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25/08/2022 | FRANCE | N°20DA01019

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 25 août 2022, 20DA01019


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Rabot Dutilleul Holding a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur les salaires auxquels elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012.

Par un jugement n° 1702799 du 19 mai 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 juillet 2020 et le 7 juin 2021, la SAS Rabot Du

tilleul Holding, représentée par Me Verzura et Me Juan, demande à la cour, dans le dernier état ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Rabot Dutilleul Holding a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur les salaires auxquels elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012.

Par un jugement n° 1702799 du 19 mai 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 juillet 2020 et le 7 juin 2021, la SAS Rabot Dutilleul Holding, représentée par Me Verzura et Me Juan, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige, soit 6 196 euros en 2011 et 6 068 euros en 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 14 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'absence de sectorisation en matière de taxe sur la valeur ajoutée n'est pas un obstacle à la constitution rétroactive de secteurs en matière de taxe sur les salaires ;

- la doctrine n° 5-L1421 du 1er juin 1995, applicable jusqu'au 12 septembre 2012, prévoyait en son point n°19 qu'au regard de la taxe sur les salaires une activité hors champ est assimilée à un secteur d'activité sans autre condition ;

- la doctrine référencée BOI-TPS-TS-20-30 n°200, applicable depuis le 12 septembre 2012, créé une condition supplémentaire, qui ajoute à la loi, relative à la disposition de moyens propres en personnel et matériel pour la réalisation des opérations financières ;

- le Conseil d'Etat, dans son arrêt n° 164100 du 28 juillet 1999, a admis qu'une entreprise constitue deux secteurs d'activité distincts au regard de la taxe sur la valeur ajoutée quand bien même l'activité de ce second secteur ne nécessite l'emploi d'aucun salarié ; plus récemment, la cour administrative d'appel de Paris, dans son arrêt n° 13PA02960 du 29 janvier 2015, a validé l'existence de deux secteurs d'activité dans un cas similaire ;

- parmi les dix salariés identifiés par l'administration dans son mémoire en défense comme étant affectés concurremment aux deux secteurs d'activité, cinq personnes seulement doivent en définitive être considérées comme affectées au secteur des prestations de service en plus des quatre salariés déjà admis par l'administration qui a accordé un dégrèvement partiel à ce titre.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 avril 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour de prononcer un non-lieu à statuer à hauteur des montants dégrevés, soit 114 281 euros au titre de l'année 2011 et 118 328 euros au titre de l'année 2012, et de rejeter le surplus des conclusions de la requête de la SAS Rabot Dutilleul Holding.

Il soutient que :

- l'administration admet la constitution de secteurs d'activité distincts au regard de la taxe sur les salaires tandis que dix salariés sont affectés de manière mixte, de sorte qu'un dégrèvement total de 232 609 euros est prononcé en cours d'instance ;

- les moyens soulevés à l'appui des impositions demeurant en litige ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 9 novembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 3 décembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sauveplane, président assesseur,

- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée (SAS) Rabot Dutilleul Holding, société holding mixte, exerce tout à la fois une activité de prestation de service pour ses filiales, soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, et une activité de gestion des produits des participations détenues dans ses filiales, non soumise à la taxe sur la valeur ajoutée. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au cours de laquelle le vérificateur a constaté que la société n'était pas assujettie à la taxe sur les salaires au titre des rémunérations de son personnel alors même que son chiffre d'affaires soumis à la taxe sur la valeur ajoutée était inférieur à 90 % de son chiffre d'affaires total. En conséquence, l'administration l'a assujettie, sur le fondement des dispositions du 1 de l'article 231 du code général des impôts, à la taxe sur les salaires sur la base de l'ensemble des salaires versés par l'entreprise au titre des années 2011 et 2012. La SAS Rabot Dutilleul Holding relève appel du jugement du 19 mai 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur les salaires auxquels elle a ainsi été assujettie au titre des années 2011 et 2012.

Sur l'étendue du litige :

2. A hauteur des montants dégrevés en cours d'instance le 28 avril 2021, en droits et pénalités, soit 114 281 euros au titre de l'année 2011 et 118 328 euros au titre de l'année 2012, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la SAS Rabot Dutilleul Holding aux fins de décharge des cotisations supplémentaires de taxe sur les salaires mises à sa charge au titre de ces deux années.

