête qui ont perdu leur objet en raison de la régularisation du vice retenu par les premiers juges ;
- Mme B... ne justifie pas d'un intérêt pour agir suffisant ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 1er septembre 2023, M. D... E... et Mme F... E..., représentés par Me Hervé Suxe, concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme B... de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête qui ont perdu leur objet en raison de la régularisation du vice retenu par les premiers juges ;
- Mme B... ne justifie pas d'un intérêt pour agir suffisant ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par un courrier du 22 décembre 2023, les parties ont été invitées par la cour à présenter leurs observations sur l'éventuelle régularisation du vice tiré de la méconnaissance de la distance d'éloignement fixée, pour les élevages non familiaux, par l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental.
Par un mémoire enregistré le 2 janvier 2024, la commune de Saint-Georges-sur-Fontaine, représentée par G..., a présenté des observations en réponse au courrier du 22 décembre 2023 mentionné ci-dessus.
Par un mémoire enregistré le 11 janvier 2024, Mme B..., représentée par Me Audrey Sarfati, a indiqué qu'elle n'entendait pas présenter d'observations en réponse au courrier du 22 décembre 2023 mentionné ci-dessus.
II. Par une requête enregistrée le 12 septembre 2022 sous le n°22DA01920 et des mémoires enregistrés les 21 juillet 2023, 3 octobre 2023 et 6 novembre 2023, Mme A... épouse C..., représentée par Me Audray Sarfati, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement du 7 juillet 2022 du tribunal administratif de Rouen mentionné ci-dessus ;
2°) d'annuler les arrêtés des 16 juillet 2019 et 21 avril 2022 du maire de Saint-Georges-sur-Fontaine et sa décision rejetant son recours gracieux contre le premier de ces arrêtés ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Georges-sur-Fontaine la somme de 5 000 euros et à la charge de M. et Mme E... la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'avis du préfet de la Seine-Maritime est illégal au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;
- le vice relevé dans le jugement avant dire droit n'a pas été régularisé.
Par des mémoires en défense enregistrés les 26 juin 2023, 20 octobre 2023 et 2 janvier 2024, la commune de Saint-Georges-sur-Fontaine, représentée par G..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme B... de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le moyen tiré de l'illégalité de l'avis du préfet de la Seine-Maritime est inopérant ;
- le vice relevé dans le jugement avant dire droit a été régularisé ;
- à titre de régularisation, il peut être dérogé à la règle d'éloignement prévue par le règlement sanitaire départemental sur le fondement de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime ; une telle régularisation requiert un délai de quatre mois.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 septembre 2023, M. D... E... et Mme F... E..., représentés par Me Hervé Suxe, concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme B... de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- Mme B... ne justifie pas d'un intérêt pour agir suffisant ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par un courrier du 4 janvier 2024, les parties ont été invitées par la cour à présenter leurs observations sur l'éventuelle régularisation du vice tiré de la méconnaissance de la distance d'éloignement fixée, pour les élevages non familiaux, par l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental.
Par un mémoire enregistré le 11 janvier 2024, Mme B..., représentée par Me Audrey Sarfati, a indiqué qu'elle n'entendait pas présenter d'observations en réponse au courrier du 22 décembre 2023 mentionné ci-dessus.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Stéphane Eustache, premier conseiller,
- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,
- et les observations de Me Huon, représentant Mme B..., de Me Hervé Suxe, représentant M. et Mme E... et de G..., représentant la commune de Saint-Georges-sur-Fontaine.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme E... ont déposé le 17 mai 2019 et complété le 18 juin 2019 une demande de permis de construire une maison individuelle sur une parcelle cadastrée A 816 à Saint-Georges-sur-Fontaine. Par un arrêté du 16 juillet 2019, le maire de cette commune a délivré le permis sollicité, dont Mme A... B... épouse C... a demandé l'annulation au tribunal administratif de Rouen. Par une ordonnance du 25 novembre 2019, la présidente de la 2e chambre du tribunal a rejeté sa demande. Cette ordonnance a été annulée par un arrêt du 25 mai 2021 de la cour qui a renvoyé l'affaire au tribunal.
