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08/06/2023 | FRANCE | N°22DA01894

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 08 juin 2023, 22DA01894


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I... H... et Mme D... H..., M. et Mme E... B..., M. et Mme A... G... et la société Bella Vista 2014 ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la délibération du 12 décembre 2019 par laquelle le conseil de la métropole européenne de Lille a approuvé son plan local d'urbanisme intercommunal ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux par lequel ils avaient sollicité le retrait de cette délibération.

Par un jugement n° 2004120 du 6 juillet 2022, le tribunal adm

inistratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I... H... et Mme D... H..., M. et Mme E... B..., M. et Mme A... G... et la société Bella Vista 2014 ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la délibération du 12 décembre 2019 par laquelle le conseil de la métropole européenne de Lille a approuvé son plan local d'urbanisme intercommunal ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux par lequel ils avaient sollicité le retrait de cette délibération.

Par un jugement n° 2004120 du 6 juillet 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 septembre 2022 et un mémoire enregistré le 19 mai 2023, Mme D... H... ainsi que M. et Mme E... B..., représentés par Me Arnoult Le Normand, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la délibération du 12 décembre 2019 du conseil de la métropole européenne de Lille ;

3°) de mettre à la charge de la métropole européenne de Lille la somme de 3 000 euros à leur verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le tribunal administratif a retenu une argumentation différente de celle de la métropole européenne de Lille ou a répondu aux moyens qu'ils avaient soulevés sans que la métropole européenne de Lille ne défende sur ces points ; de ce fait le jugement est irrégulier ;

- le jugement est également irrégulier en ce que le tribunal a demandé des pièces à la métropole européenne de Lille sans les en prévenir et en leur laissant un délai insuffisant pour produire leurs observations après la communication de ces pièces ;

- le principe du contradictoire a également été méconnu en ce que le tribunal a développé une argumentation qui n'était pas reprise de celle développée par la métropole européenne de Lille et en ce qu'il a répondu à des moyens sur lesquels la métropole européenne de Lille n'avait développé aucune argumentation ;

- le tribunal administratif s'est fondé sur des documents non communiqués aux parties ;

- les communes pivots où le dossier d'enquête pouvait être consulté étaient en nombre trop restreint et étaient trop éloignées les unes des autres ;

- certains projets n'étaient pas mentionnés dans le dossier d'enquête ;

- la commission d'enquête n'a pas répondu à toutes les observations du public ;

- la société SNCF Réseau n'a pas été consultée au titre des personnes publiques associées ;

- la commission d'enquête ne s'est pas prononcée sur les avis des personnes publiques associées ;

- l'avis n'a pas été signé par l'ensemble des membres de la commission d'enquête ;

- les modifications préconisées par la commission d'enquête que la métropole européenne de Lille s'est engagée à apporter au plan en ont modifié l'économie générale ;

- les servitudes pesant sur leurs parcelles ont pour effet de les rendre inconstructibles et de telles servitudes sont donc disproportionnées ;

- ces servitudes sont illégales au regard de leur classement en zone urbaine et du principe de densification ;

- le règlement du plan local d'urbanisme n'est pas cohérent avec les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables ;

- le classement de leurs parcelles est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- leurs parcelles constituent une dent creuse qui aurait dû bénéficier d'une constructibilité limitée ;

- ils subissent une discrimination du fait du classement de leurs parcelles.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2023, la métropole européenne de Lille, représentée par Me Thibault Soleilhac, conclut à titre principal au rejet de la requête, ou, à titre subsidiaire, à la limitation de l'annulation de la délibération du 12 décembre 2019 aux seuls zonages opérés sur les parcelles des appelants qui seraient entachés d'une erreur manifeste d'appréciation et enfin à la mise à la charge des appelants de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la requête d'appel, se bornant à reprendre les écritures de première instance, est irrecevable et qu'au surplus ses moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de l'environnement ;

- la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 ;

- la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de A... Perrin, premier conseiller,

- les conclusions de M. Stéphane Eustache, rapporteur public,

- et les observations de Me Arnoult Le Normand, représentant Mme H... et M. et Mme B..., et J..., représentant la métropole européenne de Lille.

Considérant ce qui suit :

Sur l'objet du litige :

1. Mme H... et M. et Mme B... sont propriétaires de parcelles cadastrées BE 8, 90, 96, 122 et 123 situées rue d'Hem et chemin de la Vacquerie sur le territoire de la commune de Croix qui est couvert par le plan local d'urbanisme intercommunal que le conseil communautaire de la métropole européenne de Lille a approuvé par une délibération du 12 décembre 2019.

2. Par un recours gracieux du 17 février 2020, associés à d'autres propriétaires voisins, ils ont demandé le retrait de cette délibération. La métropole européenne de Lille a rejeté cette demande par une décision du 1er juillet 2020.

3. Mme H..., M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 6 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette délibération et du rejet de leur recours gracieux.

Sur la recevabilité de la requête d'appel :

4. La requête d'appel comporte plusieurs moyens remettant en cause la régularité du jugement et énonce de manière précise les critiques adressées à la décision dont l'annulation a été demandée au tribunal administratif ainsi que celles formulées à l'encontre du raisonnement retenu par les premiers juges pour écarter leurs moyens. Elle ne constitue donc pas la reproduction littérale des écritures de première instance et répond ainsi aux exigences de motivation de la requête d'appel prévues par l'article R. 411-1 du code de justice administrative. L'exception opposée en défense par la métropole européenne de Lille doit donc être écartée.

Sur la régularité du jugement :

5. Conformément au principe du caractère contradictoire de l'instruction, le juge administratif est tenu de ne statuer qu'au vu des seules pièces du dossier qui ont été communiquées aux parties.

