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29/06/2023 | FRANCE | N°22DA00346

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 29 juin 2023, 22DA00346


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... C... ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge ou la réduction, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2007, de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 et des cotisations primitives de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008.

Par un jug

ement n° 1904199 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Lille a, d'une part,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... C... ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge ou la réduction, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2007, de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 et des cotisations primitives de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008.

Par un jugement n° 1904199 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Lille a, d'une part, réduit les bases imposables à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales assignées à M. et Mme A... C... au titre des années 2007 et 2008, d'autre part, prononcé, en conséquence de cette réduction de bases, une réduction, en droits et pénalités, des impositions et contributions en litige, enfin, rejeté le surplus des conclusions de cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 février 2022 et le 16 septembre 2022, M. et Mme A... C..., représentés par le cabinet d'avocats Fidal, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il ne leur donne pas entière satisfaction ;

2°) de prononcer, à titre principal, la décharge, en droits et pénalités, des impositions et contributions demeurant en litige, à titre subsidiaire, la réduction, en droits et pénalités, de ces mêmes impositions et contributions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- à titre principal, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif, le service, en n'apportant aucune réponse aux observations qu'ils avaient formulées sur la proposition de rectification qui leur avait été adressée le 20 décembre 2016, a, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, entaché la procédure d'imposition d'une irrégularité de nature à justifier la décharge des impositions et contributions demeurant en litige ; ils peuvent se prévaloir de la garantie correspondante dès lors qu'ils ne se trouvaient pas en situation d'être taxés d'office sur le fondement de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, en l'absence de mise en demeure préalable tendant au dépôt de déclarations fiscales ;

- le droit de reprise de l'administration ne pouvait s'exercer, en application des dispositions du troisième alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, jusqu'à la fin de la dixième année suivant celles au titre desquelles les impositions et contributions en litige étaient dues, dès lors que M. A... C... ne peut être regardé comme ayant exercé une activité occulte au sens de ces dispositions ;

- en conséquence, l'administration n'était pas fondée à faire application de la majoration de 80 % prévue, en cas de découverte d'une activité occulte, par le c. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts ;

- à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour estimerait que M. A... C... était tenu de souscrire une déclaration distincte au titre d'une activité illicite, il lui appartiendrait de réduire les impositions et contributions en litige en prenant en considération les éléments régulièrement déclarés par l'intéressé au titre des années 2007 et 2008.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juillet 2022, et par un mémoire, enregistré le 31 mai 2023, le ministre de l'économie et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les impositions et contributions en litige ont été établies d'office en application de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales ; en conséquence, M. et Mme A... C... ne peuvent utilement invoquer la méconnaissance des garanties prévues à l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, qui sont exclusivement applicables dans le cas où la procédure de rectification contradictoire est mise en œuvre ; au surplus, alors qu'il n'y était pas tenu, le service a répondu aux observations présentées par les intéressés sur la proposition de rectification qui leur a été adressée, sans qu'ait d'incidence la circonstance qu'ils n'ont pas réclamé, dans le délai légal de mise à disposition, le pli recommandé contenant cette réponse ;

- le service a pu, sans commettre d'irrégularité, mettre en œuvre la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, sans adresser à M. et Mme A... C... une mise en demeure préalable, qui n'est pas requise lorsque le contribuable s'est livré à une activité occulte au sens de l'article L. 169 du même livre, ce qui est le cas de M. A... C..., qui a prélevé, à son profit, des sommes importantes sur le compte des personnes vulnérables dont la gestion lui incombait dans le cadre de ses fonctions, sans souscrire les déclarations afférentes à cette activité illicite de détournement de fonds, qui est, par nature, distincte de l'activité réglementée de gérant de tutelle ; dans ces conditions, les appelants ne peuvent utilement faire état des déclarations de bénéfices non commerciaux déposées par M. D... en ce qui concerne l'exercice de son activité de gérant de tutelle, ni même se prévaloir des conditions d'application de la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 66 du même livre, qui sont sans rapport avec le présent litige ;

- l'administration pouvait, dans ces conditions, se prévaloir du délai de reprise de dix ans prévu à l'article L. 169 du livre des procédures fiscales dans le cas où le contribuable exerce une activité occulte ;

