Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 15 décembre 2022 par lequel le préfet de l'Aisne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.
Par un jugement n° 2300145 du 30 mars 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 avril 2023, M. B..., représenté par Me Antoine Tourbier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 15 décembre 2022 par lequel le préfet de l'Aisne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour : " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;
- le refus d'admission au séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de son état de santé ;
- le refus d'admission au séjour et l'obligation de quitter le territoire français sont entachés d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ces décisions sur sa vie privée.
Par deux mémoires en défense enregistrés les 2 et 13 juin 2023, le préfet de l'Aisne conclut au rejet de la requête et soutient qu'aucun des moyens soulevés par l'appelant n'est fondé.
Par courrier enregistré le 30 mai 2023, M. B... a, en application de la décision du Conseil d'État du 28 juillet 2022 n° 441481, confirmé sa volonté de lever le secret médical.
Le dossier médical de M. B... a été produit par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) le 7 juin 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Marc Baronnet, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant malien, né en 1972, a sollicité le renouvellement d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 15 décembre 2022, le préfet de l'Aisne a refusé ce renouvellement, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. M. B... fait appel du jugement n° 2300145 du 30 mars 2023 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, il ressort des termes de l'arrêté attaqué qu'il comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles reposent les décisions en litige, alors même qu'il ne reprend pas tous les éléments relatifs à la situation personnelle de l'intéressé. Le moyen tiré du défaut de motivation de cet arrêté doit donc être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable (...) ".
4. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. Si le demandeur entend contester le sens de cet avis du collège médical de l'OFII, il appartient à lui seul de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'OFII, en sollicitant sa communication, ainsi que les éléments versés par le demandeur au débat contradictoire. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
5. En l'espèce, le collège de médecins de l'OFII a estimé dans son avis du 3 novembre 2022 que si l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et qu'au vu des éléments du dossier, à la date de l'avis, son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque vers le pays d'origine.
6. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'avis du collège des médecins de l'OFII du 3 novembre 2022 que l'état de santé de M. B..., souffrant d'une affection de longue durée, évocatrice d'un syndrome de moyamoya lequel a entraîné la survenance de plusieurs accidents ischémiques et un déficit moteur du membre inférieur gauche, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. M. B... produit des éléments médicaux dont il ressort qu'il doit bénéficier d'un suivi neurologique annuel et prendre un traitement médicamenteux. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'un suivi neurologique est effectivement disponible au Mali, où le préfet de l'Aisne justifie qu'exercent dix-huit neurologues hospitaliers. Si M. B... prend un anti-agrégant plaquettaire et une statine à forte dose, l'OFII a estimé que le traitement approprié est disponible dans son pays d'origine, et aucun élément, notamment aucun certificat d'un médecin ou d'un pharmacien français ou malien n'indique que ces traitements, à savoir le duoplavin et l'atorvastatine, ou des molécules équivalentes, ne seraient pas disponibles au Mali. Si M. B... est sans revenu en France et soutient qu'il n'a pas les moyens financiers pour se soigner dans son pays d'origine, il n'apporte pas d'élément de nature à justifier qu'il serait démuni de ressources ou de couverture sociale en cas de retour dans son pays d'origine et qu'il ne serait pas en mesure d'y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Aisne aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être écarté. Pour les mêmes motifs, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le moyen tiré de ce que la décision de refus de renouvellement du titre de séjour serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation médicale doit également être écarté.
7. Si M. B... fait valoir qu'il est intégré dans la société française, fait du bénévolat associatif, est sans nouvelle de sa famille au Mali et n'a jamais constitué une menace pour l'ordre public, il ressort des pièces du dossier qu'il est célibataire, sans enfant, et n'est pas démuni d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a son épouse et cinq enfants. S'il soutient être entré en France en 1998, il ressort des pièces du dossier, et notamment des copies de son passeport, que celui-ci est revêtu de tampons de l'aéroport de Bamako de janvier 2019, peu avant sa demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade du 26 février 2019, de sorte que M. B... ne justifie pas de la durée de séjour en France qu'il allègue et au soutien de laquelle il ne produit au demeurant pas de pièces de nature à l'établir. M. B... n'apporte ainsi pas d'éléments de nature à établir l'existence de liens privés d'une particulière intensité sur le territoire national. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le préfet de l'Aisne n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'il a poursuivis. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision de refus de renouvellement du titre de séjour serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle et familiale doit être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de l'Aisne.
Délibéré après l'audience publique du 23 janvier 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,
- M. Marc Baronnet, président-assesseur ;
- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 février 2024.
Le rapporteur,
Signé : M. C...La présidente de chambre,
Signé : M.P. Viard
La greffière,
Signé : A.S. Villette
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
par délégation,
La greffière
Signé : Anne-Sophie VILLETTE
N°23DA00781 2