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13/04/2023 | FRANCE | N°22DA00293

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 13 avril 2023, 22DA00293


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) ASTRADEC a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités :

- des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013,

- des rappels de taxe sur les véhicules de société mis à sa charge au titre des périodes allant du 1er octobre 2011 au 30 septembre 2012 et du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2013,

- des cotisations de pré

lèvement de solidarité et de prélèvements sociaux auxquelles elle a été assujettie au titre des a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) ASTRADEC a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités :

- des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013,

- des rappels de taxe sur les véhicules de société mis à sa charge au titre des périodes allant du 1er octobre 2011 au 30 septembre 2012 et du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2013,

- des cotisations de prélèvement de solidarité et de prélèvements sociaux auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013,

- des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2012 et de la cotisation primitive d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2013.

Par un jugement n° 1904205 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 11 février 2022 et le 3 janvier 2023, la SAS ASTRADEC, représentée par la société d'avocats Ernst et Young, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013 ;

2°) de prononcer, à titre principal, la décharge, en droits et pénalités, à titre subsidiaire, une réduction, de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de prescrire la restitution des sommes correspondantes, à titre infiniment subsidiaire, de réduire d'une somme de 34 454 euros, tenant compte de droits à déduction non exercés, la majoration de 40 % pour manquement délibéré dont ces rappels ont été assortis ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, si elle ne conteste pas les retards de paiement de taxe sur la valeur ajoutée qui lui sont imputés, ni le bien-fondé, dans leur principe, des rappels correspondants, elle est cependant fondée à soutenir que l'administration aurait dû modérer le montant de ces rappels, à 147 415 euros au lieu de 233 550 euros, pour tenir compte de droits à déduction de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle n'a pas exercés et qui s'élevaient à un montant de 38 474,90 euros au titre de la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012 et à un montant de 47 660,57 euros au titre de la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013 ; l'administration n'a d'ailleurs pas contesté l'existence de ces droits à déduction non exercés ;

- alors qu'elle a fait état dans sa réclamation, en en exposant le détail sous la forme de tableaux, de ces droits non exercés, elle est fondée à revendiquer le bénéfice des dispositions de l'article R. 196-3 du livre des procédures fiscales, qui permettent au contribuable qui fait l'objet d'une procédure de reprise ou de rectification de la part de l'administration des impôts de disposer d'un délai égal à celui de l'administration pour présenter ses propres réclamations ; en conséquence, l'administration n'est pas fondée à lui opposer l'absence de souscription d'une déclaration rectificative dans le délai prévu au I de l'article 208 de l'annexe II au code général des impôts ;

- cette situation de retard de paiement de taxe sur la valeur ajoutée et d'exercice de ses droits à déduction ne résulte pas d'un procédé mis en œuvre délibérément dans le but d'éluder l'impôt, mais de difficultés d'organisation auxquelles elle s'est efforcée de remédier ; cette situation de retard concernait d'ailleurs aussi l'exercice, en sa défaveur, de son droit à déduction, à raison, respectivement, de 47 % et 38 % des retards de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée collectée relevés au titre de chacune des deux périodes en litige ; la taxe sur la valeur ajoutée due au titre de la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013 a d'ailleurs fait l'objet de sa part d'une régularisation sur la déclaration du mois d'octobre 2014, qu'elle a souscrite avant le début de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet ; il en a été de même de la taxe due sur la cession de la déchetterie de Beaumerie, mentionnée, à titre de régularisation, dans la déclaration souscrite par elle au titre du mois de mars 2014 ;