Sur les impositions demeurant en litige :

3. Aux termes du premier alinéa de l'article 231 du code général des impôts : " 1. Les sommes payées à titre de rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires égale à 4,25 % de leur montant, évalué selon les règles prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale ou pour les employeurs de salariés visés aux articles L. 722-20 et L. 751-1 du code rural et de la pêche maritime, au titre IV du livre VII dudit code, et à la charge des personnes ou organismes, à l'exception des collectivités locales, de leurs régies personnalisées mentionnées à l'article L. 1412-2 du code général des collectivités territoriales et de leurs groupements, des services départementaux de lutte contre l'incendie, des centres d'action sociale dotés d'une personnalité propre lorsqu'ils sont subventionnés par les collectivités locales, du centre de formation des personnels communaux, des caisses des écoles et des établissements d'enseignement supérieur visés au livre VII du code de l'éducation qui organisent des formations conduisant à la délivrance au nom de l'Etat d'un diplôme sanctionnant cinq années d'études après le baccalauréat, qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en totalité ou sur 90 p. 100 au moins de son montant, ainsi que le chiffre d'affaires total mentionné au dénominateur du rapport s'entendent du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s'entend du total des recettes et autres produits qui n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée. ".

4. Dans le dernier état de ses écritures, la SAS Rabot Dutilleul Holding admet que certains de ses salariés puissent être considérés comme concurremment affectés au secteur taxable des prestations de service aux filiales et au secteur financier non taxable, compte tenu des tâches qui leur sont dévolues, et qu'en conséquence les salaires qui leur sont versés doivent être inclus dans la base d'imposition à la taxe sur les salaires due par la société au titre des années 2011 et 2012. En revanche, elle conteste que les salariés Mme G... B..., Mme H... J..., Mme I... C..., Mme E... F... et M. A... D... puissent être considérés comme affectés concurremment au secteur taxable des prestations de service aux filiales et au secteur financier non taxable. Pour contester la prise en compte des salaires versés à ces salariés dans la base de la taxe sur les salaires, la SAS Rabot Dutilleul Holding soutient qu'ils étaient affectés en totalité au secteur des prestations de service. Elle joint à ses affirmations, outre les contrats de travail qui décrivent les affectations des intéressés au secteur des prestations de service, des attestations des salariés toujours employés par la société à l'heure actuelle. Ces éléments ne sont pas contestés par l'administration. Par suite, c'est à tort que l'administration a inclus les salaires versés à ces salariés dans la base d'imposition à la taxe sur les salaires au titre des années 2011 et 2012. Il y a donc lieu d'accorder à la SAS Rabot Dutilleul Holding la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires de taxe sur les salaires mises à sa charge au titre des années 2011 et 2012 à due concurrence de l'exclusion, à laquelle il convient de procéder, de la base d'imposition à la taxe sur les salaires, des salaires versés à ces salariés.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Rabot Dutilleul Holding est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses conclusions à fins de décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires de taxe sur les salaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 à due concurrence de l'exclusion de la base d'imposition à la taxe sur les salaires des salaires versés aux cinq salariés mentionnés au point 4 du présent arrêt.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante à l'instance, la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la SAS Rabot Dutilleul Holding aux fins de décharge des cotisations supplémentaires de taxe sur les salaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012, à hauteur de 114 281 euros au titre de l'année 2011 et de 118 328 euros au titre de l'année 2012, en droits et pénalités.

Article 2 : La SAS Rabot Dutilleul Holding est déchargée, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires de taxe sur les salaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 à due concurrence de l'exclusion de la base d'imposition à la taxe sur les salaires des salaires versés aux cinq salariés mentionnés au point 4 du présent arrêt.

Article 3 : Le jugement n° 1702799 du 19 mai 2020 du tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros à la SAS Rabot Dutilleul Holding sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la SAS Rabot Dutilleul Holding est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Rabot Dutilleul Holding et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera transmise à l'administrateur général chargé de la direction des vérifications nationales et internationales.

Délibéré après l'audience publique du 30 juin 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 août 2022.

Le président, rapporteur,

Signé : M. Sauveplane Le président de chambre,

Signé : C. Heu

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière,

Nathalie Roméro

N°20DA01019 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01019
Date de la décision : 25/08/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: Mme Dominique Bureau
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : PWC SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-08-25;20da01019 ?
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