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06/05/2022 | FRANCE | N°21DA00567

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 06 mai 2022, 21DA00567


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le syndicat mixte pour l'étude et le traitement des ordures ménagères (SETOM) de l'Eure à lui verser une somme de 91 043,81 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 11 mai 2018, au titre de ses salaires impayés pour la période allant de mai 2014 à août 2017, de condamner le SETOM de l'Eure à lui verser une somme de 40 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la même date, au titre des trou

bles dans les conditions d'existence et de son préjudice moral, de condamner le SET...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le syndicat mixte pour l'étude et le traitement des ordures ménagères (SETOM) de l'Eure à lui verser une somme de 91 043,81 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 11 mai 2018, au titre de ses salaires impayés pour la période allant de mai 2014 à août 2017, de condamner le SETOM de l'Eure à lui verser une somme de 40 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la même date, au titre des troubles dans les conditions d'existence et de son préjudice moral, de condamner le SETOM de l'Eure à lui verser une somme de 5 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la même date, au titre de la régularisation illégale de ses salaires et de mettre à la charge du SETOM de l'Eure la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1802634 du 2 octobre 2020 le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes et rejeté les conclusions du syndicat mixte pour l'étude et le traitement des ordures ménagères de l'Eure présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 mars 2021, M. A... B..., représenté par Me Matrand, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner le syndicat mixte pour l'étude et le traitement des ordures ménagères (SETOM) de l'Eure à lui verser une somme de 91 043,81 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 11 mai 2018, au titre de ses salaires impayés pour la période allant de mai 2014 à août 2017 ;

3°) de condamner le SETOM de l'Eure à lui verser une somme de 40 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la même date, au titre des troubles dans les conditions d'existence et de son préjudice moral ;

4°) de condamner le SETOM de l'Eure à lui verser une somme de 5 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la même date, au titre du préjudice matériel complémentaire ;

5°) de mettre à la charge du SETOM de l'Eure la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé dès lors que le tribunal administratif n'a pas expliqué les motifs pour lesquels il n'a pas tenu compte du fait que son contrat de travail conclu avec Ecotri en décembre 2000 avait été repris par le SETOM de l'Eure le 1er mars 2014 ;

- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 9 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le SETOM de l'Eure devait lui verser, compte tenu de son ancienneté, son plein traitement entre mai 2014 et juillet 2015 et son demi-traitement entre août 2015 et juillet 2017 ;

- en ne le faisant pas le SETOM de l'Eure a ainsi commis plusieurs fautes dans la gestion administrative de son dossier de nature à engager sa responsabilité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mai 2021, le SETOM de l'Eure, représenté par Me Carrère, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable car tardive ;

- son ancienneté au sein de la société Ecotri à compter du 13 décembre 2000 a été reprise par le SETOM de l'Eure lors de son embauche.

Par une décision du 7 janvier 2021, le bénéfice de l'aide juridictionnelle a été refusé à M. B....

Par ordonnance du l8 janvier 2022 a date de clôture de l'instruction a été fixée au 10 février 2022 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président assesseur,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me Bouchard représentant M. A... B....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B... a été recruté à compter du 1er mars 2014 par le syndicat mixte pour l'étude et le traitement des ordures ménagères (SETOM) de l'Eure, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, à la suite de la reprise de l'activité d'exploitation du centre de tri des emballages ménagers qui était antérieurement confiée à la société. Il a été victime d'un accident de service le 5 mai 2014. Après plusieurs avis du comité médical, le SETOM de l'Eure a, par un arrêté du 15 septembre 2017, placé rétroactivement l'intéressé en congé de grave maladie du 31 décembre 2015 au 29 août 2017. Par un arrêté du 14 mars 2018, pris après un nouvel avis du comité médical, le SETOM de l'Eure a renouvelé le congé de grave maladie pour une période de neuf mois. Ce congé a été finalement prolongé jusqu'au 30 décembre 2018. A l'issue de son congé de grave maladie, M. B... a été réintégré par le SETOM de l'Eure, à temps partiel pour motif thérapeutique à raison de 50 % du temps complet, par un arrêté du 31 décembre 2018. M. B... a demandé la condamnation du SETOM de l'Eure à lui verser les sommes de 91 043,81 euros au titre d'arriérés de traitement, de 5 000 euros au titre des préjudices matériels qu'il estime avoir subis et de 40 000 euros au titre de troubles dans les conditions d'existence. Par un jugement du 2 octobre 2020 le tribunal administratif de Rouen a notamment rejeté ses demandes. M. B... relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que celui-ci cite en son point 2 les articles 8 et 9 du décret du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale. Le tribunal administratif de Rouen a jugé que M. B... avait perçu son plein traitement pendant trois mois jusqu'au mois d'août 2014, conformément à l'article 9 de ce décret. Il n'a donc pas omis de répondre au moyen tiré de ce que les dispositions de l'article 9 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 avait été méconnues. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué est irrégulier comme entaché d'une omission à statuer doit être écarté.