- à titre subsidiaire, elle aurait dû, à tout le moins, bénéficier du mécanisme de compensation prévu à l'article L. 80 du livre des procédures fiscales, car l'absence de prise en compte, par l'administration, de droits à déduction qu'elle n'a pas exercés au titre des deux périodes faisant l'objet des rappels en litige a conduit à la soumettre à une double imposition ; l'application de ce droit de compensation devait entraîner, en ce qui concerne les deux périodes en litige, une limitation des rappels de taxe sur la valeur ajoutée aux sommes respectives de 43 433,10 euros et 77 190,43 euros et, par voie de conséquence, une réduction, à due concurrence, de l'assiette de calcul des intérêts de retard et de la majoration pour manquement délibéré ; elle est fondée à invoquer, à cet égard, les énonciations du paragraphe n°60 de la doctrine administrative publiée sous la référence le BOI-CF-PGR-30-50, en ce qu'elles reconnaissent, d'une part, que la compensation entre une insuffisance et une surtaxe résultant d'une omission ou d'une erreur est possible en matière de taxe sur la valeur ajoutée et, d'autre part, que la compensation est possible au cours de la vérification de comptabilité, quand bien même le délai de réclamation prévu au I de l'article 208 de l'annexe II au code général des impôts est dépassé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juillet 2022, et par un mémoire, enregistré le 20 janvier 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à supposer que les éléments produits par la SAS ASTRADEC lui permettent de justifier d'une insuffisance d'exercice de son droit à déduction de taxe sur la valeur ajoutée au titre des deux périodes en litige, ce qui n'est d'ailleurs pas le cas et ce que l'administration n'a aucunement admis, il lui appartenait, afin de pouvoir obtenir la prise en compte des sommes correspondantes, de mentionner celles-ci, à titre de régularisation, dans une déclaration souscrite avant l'expiration du délai prévu au I de l'article 208 de l'annexe II au code général des impôts, ce qu'elle n'a pas fait ;

- en conséquence, la SAS ASTRADEC ne peut utilement se prévaloir du délai de réclamation prévu à l'article R. 196-3 du livre des procédures fiscales ;

- la SAS ASTRADEC ne peut davantage invoquer utilement le bénéfice de la compensation prévue à l'article L. 80 du livre des procédures fiscales, dont les dispositions ne concernent pas la taxe sur la valeur ajoutée ;

- cette société n'est pas fondée à invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les énonciations du paragraphe n°60 de la doctrine administrative publiée sous la référence le BOI-CF-PGR-30-50, qui, ayant trait aux garanties ouvertes au contribuable dans le cadre des procédures de rectification, ne comportent aucune interprétation formelle de la loi fiscale, au sens de ces dispositions ; au surplus, la SAS ASTRADEC ne peut être regardée comme ayant appliqué la doctrine dont elle invoque le bénéfice ;

- eu égard au caractère systématique des insuffisances de déclaration, par la SAS ASTRADEC, de la taxe sur la valeur ajoutée collectée dans le cadre de ses activités, lesquelles insuffisances avaient déjà été mises en évidence à l'occasion de deux précédents contrôles, et à l'importance des montants correspondants, l'administration a retenu à juste titre que cette société avait conscience de cette situation, y compris s'agissant de la cession de la déchetterie de Beaumerie, et a assorti à bon droit les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a. de l'article 1729 du code général des impôts ; à cet égard, à supposer même que la SAS ASTRADEC n'ait pas exercé tous ses droits à déduction de taxe sur la valeur ajoutée au titre des deux périodes en litige, au demeurant à hauteur de montants moindres que ceux correspondant à ses insuffisances déclaratives en matière de taxe sur la valeur ajoutée collectée, cette circonstance demeurerait sans incidence sur l'appréciation du caractère délibéré des manquements qui lui sont reprochés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée (SAS) ASTRADEC, dont le siège est situé à Paris, mais qui dispose d'un principal établissement à Arques (Pas-de-Calais), exerce une activité de collecte de déchets non dangereux. Elle a fait l'objet, du 16 mars au 10 décembre 2015, d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013. A l'issue de ce contrôle, l'administration a estimé que la SAS ASTRADEC, d'une part, avait, sur ses déclarations de chiffre d'affaires, minoré la taxe sur la valeur ajoutée collectée au cours de la période vérifiée et, d'autre part, avait déduit à tort la taxe ayant grevé des dépenses regardées comme étrangères à son activité taxable. Les rectifications envisagées par l'administration en matière de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que d'autres rectifications, afférentes à la taxe sur les véhicules de société, aux prélèvements sociaux et à l'impôt sur les sociétés, ont été portées à la connaissance de la SAS ASTRADEC par deux propositions de rectification qui lui ont été adressées le 15 décembre 2015. Ces rectifications ont été maintenues malgré les observations émises par la société. Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été mis en recouvrement le 31 août 2016 pour un montant, en droits et pénalités, de 346 332 euros. Sa réclamation n'ayant été que partiellement accueillie, la SAS ASTRADEC a porté le litige devant le tribunal administratif de Lille en lui demandant, notamment, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013. La SAS ASTRADEC relève appel du jugement du 16 décembre 2021 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Lille a rejeté lesdites conclusions.

