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14/04/2022 | FRANCE | N°19DA02748

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 14 avril 2022, 19DA02748


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer une réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'années 2010.

Par un jugement n° 1800214 du 15 octobre 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2019, M. et Mme C..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce ju

gement ;

2°) de prononcer la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer une réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'années 2010.

Par un jugement n° 1800214 du 15 octobre 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2019, M. et Mme C..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'années 2010, en tenant compte du bénéfice de l'abattement prévu à l'article 150-0 D ter, pour la fraction de la plus-value correspondant aux 750 titres qu'ils ont cédés le 17 décembre 2010.

Ils soutiennent qu'ils sont fondés à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe n° 146 de l'instruction du 22 janvier 2007 publiée sous la référence 5 C-1-07, dont les prévisions ont été reprises au paragraphe n° 270 de la doctrine publiée au bulletin officiel des finances publiques sous la référence BOI-RPPM-PVBMI-20-20-20-40 n° 270, ainsi que du rescrit n° 2009/05 FP du 3 février 2009, qui admettent que, lorsqu'au moins un des cofondateurs cédants remplit l'ensemble des conditions pour bénéficier du dispositif prévu à l'article 150-0 D ter du code général des impôts, les autres co-fondateurs cédants peuvent bénéficier de l'application du régime transitoire, prévu par les dispositions de l'article 150-0 D ter du code général des impôts, en vertu duquel les gains nets que les dirigeants de petites et moyennes entreprises retirent de la cession, à titre onéreux, des titres de leur société, lors de leur départ en retraite, bénéficient de l'abattement pour durée de détention prévu à l'article 150-0 D bis du même code en ce qui concerne les cessions réalisées par les co-fondateurs ; en effet, la situation qui était celle de M. C... et de ses associés à la date de la cession répond aux conditions posées par ces extraits de doctrine ; or, ces extraits de la doctrine administrative, qui ne peuvent s'interpréter et doivent être appréhendés strictement, admettent les cessions échelonnées dans le temps ; en outre, la cession, au titre de laquelle l'administration a entendu remettre en cause le bénéfice de cet avantage fiscal, a été réalisée par M. C... le 17 décembre 2010, c'est-à-dire conjointement à la première des cessions échelonnées effectuées par son associé co-fondateur, qui satisfaisait aux conditions requises par l'article 150-0 D ter du code général des impôts ; en outre, par le rescrit n° 2009/05 FP du 3 février 2009, l'administration a admis qu'en cas de cession conjointe de titres par plusieurs cofondateurs, la condition de détention d'une participation d'au moins 25 % est appréciée en tenant compte des participations de l'ensemble des cofondateurs cédants même si ces derniers ne respectent pas les conditions fixées par l'article 150-0 D ter du code général des impôts.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions de la requête de M. et Mme C... doivent être regardées comme tendant à la décharge, à concurrence de 228 652 euros en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 ;

- il n'est pas contesté que M. C... n'a jamais détenu, dans la SELARL D..., une participation d'au moins 25 %, puisqu'il détenait, à la constitution de cette société, 22,60 % des parts de celle-ci, c'est-à-dire 1 500 parts sur les 6 637 constituant le capital social, et qu'il ne détenait plus au 17 décembre 2010, à la suite des cessions qu'il a effectuées les 8 décembre 2009 et 8 janvier 2010, que 11,30 % du capital social, à savoir 750 parts sur les 6 637 parts constituant ce capital ; il n'est pas davantage contesté que M. C... n'a fait valoir ses droits à la retraite qu'au cours des mois de juillet/août 2013, de sorte qu'il n'a pas cessé toute fonction dans la société considérée, ni fait valoir ses droits à la retraite dans les vingt-quatre mois suivant ou précédant la cession du 17 décembre 2010 ; M. C... ne remplissait donc pas ces deux conditions, auxquelles les dispositions de l'article 150-0 D ter du code général des impôts subordonnent le bénéfice de l'abattement ou de l'exonération qu'elles prévoient ; M. et Mme C... ne sont, par suite, pas fondés, sur le terrain de la loi fiscale, à contester les suppléments d'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis en conséquence de la remise en cause, par l'administration, du bénéfice de ce régime, sous lequel ils avaient entendu placer la cession de titres effectuée le 17 décembre 2010 ;