- l'administration ayant démontré l'exercice par M. D..., au cours des années en litige, d'une activité occulte de détournement de fonds, c'est à bon droit qu'elle a fait application aux droits en litige de la majoration de 80 % prévue, en pareille situation, par le c. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A... C... a exercé, du 1er janvier 2006 au 30 juin 2008, l'activité de gérant de tutelles de majeurs protégés. L'administration fiscale a été informée par l'autorité judiciaire, dans les conditions prévues à l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, de ce qu'une enquête pénale concernant M. A... C... avait été diligentée à raison de faits d'abus de confiance imputés à l'intéressé à l'occasion de l'exercice de ses fonctions de gérant de tutelles ou en raison de cette qualité. Par un jugement du 15 juillet 2016, le tribunal correctionnel de Lille a reconnu M. A... C... coupable des faits d'abus de confiance par mandataire de justice en raison de sa qualité ou dans ses fonctions, commis du 1er janvier 2006 au 30 juin 2008. Ce jugement a été confirmé, sur ce point, par un arrêt du 15 mai 2018 de la cour d'appel de Douai passé en force de chose jugée. Entre-temps, à l'issue d'un contrôle sur pièces des déclarations de revenus souscrites par M. et Mme A... C... au titre des années 2006 à 2008, l'administration a estimé que M. A... C... avait exercé, au cours de ces années, une activité occulte de détournements de fonds consistant dans le prélèvement indu, à titre habituel, de sommes importantes sur les comptes des personnes protégées dont la gestion de la tutelle lui avait été confiée. Elle a fait connaître sa position à M. A... C..., dans le cadre de la procédure d'évaluation d'office, par une proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 20 décembre 2016, et qui informait également le contribuable de l'intention du service d'appliquer la majoration de 80 % prévue, en cas de découverte d'une activité occulte, par le c. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts, aux droits résultant des rehaussements notifiés. Les cotisations d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux établies, au titre des années 2006 à 2008, à la suite de cette proposition de rectification ont été mises en recouvrement le 31 juillet 2017 pour un montant total, en droits et pénalités, de 294 250 euros.

2. La réclamation introduite par M. et Mme A... C... ayant été rejetée, ceux-ci ont porté le litige devant le tribunal administratif de Lille, en lui demandant de prononcer la décharge ou la réduction, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2007, de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 et des cotisations primitives de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008. Par un jugement du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Lille a, d'une part, réduit les bases imposables à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales assignées à M. et Mme A... C... au titre des années 2007 et 2008, d'autre part, prononcé, en conséquence de cette réduction de bases, une réduction, en droits et pénalités, des impositions et contributions en litige, enfin, rejeté le surplus des conclusions de cette demande. M. et Mme A... C... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il ne leur donne pas entière satisfaction.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne la mise en œuvre de la procédure d'évaluation d'office :

3. Aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales : " Peuvent être évalués d'office : / (...) / 2° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus non commerciaux ou des revenus assimilés lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 97 du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal ; / (...) / Les dispositions de l'article L. 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2°. ". En vertu de l'article L. 68 de ce livre, la procédure de taxation d'office n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure, ce même article précisant toutefois qu'il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure, notamment, si, ainsi qu'il est dit au 3°, le contribuable s'est livré à une activité occulte, au sens des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 169 du même livre. L'article L. 169 du livre des procédures fiscales énonce qu'une activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable qui s'y livre n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite. Enfin, en vertu de l'article 97 du code général des impôts, les contribuables exerçant une activité qui génère des bénéfices non commerciaux et qui sont soumis, obligatoirement ou sur option, au régime de la déclaration contrôlée sont tenus de souscrire chaque année, dans des conditions et délais prévus aux articles 172 et 175 de ce code, une déclaration de résultats.

4. L'administration a constaté, après avoir consulté les pièces de la procédure pénale qui lui ont été communiquées par l'autorité judiciaire, à la suite de l'autorisation donnée par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Lille, que M. A... C... s'était livré, de manière habituelle, sur la période allant du 1er janvier 2006 au 30 juin 2008, à une activité consistant à détourner des fonds à son profit, dans le cadre de l'exercice de ses fonctions de gestionnaire de tutelles. Ces détournements de fonds ont consisté en la perception, au préjudice de plusieurs majeurs protégés, de rémunérations indues, non autorisées par le juge des tutelles et excédant notablement le barème arrêté pour cette activité. La cour d'appel de Douai, dans son arrêt du 15 mai 2018, passé en force de chose jugée, déclarant M. A... C... coupable des faits d'abus de confiance au préjudice de personnes vulnérables et des faits d'abus de confiance par mandataire de justice en raison de sa qualité ou dans ses fonctions, a ainsi retenu que l'intéressé avait perçu, à ce titre, les sommes totales de 172 964 euros en 2007 et de 54 350 euros en 2008. Eu égard à l'importance des montants sur lesquels ils portent et à l'ampleur de la période au cours de laquelle ils ont été perpétrés, ces détournements de fonds doivent être regardés comme s'inscrivant dans le cadre de l'exercice habituel d'une véritable activité, dont les revenus sont, par nature, assimilables aux bénéfices non commerciaux mentionnés au 1. de l'article 92 du code général des impôts.

