Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) LBFI International a demandé au tribunal administratif de Lille, de prononcer, d'une part, la décharge des cotisations primitives de contribution foncière des entreprises (CFE) et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2017 et 2018 et, d'autre part, la restitution des sommes indûment versées, pour un montant total de 90 398 euros, majorées des intérêts moratoires prévus à l'article 1727 du code général des impôts à compter du jour du paiement des impôts concernés.
Par le jugement no 1806296 du 1er avril 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 10 mai 2021, la SAS LBFI International, représentée par Me Chronowski, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) d'ordonner la restitution des sommes indûment versées, pour un montant total de 90 398 euros, majorées des intérêts moratoires prévus à l'article 1727 du code général des impôts à compter du jour du paiement des impôts concernés ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'administration fiscale a méconnu l'article 1465 du code général des impôts faute de l'avoir informée des motifs pour lesquels sa demande d'exonération de la cotisation foncière des entreprises et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises n'était pas admise ;
- le dépôt tardif de sa déclaration initiale de CFE et de CVAE ne libère pas l'administration de cette obligation d'information ;
- elle disposait de l'agrément prévu à l'article 44 septies du code général des impôts lui permettant de solliciter l'exonération prévue à l'article 1464 B du même code et satisfait toutes les conditions prévues à cet article ;
- la métropole européenne de Lille a délibéré le 10 février 2017 sur l'exonération de CFE et de CVAE pour l'année 2017 tel qu'exigé par l'article 1464 C du code général des impôts et cette délibération vaut également pour l'article 1464 B du code général des impôts.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 avril 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la cour ne doit statuer qu'à hauteur de la somme de 47 573 euros ;
- les conclusions tendant au versement par l'Etat d'intérêts moratoires sont irrecevables ;
- les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bertrand Baillard, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société par actions simplifiée (SAS) LBFI International, a repris à l'occasion de sa création, le 12 juillet 2016, les activités exercées par les sociétés LBFI, CDC et Multi-participations, lesquelles avaient été placées en redressement judiciaire. Le 26 septembre 2017, la SAS LBFI a présenté une demande d'agrément pour bénéficier du régime fiscal prévu à l'article 44 septies du code général des impôts en se prévalant de cette reprise d'activité. Par une décision du 19 avril 2018, le directeur régional des finances publiques des Hauts-de-France et du département du Nord lui a accordé cet agrément lui permettant ainsi d'être exonérée d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés pour une période de deux ans. En conséquence de cet agrément, par un courriel du 26 avril 2018, le comptable de la société LBFI International a sollicité de l'administration fiscale le bénéfice de l'exonération de la contribution foncière des entreprises pour l'année 2017 et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises au titre de l'exercice 2017. Par une décision du 16 mai 2018, l'administration a refusé de faire droit à ce qu'elle estimait être une réclamation. La SAS LBFI International a alors porté le litige devant le tribunal administratif de Lille en lui demandant de prononcer la décharge des cotisations primitives de contribution foncière des entreprises et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2017 et 2018. Toutefois, par un jugement du 1er avril 2021 dont cette société relève appel, le tribunal a refusé de faire droit à cette demande.
Sur la régularité de la procédure d'assujettissement à la contribution foncière des entreprises :
2. D'une part, aux termes de l'article 44 septies du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur : " I. - Les sociétés créées entre le 1er juillet 2007 et le 31 décembre 2020 pour reprendre une entreprise industrielle en difficulté qui fait l'objet d'une cession ordonnée par le tribunal en application de l'article L. 626-1, de l'article L. 631-22 ou des articles L. 642-1 et suivants du code de commerce bénéficient d'une exonération d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés, à l'exclusion des plus-values constatées lors de la réévaluation des éléments d'actif immobilisé, jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création et déclarés selon les modalités prévues à l'article 53 A. /(...)/ ". Aux termes de l'article 1464 B du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " I. - Les entreprises qui bénéficient des exonérations prévues aux articles 44 sexies, 44 septies et 44 quindecies peuvent être temporairement exonérées, dans les conditions prévues à l'article 1464 C, de la cotisation foncière des entreprises dont elles sont redevables, pour les établissements qu'elles ont créés ou repris, à compter de l'année suivant celle de leur création. / II. - Les entreprises ne peuvent bénéficier de cette exonération qu'à la condition d'en avoir adressé la demande au service des impôts de chacun des établissements concernés, avant le 1er janvier de l'année suivant celle de la création ou de la reprise de l'établissement en attestant qu'elles remplissent les conditions exigées au I ; elles déclarent chaque année les éléments entrant dans le champ d'application de l'exonération. /(...)/ ".