6. Le tribunal administratif s'est fondé, dans le point 3 du jugement contesté, sur le premier tome de la première partie du rapport de la commission d'enquête, pour écarter le moyen tiré de l'absence de consultation de la société SNCF Réseau. Ce volume était relatif au déroulement de l'enquête publique et le rapport de la commission d'enquête n'a pas valeur règlementaire et constitue non pas une annexe au plan local d'urbanisme intercommunal mais un acte préparatoire de celui-ci. Or, il ressort de la procédure de première instance que cette pièce n'a pas été communiquée aux parties. Dès lors, les appelants sont fondés à soutenir que le principe du contradictoire n'a pas été respecté. Par suite, le jugement du tribunal administratif de Lille du 6 juillet 2022 doit être annulé, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de régularité soulevés par les appelants.

7. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme H... et M. et Mme B... devant le tribunal administratif de Lille.

Sur la légalité externe de la délibération du 12 décembre 2019 :

En ce qui concerne le dossier soumis à enquête publique :

8. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances affectant le dossier soumis à enquête publique ne sont susceptibles de vicier la procédure et ainsi d'entacher d'irrégularité l'autorisation que si elles ont eu pour effet de nuire à l'information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision de l'autorité administrative.

9. En premier lieu, si le dossier soumis à enquête publique ne comprenait pas d'information sur les zones d'aménagement différé envisagées à Baisieux, ce projet n'a été adopté par le conseil de la métropole que le 14 décembre 2018. Il est donc postérieur à l'arrêt du plan local d'urbanisme et n'avait donc pas à être soumis à enquête publique. L'approbation de ce projet est en outre intervenue à la veille de la clôture de l'enquête publique, celle-ci s'étant déroulée du 20 novembre 2018 au 15 décembre 2018. Enfin ce projet a finalement été abandonné avant l'adoption définitive du plan local d'urbanisme puisque cet abandon a été acté par la délibération du conseil de la métropole du 11 octobre 2019. Dans ces conditions, le dossier d'enquête publique n'avait pas à comporter d'informations sur ce projet.

10. En second lieu, aux termes de l'article L. 153-16 du code de l'urbanisme : " Le projet de plan arrêté est soumis pour avis : / 1° Aux personnes publiques associées à son élaboration mentionnées aux articles L. 132-7 et L. 132-9 ; / (...). Aux termes de l'article L. 132-7 du même code dans sa rédaction alors applicable : " L'Etat, les régions, les départements, les autorités organisatrices prévues à l'article L. 1231-1 du code des transports, les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de programme local de l'habitat, les collectivités territoriales ou les établissements publics mentionnés à l'article L. 312-3 du présent code, les établissements publics chargés d'une opération d'intérêt national ainsi que les organismes de gestion des parcs naturels régionaux et des parcs nationaux sont associés à l'élaboration des schémas de cohérence territoriale et des plans locaux d'urbanisme dans les conditions définies aux titres IV et V. / Il en est de même des chambres de commerce et d'industrie territoriales, des chambres de métiers, des chambres d'agriculture et, dans les communes littorales au sens de l'article L. 321-2 du code de l'environnement, des sections régionales de la conchyliculture. Ces organismes assurent les liaisons avec les organisations professionnelles intéressées. ".

11. Si les requérants soutiennent que la métropole européenne de Lille aurait dû consulter la société SNCF réseau en tant que personne publique associée et joindre son avis au dossier d'enquête publique, la consultation " du gestionnaire d'infrastructure ferroviaire ayant au moins un passage à niveau ouvert au public dans l'emprise (...) du plan local d'urbanisme " n'a été imposée que par les dispositions de l'article L. 132-7 du code de l'urbanisme telles qu'elles résultent de la loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités et n'étaient donc pas en vigueur à la date d'élaboration du plan local d'urbanisme intercommunal. Ce moyen est donc inopérant. Au surplus, la Société nationale des chemins de fer français a donné son avis en tant que personne publique associée sur le plan arrêté ainsi que son impact sur les infrastructures ferroviaires et cet avis était joint au dossier d'enquête.

En ce qui concerne la régularité du déroulement de l'enquête publique :

12. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 123-12 du code de l'environnement : " Le dossier d'enquête publique est mis en ligne pendant toute la durée de l'enquête. Il reste consultable, pendant cette même durée, sur support papier en un ou plusieurs lieux déterminés dès l'ouverture de l'enquête publique. Un accès gratuit au dossier est également garanti par un ou plusieurs postes informatiques dans un lieu ouvert au public. ". Aux termes du I de l'article L. 123-12 du même code : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête conduit l'enquête de manière à permettre au public de disposer d'une information complète sur le projet, plan ou programme, et de participer effectivement au processus de décision. Il ou elle permet au public de faire parvenir ses observations et propositions pendant la durée de l'enquête par courrier électronique de façon systématique ainsi que par toute autre modalité précisée dans l'arrêté d'ouverture de l'enquête. Les observations et propositions sont accessibles sur un site internet désigné par voie réglementaire. ".

13. Aux termes de l'article R. 153-9 du même code : " I. - L'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête précise par arrêté les informations mentionnées à l'article L. 123-10, quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête et après concertation avec le commissaire enquêteur ou le président de la commission d'enquête. Cet arrêté précise notamment : / (...) / 2° En cas de pluralité de lieux d'enquête, le siège de l'enquête, où toute correspondance postale relative à l'enquête peut être adressée au commissaire enquêteur ou au président de la commission d'enquête ; / 3° L'adresse électronique à laquelle le public peut transmettre ses observations et propositions pendant la durée de l'enquête, ainsi que, le cas échéant, l'adresse du site internet comportant le registre dématérialisé sécurisé mentionné à l'article L. 123-10 ; / 4° Les lieux, jours et heures où le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête, représentée par un ou plusieurs de ses membres, se tiendra à la disposition du public pour recevoir ses observations ; / 5° Le cas échéant, la date et le lieu des réunions d'information et d'échange envisagées ; / 6° La durée, le ou les lieux, ainsi que le ou les sites internet où à l'issue de l'enquête, le public pourra consulter le rapport et les conclusions du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête ; / (...) / II.- Un dossier d'enquête publique est disponible en support papier au minimum au siège de l'enquête publique. / Ce dossier est également disponible depuis le site internet mentionné au II de l'article R. 123-11. ".