Sur le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

2. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. / (...) / 3. La déduction de la taxe ayant grevé les biens et les services est opérée par imputation sur la taxe due par le redevable au titre du mois pendant lequel le droit à déduction a pris naissance. / (...) / IV. La taxe déductible dont l'imputation n'a pu être opérée peut faire l'objet d'un remboursement dans les conditions, selon les modalités et dans les limites fixées par décret en Conseil d'Etat. / (...) ". Aux termes du I de l'article 208 de l'annexe II au code général des impôts, pris pour l'application du IV de l'article 271 de ce code : " Le montant de la taxe déductible doit être mentionné sur les déclarations déposées pour le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée. Toutefois, à condition qu'elle fasse l'objet d'une inscription distincte, la taxe dont la déduction a été omise sur cette déclaration peut figurer sur les déclarations ultérieures déposées avant le 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de l'omission. (...) ".

3. Si les dispositions du I de l'article 208 de l'annexe II au code général des impôts prévoient que la taxe sur la valeur ajoutée dont la déduction a été omise sur la déclaration afférente à l'année concernée peut valablement être portée sur une déclaration ultérieure, elles subordonnent toutefois cette faculté à la condition que cette déclaration différée soit déposée avant le 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de l'omission, qui, selon les dispositions précitées du 2 du I de l'article 271 du code général des impôts, est aussi celle à laquelle la taxe déductible devient exigible auprès du redevable. En vertu du a) du 1 de l'article 269 de ce code, le fait générateur de la taxe se produit au moment où la livraison du bien ou la prestation de services est effectuée. En outre, selon le a) du 2 de l'article 269, la taxe devient exigible, en ce qui concerne les livraisons et les achats de biens, lors de la réalisation du fait générateur et, selon le c) de ce même 2, la taxe devient exigible, en ce qui concerne les prestations de services, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits. Enfin, un contribuable ne peut demander la compensation entre la taxe qui lui a été assignée et un crédit de taxe déductible dont il se prévaut, dès lors que cette taxe déductible omise n'a pas figuré dans les déclarations ultérieures déposées dans le délai prévu par les dispositions du I de l'article 208 de l'annexe II du code général des impôts, citées au point précédent, c'est-à-dire avant le 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de l'omission, qui est celle au cours de laquelle la taxe sur la valeur ajoutée est devenue exigible chez le fournisseur ou le prestataire.

4. Au cours de la vérification de comptabilité dont la SAS ASTRADEC a fait l'objet, le vérificateur a constaté que cette société avait pratiqué d'importantes minorations de la taxe sur la valeur ajoutée collectée au cours de la période vérifiée, allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013. La SAS ASTRADEC admet cette situation, mais soutient qu'elle correspond, en réalité, non à des omissions mais à des retards de déclaration imputables à des difficultés d'organisation auxquelles elle s'est efforcée de remédier. Elle ajoute que cette situation l'a notamment privée de la déduction de sommes importantes, dont l'administration a omis de tenir compte.

5. Toutefois, il est constant que la SAS ASTRADEC n'a pas porté la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle allègue avoir omis de déduire sur des déclarations souscrites dans le délai prévu par les dispositions du I de l'article 208 de l'annexe II du code général des impôts, c'est-à-dire avant le 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de l'omission, définie au point 3. Elle ne peut, dès lors, obtenir une compensation entre les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle conteste et le crédit de taxe dont elle soutient pouvoir se prévaloir pour avoir omis de déduire la taxe ayant grevé des achats de biens effectués au cours de la période vérifiée. Au surplus, les tableaux qu'elle verse à l'instruction, lesquels ne sont appuyés par aucune pièce justificative, sont insuffisants, à eux seuls, à établir la réalité du crédit de taxe qu'elle revendique. Il ne peut, en conséquence, être fait droit à ses prétentions sur ce point. Par ailleurs, la SAS ASTRADEC ne peut, en tout état de cause, soutenir qu'elle aurait disposé, en raison de la procédure d'imposition mise en œuvre à son égard, d'un délai supplémentaire pour obtenir la prise en compte de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle entend voir admise en déduction, ni invoquer, sur ce point, les dispositions de l'article R. 196-3 du livre des procédures fiscales, qui impartissent au contribuable faisant l'objet d'une procédure de reprise ou de rectification un délai égal à celui de l'administration pour présenter ses réclamations, mais qui ne peuvent être interprétées comme l'autorisant à introduire une réclamation tendant à la restitution de la taxe dont la déduction a été omise au cours de l'année faisant l'objet d'une reprise ou d'une rectification et qu'elle n'a pas fait figurer dans une déclaration déposée avant l'expiration du délai imparti par le I de l'article 208 de l'annexe II au code général des impôts.

