La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/06/2023 | FRANCE | N°22DA02027

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 29 juin 2023, 22DA02027


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 8 juin 2022 par lequel la préfète de la Somme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de la Somme de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir.

Par un jugement n

2202203 du 15 septembre 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 8 juin 2022 par lequel la préfète de la Somme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de la Somme de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 2202203 du 15 septembre 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 octobre 2022, M. A..., représenté par Me Porcher, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 8 juin 2022 de la préfète de la Somme ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Somme de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient qu'en décidant de ne pas l'admettre, à titre exceptionnel, au séjour, en dépit, notamment, des diplômes et des perspectives d'insertion professionnelle dont il justifiait, la préfète de la Somme a commis une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de la Somme, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Par une décision du 3 novembre 2022, M. A... a été admis à l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Papin, premier conseiller,

- et les observations de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant malien né le 15 novembre 1987 à Mafouné (Mali), a quitté son pays d'origine après l'obtention du baccalauréat, à l'âge de dix-huit ans, afin de se rendre en Algérie, où il a vécu durant quatre années et a poursuivi des études supérieures. Entré régulièrement en France le 21 décembre 2010 sous couvert d'un passeport national revêtu d'un visa portant la mention " étudiant ", il s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ", valable jusqu'au 12 novembre 2018. Par un arrêté du 31 janvier 2020, le préfet de la Somme a refusé de lui accorder le renouvellement de ce titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 26 mai 2020, confirmé par un arrêt du 13 juillet 2021 de la cour administrative d'appel de Douai, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté la demande de M. A... tendant à l'annulation de cet arrêté. M. A... a sollicité, le 5 août 2021, l'admission exceptionnelle au séjour. Par un avis du 7 mars 2022, la commission du titre de séjour du département de la Somme a émis un avis défavorable à la régularisation de la situation de M. A... au regard du droit au séjour. Par un arrêté du 8 juin 2022, la préfète de la Somme a refusé de faire droit à cette demande, a fait obligation à M. A... de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du 15 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de cet arrêté.

2. Aux termes l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / (...) ".

3. En présence d'une demande de titre de séjour présentée sur le fondement de ces dispositions par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger, ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément relatif à sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.

4. M. A... se prévaut de l'obtention, au terme des études qu'il a poursuivies en France, d'un doctorat en langue, littérature et civilisation des pays anglophones, qui lui a été délivré le 2 avril 2019. Il soutient que ce diplôme, ainsi que le Master II en arts, lettres, langues, mention lettres, qu'il a préparé ensuite afin d'enrichir ses qualifications et qu'il a obtenu à la session de juin 2022, lui ouvrent des perspectives sérieuses d'insertion professionnelle. Il fait état, à cet égard, des contacts qu'il a noués avec l'Université de Picardie Jules Verne, qui lui a proposé de dispenser 80 heures d'enseignement en Anglais, au titre de l'année universitaire 2022/2023, auprès d'étudiants inscrits en première année de licence de lettres-humanités. Il indique également que la direction diocésaine de l'enseignement catholique de l'Est-Francilien a, depuis lors, manifesté, en février 2023, son intérêt pour la candidature qu'il a présentée afin d'enseigner l'anglais dans des établissements privés sous contrat et que l'absence d'aboutissement de ces discussions résulte uniquement de ce qu'il n'a pas été en mesure de justifier de la détention d'un titre de séjour.

5. Toutefois, d'une part, si M. A... pouvait, à la date de l'arrêté contesté, se prévaloir d'un séjour habituel de près de douze années en France, dont la majeure partie a été effectuée dans des conditions régulières, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est célibataire et sans enfant à charge et qu'il n'apporte aucun élément au soutien de ses allégations relatives aux relations sociales et amicales qu'il indique avoir nouées depuis son arrivée sur le territoire français. Dans ces conditions, ni l'ancienneté du séjour en France de M. A..., ni son engagement bénévole auprès d'une association confessionnelle d'aide aux étudiants, ni les nombreuses missions d'intérim qu'il a accomplies afin de financer ses études ne peuvent suffire à constituer des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale.

6. D'autre part, à la date de l'arrêté contesté, M. A... ne pouvait, malgré l'obtention de son diplôme de doctorat, justifier de perspectives pérennes d'insertion professionnelle en France, mais faisait seulement état de contacts avec l'Université de Picardie Jules Verne en vue de dispenser un nombre réduit d'heures d'enseignement en anglais à des étudiants de première année, les relations qu'il a nouées avec la direction diocésaine de l'enseignement catholique de l'Est-Francilien étant, en tout état de cause, postérieures à la date d'édiction de l'arrêté contesté. Dans ces conditions, M. A... ne peut être regardé comme justifiant, à cette date, de motifs exceptionnels de nature à justifier que lui soit délivrée, dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour, une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ".

7. Il résulte de ce qui a été dit aux points 5 et 6 que, nonobstant les efforts d'intégration de l'intéressé, la préfète de la Somme, pour refuser de faire bénéficier M. A... d'une régularisation de sa situation administrative au titre de l'admission exceptionnelle au séjour prévue par les dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut être regardée comme ayant entaché cette décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles qu'il présente sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Porcher.

Copie en sera transmise au préfet de la Somme.

Délibéré après l'audience publique du 15 juin 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juin 2023.

Le rapporteur,

Signé: J.-F. PapinLe président de chambre,

Signé: C. Heu

La greffière,

Signé: N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Nathalie Roméro

1

2

N°22DA02027

1

2

N°22DA01278


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA02027
Date de la décision : 29/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : PORCHER

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-06-29;22da02027 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award