14. Il ressort des pièces du dossier que onze communes dites " pivots " de la métropole disposaient du dossier d'enquête sous forme papier, d'un registre papier et d'une borne informatique permettant de recevoir les contributions sous forme numérique. Si ces onze communes étaient pour moitié situées autour de Lille dans les zones les plus denses de la métropole européenne de Lille, l'autre moitié permettait d'assurer une couverture géographique de l'ensemble du territoire. Dans les 79 autres communes de la métropole, un cahier de renseignements reprenant les caractéristiques communales et les projets du plan local d'urbanisme intercommunal intéressant la commune était disponible en mairie. Conformément aux dispositions précitées, l'entier dossier était aussi disponible sur le site internet de la métropole et les observations pouvaient être recueillies de manière dématérialisée. Ainsi, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que les personnes privées de voiture ont été privées de la possibilité de prendre connaissance du dossier.

15. Si la commission d'enquête a considéré que le choix des communes pivots était discutable et qu'elles étaient trop concentrées sur Lille et sa périphérie immédiate, elle a cependant reconnu, selon les propres extraits de son rapport cité par les requérants, que les différentes possibilités d'expression du public ont permis de " pallier en partie " le choix des communes pivots. La commission d'enquête a également souligné que " le registre électronique a permis à de nombreux contributeurs de s'exprimer ". La commission a, finalement, recueilli 3 655 contributions.

16. Dans ces conditions et alors que la métropole n'était pas tenue de déposer un dossier papier dans chacune des communes de la métropole, les modalités d'organisation de l'enquête publique ont permis à l'ensemble des personnes et des groupements intéressés de prendre connaissance du projet, d'en mesurer les impacts et d'émettre leurs observations. La mise à la disposition du public du dossier d'enquête a ainsi été suffisante.

En ce qui concerne le rapport et les conclusions de la commission d'enquête :

17. Aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. / Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans une présentation séparée, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet. ".

18. En premier lieu, les conclusions de la commission d'enquête ont été signées par son président et par douze de ses quatorze autres membres. En l'absence de formalisme particulier requis par les dispositions précitées du code de l'environnement, l'absence de signature de deux des membres n'a pas pu priver de portée les conclusions signées par l'ensemble des autres membres de la commission d'enquête.

19. En deuxième lieu, l'obligation de motivation des conclusions de la commission d'enquête n'impose pas qu'elle réponde à chacune des observations présentées lors de l'enquête.

20. D'une part, il ressort des conclusions de la commission d'enquête que celle-ci a analysé chacune des contributions du public en les regroupant par thèmes. En particulier, si les requérants soutiennent que la commission d'enquête n'a pas mentionné les observations relatives à l'échangeur de Templemars ou celles concernant l'orientation d'aménagement programmée n°36 sur Lille, il ressort au contraire des conclusions de la commission d'enquête que les observations présentées sur ces points ont été synthétisées.

21. D'autre part, si la commission d'enquête n'a pas émis un avis sur chacune des observations du public, ses avis étaient sérieusement étayés, ne se contentant pas de renvoyer à des études ou aux réponses de l'intercommunalité mais prenant position sur un certain nombre de points dans ses réserves. Si les requérants reprochent à la commission d'enquête de ne pas avoir fait de recommandation sur les déplacements, il ressort au contraire de ses conclusions qu'elle a formulé des recommandations sur ce thème, alors même que le plan de déplacements urbains était en cours de révision.

22. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'absence d'avis motivé de la commission d'enquête publique au regard des observations du public doit être écarté.

23. En troisième lieu, si les requérants soutiennent que la commission d'enquête ne s'est pas prononcée sur les avis des personnes publiques associées, il ressort au contraire de la partie du rapport de la commission d'enquête relative au déroulement de l'enquête que celle-ci a très précisément analysé chaque avis formulé par les personnes publiques associées et en a ainsi tenu compte dans son avis motivé.

24. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance que le rapport et les conclusions de la commission d'enquête ont été remis au tribunal administratif de Lille le 31 juillet 2019. Le moyen tiré de l'absence de ce dépôt manque donc en fait, outre le fait qu'il est sans incidence sur la légalité de la décision approuvant le plan local d'urbanisme.

En ce qui concerne les conditions d'adoption de la délibération du 12 décembre 2019 :

25. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que les conseillers de la métropole européenne de Lille ont été convoqués par un courrier électronique du 6 décembre 2019 pour la séance du 12 décembre suivant. Il ressort également des pièces du dossier que cette convocation était accompagnée de l'ordre du jour de la séance et d'une note de synthèse sur les affaires inscrites à l'ordre du jour. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions combinées des articles L. 5211-1, L. 2121-10 et L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, qui imposent un délai minimum de cinq jours francs pour l'envoi de la convocation et précisent les pièces qui doivent l'accompagner, doit donc être écarté.

26. En deuxième lieu, si les requérants soutiennent que l'information des membres du conseil de la métropole européenne de Lille était insuffisante, il ressort du constat de l'huissier requis par la métropole européenne de Lille que celui-ci a procédé, le 22 novembre 2019, à la mise sous pli des clés USB comprenant l'ensemble des documents du plan local d'urbanisme intercommunal adressées à chaque conseiller de la métropole européenne de Lille, cet huissier ayant auparavant constaté l'accessibilité de chacun de ces documents au moyen de cette clé. Ce même huissier a aussi constaté que ces documents étaient également consultables sous forme papier au siège de la métropole. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions combinées des articles L. 5211-1 et L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales relatives à l'information des élus locaux, doit être écarté.

27. En troisième lieu, si les requérants soutiennent que la métropole européenne de Lille doit justifier qu'aucun des conseillers de la métropole européenne de Lille n'était personnellement intéressé à la délibération contestée, ils n'assortissent ce moyen d'aucune précision permettant à la cour d'en apprécier la portée, ni n'apportent aucun élément de nature à donner crédit à une telle hypothèse. Ce moyen doit donc être écarté.