- la garantie prévue à l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ne peut être invoquée que si le contribuable satisfait à l'ensemble des conditions d'application de l'interprétation admise par l'administration ; or, la situation de M. C... ne répond pas aux conditions de la doctrine, interprétée littéralement, que les appelants invoquent, à savoir le paragraphe n° 270 de la doctrine publiée au bulletin officiel des finances publiques sous la référence BOI-RPPM-PVBMI-20-20-20-40, qui reprend, d'une part, le paragraphe n° 146 de l'instruction du 22 janvier 2007 publiée sous la référence 5 C-1-07 et, d'autre part, le rescrit n° 2009/05 du 3 février 2009 FP ; en effet, contrairement à ce que soutiennent les appelants, il résulte de cette doctrine que l'existence de cessions échelonnées n'est envisagée qu'à l'égard du cofondateur qui remplit l'ensemble des conditions prévues à l'article 150-0 D ter du code général des impôts et, notamment, celle relative au départ à la retraite dans un délai de deux ans, ce qui n'est pas le cas de M. C... ; en outre, la doctrine administrative précise que les cessions effectuées par les autres cofondateurs, c'est-à-dire par ceux qui ne remplissent pas les conditions posées à l'article 150-0 D ter du code général des impôts, doivent intervenir à la date de la première des cessions échelonnées effectuées par le cofondateur remplissant ces conditions, et que les cessions, effectuées à la même date, doivent porter sur plus de 25 % des droits sociaux ; ces deux conditions doivent être remplies à la date de la cession conjointe, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, dès lors, en premier lieu, que M. C... n'a cédé que 750 titres le 17 décembre 2010, les 750 autres parts qu'il détenait ayant été cédées antérieurement, à concurrence de deux parts le 8 décembre 2009 et de 748 parts le 8 janvier 2010, les plus-values correspondantes n'ayant, au demeurant, pas été soumises à l'impôt, et, en second lieu, que les cessions réalisées conjointement par M. C... et un autre associé cofondateur le 17 décembre 2010 ont porté, non pas sur plus de 25 % des droits de vote, mais seulement sur 12,05 %, c'est-à-dire sur 800 des 6 637 titres composant le capital social ; en conséquence, M. et Mme C... ne peuvent, sur le terrain de la doctrine administrative, revendiquer le bénéfice du régime d'exonération sous lequel ils avaient entendu placer la plus-value issue de la cession de titres intervenue le 17 décembre 2010.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C... a créé, le 21 octobre 2002, avec deux autres associés co-fondateurs, la société A..., qui est devenue, à compter du 15 octobre 2005, la société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Bio Seine. M. C... et l'un des deux autres co-fondateurs possédaient alors, chacun, 1 500 parts sur les 6 637 parts constituant le capital de cette société, ce qui les rendaient détenteurs, ensemble, de 45,20 % du capital. Cet autre co-fondateur, qui a fait valoir ses droits à la retraite à compter du 1er juillet 2012, a cédé, de façon échelonnée au cours de la période couvrant les années 2010 à 2012, les parts dont il était ainsi le détenteur, la première de ces cessions, portant sur 50 parts, étant intervenue le 17 décembre 2010. Il a cédé, ensuite, en deux autres opérations successives, les 6 janvier 2011 et 23 mai 2012, le solde de ses parts dans la SELARL Bio Seine. M. C..., qui envisageait de prendre, à son tour, sa retraite, a, lui aussi, cédé, de façon échelonnée entre 2009 et 2010, les 1 500 parts qu'il détenait dans le capital de la SELARL Bio Seine. La première cession, portant sur 2 parts, est ainsi intervenue le 8 décembre 2009, la deuxième, portant sur 748 parts, le 8 janvier 2010 et la troisième et dernière cession, portant sur 750 parts, est intervenue le 17 décembre 2010. M. C... a cessé son activité en novembre 2011 et fait valoir ses droits à la retraite à compter de l'été 2013. Au moment de souscrire leur déclaration de revenus de l'année 2010, M. et Mme C... ont considéré que la plus-value réalisée par eux au titre des cessions effectuées par M. C... au cours de l'année 2010 pouvait bénéficier de l'abattement prévu par les dispositions de l'article 150-0 D ter du code général des impôts. Compte-tenu de la durée de détention des titres cédés, l'application de ces dispositions a eu pour effet d'entraîner l'exonération totale, à l'impôt sur le revenu, de cette plus-value qui, par ailleurs, a été soumise aux contributions sociales. A la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration a entendu remettre en cause le bénéfice de ce régime d'exonération, ce dont elle a informé M. et Mme C..., par une proposition de rectification qu'elle leur a adressée le 10 décembre 2013. Le service a, en effet, estimé que la condition relative à la détention, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession, d'une participation substantielle d'au moins 25 % des droits de vote, prévue au b du 2° du I de l'article 150-0 D ter du code général des impôts, n'était pas remplie, puisque M. C... ne détenait que 22,57 % des titres à cette période, à savoir 1 498 parts sur un total de 6 637. Le service a retenu, en outre, que la condition requise par le c du 2° du I du même article n'était pas respectée, M. C... n'ayant pas fait valoir ses droits à la retraite dans les deux années suivant ou précédant la cession.