3. Le tribunal administratif a relevé qu'à la suite de son accident de service, M. B... avait perçu, en tant qu'assuré social relevant du régime général de la sécurité sociale, les indemnités journalières de la caisse primaire d'assurance maladie jusqu'au 31 décembre 2015 puis, dans le cadre de son congé de grave maladie du 31 décembre 2015 au 30 décembre 2018, avait été rémunéré à plein traitement jusqu'au 31 décembre 2016 et à demi-traitement à compter du 1er janvier 2017. Ainsi, compte tenu de ses années de services, le tribunal a indiqué qu'il avait perçu son plein traitement pendant une durée totale de quinze mois et son demi-traitement durant vingt-quatre mois. Le tribunal en a ainsi déduit que le SETOM de l'Eure n'avait commis aucune faute en lien avec la reprise de son ancienneté à la suite du transfert de l'activité d'exploitation du centre de tri des emballages ménagers. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement est insuffisamment motivé en ce qu'il n'a pas tenu compte du fait que le contrat de travail de l'intéressé conclu avec la société Ecotri en décembre 2000 avait été repris par le SETOM de l'Eure le 1er mars 2014 manque en fait et doit être écarté comme tel.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Aux termes de l'article L. 1224-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert de cette entité, reprise par une personne publique dans le cadre d'un service public administratif, il appartient à cette personne publique de proposer à ces salariés un contrat de droit public, à durée déterminée ou indéterminée selon la nature du contrat dont ils sont titulaires. / Sauf disposition légale ou conditions générales de rémunération et d'emploi des agents non titulaires de la personne publique contraires, le contrat qu'elle propose reprend les clauses substantielles du contrat dont les salariés sont titulaires, en particulier celles qui concernent la rémunération. / En cas de refus des salariés d'accepter le contrat proposé, leur contrat prend fin de plein droit. La personne publique applique les dispositions relatives aux agents licenciés prévues par le droit du travail et par leur contrat ". Aux termes de l'article 8 du décret du 15 février 1988 : " L'agent non titulaire en activité employé de manière continue et comptant au moins trois années de services, atteint d'une affection dûment constatée, le mettant dans l'impossibilité d'exercer son activité, nécessitant un traitement et des soins prolongés et présentant un caractère invalidant et de gravité confirmée bénéficie d'un congé de grave maladie pendant une période maximale de trois ans. / Dans cette situation, l'intéressé conserve l'intégralité de son traitement pendant une durée de douze mois. Le traitement est réduit de moitié pendant les vingt-quatre mois suivants. / En vue de l'octroi de ce congé, l'intéressé est soumis à l'examen d'un spécialiste agréé compétent pour l'affection en cause. La décision d'octroi est prise par le chef de service sur avis émis par le comité médical saisi du dossier. / La composition du comité médical et la procédure suivie sont celles prévues par la réglementation en vigueur pour les fonctionnaires titulaires. / Le congé pour grave maladie peut être accordé par période de trois à six mois. L'agent qui a épuisé un congé de grave maladie ne peut bénéficier d'un autre congé de cette nature s'il n'a repris auparavant l'exercice de ses fonctions pendant un an ". L'article 9 du même décret dispose : " L'agent non titulaire en activité bénéficie en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle d'un congé pendant toute la période d'incapacité de travail jusqu'à la guérison complète, la consolidation de la blessure ou le décès. / L'intéressé a droit au versement par l'autorité territoriale de son plein traitement dans les limites suivantes : (...) / 3. Pendant trois mois après trois ans de services ".

En ce qui concerne la reprise d'ancienneté :

5. Il résulte de l'instruction que M. B... a été recruté par le SETOM de l'Eure le 1er mars 2014 à l'indice majoré 454 correspondant à l'échelon 9 de la grille indiciaire d'un agent de catégorie C. Cet échelon 9 correspondait à son ancienneté acquise de quatorze années au sein de la société Ecotri dès lors que cet échelon ne pouvait être attribué qu'à des fonctionnaires cumulant une ancienneté minimum de treize ans et huit mois. Aussi, l'ancienneté de M. B... au sein de cette société à compter du 13 décembre 2000 a été reprise par le SETOM de l'Eure lors de son embauche. Par suite, le SETOM de l'Eure n'a commis aucune faute dans l'application des dispositions de l'article L. 1224-3 du code du travail s'agissant de la reprise d'ancienneté de l'intéressé.