Sur les modifications adoptées par la délibération du 12 décembre 2019 :

28. Aux termes de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " A l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête, est approuvé par : / 1° L'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale à la majorité des suffrages exprimés après que les avis qui ont été joints au dossier, les observations du public et le rapport du commissaire ou de la commission d'enquête aient été présentés lors d'une conférence intercommunale rassemblant les maires des communes membres de l'établissement public de coopération intercommunale ; / (...) ".

29. Le projet de plan local d'urbanisme ne peut subir de modifications, entre la date de sa soumission à l'enquête publique et celle de son approbation, qu'à la double condition que ces modifications ne remettent pas en cause l'économie générale du projet et qu'elles procèdent de l'enquête. Doivent être regardées comme procédant de l'enquête les modifications destinées à tenir compte des réserves et recommandations du commissaire ou de la commission d'enquête, des observations du public et des avis émis par les autorités, collectivités et instances consultées et joints au dossier de l'enquête.

30. Dans ses conclusions, la commission d'enquête a émis une réserve générale n° 1 qui demande que la métropole européenne de Lille modifie le plan local d'urbanisme intercommunal arrêté en reprenant les réponses au procès-verbal de synthèse des observations du public que lui a transmis la commission. D'une part ses modifications procèdent ainsi nécessairement de l'enquête publique. D'autre part, ainsi que le note la commission, il s'agit " d'un certain nombre de compléments, d'ajouts, voire de corrections " qui ne remettent donc pas en cause l'économie générale du projet.

31. Si les requérants indiquent que, d'après les conclusions de la commission d'enquête, ces modifications concernent des corrections voire des suppressions d'emplacements réservés, la modification du zonage de deux sites artificialisés ou la suppression de zones à dominante humide ou d'inscriptions de biens à l'inventaire des bâtiments agricoles, ils n'apportent aucun élément de nature à démontrer que ces corrections très localisées ont eu par leur ampleur un impact majeur sur l'économie générale du projet. De même, s'ils reprennent la conclusion de la commission qui a noté que la prise en compte de la problématique environnementale sera accentuée " pour répondre notamment à l'avis de l'Etat ", il n'est pas établi que cette modification, concernant une partie limitée du territoire métropolitain, ait bouleversé l'économie générale du plan, alors que le projet d'aménagement et de développement durables comprenait déjà une orientation de préservation de l'environnement.

Sur la cohérence entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables :

32. Pour apprécier la cohérence exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou à un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

33. En premier lieu, d'un point de vue global, le projet d'aménagement et de développement durables de la métropole européenne de Lille retient l'objectif de " faire réapparaître la nature en ville " au titre de son axe intitulé " Une métropole facilitatrice pour bien vivre au quotidien ". Dans ce cadre le projet préconise notamment de renforcer dans l'existant " les conditions de perception du végétal de l'espace privé depuis l'espace public ", de préserver " les espaces de nature existants " et de limiter " l'imperméabilisation des sols ". Il encourage également le recours à la végétalisation pour " lutter contre le phénomène des îlots de chaleur " et pour " promouvoir un développement territorial favorable à la santé des habitants ", qui constituent deux autres objectifs du projet. Il recommande ainsi dans les secteurs urbains " le maintien d'espaces de nature et de traitements végétalisés, qu'ils soient publics ou privés, ainsi que la protection des cœurs d'îlots paysagers et/ou arborés en jouant notamment sur l'implantation et la densité du bâti ou sur la définition de seuils d'espaces verts ".

34. Par ailleurs, si le projet d'aménagement et de développement durables préconise, dans la tache urbaine existante, " l'intensification du foncier en renouvellement urbain ", il précise que cette recommandation doit tenir compte de la qualité urbaine et paysagère qui constitue un autre objectif du projet.

35. Compte tenu du parti d'urbanisme ainsi adopté par le projet d'aménagement et de développement durables, les servitudes contenues dans le règlement du plan local d'urbanisme visant à préserver la qualité paysagère et écologique ainsi que les continuités écologiques ne sont nullement incohérentes avec le projet d'aménagement et de développement durables.

36. En second lieu, le projet d'aménagement et de développement durables comporte un objectif spécifique au secteur où se situent les parcelles des requérants, intitulé " Affirmer le rôle structurant de la ville du grand boulevard et y garantir une qualité urbaine ". Si cet objectif vise à intensifier les fonctions urbaines, le projet précise qu'il doit être tenu compte des spécificités des tissus urbains et que les éléments de qualité paysagère, architecturale et urbaine existants doivent être respectés. Par ailleurs, au sein du même objectif, est soulignée l'existence d'une ambiance arborée très marquée et la nécessité de favoriser la qualité environnementale.

37. Dans ces conditions, les servitudes imposées sur les parcelles des appelants par le règlement du plan local d'urbanisme intercommunal, qui visent à en préserver le caractère naturel et arboré ainsi que la biodiversité, ne sont pas incohérentes non plus avec l'objectif territorialisé du projet d'aménagement et de développement durables relatif au grand boulevard.

Sur la légalité du classement des parcelles des appelants en zone UGB 6 :

38. Aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme relatif à l'affectation des sols dans les plans locaux d'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées. ".

39. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste.

40. Les parcelles des requérants sont classées en zone UGB 6, zone urbaine mixte de la couronne urbaine du grand boulevard. Cette zone est définie dans le règlement comme " très majoritairement dédiée à l'habitat individuel de type pavillonnaire mais peut accueillir d'autres types de formes d'habitat de manière ponctuelle et insérée dans le tissu. Le tissu résidentiel pavillonnaire se caractérise principalement par un parcellaire de grande ou très grande taille et des constructions le plus souvent de faible hauteur et très faible densité implantées en retrait de la rue et sans mitoyenneté. Les constructions se caractérisent par une variété des formes architecturales et forment un tissu urbain aéré et une présence végétale qui marquent le paysage. La diversification des typologies bâties, l'optimisation mesurée du tissu et l'amélioration de l'habitat existant sont recherchées dans le respect des qualités paysagères et végétales. La qualité du traitement paysager des espaces libres entre les constructions, la rue et les limites parcellaires est souhaitée. La préservation du cadre de vie et du caractère vert et paysager de ce tissu est recherchée tout en permettant une optimisation légère du tissu et une amélioration de l'habitat existant. ".