3. D'autre part, lorsqu'une imposition est, telle la contribution foncière des entreprises, établie après que le contribuable a déclaré bénéficier d'une exonération, l'administration ne peut établir, à la charge de celui-ci, une imposition qu'après l'avoir, conformément au principe général des droits de la défense, mis à même de présenter ses observations. Les dispositions de l'article L. 56 du livre des procédures fiscales, en vertu desquelles la procédure de redressement contradictoire prévue par les articles L.55 à L.61 de ce livre n'est pas applicable en matière d'impositions directes perçues au profit des collectivités locales, ont pour seul effet d'écarter cette procédure de redressement contradictoire mais ne dispensent pas du respect, en ce qui concerne la contribution foncière des entreprises, des obligations qui découlent du principe général des droits de la défense.
4. En premier lieu, la SAS LBFI International soutient que l'administration fiscale ne l'a pas mise à même de présenter ses observations sur le fait qu'elle ne pouvait bénéficier de l'exonération de contribution foncière des entreprises avant la mise en recouvrement de l'impôt. Toutefois, il résulte de l'instruction que le formulaire initial de déclaration déposé par la société au titre de la cotisation foncière 2017, le 10 février 2017, et donc au demeurant postérieurement à la date limite de dépôt résultant du II de l'article 1464 B du code général des impôts, ne comportait aucune déclaration d'exonération sur le fondement de ces dispositions. Par ailleurs, si la SAS LBFI International produit des déclarations datées du 27 septembre 2017, s'agissant de la contribution foncière des entreprises de l'année 2017, et du 29 décembre 2017, s'agissant de celle de l'année 2018, lesquelles mentionnent que l'entreprise souhaite bénéficier de l'exonération de contribution foncière des entreprises et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises en application de l'article 1464 B du code général des impôts, elle n'apporte toujours pas en appel la preuve de leur dépôt par la simple justification du versement d'acomptes et du solde de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Dès lors, l'administration fiscale, qui conteste avoir reçu ces déclarations, n'a pas refusé le bénéfice de l'exonération prévue à l'article 1464 B du code général des impôts dans le cadre de l'examen des déclarations faites par la SAS LBFI International et, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe général des droits de la défense ne peut qu'être écarté.
Sur le bénéfice de l'exonération prévue à l'article 1464 B du code général des impôts :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
5. Aux termes de l'article 1464 C du code général des impôts : " I. - L'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la cotisation foncière des entreprises prévue aux articles 1383 A et 1464 B est subordonnée à une décision de l'organe délibérant des collectivités territoriales ou des établissements publics de coopération intercommunal dotés d'une fiscalité propre dans le ressort desquels sont situés les établissements des entreprises en cause. /(...)/ ". Aux termes de l'article 1586 nonies de ce code alors en vigueur : " I. - La valeur ajoutée des établissements exonérés de cotisation foncière des entreprises en application de la délibération d'une commune ou d'un établissement public de coopération intercommunale est, à la demande de l'entreprise, exonérée de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises pour sa fraction taxée au profit de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale. (...)/ "
6. Il résulte de l'instruction que, par une délibération du 10 février 2017, le conseil communautaire de la métropole européenne de Lille n'a délibéré en faveur que de l'exonération de cotisation foncière des entreprises évoquée aux articles 1465 et 1465 B du code général des impôts et pas au titre de celle prévue à l'article 1464 B du même code. En l'absence d'une délibération en faveur de cette exonération, il ne pouvait être fait droit à la demande d'exonération de contribution foncière des entreprises, et, par voie de conséquence, de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises en application de l'article 1586 nonies du code général des impôts. Dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges, faisant droit à ce moyen de défense présenté devant eux par l'administration, ont estimé que la SAS LBFI International ne pouvait prétendre aux exonérations prévues aux articles 1464 B et 1586 nonies du code général des impôts.
En ce qui concerne l'application de la doctrine administrative :
7. A supposer que la SAS LBFI International soit regardée comme se prévalant de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales en invoquant le paragraphe 160 de la doctrine BOI-IF-CFE-10-30-40-10 aux termes duquel " Les délibérations prises en application de l'article 1465 du CGI ne sont pas incompatibles avec les délibérations prévues à l'article 1464 C du CGI. ", elle ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, l'administration n'ayant procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures. En tout état de cause, cette doctrine ne fait pas une interprétation différente de la loi fiscale de celle dont le présent arrêt fait application.
8. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en défense, que la SAS LBFI International n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à la décharge des impositions en litige et à la restitution, assortie des intérêts moratoires, des sommes qu'elle a acquittées à ce titre, ainsi que les conclusions qu'elle présente sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SAS LBFI International est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS LBFI International et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l'audience publique du 1er juin 2023 à laquelle siégeaient :
- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Bertrand Baillard, premier conseiller,
- M. Jean-François Papin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023.
Le rapporteur,
Signé : B. BaillardLe président de la formation de jugement,
Signé : M. A...
La greffière,
Signé : S. Pinto Carvalho
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
La greffière,
Suzanne Pinto Carvalho
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N°21DA01021
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