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06/05/2022 | FRANCE | N°21DA00819

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 06 mai 2022, 21DA00819


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel le président de la communauté de communes du Ternois l'a recruté en tant que vacataire pour exercer les fonctions d'animateur musical au sein des collèges de Saint-Pol-sur-Ternoise ou d'Heuchin ainsi que la décision du 4 décembre 2017 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1710828 du 19 février 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devan

t la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 avril et le 5 novembre 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel le président de la communauté de communes du Ternois l'a recruté en tant que vacataire pour exercer les fonctions d'animateur musical au sein des collèges de Saint-Pol-sur-Ternoise ou d'Heuchin ainsi que la décision du 4 décembre 2017 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1710828 du 19 février 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 avril et le 5 novembre 2021, M. A..., représenté par Me François Chéneau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du président de la communauté de communes du Ternois du 11 septembre 2017 et la décision du 4 décembre 2017 ;

3°) de mettre à la charge de la communauté de communes du Ternois la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté du 4 décembre 2017 portant atteinte à ses droits et prérogatives, sa demande était recevable ;

- il était également recevable à demander l'annulation de cette décision puisque les heures de vacation sont moins bien rémunérées que les heures supplémentaires qu'il aurait pu effectuer ;

- les missions qui lui sont confiées par cette décision ne constituent pas des vacations ;

- la jurisprudence interdit à un fonctionnaire d'être recruté par son employeur comme non titulaire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2021 et un mémoire non communiqué enregistré le 29 novembre 2021, la communauté de communes du Ternois, représentée par la société civile professionnelle Manuel Gros, Héloïse Hicter, Audrey d'Halluin et associés, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. A... de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- son recrutement comme vacataire n'a pas été imposé à M. A... ;

- celui-ci demeurait libre de ne pas exécuter son engagement comme vacataire ;

- rien n'interdit qu'une même personne cumule une activité de titulaire et une activité de vacataire ;

- les tâches confiées à M. A... correspondent à des vacations, le volume de ses interventions au collège n'étant pas maîtrisé par la collectivité.

La clôture de l'instruction a été fixée la dernière fois au 30 novembre 2021 à 12 heures par ordonnance du 8 novembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me Robillard pour la communauté de communes du Ternois.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., assistant territorial d'enseignement artistique, occupe plusieurs emplois à temps non complet, chacun pour quelques heures hebdomadaires, dans différentes collectivités dont, depuis le 1er septembre 2011, la communauté de communes du Saint-Polois devenue la communauté de communes du Ternois. L'arrêté contesté du 11 septembre 2017 du président de cette communauté de communes entend le recruter, comme vacataire, pour une nouvelle activité d'animation musicale en collèges, qualifiée de " ponctuelle ", " à caractère discontinu " et " d'accessoire ". Par un recours gracieux du 9 novembre 2017, M. A... a demandé le retrait de cet arrêté, ce que le président a refusé par décision du 4 décembre 2017. M. A... relève appel du jugement du 19 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 11 septembre 2017 et de la décision du 4 décembre 2017.

Sur la régularité du jugement :

2. Le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de M. A... comme irrecevable au motif qu'il n'avait pas intérêt à contester une décision qui lui donnait satisfaction. Or, d'une part, aux termes de l'article L. 242-3 du code des relations entre le public et l'administration : " Sur demande du bénéficiaire de la décision, l'administration est tenue de procéder, selon le cas, à l'abrogation ou au retrait d'une décision créatrice de droits si elle est illégale et si l'abrogation ou le retrait peut intervenir dans le délai de quatre mois suivant l'édiction de la décision ". M. A... avait donc intérêt pour agir contre la décision du 4 décembre 2017 qui rejetait sa demande de retrait de l'arrêté du 11 septembre 2017. D'autre part, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que les conditions d'emploi prévues par cet arrêté, qui le recrute comme vacataire, répondent à une demande de l'intéressé. Sa signature portée sur cet arrêté atteste seulement qu'il en a eu notification. A supposer même que, malgré ce recrutement par arrêté, la collectivité ait, comme elle le soutient, conclu un contrat de recrutement, les conditions d'emploi de M. A... restent, en tout état de cause, soumises aux dispositions législatives et réglementaires régissant l'emploi des agents publics. Par ailleurs, la circonstance que l'intéressé ait exécuté les missions ainsi confiées ne signifie pas pour autant qu'il en ait accepté les conditions, comme en témoignent d'ailleurs ses recours, alors que son recrutement comme vacataire était susceptible de le priver, pour le volume horaire ainsi effectué, des avantages et garanties liés à un emploi en tant que titulaire. Par suite, M. A... avait intérêt à demander l'annulation de l'arrêté du 11 septembre 2017. Dès lors, il est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande comme irrecevable. Le jugement du 19 février 2021 doit donc être annulé et il y a lieu, pour la cour, de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Lille.

Sur la légalité de l'arrêté du 11 septembre 2017 et de la décision du 4 décembre 2017 :

3. Les missions confiées à M. A... l'ont été dans le cadre d'un dispositif pédagogique dénommé " orchestre au collège ", dont il n'apparaît pas qu'il avait une durée limitée, même si sa pérennité était subordonnée à l'accord des collectivités partenaires. Les interventions, quoique soumises au temps scolaire, présentaient un caractère régulier. Au surplus, l'intéressé souligne, sans être sérieusement contredit, qu'elles se sont traduites depuis lors par quatre heures hebdomadaires d'activité. Ces missions ne sauraient donc être qualifiées de purement ponctuelles pour l'exécution d'actes déterminés, mais satisfont à un besoin permanent et régulier, quoique pour un temps incomplet et une durée de travail variable. M. A... ne pouvait donc pas être employé en tant que vacataire pour assurer ces missions. Il est ainsi fondé à soutenir que la décision du 11 septembre 2017 est illégale et qu'elle doit être annulée, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen soulevé. Par suite, le rejet de son recours gracieux contre cette décision doit également être annulé.

Sur les frais liés aux dépens :

4. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée à ce titre par la communauté de communes du Ternois. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cet établissement public, la somme de 2 000 euros, à verser à M. A... sur le même fondement.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 19 février 2021 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 11 septembre 2017 du président de la communauté de communes du Ternois recrutant M. A... comme vacataire et la décision du 4 décembre 2017 sont annulés.

Article 3 : La communauté de communes du Ternois versera la somme de 2 000 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la communauté de communes du Ternois présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A... et à la communauté de communes du Ternois.

Délibéré après l'audience publique du 24 mars 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Denis Perrin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 mai 2022.

Le rapporteur,

Signé : D. PerrinLa présidente de chambre,

Signé : G. BorotLa greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au préfet du Pas-de-Calais en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

C. Huls-Carlier

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N°21DA00819

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA00819
Date de la décision : 06/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12-01 Fonctionnaires et agents publics. - Agents contractuels et temporaires. - Nature du contrat.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SCP GROS - HICTER - D'HALLUIN ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-05-06;21da00819 ?
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