41. D'une part, il ressort des pièces du dossier que les parcelles des appelants se situent dans un secteur très peu dense avec de vastes constructions entourées d'espaces verts importants. Cette zone est délimitée à l'est par le grand boulevard reliant Lille à Roubaix et au sud par la Marque et le bois de Warwamme. Elle se densifie progressivement vers le nord en allant vers Roubaix. Le cœur de ces parcelles est couvert par un espace arboré nord-sud de faible largeur, dont une branche part vers l'est et constitue l'extrémité arborée de la parcelle 8 au sud.

42. D'autre part, s'il est constant que ces parcelles font partie d'un secteur urbanisé, sont situées à proximité des transports en commun et sont desservies par les réseaux urbains, il ressort également des pièces du dossier que ces terrains ne supportent aucune construction et sont entièrement végétalisés, les appelants développant leur argumentation sur ce point, à la différence de la première instance, pour les seules parcelles non bâties 8, 90, 96, 122 et 123.

43. Dans ces conditions et compte tenu du parti d'urbanisme rappelé aux points précédents, le classement de ces parcelles en zone UGB 6 du plan local d'urbanisme intercommunal n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Sur la légalité des servitudes d'urbanisme grevant les parcelles des appelants :

44. Aux termes de l'article L. 151-19 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut identifier et localiser les éléments de paysage et identifier, localiser et délimiter les quartiers, îlots, immeubles bâtis ou non bâtis, espaces publics, monuments, sites et secteurs à protéger, à conserver, à mettre en valeur ou à requalifier pour des motifs d'ordre culturel, historique ou architectural et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation leur conservation ou leur restauration. Lorsqu'il s'agit d'espaces boisés, il est fait application du régime d'exception prévu à l'article L. 421-4 pour les coupes et abattages d'arbres. ". Aux termes de l'article L. 151-23 du même code : " Le règlement peut identifier et localiser les éléments de paysage et délimiter les sites et secteurs à protéger pour des motifs d'ordre écologique, notamment pour la préservation, le maintien ou la remise en état des continuités écologiques et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation. Lorsqu'il s'agit d'espaces boisés, il est fait application du régime d'exception prévu à l'article L. 421-4 pour les coupes et abattages d'arbres. / Il peut localiser, dans les zones urbaines, les terrains cultivés et les espaces non bâtis nécessaires au maintien des continuités écologiques à protéger et inconstructibles quels que soient les équipements qui, le cas échéant, les desservent. ".

45. Les articles L. 151-19 et L. 151-23 du code de l'urbanisme permettent l'un et l'autre au règlement d'un plan local d'urbanisme d'édicter des dispositions visant à protéger, mettre en valeur ou requalifier un élément du paysage ou un secteur à protéger dont l'intérêt le justifie. La légalité de ces prescriptions, qui doivent être proportionnées et ne peuvent excéder ce qui est nécessaire à l'objectif recherché, s'apprécie au regard du parti d'urbanisme retenu, défini notamment par les orientations générales et par les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables. Une interdiction de toute construction ne peut être imposée que s'il s'agit du seul moyen permettant d'atteindre l'objectif poursuivi.

En ce qui concerne le secteur paysager et/ou arboré simple :

46. Afin de concourir aux objectifs de valorisation de la biodiversité et de la protection des espaces naturels, le règlement du plan local d'urbanisme intercommunal de la métropole européenne de Lille a défini des secteurs paysagers et/ou arborés à préserver. Dans les secteurs à préserver dits " simples ", le règlement prévoit que " sont autorisés tous les travaux, constructions et aménagements qui ne concourent pas à imperméabiliser plus de 20 % de la superficie du secteur paysager ou arboré repéré au plan et couvrant l'unité foncière. Tout déboisement rendu nécessaire par le projet doit être compensé par la plantation d'arbres sur l'unité foncière à raison de deux sujets plantés pour un arbre abattu, de façon à reconstituer une qualité paysagère et arborée équivalente, en tenant compte de la valeur écologique et économique du reboisement ". Le rapport de présentation précise aussi que le secteur paysager et/ou arboré simple vise à limiter l'imperméabilisation à 20 % du secteur.

47. Une unité foncière est un îlot de propriété d'un seul tenant, composé d'une parcelle ou d'un ensemble de parcelles appartenant à un même propriétaire ou à la même indivision. Le glossaire, qui constitue le livre VI du rapport de présentation du plan local d'urbanisme intercommunal, précise que les " délimitations administratives opérées sur les terrains contigus appartenant à un même propriétaire ne constituent pas une rupture de cette unité foncière. Ainsi, le zonage opéré par un plan local d'urbanisme (PLU) est sans incidence sur la détermination de l'unité foncière (Conseil d'Etat, 27 juin 2005, n° 264667, commune de Chambéry) alors même qu'il opère comme une division foncière pour l'application des règles d'urbanisme (Conseil d'Etat, 26 févr. 1988, n° 64507). Ainsi, en cas de zonage différent d'une même parcelle, il convient de faire application du PLU pour chaque partie de parcelle. Il y a bien une seule unité foncière mais le zonage entraîne une division en deux de cette unité foncière. Il convient d'appliquer le règlement de la zone de façon distincte pour chaque partie. ".

48. Il résulte de ce qui précède que lorsqu'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal de la métropole européenne de Lille applicable à une servitude instituée par ce plan en application des articles L. 151-19 et L. 151-23 du code de l'urbanisme se réfère à la notion d'" unité foncière " sans autre précision, il y a lieu de prendre en compte le seul espace d'un même tenant qui à la fois appartient à un seul propriétaire ou à une seule indivision et est repéré dans le règlement graphique comme couvert par cette servitude.