5. M. et Mme A... C... font valoir qu'ils ont porté, dans les déclarations de revenus qu'ils ont souscrites au titre des années d'imposition en litige, une partie des sommes perçues par M. A... C... dans le cadre de son activité de gestionnaire de tutelles. Toutefois, cette activité doit être regardée comme distincte, par nature, de celle consistant à détourner, à titre habituel, des sommes sur les comptes bancaires des personnes protégées, auxquels l'intéressé avait accès. Or, il est constant que M. A... C... n'a souscrit aucune des déclarations que les dispositions de l'article 97 du code général des impôts imposent aux titulaires de bénéfices non commerciaux de souscrire chaque année, et n'a pas davantage fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, cette activité présentant, au surplus, un caractère illicite. En conséquence, cette activité doit être regardée comme présentant un caractère occulte au sens des dispositions susmentionnées de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales. Dès lors, l'administration, après avoir constaté l'absence de souscription, par M. A... C..., des déclarations annuelles auxquelles celui-ci était astreint à raison de l'exercice de cette activité, ainsi que le caractère occulte de celle-ci, a pu, sans entacher d'irrégularité la procédure d'imposition, notifier à l'intéressé, selon la procédure d'évaluation d'office prévue au 2° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, sans préalablement lui adresser une mise en demeure de régulariser sa situation, les rehaussements, en matière de bénéfices non commerciaux, correspondant à l'imposition, au sein de son foyer fiscal, des bénéfices réalisés à l'occasion de cette activité. Par ailleurs, M. et Mme A... C... ne peuvent utilement soutenir que les conditions auxquelles la mise en œuvre de la procédure de taxation d'office, visée à l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, n'étaient pas satisfaites, dès lors que l'administration n'a pas engagé cette procédure à leur égard.

En ce qui concerne l'absence de réponse de l'administration aux observations présentées par les contribuables sur les rehaussements notifiés :

6. Si, en vertu de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, lorsque l'administration rejette les observations du contribuable, sa réponse doit être motivée, cette disposition, qui s'insère dans la partie de ce livre qui concerne la procédure de rectification contradictoire, ne trouve pas à s'appliquer dans le cas où, comme en l'espèce, les impositions et contributions en litige ont été établies d'office. Par suite, M. et Mme A... C... ne peuvent utilement soutenir qu'ils n'ont pas été rendus destinataires d'une réponse motivée aux observations qu'ils ont formulées le 19 février 2017 sur la proposition de rectification adressée le 20 décembre 2016 à M. A... C.... Au surplus, le ministre justifie en appel de l'envoi, le 4 avril 2017, d'une réponse motivée aux intéressés et de ce que ceux-ci, bien qu'avisés le 6 avril 2017 de la mise à leur disposition, auprès du bureau de poste, du pli correspondant, ne l'ont pas retiré dans le délai imparti.

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

En ce qui concerne le moyen tiré de la prescription :

7. En vertu de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce, pour l'impôt sur le revenu, jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. Cet article ajoute que, par exception, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable exerce une activité occulte, dont le même article donne, ainsi qu'il a été dit au point 3, la définition.

8. Il résulte de l'instruction que M. A... C... doit être regardé, ainsi qu'il a été dit au point 5, comme ayant exercé, au cours des années 2007 et 2008, une activité occulte au sens des dispositions de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales. Le droit de reprise dont disposait l'administration en matière d'impôt sur le revenu était donc susceptible d'être exercé, non pas jusqu'à la fin de la troisième année, mais jusqu'à la fin de la dixième année suivant celle au cours de laquelle les impositions sont devenues exigibles. Par suite, le moyen tiré par M. et Mme A... C... de ce que les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige sont, en tout ou partie, atteintes par la prescription doit être écarté.

