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07/06/2022 | FRANCE | N°21DA01587

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 07 juin 2022, 21DA01587


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... H... a notamment demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays d'éloignement et lui a interdit de revenir sur le territoire français pendant une période de deux ans.

Par un jugement n° 2100170 du 24 juin 2021, le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du 9 novemb

re 2020 par laquelle le préfet de la Seine-Maritime a interdit à Mme H... de revenir ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... H... a notamment demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays d'éloignement et lui a interdit de revenir sur le territoire français pendant une période de deux ans.

Par un jugement n° 2100170 du 24 juin 2021, le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du 9 novembre 2020 par laquelle le préfet de la Seine-Maritime a interdit à Mme H... de revenir sur le territoire français pendant une période de deux ans, a enjoint à ce préfet de supprimer le signalement de Mme H... dans le système d'information Schengen dans un délai de quinze jours et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 juillet 2021, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter dans toutes ses conclusions la demande présentée en première instance par Mme H....

Il soutient que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est suffisamment motivée.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 novembre 2021, Mme H..., représentée par Me Magali Leroy, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à titre incident, à l'annulation du jugement du 24 juin 2021 en tant qu'il a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation dirigées contre les décisions portant refus d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays d'éloignement ;

3°) à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) à titre subsidiaire, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Seine-Maritime de réexaminer sa demande de titre de séjour dans un délai de quatre mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision portant refus d'un titre de séjour est entachée d'incompétence ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de procédure contradictoire ;

- elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;

- elle est illégale dès lors que sa demande a fait l'objet d'un traitement fautif et déloyal ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa demande de titre de séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article L. 313-14 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'incompétence ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale dès lors que sa demande a fait l'objet d'un traitement fautif et déloyal ;

- elle a été prise sur le fondement d'une décision illégale portant refus d'un titre de séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays d'éloignement est entachée d'incompétence ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale dès lors que sa demande a fait l'objet d'un traitement fautif et déloyal ;

- elle a été prise sur le fondement d'une décision illégale portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est entachée d'incompétence ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de procédure contradictoire ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;

- elle a été prise sur le fondement d'une décision illégale portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Mme H... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 septembre 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le décret n°2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Stéphane Eustache, premier conseiller.

Considérant ce qui suit :

1. Mme H..., ressortissante marocaine née le 10 septembre 1979, a présenté le 17 janvier 2019 une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 9 novembre 2020, le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays d'éloignement et lui a interdit de revenir sur le territoire français pendant une période de deux ans. Par un jugement du 24 juin 2021, le tribunal administratif de Rouen, saisi par Mme H..., a annulé la décision portant interdiction de retour sur le territoire français et a rejeté les conclusions aux fins d'annulation dirigées contre les décisions portant refus d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays d'éloignement. Dans la présente instance, le préfet relève appel de ce jugement en tant qu'il a annulé la décision portant interdiction de retour sur le territoire français et Mme H... demande, à titre incident, d'annuler ce même jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande de première instance.

Sur les conclusions d'appel incident présentées par Mme H... :

En ce qui concerne la décision portant refus d'un titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes du I de l'article 44 du décret du 29 avril 2004 visé ci-dessus : " Les chefs des services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat dans le département, ainsi que l'adjoint auprès du directeur départemental des finances publiques mentionné au 15° de l'article 43, peuvent donner délégation pour signer les actes relatifs aux affaires pour lesquelles ils ont eux-mêmes reçu délégation aux agents placés sous leur autorité. Le préfet de département peut, par arrêté, mettre fin à tout ou partie de cette délégation. Il peut également fixer, par arrêté, la liste des compétences qu'il souhaite exclure de la délégation que peuvent consentir les chefs de service et l'adjoint auprès du directeur départemental des finances publiques aux agents placés sous leur autorité ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté préfectoral n°20-01 du 13 janvier 2020 portant organisation de la préfecture et des sous-préfectures de la Seine-Maritime : " La préfecture et les sous-préfectures de la Seine-Maritime sont organisées comme suit : / (...) / Direction des migrations et de l'intégration (DMI) / (...) / bureau "éloignement" ".

3. En l'espèce, la décision attaquée a été signée par Mme B... A..., adjointe à la cheffe du bureau de l'éloignement de la préfecture de la Seine-Maritime. Par un arrêté du 4 septembre 2020, M. I... D..., préfet de la Seine Maritime, a accordé à Mme C... G..., cheffe du bureau de l'éloignement, et, en cas d'absence ou d'empêchement de cette dernière, à Mme B... A..., son adjointe, une délégation de signature à l'effet de signer les décisions " relevant des attributions de son bureau " et notamment " les refus de délivrance de titre de séjour " et " les mesures d'éloignement ".