49. Compte tenu des objectifs du projet d'aménagement et de développement durables rappelés aux point 33 et 36, eu égard à la qualité écologique de la zone tampon entourant le bois de Warwamme, compte tenu de la consistance des parcelles en cause et alors que ce classement ne fait pas obstacle aux constructions dans la limite du plafond de 20 % rappelé au point 46 et appliqué à l'espace défini au point 48, le plan local d'urbanisme de la métropole européenne de Lille, en classant en secteur paysager et/ou arboré simple la totalité des parcelles non bâties des appelants, ainsi d'ailleurs que l'ensemble des parcelles du compartiment très peu dense et très végétalisé partant vers l'est du chemin de la Vacquerie et situé entre d'une part le bois de Warwamme et la Marque au sud et d'autre part la rue d'Hem au nord, n'impose pas de servitudes qui ne seraient pas proportionnées et nécessaires pour atteindre l'objectif recherché.

En ce qui concerne le secteur paysager et/ou arboré renforcé :

50. Le rapport de présentation indique que le secteur paysager et/ou arboré renforcé " est adapté à la protection renforcée d'espaces présentant un intérêt paysager, tels que : / -Certains cœurs d'îlots, à forte dominante végétale, subsistant au sein d'un tissu urbain. Ces ensembles, situés à l'arrière des constructions, sont enserrés au centre des îlots habités ; / - Des espaces végétalisés, visibles depuis l'espace public, qu'ils soient privés ou publics (jardins, bandes boisées ou arborées, etc.). / Les objectifs généraux de l'outil sont : / - Préserver les caractéristiques paysagères majeures de ces ensembles, et en particulier protéger la dominante végétale et non bâtie ; / - Inscrire les projets de façon harmonieuse dans l'environnement urbain/paysager des secteurs concernés, notamment par la limitation et la réversibilité des aménagements ".

51. Le règlement du plan local d'urbanisme dispose que " Dans les secteurs paysagers et/ou arborés à préserver renforcé repérés au plan sont seuls autorisés : - les constructions légères n'excédant pas 10 m2 d'emprise au sol et 3,50 mètres de hauteur absolue. Une seule construction légère, à l'exception de la reconstruction à l'identique, peut être autorisée sur l'unité foncière après la date d'approbation du PLU ; - la pose ou le remplacement des clôtures par des dispositifs végétaux vivants ; - la création d'un nouvel accès ; - les aménagements ne supprimant pas d'espace vert de pleine terre, sauf pour la création de cheminements modes doux constitués de matériaux perméables ; - les abattages d'arbres : · si la sécurité des biens et des personnes est compromise ; · en cas de maladie irréversible de l'arbre ; · en cas d'impossibilité technique d'évitement par le projet lié à la configuration de la parcelle ; · en cas de nécessité liée à une autre règlementation (code civil ...). En cas d'abattage autorisé, une compensation doit être réalisée en prévoyant des essences de même développement, à raison de 2 sujets plantés pour 1 abattu. ".

52. Il ressort des pièces du dossier que seule une partie des parcelles des appelants est classée en secteur paysager et/ou arboré renforcé, soit la quasi-totalité de la parcelle n° 96, la moitié de la parcelle n° 122, un tiers de la parcelle n° 83 et une petite partie des parcelles nos 90 et 123, et il n'est pas contesté que l'espace ainsi délimité constitue la partie la plus boisée de l'îlot selon un axe nord-sud et que ces boisements sont connectés au bois de Warwamme.

53. Eu égard à la qualité environnementale remarquable de ce secteur, compte tenu du parti d'urbanisme adopté par le projet d'aménagement et de développement durables, dès lors que l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme donne la possibilité d'imposer même au sein d'une zone urbaine des prescriptions visant à protéger un secteur pour des raisons paysagères et écologiques, alors que le règlement ne prohibe pas toute construction en secteur paysager et/ou arboré renforcé et alors que les restrictions à l'usage des sols fixées dans ce secteur ne s'appliquent que dans l'espace défini au point 48 et non sur la totalité des parcelles, le plan local d'urbanisme intercommunal, en procédant à ce classement en secteur paysager et/ou arboré renforcé, n'imposent pas de servitudes qui ne seraient pas proportionnées et nécessaires pour atteindre l'objectif recherché de préservation des espaces naturels existants.

En ce qui concerne les espaces naturels relais :

54. Le projet d'aménagement et de développement durables comporte quatre axes dont le troisième est relatif à " Une stratégie innovante et exemplaire sur le plan environnemental ". Il comporte, à ce titre, un objectif tendant à favoriser " la conservation, la restauration et la création des corridors écologiques ". Il recommande en conséquence de préserver et de rétablir des continuités écologiques fragmentées par la forte densité urbaine et d'infrastructures. Il identifie à ce titre des espaces naturels relais, participant aux fonctionnalités écologiques même s'ils ont un potentiel plus faible que les réservoirs de biodiversité.

55. Le règlement du plan local d'urbanisme intercommunal définit lui-même ces espaces naturels relais comme des " sites présentant une mosaïque de milieux avec des qualités écologiques couplés à des milieux anthropisés mais présentant une réelle potentialité. Ces sites en raison de la pauvreté des milieux écologiques sur notre territoire participent pleinement à la trame verte et bleue d'autant plus s'ils sont en lien avec les réservoirs de biodiversité ".