2. Les observations formulées par M. et Mme C... n'ayant pas amené l'administration à revoir sa position, ni les entretiens qui leur ont été accordés par le supérieur hiérarchique du vérificateur puis par l'interlocutrice fiscale départementale, les suppléments d'impôt sur le revenu résultant, au titre de l'année 2010, des rectifications notifiées ont été mis en recouvrement le 30 avril 2015, pour un montant, en droits et pénalités, de 445 194 euros. M. et Mme C..., ayant présenté une réclamation à laquelle l'administration n'a pas apporté de réponse expresse, ont porté le litige devant le tribunal administratif de Rouen, en lui demandant de prononcer une réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'années 2010. Ils relèvent appel du jugement du 15 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande.

Sur l'application de la loi fiscale :

3. En vertu du 1 du I de l'article 150-0 D bis du code général des impôts, les gains nets retirés des cessions à titre onéreux d'actions, de parts de sociétés ou de droits démembrés portant sur ces actions ou parts sont réduits d'un abattement d'un tiers pour chaque année de détention au-delà de la cinquième, lorsque certaines conditions, prévues au II du même article, sont remplies. En outre, aux termes du I de l'article 150-0 D ter du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " L'abattement prévu à l'article 150-0 D bis s'applique (...) aux gains nets réalisés lors de la cession à titre onéreux d'actions, de parts ou de droits démembrés portant sur ces actions ou parts, acquis ou souscrits avant le 1er janvier 2006, si les conditions suivantes sont remplies : / 1° La cession porte sur l'intégralité des actions, parts ou droits détenus par le cédant dans la société dont les titres ou droits sont cédés ou sur plus de 50 % des droits de vote ou, en cas de la seule détention de l'usufruit, sur plus de 50 % des droits dans les bénéfices sociaux de cette société ; / 2° Le cédant doit : / (...) / b) Avoir détenu directement ou par personne interposée ou par l'intermédiaire de son conjoint ou de leurs ascendants ou descendants ou de leurs frères et sœurs, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession, au moins 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société dont les titres ou droits sont cédés ; / c) Cesser toute fonction dans la société dont les titres ou droits sont cédés et faire valoir ses droits à la retraite dans les deux années suivant ou précédant la cession ; / (...) ".

4. Il résulte de l'instruction que M. C..., qui s'est vu attribuer, lors de la création de la SELARL Bio Seine, 1 500 parts sur les 6 637 parts constituant le capital de cette société, de sorte qu'il possédait 22,60 % de ce capital, ne détenait plus, après les cessions qu'il avait effectuées les 8 décembre 2009 et 8 janvier 2010, lesquelles portaient respectivement sur 2, puis 748 des parts en sa possession, que 11,30 % de ce capital, à savoir 750 parts sur 6 637 parts, et donc des droits qui y sont attachés. Enfin, comme il a été dit au point 1, M. C... a cédé le 17 décembre 2010 les 750 dernières parts qu'il détenait. Ainsi, au 31 décembre 2010, date à laquelle doit être apprécié le respect, par le contribuable, des conditions prévues par les dispositions précitées du I de l'article 150-0 D ter du code général des impôts en ce qui concerne les cessions de droits sociaux intervenues en 2010, M. C... ne satisfaisait pas, ce qu'il ne conteste d'ailleurs pas, à la condition, prévue par les dispositions précitées du b) du 2° du I de l'article 150-0 D ter du code général des impôts et au respect de laquelle le bénéfice de l'abattement prévu à l'article 150-0 D bis de ce code est subordonné, tenant à la détention continue par le contribuable, pendant les cinq années précédant la cession de l'intégralité de ses titres, d'au moins 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société dont les titres ou droits sont cédés. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'apprécier si M. C... satisfaisait aux autres conditions fixées par les dispositions du I de l'article 150-0 D ter du code général des impôts, notamment à celle, prévue au c) du 2° de ce I, tenant à avoir cessé toute fonction dans la société dont les titres ou droits sont cédés et à avoir fait valoir ses droits à la retraite dans les deux années suivant ou précédant la cession, M. et Mme C... ne sont pas fondés, sur le terrain de la loi fiscale, à soutenir que le bénéfice de l'abattement sous lequel ils avaient placé la plus-value générée par les cessions effectuées en 2010 par M. C... a été remis en cause à tort par l'administration.

Sur l'interprétation administrative de la loi fiscale :

5. M. et Mme C... invoquent, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les énonciations du paragraphe n° 270 de la doctrine publiée le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des finances publiques sous la référence BOI-RPPM-PVBMI-20-20-20-40, qui reprennent, d'une part, celles du paragraphe n° 146 de l'instruction du 22 janvier 2007 publiée sous la référence 5 C-1-07 et, d'autre part, les prévisions du rescrit n° 2009/05 FP du 3 février 2009.

