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25/01/2024 | FRANCE | N°23DA00662

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 25 janvier 2024, 23DA00662


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2022 par lequel la préfète de l'Oise a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.



Par un jugement n° 2203995 du 2 mars 2023, le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté du 24 novembre 2022 en tant

qu'il a refusé à M. C... un délai de départ volontaire, a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2022 par lequel la préfète de l'Oise a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2203995 du 2 mars 2023, le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté du 24 novembre 2022 en tant qu'il a refusé à M. C... un délai de départ volontaire, a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 avril 2023, M. C..., représenté par Me Emmanuelle Pereira, demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement en ce qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 novembre 2022 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l'Oise de renouveler son titre de séjour ou de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la préfète de l'Oise ne pouvait refusait l'admettre au séjour en raison de la menace pour l'ordre public qu'il constituerait ;

- le jugement attaqué est entaché d'omission à statuer ;

- il a implicitement présenté une demande d'autorisation de travail sur laquelle il n'a pas été statué ;

- la mesure d'éloignement est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle ;

- cette décision est entachée d'erreur de droit et résulte d'un défaut d'examen complet de sa situation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 novembre 2023, la préfète de l'Oise conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- les moyens invoqués ne sont pas fondés ;

- elle se trouvait en situation de compétence liée pour refuser d'admettre au séjour M. C....

M. C... a été admis au bénéficie de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 avril 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour et des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Bertrand Baillard, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant ivoirien né le 25 avril 2003 à Locodjro (Côte-d'Ivoire) est entré en France, selon ses déclarations, en février 2019 alors qu'il était mineur. Après avoir été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance, M. C... s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire " travailleur temporaire " valable du 28 avril 2021 au 27 avril 2022. Par un arrêté du 24 novembre 2022, la préfète de l'Oise a refusé de renouveler ce titre de séjour, a obligé M. C... à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de trois ans. M. C... a alors saisi le tribunal administratif d'Amiens d'une requête tendant à l'annulation de cet arrêté. Par un jugement du 2 mars 2023, le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté du 24 novembre 2022 uniquement en tant qu'il a refusé à M. C... un délai de départ volontaire et a rejeté le surplus des conclusions de la requête. Dans le cadre de la présente instance, M. C... demande à la cour de réformer ce jugement et d'annuler les décisions contenues dans l'arrêté du 24 novembre 2022 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser le renouvellement du titre de séjour sollicité par M. C..., la préfète de l'Oise s'est fondé sur le fait que le casier judiciaire de l'intéressé comportait une mention datée du 21 mai 2019 selon laquelle celui-ci avait été condamné par le tribunal correctionnel d'Auxerre à une peine de deux mois d'emprisonnement avec sursis et aux peines complémentaires d'interdiction du territoire français et de privation du droit d'éligibilité pendant deux ans pour " déclaration fausse ou incomplète pour obtenir d'une personne publique ou d'un organisme chargé d'une mission de service public une allocation, une prestation, un paiement ou un avantage indu ", fait caractérisant une menace pour l'ordre public. Toutefois, aucune précision n'a été apportée à l'instance sur les faits à l'origine de cette condamnation alors que M. C... soutient qu'il n'en est pas l'auteur et que son identité a été usurpée, une plainte contre X ayant été déposée à ce titre par M. C... le 1er décembre 2022 immédiatement après qu'il ait eu connaissance de cette condamnation à la suite de la notification de l'arrêté en litige. Par suite, en l'état du dossier, l'intéressé ne peut pas être regardé comme présentant une menace pour l'ordre public à la date d'adoption de l'arrêté du 24 novembre 2022. Dès lors, en refusant d'admettre au séjour M. C... pour ce seul motif, la préfète de l'Oise a inexactement appliqué les dispositions précitées de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étranger et du droit d'asile.

4. Devant la cour, la préfète de l'Oise se prévaut de ce qu'elle se trouvait en situation de compétence liée pour refuser d'admettre au séjour M. C... en raison de la peine d'interdiction du territoire français pour une durée de deux ans prononcée par le tribunal correctionnel d'Auxerre à l'encontre de l'intéressé le 21 mai 2019. Toutefois, en tout état de cause, l'absence d'exécution de cette peine dont le terme était atteint à la date de la décision en litige, ne pouvait justifier légalement un refus de séjour. M. C... est donc fondé à demander l'annulation de la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour ainsi que, par voie de conséquence, de celles portant obligation de quitter le territoire, fixant le pays de renvoi et interdisant à M. C... de retourner sur le territoire français pour une durée de trois ans.

5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté le surplus de sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. L'exécution du présent arrêt implique uniquement qu'il soit enjoint à la préfète de l'Oise de procéder au réexamen de la demande de M. C... dans un délai d'un mois et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.

Sur les conclusions relatives aux frais de l'instance :

7. M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Pereira, avocate de M. C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 000 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 3 du jugement du tribunal administratif d'Amiens du 2 mars 2023 et les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français contenues dans l'arrêté de la préfète de l'Oise du 24 novembre 2022 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la préfète de l'Oise de procéder au réexamen de la situation de M. C... dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à Me Pereira une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette dernière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à Me Emmanuelle Pereira et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera transmise à la préfète de l'Oise.

Délibéré après l'audience publique du 11 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- M. François-Xavier Pin, président-assesseur,

- M. Bertrand Baillard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2024.

Le rapporteur,

Signé : B. BaillardLe président de chambre,

Signé : M. A...

La greffière,

Signé : E. Héléniak

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Pour la greffière en chef

Et par délégation,

La greffière,

Elisabeth Héléniak

2

N°23DA00662


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA00662
Date de la décision : 25/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Bertrand Baillard
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SCP CARON-AMOUEL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-25;23da00662 ?
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