56. Pour la réalisation de cet objectif, le règlement du plan précise que dans les secteurs d'espaces naturels relais des zones urbaines et à urbaniser constructibles " sont seuls autorisés : / - les travaux visant à améliorer le confort, la solidité des bâtiments existants ; / - les extensions mesurées ; / - Les dispositifs de production d'énergie renouvelable, sous réserve d'une bonne intégration dans l'environnement, du maintien de la qualité des sites, milieux et espaces naturels et qu'ils ne portent pas atteinte à la sensibilité des milieux naturels ; / - les changements de destination des bâtiments vers la destination " habitation ", dans le volume existant, sans renforcer les réseaux publics existants ; / - L'augmentation du nombre de logements dans un bâtiment existant, sans renforcer les réseaux publics existants ; / - les dispositifs de clôtures permettant un écoulement naturel de l'eau. Les clôtures doivent être ajourées de 70 % minimum et/ou doublées d'une haie végétale d'essences locales diversifiées ; / - les exhaussements et les affouillements, exclusivement liés soit : · à la restauration écologique des lieux ; · à la gestion du risque inondation ; · à un projet de construction ; / - les constructions et installations et leurs extensions nécessaires à des équipements d'intérêt collectif ou au service public ; / - Les constructions nouvelles et extensions liées aux exploitations agricoles existantes et à proximité de celles-ci. ".

57. Il ressort de l'atlas de la trame verte et bleue, partie intégrante du plan local d'urbanisme intercommunal de la métropole européenne de Lille, que le bois de Warwamme et la Marque sont identifiés comme un corridor écologique. Ce bois lui-même est classé en réservoir de biodiversité et des zones tampons sont identifiées au nord.

58. Même si les parcelles des appelants ne permettent pas la liaison entre des espaces naturels, elles sont situées au nord et à proximité immédiate d'un réservoir de biodiversité et le parti d'urbanisme adopté par le projet d'aménagement et de développement durables a retenu un objectif de rétablissement des continuités écologiques. Le classement de la totalité de ces parcelles en espaces naturels relais n'est donc pas entaché d'erreur de fait.

59. Eu égard à la qualité environnementale du secteur, compte tenu du parti d'urbanisme adopté par le projet d'aménagement et de développement durables, alors que l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme donne la possibilité de localiser des secteurs inconstructibles dans les zones urbaines lorsqu'ils sont nécessaires au maintien des continuités écologiques et alors que le règlement du plan autorise dans un espace naturel relais l'amélioration ou l'extension mesurée des constructions existantes, les prescriptions imposées à ce titre par le règlement du plan local d'urbanisme sur les parcelles en cause apparaissent proportionnées et nécessaires pour atteindre l'objectif recherché.

En ce qui concerne le cumul des servitudes :

60. Compte tenu du parti d'urbanisme rappelé ci-dessus, de la qualité écologique du secteur concerné qui constitue un vaste espace vert comprenant une partie centrale très arborée à proximité immédiate d'un réservoir de biodiversité, alors que le classement en secteur paysager et/ou arboré renforcé, qui entraîne une quasi inconstructibilité, ne concerne qu'une partie limitée des terrains concernés, alors que le classement en secteur paysager et/ou arboré simple autorise les constructions sur une partie du terrain et alors que le classement en espace naturel relais autorise l'extension mesurée des constructions existantes, le cumul des prescriptions évoquées ci-dessus, qu'aucun texte n'interdit même s'il limite très fortement les projets de construction, apparaît nécessaire et non disproportionné par rapport aux objectifs de préservation des espaces naturels dans l'enveloppe urbaine et de rétablissement les continuités écologiques.

En ce qui concerne la cohérence entre les prescriptions applicables aux parcelles, leur situation en zone urbaine et leur classement en zone UGB :

61. Compte tenu du parti d'urbanisme adopté par le projet d'aménagement et de développement durables rappelé ci-dessus et eu égard aux dispositions des articles L. 151-19 et L. 151-23 du code de l'urbanisme, l'application aux parcelles des appelants des prescriptions analysées ci-dessus visant à préserver leurs qualités paysagères et écologiques n'est nullement contradictoire avec leur inclusion en zone urbaine et leur classement en zone UGB, qui vise également à préserver le cadre de vie et le caractère vert et paysager du secteur.

En ce qui concerne la compatibilité des servitudes avec les objectifs généraux du code de l'urbanisme :

62. Aux termes de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " Dans le respect des objectifs du développement durable, l'action des collectivités publiques en matière d'urbanisme vise à atteindre les objectifs suivants : / 1° L'équilibre entre : / a) Les populations résidant dans les zones urbaines et rurales ; / b) Le renouvellement urbain, le développement urbain maîtrisé, la restructuration des espaces urbanisés, la revitalisation des centres urbains et ruraux, la lutte contre l'étalement urbain ; / c) Une utilisation économe des espaces naturels, la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des sites, des milieux et paysages naturels ; / d) La sauvegarde des ensembles urbains et la protection, la conservation et la restauration du patrimoine culturel ; / e) Les besoins en matière de mobilité ; / 2° La qualité urbaine, architecturale et paysagère, notamment des entrées de ville ; / 3° La diversité des fonctions urbaines et rurales et la mixité sociale dans l'habitat, en prévoyant des capacités de construction et de réhabilitation suffisantes pour la satisfaction, sans discrimination, des besoins présents et futurs de l'ensemble des modes d'habitat, d'activités économiques, touristiques, sportives, culturelles et d'intérêt général ainsi que d'équipements publics et d'équipement commercial, en tenant compte en particulier des objectifs de répartition géographiquement équilibrée entre emploi, habitat, commerces et services, d'amélioration des performances énergétiques, de développement des communications électroniques, de diminution des obligations de déplacements motorisés et de développement des transports alternatifs à l'usage individuel de l'automobile ; / 4° La sécurité et la salubrité publiques ; / 5° La prévention des risques naturels prévisibles, des risques miniers, des risques technologiques, des pollutions et des nuisances de toute nature ; / 6° La protection des milieux naturels et des paysages, la préservation de la qualité de l'air, de l'eau, du sol et du sous-sol, des ressources naturelles, de la biodiversité, des écosystèmes, des espaces verts ainsi que la création, la préservation et la remise en bon état des continuités écologiques ; / 7° La lutte contre le changement climatique et l'adaptation à ce changement, la réduction des émissions de gaz à effet de serre, l'économie des ressources fossiles, la maîtrise de l'énergie et la production énergétique à partir de sources renouvelables ; / 8° La promotion du principe de conception universelle pour une société inclusive vis-à-vis des personnes en situation de handicap ou en perte d'autonomie dans les zones urbaines et rurales. ".