En ce qui concerne la charge de la preuve :

9. Ainsi qu'il a été dit au point 5, les rehaussements contestés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ont été notifiés à bon droit à M. A... C... selon la procédure d'évaluation d'office. Il s'ensuit que M. et Mme A... C... supportent, en application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve et qu'il leur appartient, en vertu de l'article R. 193-1 de ce livre, d'établir que les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis présentent un caractère exagéré.

En ce qui concerne le moyen tiré de l'exagération des impositions en litige :

10. Il résulte de l'instruction et, notamment, des termes de la proposition de rectification adressée le 20 décembre 2016 à M. A... C... que, pour apporter, aux revenus imposable de ce dernier dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, les rectifications contestées, l'administration a estimé, à partir de l'examen des pièces de la procédure pénale auxquelles elle a eu accès et après avoir notamment constaté l'absence de décision du juge des tutelles autorisant l'intéressé à percevoir une rémunération au titre de l'exercice de ses fonctions de gestionnaire de tutelles, que l'intégralité des revenus perçus, au cours des années d'imposition en litige, par l'intéressé à l'occasion de l'exercice de cette activité provenait de son activité occulte de détournement de fonds. Elle n'a, dans ces conditions, pas tenu compte des sommes portées par M. et Mme A... C..., sur les déclarations de revenus souscrites par eux au titre des années 2007 et 2008, comme correspondant aux revenus de l'activité de M. A... C..., mais a exclusivement soumis à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux, au sein du foyer fiscal de l'intéressé, les sommes identifiées comme provenant de cette activité occulte. En conséquence, M. et Mme A... C... ne sont pas fondés à demander que les sommes portées sur les déclarations de revenus qu'ils ont souscrites au titre des années 2007 et 2008 soient déduites des bases d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux qui leur ont été assignées, après les rectifications contestées, au titre de ces années, ni à soutenir qu'en procédant à ces rectifications, l'administration les aurait doublement imposés à raison des mêmes sommes. Il suit de là que leurs conclusions subsidiaires tendant à la réduction, en droits et pénalités, des impositions en litige doivent être rejetées.

Sur les pénalités :

11. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / (...) / c. 80 % en cas de découverte d'une activité occulte. / (...) ".

12. L'administration a appliqué aux suppléments d'impôt sur le revenu auxquels M. et Mme A... C... ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008 la majoration de 80 % prévue, en cas de découverte d'une activité occulte, par le c. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts. Pour justifier, comme la charge lui en incombe, l'application de cette majoration, l'administration a retenu, dans la proposition de rectification qu'elle a adressée le 20 décembre 2016 à M. A... C..., que l'activité de détournement de fonds exercée à titre habituel par l'intéressé, qui n'avait pas souscrit les déclarations de résultats lui incombant, était, par nature, illicite, de sorte qu'elle présentait un caractère occulte. Le ministre s'approprie cette analyse dans ses écritures d'appel.

13. Il est constant que M. et Mme A... C... n'ont porté, sur les déclarations de revenus souscrites par eux au titre des années 2007 et 2008, aucune des sommes tirées par M. D... des détournements de fonds auxquels il s'est habituellement livré au cours de ces années au préjudice des majeurs protégés dont la gestion de la tutelle lui avait été confiée. Ces agissements habituels effectués dans un but lucratif caractérisent l'exercice d'une activité économique, distincte par nature de l'exercice des fonctions de gestionnaire de tutelle. Or, il est constant que M. A... C... n'a aucunement déclaré les résultats de cette activité, laquelle était inconnue de l'administration et des organismes compétents. Dans ces conditions et alors que M. et Mme A... C... n'allèguent pas que ces manquements aux obligations déclaratives résulteraient d'une erreur, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'exercice, par M. A... C..., d'une activité occulte, au sens des dispositions précitées du c. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts, de détournement de fonds, laquelle présentait, au surplus, un caractère illicite. C'est donc à bon droit que l'administration a fait application aux suppléments d'impôt sur le revenu auxquels M. et Mme A... C... ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008, de la majoration de 80 % prévue, en cas de découverte d'une activité occulte, par le c. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille n'a que partiellement fait droit à leurs conclusions tendant à la décharge des impositions et contributions en litige. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. et Mme A... C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... C... et au ministre de l'économie et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 15 juin 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juin 2023.

Le rapporteur,

Signé: J.-F. PapinLe président de chambre,

Signé: C. Heu

La greffière,

Signé: N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Nathalie Roméro

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N°22DA00346

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00346
Date de la décision : 29/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-06-29;22da00346 ?
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