4. Contrairement à ce que soutient Mme H..., le préfet de la Seine-Maritime a pu régulièrement accorder une telle délégation de signature à Mme A... sans méconnaître les dispositions précitées de l'article 44 du décret du 29 avril 2004 qui n'ont ni pour objet ni pour effet de dessaisir le préfet de sa faculté d'accorder des délégations de signature, y compris à des chefs de bureau ou aux agents placés sous leur autorité, pour la mise en œuvre des compétences relevant de ses attributions. En outre, dès lors que Mme A... ne bénéficie d'une délégation de signature qu'à l'effet de signer les décisions relevant des attributions de son bureau, Mme H... n'est pas fondée à soutenir que cette délégation entrerait en contradiction avec les dispositions précitées de l'arrêté du 13 janvier 2020 du préfet de la Seine-Maritime relatives à l'organisation des services de la préfecture de la Seine-Maritime.

5. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision attaquée doit être écarté.

6. En deuxième lieu, en application des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les décisions par lesquelles l'autorité administrative refuse, dans l'exercice de ses pouvoirs de police des étrangers, la délivrance d'un titre de séjour doivent être motivées et, à cet égard, comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent leur fondement. En l'espèce, la décision attaquée comporte la mention des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et, notamment, des éléments relatifs à la durée du séjour de Mme H... sur le territoire français, à ses activités associatives en France et à ses liens familiaux dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré d'un défaut de motivation doit être écarté.

7. En troisième lieu, si Mme H... soutient qu'elle n'a pas été mise à même de présenter des observations sur la décision attaquée, elle a présenté une demande de titre de séjour au soutien de laquelle elle a pu faire état de tous les éléments pertinents relatifs à sa situation personnelle. L'autorité administrative n'était pas tenue de lui permettre de présenter des observations spécifiques sur la décision contestée, alors qu'elle ne pouvait ignorer qu'en cas de refus de sa demande de titre de séjour, elle pourrait être obligée de quitter le territoire français et par suite faire l'objet d'une interdiction de retour sur le territoire français en application des dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de son droit à être entendue doit être écarté.

8. En quatrième lieu, si Mme H... soutient qu'aucun récépissé de dépôt d'une demande de titre de séjour ne lui a été délivré et que le délai d'examen de cette demande a été excessif, ces circonstances, invoquées par l'appelante comme constitutives d'une faute, sont toutefois sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. En outre, si Mme H... soutient qu'elle n'a pas été invitée à compléter son dossier et n'a pas été convoquée par les services préfectoraux, sa demande n'a pas été rejetée comme incomplète et elle ne fait état d'aucune circonstance que le préfet de la Seine-Maritime aurait omis de prendre en considération. Par suite, ce moyen tiré d'un vice de procédure doit être écarté.

9. En cinquième lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet de la Seine-Maritime a pris en considération la durée de la présence de Mme H... sur le territoire français, ses liens privés et familiaux en France et dans son pays d'origine ainsi que ses activités associatives bénévoles en France. Par suite, le moyen tiré d'un défaut d'examen de sa situation personnelle doit être écarté.

10. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

11. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au présent litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

12. En l'espèce, si Mme H..., entrée à l'âge de 34 ans en Espagne le 21 octobre 2013 ainsi qu'en atteste le visa de court séjour délivré par les autorités espagnoles, soutient être entrée le même jour en France, les éléments qu'elle produit ne justifient de sa présence sur le territoire français qu'à compter de février 2014. A la suite du rejet de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée le 9 août 2016, Mme H... a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français par un arrêté du 27 février 2017 de la préfète de la Seine-Maritime, confirmé par un jugement n° 1701126 du 13 juillet 2017 du tribunal administratif de Rouen et par un arrêt n° 17DA01510 du 29 décembre 2017 de la présente cour.

13. Il ressort en outre des pièces du dossier que son époux réside en France de manière irrégulière et a fait l'objet de mesures d'éloignement par un arrêté du 27 février 2017 confirmé par un jugement n° 1701125 du 13 juillet 2017 du tribunal administratif de Rouen et par un arrêt n° 17DA01509 du 29 décembre 2017 de la présente cour. Si Mme H... a participé à plusieurs activités associatives, a suivi des cours de langue française et a engagé un traitement médical tendant à remédier à son infertilité, ces circonstances ne suffisent pas à établir que la décision attaquée porterait une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, alors qu'elle n'établit pas avoir rompu tout lien familial dans son pays d'origine.

14. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

15. En septième lieu, aux termes de l'article L. 312-2 : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 ".

16. En l'espèce, dès lors que Mme H... ne satisfait pas les conditions requises pour l'obtention d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi qu'il a été dit au point précédent ou sur le fondement des autres articles mentionnés à l'article L. 312-2 du même code, le préfet de la Seine-Maritime n'était pas tenu de saisir pour avis la commission du titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

17. En huitième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au présent litige : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ".

18. En l'espèce, si Mme H... se prévaut d'une durée de séjour de sept ans sur le territoire français, de l'exercice d'activités associatives en France, de l'engagement en France d'un traitement médical contre l'infertilité et du coût d'un tel traitement dans son pays d'origine, ces circonstances ne suffisent pas à caractériser une considération humanitaire ou un motif exceptionnel justifiant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions citées au point précédent. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

19. En premier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-dessus, les moyens tirés de l'incompétence de la signataire de la décision attaquée, d'un vice de procédure en raison d'un traitement fautif et déloyal de la demande de titre de séjour présentée par Mme H..., de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

20. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée (...) ". En l'espèce, la décision attaquée mentionne avec une précision suffisante les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle mentionne notamment la durée de la présence sur le territoire français de Mme H..., ses activités associatives en France et ses liens familiaux en France et dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré d'un défaut de motivation doit être écarté.

21. En troisième lieu, il résulte de ce qui précède que Mme H... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait été prise sur le fondement d'une décision illégale portant refus d'un titre de séjour.

En ce qui concerne la décision fixant le pays d'éloignement :

22. En premier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-dessus, les moyens tirés d'un vice d'incompétence, d'un défaut de motivation, d'un vice de procédure en raison d'un traitement fautif et déloyal de sa demande de titre de séjour et d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

23. En second lieu, pour les motifs énoncés ci-dessus, Mme H... n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée aurait été prise sur le fondement d'une décision illégale portant obligation de quitter le territoire français. Par suite, ce moyen doit être écarté.

24. Il résulte de ce qui précède que les conclusions présentées à titre incident par Mme H... aux fins d'annulation et, par voie de conséquence, d'injonction doivent en tout état de cause être rejetées.

Sur les conclusions d'appel principal :

En ce qui concerne le moyen accueilli par le tribunal :

25. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au présent litige : " (...) Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. / (...) / Lorsque l'étranger ne faisant pas l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l'autorité administrative prononce une interdiction de retour pour une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

26. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que, pour prononcer à l'encontre de Mme H... une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans, le préfet de la Seine-Maritime s'est fondé sur la durée de son maintien en France de manière irrégulière, sur l'inexécution d'une précédente mesure d'éloignement et sur l'absence de liens personnels, anciens et stables avec la France. Si l'arrêté indique que la date d'entrée en France de Mme H... est " indéterminée ", il mentionne toutefois la date d'entrée en France déclarée par l'intéressée, à savoir le 21 octobre 2013, qui a été prise en compte pour apprécier sa durée de présence irrégulière en France. En outre, alors même que la date de réception de sa demande de titre de séjour, mentionnée dans l'arrêté attaqué, serait matériellement erronée, cette erreur de fait est en tout état de cause sans incidence sur la suffisance de la motivation de l'arrêté attaqué.

27. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen s'est fondé sur l'insuffisance de motivation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour annuler cette décision.

28. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés à l'encontre de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français par Mme H... devant le tribunal administratif de Rouen.

En ce qui concerne les autres moyens dirigés contre la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

29. En premier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-dessus, les moyens tirés de l'incompétence de la signataire de la décision attaquée, de la méconnaissance du droit à être entendu, du défaut d'examen de la situation personnelle de l'intéressée, de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

30. En second lieu, Mme H... soutient que la décision attaquée a été prise sur le fondement d'une décision illégale portant obligation de quitter le territoire français. Pour les motifs énoncés ci-dessous, ce moyen doit être écarté.

31. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé sa décision portant interdiction de retour sur le territoire français.

Sur les frais liés à l'instance :

32. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 visée ci-dessus font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, les sommes que Mme H... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 24 juin 2021 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par Mme H... en première instance sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme H... sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... H... au ministre de l'intérieur et à Me Magali Leroy.

Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 17 mai 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- Mme Corinne Baes-Honoré, présidente,

- M. Stéphane Eustache, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juin 2022.

Le rapporteur,

Signé : S. Eustache

Le président de la 1ère chambre,

Signé : M. F...

La greffière,

Signé : C. Sire

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Christine Sire

N°21DA01587 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21DA01587
Date de la décision : 07/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Stéphane Eustache
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : LEROY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-06-07;21da01587 ?
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