En ce qui concerne les droits à rémunération au titre du congé pour accident de service :

6. Après son accident du 5 mai 2014, M. B... a été placé en congé pour accident de service du 5 mai 2014 au 30 décembre 2015, date de la consolidation de ses blessures. Il cumulait, à la date de son accident de service, plus de trois ans d'ancienneté à la suite de la reprise de son contrat de travail avec la société Ecotri. En application de l'article 9 du décret du 15 février 1988, il a bénéficié du maintien de son plein traitement pendant trois mois du 5 mai 2014 au 5 août 2014. Postérieurement à cette période, M. B... ne disposait d'aucun droit à percevoir une quelconque rémunération de la part du SETOM de l'Eure au titre de son congé pour accident de service. Mais en sa qualité d'assuré du régime général de la sécurité sociale, il pouvait prétendre au versement d'indemnités journalières par la sécurité sociale jusqu'au 30 décembre 2015 date de consolidation de ses blessures. Le SETOM de l'Eure n'a ainsi commis aucune faute s'agissant des droits à rémunération du requérant au titre du congé pour accident de service.

En ce qui concerne la gestion de la situation du requérant à la suite des avis du comité médical :

7. Le comité médical le 7 juillet 2017 a émis un avis favorable à l'octroi d'un congé de grave maladie du 31 décembre 2015 au 1er avril 2016 puis, le 5 janvier 2018, par un autre avis, il a déclaré M. B... inapte totalement et définitivement à son emploi d'agent d'exploitation et a renouvelé son congé de grave maladie du 29 août 2017 au 29 mai 2018. Conformément aux dispositions de l'article 8 du décret du 15 février 1988 précité, par un arrêté du 15 septembre 2017, le SETOM de l'Eure, a en conséquence placé rétroactivement M. B... en congé pour grave maladie du 31 décembre 2015 au 29 août 2017, avec maintien à plein traitement du 31 décembre 2015 au 31 décembre 2016 puis à demi-traitement du 1er janvier 2017 au 29 août 2017. Par un arrêté du 14 mars 2018, le SETOM de l'Eure a prolongé le congé pour grave maladie jusqu'au 28 mai 2018 en plaçant M. B... à demi-traitement sur cette période. Il a ainsi régularisé la situation de l'intéressé. M. B... n'établit ni même n'allègue avoir demandé au SETOM de l'Eure le bénéfice d'un congé de grave maladie pour une période antérieure au 31 décembre 2015 date de consolidation de son état. Par ailleurs, la procédure de maintien en congé de grave maladie n'ayant pu intervenir avant que le comité médical ait été consulté et qu'il ait rendu ses avis, compte tenu des dates auxquelles s'est réuni le comité médical et auxquelles il a rendu ses avis, le SETOM de l'Eure ne peut être regardé comme ayant agi avec un retard fautif. Par suite, il ne résulte pas de l'instruction que le SETOM de l'Eure aurait commis une faute dans la régularisation de sa situation administrative et financière.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le SETOM de l'Eure n'a pas commis de faute dans la gestion de la situation administrative de M. B.... L'erreur dans le calcul de son traitement ou de prétendues " manipulations comptables " invoquées par l'appelant ne sont pas plus établies. Enfin, le SETOM de l'Eure a saisi la cellule aménagement et reclassement du centre de gestion de la fonction publique territoriale, un bilan de compétences ayant été réalisé pour faciliter son reclassement et envisager des formations. Dans ces conditions, si M. B... fait valoir qu'il a contracté des dettes et subi deux procédures d'expulsions locatives, en l'absence de toute faute de nature à engager la responsabilité du SETOM de l'Eure, il ne peut prétendre au versement des indemnités qu'il réclame.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin

de non-recevoir opposée par le SETOM de l'Eure que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 2 octobre 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes. Ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence. Enfin, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme demandée par le SETOM de l'Eure au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du syndicat mixte pour l'étude et le traitement des ordures ménagères de l'Eure présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au syndicat mixte pour l'étude et le traitement des ordures ménagères de l'Eure.

Délibéré après l'audience publique du 7 avril 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Denis Perrin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 mai 2022.

Le président-rapporteur,

Signé : M. C...La présidente de chambre,

Signé : G. Borot

La greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au préfet de l'Eure en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Huls-Carlier

2

N°21DA00567


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA00567
Date de la décision : 06/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-01-07-02 Procédure. - Introduction de l'instance. - Délais. - Point de départ des délais.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SCP SEBAN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 24/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-05-06;21da00567 ?
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