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24/01/2023 | FRANCE | N°22DA00704

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 24 janvier 2023, 22DA00704


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. W... D... et six autres conseillers municipaux de Compiègne ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler les arrêtés du 4 juin 2020 par lesquels le maire de la commune a accordé des délégations à Mme ..., à M. ..., à M. ..., à Mme ..., à Mme ..., à Mme ..., à M. ..., à Mme ..., à Mme ..., à Mme ..., à M. ..., à M. ... et à M. ..., d'annuler les actes de mandatement postérieurs au 27 mai 2020 pour le paiement des indemnités dues à raison de leurs délégations et d'annuler la

délibération du 8 juillet 2020 par laquelle le conseil municipal a fixé les indemnités ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. W... D... et six autres conseillers municipaux de Compiègne ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler les arrêtés du 4 juin 2020 par lesquels le maire de la commune a accordé des délégations à Mme ..., à M. ..., à M. ..., à Mme ..., à Mme ..., à Mme ..., à M. ..., à Mme ..., à Mme ..., à Mme ..., à M. ..., à M. ... et à M. ..., d'annuler les actes de mandatement postérieurs au 27 mai 2020 pour le paiement des indemnités dues à raison de leurs délégations et d'annuler la délibération du 8 juillet 2020 par laquelle le conseil municipal a fixé les indemnités du maire, des adjoints et des conseillers municipaux délégués.

Par un jugement n° 2002903 du 23 février 2022, le tribunal administratif d'Amiens a annulé les arrêtés du 4 juin 2020, ensemble les actes de mandatement des sommes versées sur leur fondement et a enjoint au maire de Compiègne d'ordonner le reversement des indemnités versées aux intéressés sur le fondement de ces arrêtés.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 mars 2022, la commune de Compiègne, représentée par Me Hugues Portelli, demande à la cour d'annuler ce jugement en ce qu'il a annulé les arrêtés du 4 juin 2020 concernant les délégations données à Mme L... P... de Oliveira, à M. AK... U..., à M. T... V..., à Mme Y... AG..., à Mme AO... A... AJ..., à Mme AE... H..., à M. AB... I..., à Mme AA... X..., à Mme AI... AM..., à Mme M... K..., à M. AH... AC..., à M. J... N... et à M. AD... O..., enjoint au maire de Compiègne d'ordonner le reversement des indemnités versées à ces treize conseillers municipaux et mis à sa charge une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les arrêtés du 4 juin 2020 accordant des délégations aux intéressés sont suffisamment précis, portent sur des domaines relevant de la compétence de la commune et ont permis aux délégataires de prendre des décisions au nom du maire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2022, M. W... D..., M. Q... F..., Mme S... AN..., M. R... E..., Mme AF... G..., Mme AL... C... et Mme B... Z..., représentés par Me Cyrille Rollin, concluent au rejet de la requête.

Ils soutiennent que les moyens soulevés par la commune de Compiègne ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 21 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller,

- les conclusions de M. Guillaume Toutias, rapporteur public,

- et les observations de Me Hugues Portelli, représentant la commune de Compiègne et M. W... D....

Considérant ce qui suit :

1. Après son renouvellement issu des élections du 15 mars 2020, le conseil municipal de la commune de Compiègne a, le 27 mai 2020, élu le maire et désigné ses douze adjoints. Par des arrêtés du 4 juin 2020, le maire a attribué des délégations à ses adjoints, ainsi qu'à des conseillers municipaux membres de la majorité municipale. Par une délibération du 8 juillet 2020, le conseil municipal a fixé les indemnités du maire, des adjoints et des conseillers municipaux délégués. Ces décisions, en tant qu'elles concernent treize conseillers délégués de la majorité municipale, ont été contestées par des conseillers municipaux d'opposition. La commune de Compiègne relève appel du jugement du 23 février 2022 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé les arrêtés du 4 juin 2020 attribuant délégation à des conseillers municipaux membres de la majorité et a enjoint au maire de Compiègne d'ordonner le reversement des indemnités qu'ils ont perçues.

Sur le moyen d'annulation retenu par le jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 2122-18 au code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et à des membres du conseil municipal. (...) ". Aux termes de l'article L. 2123-17 du même code : " Sans préjudice des dispositions du présent chapitre, les fonctions de maire, d'adjoint et de conseiller municipal sont gratuites ". Aux termes de l'article L. 2123-24-1 dudit code : " II. - Dans les communes de moins de 100 000 habitants, il peut être versé une indemnité pour l'exercice effectif des fonctions de conseiller municipal dans les limites prévues par le II de l'article L. 2123-24. (...) / III. - Les conseillers municipaux auxquels le maire délègue une partie de ses fonctions en application des articles L. 2122-18 et L. 2122-20 peuvent percevoir une indemnité allouée par le conseil municipal dans les limites prévues par le II de l'article L. 2123-24. Cette indemnité n'est pas cumulable avec celle prévue par le II du présent article ". Lorsque le maire délègue une partie de ses fonctions à des membres du conseil municipal, une telle délégation, pour être régulière, doit porter sur des attributions effectives, identifiées de façon suffisamment précise pour permettre d'en apprécier la consistance.