6. Aux termes du paragraphe n°270 ainsi invoqué : " Lorsque le capital de la société dont les titres ou droits sont cédés est détenu par plusieurs co-fondateurs, il est admis que les dispositions de l'article 150-0 D ter du code général des impôts s'appliquent aux gains nets de cession de titres ou droits de sociétés réalisés par les actionnaires ou associés co-fondateurs, lorsque les conditions suivantes sont remplies : / - les actionnaires ou associés cédants (dénommés ci-après co-fondateurs) doivent avoir été présents dans le capital de la société dont les titres sont cédés depuis sa constitution et de manière continue jusqu'à la cession ; / - l'ensemble des conditions prévues à l'article 150-0 D ter du code général des impôts est rempli par l'un au moins des cédants co-fondateurs ; / - les cessions réalisées par les autres co-fondateurs doivent porter sur l'intégralité des titres ou droits qu'ils détiennent dans la société concernée. Lorsque les autres co-fondateurs détiennent les titres de la société par l'intermédiaire d'une personne interposée, cette dernière doit céder un nombre de titres ou droits correspondant au pourcentage de détention indirecte de cette société par les autres co-fondateurs ; / - les cessions réalisées par l'ensemble des co-fondateurs interviennent à la même date et doivent porter sur plus de 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société concernée. Dans l'hypothèse où le ou les co-fondateurs cédants qui remplissent les conditions relatives au cédant énoncées dans la présente sous-section procèdent à des cessions échelonnées (dans les conditions du BOI-RPPMPVBMI-20-20-20-30), les cessions réalisées par les autres co-fondateurs interviennent à la même date que celle de la première des cessions échelonnées. / - en cas de cession à une entreprise, les co-fondateurs qui ne remplissent pas les conditions relatives au cédant prévues à la présente sous-section ne doivent pas détenir, directement ou indirectement, de participation (droits de vote ou droits financiers) dans la société cessionnaire. ".

7. Les énonciations précitées admettent que, lorsque le capital de la société dont les titres ou droits sont cédés est détenu par plusieurs co-fondateurs dont l'un au moins satisfait aux conditions auxquelles l'article 150-0 D du code général des impôts subordonne le bénéfice de l'abattement qu'il prévoit, cet avantage bénéficie aussi aux autres associés co-fondateurs qui ne rempliraient pas ces conditions, mais subordonnent cette tolérance à plusieurs autres conditions. Au nombre de ces autres conditions, qui ne peuvent être interprétées mais doivent être lues strictement, figure notamment celle tenant à ce que les cessions réalisées par l'ensemble des co-fondateurs interviennent à la même date et portent sur plus de 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société concernée.

8. Si M. C... et un autre associé co-fondateur de la SELARL Bio Seine ont tous deux cédé, le 17 décembre 2010, des parts qu'ils détenaient dans le capital de cette société, il est constant que ces cessions, si elles sont intervenues à la même date, ont porté respectivement sur 750 parts et sur 50 parts, de sorte qu'elles ont concerné, ensemble, 800 des 6 637 parts composant le capital social, c'est-à-dire 12,05 % de ce capital. En outre, il est constant que les intéressés ne se sont pas livré à d'autres cessions coordonnées. Il suit de là que la condition tenant à ce que les cessions coordonnées effectuées par des associés co-fondateurs portent sur plus de 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société concernée n'est pas satisfaite. Dans ces conditions, et à supposer même que, comme le soutiennent les appelants, M. C... satisferait aux autres conditions posées par l'extrait de doctrine invoqué, notamment à celle tenant à ce qu'en cas de cession échelonnée effectuée par un associé co-fondateur remplissant les conditions imposées au cédant par cette doctrine, les cessions réalisées par les autres co-fondateurs interviennent à la même date que celle de la première des cessions échelonnées, M. et Mme C... ne sont pas fondés, sur le terrain de l'interprétation administrative de la loi fiscale, à soutenir que le bénéfice de l'abattement sous lequel ils avaient placé la plus-value générée par les cessions effectuées en 2010 par M. C... aurait été remis en cause à tort par l'administration.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande. Les conclusions tendant à la décharge partielle des impositions en litige doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 31 mars 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 avril 2022.

Le rapporteur,

Signé : J.-F. PapinLe président de chambre,

Signé : C. Heu

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Nathalie Roméro

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No19DA02748

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA02748
Date de la décision : 14/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Textes fiscaux - Opposabilité des interprétations administratives (art - L - 80 A du livre des procédures fiscales) - Absence.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Plus-values de cession de droits sociaux - boni de liquidation.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : ASSOCIATION D'AVOCATS CALIFANO BAREGE

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-04-14;19da02748 ?
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