Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 31 juillet 2020 par laquelle le directeur interrégional des douanes a refusé de reconnaître imputable au service l'accident de trajet dont elle a été victime le 12 octobre 2019, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2101747 du 20 juillet 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 septembre 2022, Mme A..., représentée par Me Dutat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision du 31 juillet 2020 par laquelle le directeur interrégional des douanes a refusé de reconnaître imputable au service l'accident de trajet dont elle a été victime le 12 octobre 2019, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la chute accidentelle dont elle a été victime le 12 octobre 2019 doit être présumée imputable au service, conformément aux dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 ;
- son accident a eu lieu au cours de sa semaine de permanence s'étendant du lundi 7 octobre à 8 heures au lundi 14 octobre 2019 à 8 heures ;
- la circonstance que l'accident soit survenu au domicile de son compagnon ne rompt pas le lien avec le service dès lors que le détour par ce lieu était lié aux nécessités de la vie courante.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 janvier 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la relance, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés dans la requête ne sont pas fondés, en renvoyant au mémoire qu'il a produit le 7 juin 2021 devant le tribunal administratif de Lille.
Par une ordonnance du 25 mai 2023, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 26 juin 2023 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Frédéric Malfoy, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... A... est inspectrice régionale des douanes, affectée au service d'enquêtes judiciaires des finances (SEJF) de Lille. Le 12 octobre 2019, elle a chuté dans les escaliers du domicile de son compagnon et s'est blessée au poignet gauche. Le 22 octobre 2019, Mme A... a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident dont elle a été victime. La commission de réforme de l'Etat a examiné sa demande lors d'une séance s'étant tenue le 5 mars 2020 à l'issue de laquelle elle a émis un avis défavorable. Le directeur général des douanes et droits indirects, par une décision du 31 juillet 2020, a refusé de reconnaître l'accident déclaré par Mme A... comme imputable au service. Par un recours gracieux en date du 28 octobre 2020, Mme A... a demandé le réexamen de sa situation et la reconnaissance de l'imputabilité au service de son accident. Son recours ayant été expressément rejeté le 21 décembre suivant par le chef du Centre de services des ressources humaines de la direction interrégionale de Nouvelle Aquitaine, Mme A... a saisi le tribunal administratif de Lille d'un recours en excès de pouvoir contre ces décisions. Mme A... relève appel du jugement du 20 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 31 juillet 2020 du directeur général des douanes et droits indirects refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont elle a été victime le 12 octobre 2019, ensemble la décision du 21 décembre 2020 rejetant son recours gracieux.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors en vigueur : " (...) / II. - Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service. / III. - Est reconnu imputable au service, lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit en apportent la preuve ou lorsque l'enquête permet à l'autorité administrative de disposer des éléments suffisants, l'accident de trajet dont est victime le fonctionnaire qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s'accomplit son service et sa résidence ou son lieu de restauration et pendant la durée normale pour l'effectuer, sauf si un fait personnel du fonctionnaire ou toute autre circonstance particulière étrangère notamment aux nécessités de la vie courante est de nature à détacher l'accident du service. / (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service, le caractère d'un accident de service. En outre, est réputé constituer un accident de trajet tout accident dont est victime un agent public qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s'accomplit son travail et sa résidence et pendant la durée normale pour l'effectuer, sauf si un fait personnel de cet agent ou toute autre circonstance particulière est de nature à détacher l'accident du service. Il appartient dans tous les cas au juge administratif, saisi d'une décision de l'autorité administrative compétente refusant de reconnaître l'imputabilité au service d'un tel événement, de se prononcer au vu des circonstances de l'espèce.
4. Il ressort des motifs de la décision du 31 juillet 2020 contestée, que pour refuser de reconnaître comme imputable au service l'accident déclaré par Mme A..., le directeur général des douanes et droits indirects s'est fondé sur la circonstance que l'intéressée a chuté alors qu'elle ne se trouvait pas sur le trajet normal, direct et habituel entre son lieu de travail et son domicile, qui plus est au sein d'un logement qui n'était pas le sien et alors que ce trajet était interrompu depuis déjà deux heures.
5. Il ressort des pièces du dossier que dans le cadre de ses fonctions de directrice d'enquête au service d'enquêtes judiciaires des finances (SEJF) de Lille, Mme A... assurait une permanence d'une durée d'une semaine, courant du lundi 7 octobre à 8 heures au lundi 14 octobre 2019 à 8 heures. Dans le cadre d'une procédure de flagrance, elle a effectué une mission de deux jours à Dunkerque, qui a débuté le vendredi 11 octobre, pour s'achever le samedi 12 octobre en fin de journée. Il est constant qu'à l'issue de cette mission de deux jours, Mme A... ne s'est pas rendue directement à son domicile déclaré, situé rue Henry Bouchery à Pérenchies, mais est allée au domicile de son compagnon, situé rue de la gare à Saint-André-Lez-Lille. Selon les propres déclarations de Mme A..., elle est arrivée au domicile de son compagnon vers 20 heures pour y récupérer des effets personnels et se reposer puis c'est aux alentours de 22 heures, au moment où elle quittait son compagnon pour retourner chez elle, qu'elle a chuté dans les escaliers de l'immeuble de ce dernier. S'il n'est pas contesté qu'elle se rendait régulièrement et habituellement au domicile de son compagnon, le détour qu'elle a effectué par rapport à son lieu de résidence déclaré auprès de son administration employeur est étranger aux nécessités essentielles de la vie courante. A supposer même que le détour effectué par Mme A... ne puisse être regardé comme dicté par un simple motif de convenance personnelle, le temps durant lequel Mme A... est demeurée au domicile de son compagnon a eu pour effet de rompre tout lien avec le trajet effectué dans le cadre du retour de la mission qu'elle avait accomplie à Dunkerque. Il s'ensuit que c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que les circonstances particulières de l'accident dont Mme A... a été victime constituent un fait de nature à détacher cet accident du service, après avoir relevé qu'il s'est produit à l'intérieur de l'immeuble où se trouve le logement de son compagnon.
6. Dans ces conditions, le directeur général des douanes et droits indirects, n'a, dès lors, pas fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce, ni une application erronée des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la chute accidentelle dont Mme A... a été victime le 12 octobre 2019.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 31 juillet 2020 et de celle du 21 décembre 2020 de rejet de son recours gracieux.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par Mme A... au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience publique du 5 septembre 2023 à laquelle siégeaient :
- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,
- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,
- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 septembre 2023.
Le rapporteur,
Signé : F. Malfoy
La présidente de chambre,
Signé : M-P. Viard
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
La greffière,
N. Roméro
N° 22DA01965 2