3. Par des arrêtés du 4 juin 2020, le maire de Compiègne a attribué à Mme P... de Oliveira, à M. U..., à M. V..., à Mme AG..., à Mme A... AJ..., à Mme H..., à M. I..., à Mme X..., à Mme AM..., à Mme K... et à M. N... des délégations pour assister des adjoints dans leurs fonctions ou pour représenter le maire auprès des associations d'un quartier de la ville, y développer des services de proximité, assurer une liaison constante entre les habitants, les associations et la municipalité ou coordonner des comités d'intérêts locaux de quartier. Or, les délégations mentionnées ci-dessus, qui attribuent des missions identiques à plusieurs de ces conseillers municipaux sans plus de précision, ne fixent pas de manière suffisamment précise la nature et les limites des fonctions déléguées et ne confient pas à leurs bénéficiaires l'exercice effectif de l'administration des affaires communales dans des conditions de nature à justifier l'attribution des indemnités de fonctions prévues par la délibération du 8 juillet 2020. Il en résulte que la commune de Compiègne n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé ces onze arrêtés.

4. En revanche, si une partie des délégations accordées à MM. AC... et O... comportent des attributions imprécises énoncées en des termes identiques, le maire de Compiègne leur a délégué, respectivement, les relations avec l'enseignement supérieur et des fonctions relatives au logement social, qui consistent dans la représentation de la collectivité au sein du conseil d'administration de l'IUT de Compiègne, établissement d'enseignement supérieur, et des commissions d'attribution des bailleurs sociaux. Dans cette mesure, ces délégations portent sur des attributions effectives et sont suffisamment précises pour permettre d'en apprécier la consistance. Dès lors, ces conseillers municipaux ont le droit de garder la partie de l'indemnité relative à leurs fonctions de représentation du maire aux commissions d'attribution des bailleurs sociaux et de représentation de la commune au sein du conseil d'administration de l'IUT de Compiègne. Il suit de là que la commune de Compiègne est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé ces deux arrêtés dans leur intégralité et lui a enjoint d'ordonner le reversement de la totalité des indemnités versées à ces deux conseillers municipaux.

5. Lorsque le juge d'appel, saisi par le défendeur de première instance, censure le motif retenu par les premiers juges, il lui appartient, en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'ensemble des moyens présentés par l'intimé en première instance, alors même qu'ils ne seraient pas repris dans les écritures produites, le cas échéant, devant lui, à la seule exception de ceux qui auraient été expressément abandonnés en appel.

Sur les autres moyens soulevés en première instance et en appel :

6. Aux termes de l'article L. 2121-19 du code général des collectivités territoriales : " Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune. (...) ". Aux termes de l'article L. 2121-23 du même code : " Le conseil municipal procède à la désignation de ses membres ou de délégués pour siéger au sein d'organismes extérieurs dans les cas et conditions prévus par les dispositions du présent code et des textes régissant ces organismes. (...) ".

7. D'une part, le maire de Compiègne, en délégant à MM. AC... et O... des fonctions relatives aux relations avec l'enseignement supérieur et au logement social, n'a pas méconnu les prérogatives du conseil municipal quant à la désignation de ses membres pour siéger au sein d'organismes extérieurs ni l'étendue de sa propose compétence.

8. D'autre part, les attributions citées au point 8 portant sur des missions effectives, le maire de Compiègne ne peut pas être regardé comme ayant commis un détournement de procédure.

9. Il résulte de tout ce qui précède qu'il convient de prononcer l'annulation de la délégation accordée à M. AC... seulement dans sa partie ne concernant pas les relations avec l'enseignement supérieur et la délégation accordée à M. O..., seulement dans sa partie ne concernant pas les fonctions relatives au logement social et d'ordonner le reversement de la partie des indemnités de fonctions qui ne correspondent pas à ces missions.

10. La commune de Compiègne étant principalement perdante, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont mis à sa charge une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2002903 du 23 février 2022 du tribunal administratif d'Amiens est annulé en ce qu'il a annulé dans leur intégralité les arrêtés de délégation de fonctions du 4 juin 2020 donnée à MM. ... et ... et a enjoint à la commune de Compiègne d'ordonner le reversement de la totalité des indemnités versées à ces deux conseillers municipaux.

Article 2 : Les arrêtés de délégation de fonctions du 4 juin 2020 donnée à MM. ... et ... sont annulés en tant qu'ils ne concernent pas les relations avec l'enseignement supérieur et les fonctions relatives au logement social.

Article 3 : Il est enjoint à la commune de Compiègne d'ordonner le reversement de la partie des indemnités de MM. AC... et O... qui ne concernent pas les relations avec l'enseignement supérieur et le logement social.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Compiègne et à M. W... D... qui a été désigné à cette fin dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 751-3 du code de justice administrative.

Délibéré après l'audience publique du 10 janvier 2023 à laquelle siégeaient :

- Mme Anne Seulin, présidente de chambre,

- M. Marc Baronnet, président-assesseur,

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 janvier 2023.

Le rapporteur,

Signé : G. VandenbergheLa présidente de chambre,

Signé : A. Seulin

La greffière,

Signé : A.S. Villette

La République mande et ordonne à la préfète de l'Oise en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Anne-Sophie Villette

2

N°22DA00704


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00704
Date de la décision : 24/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: M. Guillaume Vandenberghe
Rapporteur public ?: M. Toutias
Avocat(s) : SELARL PORTELLI

Origine de la décision
Date de l'import : 29/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-01-24;22da00704 ?
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