En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :

6. En vertu du dernier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente.

7. La SAS ASTRADEC invoque, sur le fondement des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les énonciations du paragraphe n°60 de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 sous la référence BOI-CF-PGR-30-50, selon lesquelles " la compensation entre des droits rappelés pour défaut de déclaration d'opérations imposables et une surtaxe résultant de l'omission par erreur, de déductions autorisées est possible même si le délai fixé par le I de l'article 208 de l'annexe II au code général des impôts pour opérer les déductions susvisées est venu à expiration ". Toutefois, ces prévisions, qui s'insèrent dans une doctrine administrative qui, selon son intitulé même, a trait aux garanties ouvertes au contribuable dans le cadre des procédures de rectification, ne peuvent être regardées comme comportant, au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, une interprétation de la loi fiscale qui soit opposable à l'administration. Au surplus, ainsi qu'il a été dit au point 5, par les tableaux qu'elle verse à l'instruction, la SAS ASTRADEC ne justifie pas avoir été soumise, au sens de l'extrait de doctrine invoqué, à " une surtaxe résultant de l'omission, par erreur, de déductions autorisées ". Dès lors, la SAS ASTRADEC n'est pas fondée à invoquer le bénéfice de cet extrait de doctrine.

Sur les pénalités :

8. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ".

9. Pour justifier l'application aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige, de la majoration de 40 % prévue en cas de manquement délibéré par les dispositions précitées du a. de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration a retenu, dans la proposition de rectification qu'elle a adressée, le 15 décembre 2015, à la SAS ASTRADEC, en ce qui concerne le rehaussement en matière de taxe sur la valeur ajoutée, que cette société avait minoré, de façon répétée, le montant de la taxe sur la valeur ajoutée collectée portée sur les déclarations de chiffre d'affaires qu'elle avait souscrites au cours de la période vérifiée et que cette pratique s'est avérée récurrente, puisque des rappels de taxe sur la valeur ajoutée avaient déjà été mis à sa charge, pour le même motif, à l'issue de deux contrôles portant sur des périodes antérieures. Le ministre, qui reprend ces éléments, fait également valoir que, eu égard au caractère récurrent de ces agissements et à l'importance des montants correspondants, la SAS ASTRADEC ne peut sérieusement imputer les manquements relevés à des difficultés d'organisation, alors que, déjà informée, à deux reprises, de cette situation d'insuffisance chronique de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée collectée, il lui appartenait de prendre toutes mesures propres à y remédier. Si la SAS ASTRADEC soutient qu'elle n'aurait pas exercé tous ses droits à déduction de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période en litige, au demeurant à hauteur de montants notablement moindres que ceux correspondant à ses insuffisances déclaratives en matière de taxe sur la valeur ajoutée collectée, cette circonstance ne peut, en tout état de cause, être tenue pour établie par les seuls tableaux qu'elle verse à l'instruction. En outre, la SAS ASTRADEC ne justifie pas avoir effectivement déposé les déclarations rectificatives des mois de mars 2014 et d'octobre 2014 dont elle fait état, s'agissant notamment de la taxe due sur la cession de la déchetterie de Beaumerie. Dès lors, les éléments ainsi avancés par le ministre sont de nature à établir l'intention délibérée, qui a été celle de la SAS ASTRADEC, d'éluder l'impôt et à justifier l'application, au chef de rectification afférent à la taxe sur la valeur ajoutée, de la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées du a. de l'article 1729 du code général des impôts. Enfin, dès lors que, pour les motifs énoncés aux points 5 et 7, la SAS ASTRADEC n'est pas fondée à demander le bénéfice d'une compensation entre les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige et les droits à déduction dont elle fait état, elle ne peut, par voie de conséquence, obtenir une modération corrélative de la majoration, prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts, dont ces rappels ont été assortis.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS ASTRADEC n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Les conclusions qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS ASTRADEC est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS ASTRADEC et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 30 mars 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2023.

Le rapporteur,

Signé : J.-F. PapinLe président de chambre,

Signé : C. Heu

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Nathalie Roméro

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N°22DA00293

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00293
Date de la décision : 13/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SOCIÉTÉ D'AVOCATS ERNST et YOUNG

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-04-13;22da00293 ?
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