2. Par un jugement avant dire droit du 27 janvier 2022, le tribunal a sursis à statuer en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme aux fins de régularisation de l'incomplétude de la demande de permis de construire au regard des prescriptions de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme. Estimant que ce vice avait été régularisé par un arrêté du 21 avril 2022 du maire de Saint-Georges-sur-Fontaine, le tribunal a rejeté la demande de Mme B... par un jugement du 7 juillet 2022. Mme B... demande l'annulation de ces jugements du 27 janvier et du 7 juillet 2022 par deux requêtes enregistrées sous les n°22DA00579 et 22DA01920, qui ont fait l'objet d'une instruction commune et qu'il y a lieu de joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur les fins de non-recevoir opposées dans les deux instances :
3. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".
4. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité.
5. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
6. Il ressort des pièces des dossiers que Mme B... est nue propriétaire d'une parcelle qui jouxte le terrain d'assiette du projet et qui supporte un centre équestre situé à environ 23 mètres de la construction projetée. Si un incendie, survenu le 14 avril 2019, a détruit les écuries de ce centre, il ressort des pièces des dossiers et notamment du rapport d'expertise du 19 avril 2019 que ce centre a pu poursuivre ses activités après cet incident grâce à des installations provisoires puis, après la reconstruction des écuries, avec des équipements pérennes. Dans ces conditions, Mme B... justifie d'un intérêt suffisant pour agir contre les arrêtés attaqués. Par suite, les fins de non-recevoir opposées par les intimés doivent être écartées.
Sur la requête n°22DA00579 :
En ce qui concerne les moyens écartés par le jugement avant dire droit :
7. D'une part, aux termes du premier alinéa de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque des dispositions législatives ou réglementaires soumettent à des conditions de distance l'implantation (...) de bâtiments agricoles vis-à-vis des habitations et immeubles habituellement occupés par des tiers, la même exigence d'éloignement doit être imposée à ces derniers à toute nouvelle construction et à tout changement de destination précités à usage non agricole nécessitant un permis de construire (...) ".
8. Aux termes des deuxième et troisième alinéas du même article : " Dans les parties actuellement urbanisées des communes, des règles d'éloignement différentes de celles qui résultent du premier alinéa peuvent être fixées pour tenir compte de l'existence de constructions agricoles antérieurement implantées. Ces règles sont fixées par le plan local d'urbanisme ou, dans les communes non dotées d'un plan local d'urbanisme, par délibération du conseil municipal, prise après avis de la chambre d'agriculture et enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement. / Dans les secteurs où des règles spécifiques ont été fixées en application de l'alinéa précédent, l'extension limitée et les travaux rendus nécessaires par des mises aux normes des exploitations agricoles existantes sont autorisés, nonobstant la proximité de bâtiments d'habitations. ".
9. Aux termes du quatrième alinéa du même article : " Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, une distance d'éloignement inférieure peut être autorisée par l'autorité qui délivre le permis de construire, après avis de la chambre d'agriculture, pour tenir compte des spécificités locales. Une telle dérogation n'est pas possible dans les secteurs où des règles spécifiques ont été fixées en application du deuxième alinéa. ".
10. Il résulte de ces dispositions que les règles de distance imposées, par rapport notamment aux habitations existantes, à l'implantation d'un bâtiment agricole en vertu, en particulier, de la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement sont également applicables, par effet de réciprocité, à la délivrance du permis de construire une habitation située à proximité d'un tel bâtiment agricole. Il appartient ainsi à l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire un bâtiment à usage d'habitation de vérifier le respect des dispositions législatives ou réglementaires fixant de telles règles de distance, quelle qu'en soit la nature.
11. D'autre part, aux termes de l'article 153-4, intitulé " règles générales d'implantation ", du règlement sanitaire du département de Seine-Maritime : " Sans préjudice de l'application des documents d'urbanisme existant dans la commune ou de cahiers des charge de lotissement, l'implantation des bâtiments renfermant des animaux doit respecter les règles suivantes : / (...) / - les autres élevages, à l'exception des élevages de types familial et de ceux de volailles et de lapins, ne peuvent être implantés à moins de 50 m des immeubles habités ou habituellement occupés par des tiers (...) ".