63. Si les appelants se prévalent d'un objectif " Grenelle " de densification des zones urbaines, il résulte des principes généraux de la règlementation de l'urbanisme tels que codifiés par les dispositions citées au point précédent et issus initialement de la loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement que les objectifs de lutte contre l'étalement urbain et de constructions de capacités suffisantes pour répondre à l'ensemble des besoins en logement doivent être conciliés avec les objectifs de protection des paysages et des espaces verts. Par suite, en imposant des servitudes visant à préserver les qualités paysagères et écologiques des parcelles en cause, le plan local d'urbanisme n'est nullement incompatible avec les principes généraux de la règlementation de l'urbanisme.

En ce qui concerne le classement en zone à dominante humide du sud de la parcelle 90 :

64. Le règlement du plan local d'urbanisme intercommunal indique que " les zones à dominante humide sont des zones où il existe une très forte probabilité qu'elles soient des zones humides. L'existence présumée d'une telle zone humide n'y a cependant pas été confirmée et doit encore être étudiée pour caractériser définitivement la zone. ".

65. La partie sud de la parcelle n°90 est classée en zone à dominante humide. D'une part, la métropole européenne de Lille fait valoir que cette parcelle est identifiée comme zone à dominante humide dans le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) Artois-Picardie, repris par le schéma de cohérence territoriale de la métropole lilloise. D'autre part, la seule prescription prévue dans une telle zone est une investigation pour déterminer le caractère de la zone et le cas échéant la nécessité d'une autorisation au titre de la loi sur l'eau.

66. Si les appelants font valoir que la limite de leur parcelle est située à plus de 100 mètres de la Marque, que plusieurs bâtiments s'intercalent entre elle et ce cours d'eau et que le sens d'écoulement des eaux est vers la Marque au sud, ce qui rendrait improbable le caractère humide de leur parcelle, ils n'ont apporté à l'instance, alors que les éléments cartographiques du SDAGE Artois-Picardie confirment la proximité de la parcelle avec des zones humides, aucun élément précis ni aucune étude hydrogéologique ou sur le sous-sol de la parcelle en cause suggérant son caractère non humide.

67. Dans ces conditions et alors que la seule prescription attachée au classement litigieux en zone à dominante humide est la réalisation d'une étude pour confirmer ou non le caractère humide de la parcelle, il n'apparaît pas disproportionné que la charge d'une telle étude incombe au maître d'ouvrage qui souhaite y réaliser un projet de construction. Le classement du sud de la parcelle n°90 dans une telle zone n'apparaît ainsi pas entaché d'erreur d'appréciation.

Sur la discrimination invoquée par les appelants :

68. Il est de la nature de toute réglementation d'urbanisme de distinguer des zones où les possibilités de construire sont différentes, ainsi que des zones inconstructibles. Dès lors que cette délimitation effectuée dans un plan local d'urbanisme ne repose pas sur une appréciation manifestement erronée, elle ne porte pas d'atteinte illégale au principe d'égalité des citoyens devant la loi.

69. Si les appelants soutiennent que d'autres parcelles situées dans le même compartiment du secteur ne subissent pas de contraintes identiques, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le classement de leurs parcelles n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ni, s'agissant de son classement en zone à dominante humide, d'erreur d'appréciation.

70. Il ressort au demeurant des pièces du dossier que l'ensemble des parcelles situées entre le chemin de la Vacquerie à l'ouest et la rue au nord ont été classées en secteur paysager et/ou arboré à préserver simple, y compris de très nombreuses parcelles bâties. De même, l'ensemble arboré des cœurs d'îlots de ce secteur est classé en secteur paysager et/ou arboré à préserver renforcé. De même, les parcelles voisines de celles des appelants, à l'ouest comme à l'est et au sud, sont également classées en espace naturel relais alors même que certaines sont bâties.

71. Dans ces conditions, le moyen des appelants tiré de la méconnaissance du principe d'égalité doit être écarté.

En ce qui concerne la qualification de dent creuse des parcelles :

72. Si les appelants soutiennent que leurs parcelles doivent être qualifiées de dents creuses au sens donné par le règlement du plan local d'urbanisme intercommunal et doivent en conséquence bénéficier d'une constructibilité limitée, une telle qualification n'exclut pas par principe l'application des servitudes définies par le règlement du plan pour préserver la qualité paysagère et écologique d'un secteur. Ce moyen est donc inopérant.

73. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que l'absence de constructions sur les parcelles des appelants n'est pas nuisible à l'aspect du quartier, compte tenu du caractère très végétalisé et arboré de ce dernier, de sorte que cette condition de l'identification d'une dent creuse posée par le règlement du plan local d'urbanisme n'est pas remplie.

74. Il résulte de tout ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leurs demandes à fin d'annulation de la délibération du 19 décembre 2019 et de la décision ayant rejeté leur recours gracieux.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

75. La métropole européenne de Lille n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, la demande présentée par Mme H... et M. et Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doit être rejetée.

76. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme H... et M. et Mme B... la somme demandée par la métropole européenne de Lille sur le même fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme H... et de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la métropole européenne de Lille au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... H... et à M. et Mme E... B..., à la métropole européenne de Lille, à M. et Mme A... G... et à la société Bella Vista 2014.

Copie de l'arrêt sera transmise, pour information, au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 25 mai 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président assesseur,

- M. Denis Perrin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juin 2023.

Le rapporteur,

Signé : D. Perrin

Le président de la 1ère chambre,

Signé : M. C...

Le greffier,

Signé : C. Sire

La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Christine Sire

N°22DA01894 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01894
Date de la décision : 08/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Eustache
Avocat(s) : LE NORMAND

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-06-08;22da01894 ?
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