12. Il ressort des pièces du dossier et notamment des factures et du rapport d'expertise produits que l'écurie du centre équestre implanté sur la parcelle appartenant à Mme B... comportait, avant sa destruction par l'incendie survenu le 14 avril 2019, quatorze " boxes " et accueillait dix chevaux, dont deux ont été tués par l'incendie. S'il est soutenu que le centre équestre n'était plus en fonctionnement à la date de l'arrêté du 16 juillet 2019, il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport d'expertise produit que ce centre a pu poursuivre ses activités après cet incendie grâce à des installations provisoires puis, après la reconstruction des écuries, avec des équipements pérennes.
13. Par ailleurs, s'il est soutenu que ce centre équestre présente le caractère d'un élevage familial, il ressort des pièces du dossier et notamment des factures de frais vétérinaires produites, qui ont certes été établies après la délivrance de l'arrêté attaqué mais qui révèlent des circonstances de fait prévalant à la date de son édiction, qu'au moins six chevaux sont pris en charge et ainsi élevés au sein du centre équestre. En outre, il ressort des pièces du dossier et notamment des attestations circonstanciées produites que ces chevaux ne sont pas exclusivement destinés à l'agrément des membres de la famille de Mme C..., mais qu'ils sont principalement utilisés par sa fille pour dispenser, à titre professionnel, des cours d'équitation et des prestations de promenade en calèche dans les environs.
14. Dans ces conditions, eu égard au nombre de chevaux élevés dans ce centre équestre et à l'usage professionnel qui en est fait, l'activité exercée sur la parcelle litigieuse ne peut être regardée comme un élevage familial au sens des dispositions précitées de l'article 153-4 du règlement sanitaire du département de Seine-Maritime. Il s'ensuit qu'en application de ces dispositions et de celles du premier alinéa de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime, et en l'absence de toute dérogation délivrée sur le fondement des deuxième à quatrième alinéas de ce dernier article, le projet de construction devait être implanté à au moins 50 mètres du centre équestre en cause. Or il ressort des pièces du dossier que le projet est implanté à 23 mètres du centre. Par suite, Mme B... est fondée à soutenir que l'arrêté du 16 juillet 2019 est entaché d'illégalité.
En ce qui concerne la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme par le jugement avant dire droit attaqué :
15. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé ".
16. Lorsqu'un tribunal administratif, après avoir écarté comme non fondés les autres moyens de la requête, a retenu l'existence d'un ou plusieurs vices entachant la légalité du permis de construire dont l'annulation lui était demandée et, après avoir estimé que ce ou ces vices étaient régularisables par un permis modificatif, a décidé de surseoir à statuer en faisant usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour inviter l'administration à régulariser ce vice, l'auteur du recours formé contre le permis est recevable à faire appel de ce jugement avant dire droit en tant qu'il a écarté comme non fondés les moyens dirigés contre l'autorisation d'urbanisme initiale et également en tant qu'il a fait application de ces dispositions de l'article L. 600-5-1.
17. Toutefois, à compter de l'intervention de la mesure de régularisation dans le cadre du sursis à statuer prononcé par le jugement avant dire droit, les conclusions dirigées contre ce jugement en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme sont privées d'objet.
18. Il ressort des pièces du dossier que, dans le cadre du sursis à statuer prononcé par le jugement avant dire droit du 27 janvier 2022, le maire de Saint-Georges-sur-Fontaine a délivré le permis de construire modificatif demandé par M. et Mme E... aux fins de régulariser le vice identifié par ce jugement tenant à l'incomplétude de la demande au regard des prescriptions de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme. Par suite, en application des règles énoncées ci-dessus, les conclusions d'appel de Mme B... tendant à l'annulation de ce jugement avant dire droit en tant qu'il met en œuvre la procédure de régularisation prévue à l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme sont privées d'objet. Dès lors, comme le fait valoir la commune, il n'y a plus de lieu de statuer sur ces conclusions.
En ce qui concerne la régularisation du vice entachant l'arrêté du 16 juillet 2019 :
19. Le vice relevé au point 14 est susceptible d'être régularisé par la délivrance d'un nouveau permis de construire modificatif, après avis de la chambre d'agriculture compétente, sur le fondement des dispositions précitées du quatrième alinéa de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les parcelles en cause appartiendraient à un secteur où des règles spécifiques d'éloignement auraient été édictées en application des deuxième et troisième alinéas de ce même article. Pour mettre en œuvre cette régularisation, il y a lieu, en application des dispositions précitées de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, de surseoir à statuer sur les conclusions de la requête n°22DA00579 pendant un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur la requête n°22DA01920 :
En ce qui concerne la régularisation de la demande de permis de construire :
20. Aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également : (...) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse ".
21. Il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire initiale a été complétée par des éléments photographiques permettant d'apprécier, d'une manière suffisamment précise et complète, l'insertion du projet dans son environnement proche et lointain, notamment par rapport aux constructions avoisinantes. Contrairement à ce que soutient l'appelante, il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire de Saint-Georges-sur-Fontaine n'aurait pas pris en considération ces éléments pour délivrer le permis de construire modificatif du 21 avril 2022. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du c) et du d) de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme doit être écarté.
En ce qui concerne l'avis conforme du préfet de la Seine-Maritime :
22. D'une part, aux termes de l'article L. 422-6 du code de l'urbanisme : " En cas d'annulation par voie juridictionnelle ou d'abrogation d'une carte communale, d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu, ou de constatation de leur illégalité par la juridiction administrative ou l'autorité compétente et lorsque cette décision n'a pas pour effet de remettre en vigueur un document d'urbanisme antérieur, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale recueille l'avis conforme du préfet sur les demandes de permis ou les déclarations préalables postérieures à cette annulation, à cette abrogation ou à cette constatation ".
23. D'autre part, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".
24. En vertu de ces dispositions, lorsqu'un projet de construction est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, le permis de construire ne peut être refusé que si l'autorité compétente estime, sous le contrôle du juge, qu'il n'est pas légalement possible, au vu du dossier et de l'instruction de la demande de permis, d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modification substantielle nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, permettraient d'assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect.
25. Il est constant qu'à la date de l'arrêté attaqué, le territoire de la commune de Saint-Georges-sur-Fontaine n'était plus couvert par un document d'urbanisme et que le préfet de la Seine-Maritime devait dès lors être consulté, en application des dispositions précitées de l'article L. 422-6 du code de l'urbanisme, sur la demande de permis de construire modificatif présentée par M. et Mme E... aux fins de régulariser le vice identifié par le jugement avant dire droit du 27 janvier 2022. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Maritime a émis le 28 mars 2022 un avis conforme favorable sur cette demande.
26. Si, dans cet avis, le préfet a notamment relevé que le projet n'appelait pas " d'observations particulières " au titre de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, la demande de permis de construire modificatif dont il était saisi ne portait que sur l'insertion du projet dans son environnement et les documents fournis dans cette demande ne comportent aucun élément nouveau susceptible de révéler un risque pour la sécurité ou la salubrité publiques, alors même le projet sera implanté à proximité du centre équestre mentionné ci-dessus comme l'indiquait déjà la demande initiale. Par suite et en tout état de cause, le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation au titre de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doit être écarté.
27. Il résulte de ce qui précède que les moyens soulevés contre l'arrêté du 21 avril 2022 doivent être écartés. Cependant, dès lors que, pour les motifs énoncés ci-dessus, l'arrêté du 16 juillet 2019 est entaché d'un vice et que celui-ci peut être régularisé en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, il y a lieu de surseoir à statuer dans les mêmes conditions sur les conclusions de la requête n°22DA01920 pendant un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n°22DA00579 tendant à l'annulation du jugement avant dire droit du 27 janvier 2022 en tant qu'il met en œuvre la procédure de régularisation prévue à l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.
Article 2 : Il est sursis à statuer sur les autres conclusions de la requête n°22DA00579 et sur les conclusions de la requête n°22DA01920 dans les conditions prévues aux points 19 et 27 du présent arrêt.
Article 3 : Tous droits et conclusions des parties sur lesquels il n'a pas été statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'à la fin de l'instance.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... épouse C..., à M. D... E..., à Mme F... E... et à la commune de Saint-Georges-sur-Fontaine.
Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 29 février 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Denis Perrin, premier conseiller,
- M. Stéphane Eustache, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 mars 2024.
Le rapporteur,
Signé : S. Eustache
La présidente de la formation de jugement,
Signé : I. Legrand
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Maritime en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Nathalie Roméro
N°22DA00579,22DA01920
2