Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen, par une première requête, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 16 juillet 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Il avait également demandé d'enjoindre à l'autorité préfectorale de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement et dans cette attente de lui délivrer, sous quarante-huit heures, un récépissé l'autorisant à travailler, ou subsidiairement d'enjoindre sous astreinte au préfet de réexaminer sa situation et dans cette attente de lui délivrer, sous quarante-huit heures, une autorisation provisoire de séjour. Par une deuxième requête, il a demandé au même tribunal d'annuler les arrêtés du 29 octobre 2020 par lesquels le préfet de la Seine-Maritime lui a interdit son retour sur le territoire français pendant une durée d'un an et l'a assigné à résidence. Il a enfin demandé qu'il soit enjoint au préfet de supprimer le signalement aux fins de non-admission et de lui délivrer un récépissé l'autorisant à travailler dans le délai de quarante-huit heures ou subsidiairement de lui délivrer l'autorisation de travail prévue à l'article R. 561-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un jugement commun nos 2003327-2004249 du 12 janvier 2021, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 16 juillet 2020 ainsi que les arrêtés du 29 octobre 2020 du préfet de la Seine-Maritime. Il a également enjoint au préfet territorialement compétent de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 25 février 2021 sous le n°21DA00447, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter les demandes de M. A....
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II. Par une requête, enregistrée le 25 février 2021 sous le n°21DA00448, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour que soit ordonné le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Rouen du 12 janvier 2021 en tant qu'il annule l'arrêté du 16 juillet 2020 refusant un titre de séjour à M. A..., l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité guinéenne, est entré en France en mars 2017, selon ses déclarations. Le 14 juin 2019, il a demandé un titre de séjour sur le fondement du 2 bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de la Seine-Maritime a rejeté cette demande par arrêté du 16 juillet 2020, portant également obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination. L'autorité préfectorale a ensuite prononcé à son encontre, le 29 octobre 2020, par deux arrêtés distincts, une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an et une assignation à résidence. Saisi par deux requêtes distinctes, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 16 juillet 2020 ainsi que les arrêtés du 29 octobre 2020 du préfet de la Seine-Maritime. Il a également enjoint au préfet territorialement compétent de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement. Par une première requête, le préfet de la Seine-Maritime relève appel de ce jugement du 12 janvier 2021. Par une seconde requête, il demande que soit ordonné le sursis à exécution de ce même jugement.
Sur la jonction :
2. Les requêtes, enregistrées sous les nos21DA00447 et 21DA00448, tendent respectivement à l'annulation et au sursis à exécution du même jugement. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur la régularité du jugement :
3. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Le préfet ne peut donc pas utilement faire valoir que les premiers juges se seraient fondés sur des faits qui ne correspondent pas à la situation de M. A... pour contester la régularité du jugement.
Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif de Rouen :
4. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée ; (...) ". Le juge de l'excès de pouvoir exerce un entier contrôle sur les motifs de refus de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 2° bis du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. Aux termes de l'article 375-3 du code civil : " Si la protection de l'enfant l'exige, le juge des enfants peut décider de le confier : / (...) / 3° A un service départemental de l'aide sociale à l'enfance ; / (...) " et aux termes de l'article L. 223-2 du code de l'action sociale et des familles : " Sauf si un enfant est confié au service par décision judiciaire ou s'il s'agit de prestations en espèces, aucune décision sur le principe ou les modalités de l'admission dans le service de l'aide sociale à l'enfance ne peut être prise sans l'accord écrit des représentants légaux ou du représentant légal du mineur ou du bénéficiaire lui-même s'il est mineur émancipé. / En cas d'urgence et lorsque le représentant légal du mineur est dans l'impossibilité de donner son accord, l'enfant est recueilli provisoirement par le service qui en avise immédiatement le procureur de la République. / (...) / Si, dans le cas prévu au deuxième alinéa du présent article, l'enfant n'a pas pu être remis à sa famille ou le représentant légal n'a pas pu ou a refusé de donner son accord dans un délai de cinq jours, le service saisit également l'autorité judiciaire en vue de l'application de l'article 375-5 du code civil. / En cas de danger immédiat ou de suspicion de danger immédiat concernant un mineur ayant abandonné le domicile familial, le service peut, dans le cadre des actions de prévention, pendant une durée maximale de soixante-douze heures, accueillir le mineur, sous réserve d'en informer sans délai les parents, toute autre personne exerçant l'autorité parentale ou le tuteur, ainsi que le procureur de la République. Si au terme de ce délai le retour de l'enfant dans sa famille n'a pas pu être organisé, une procédure d'admission à l'aide sociale à l'enfance ou, à défaut d'accord des parents ou du représentant légal, une saisine de l'autorité judiciaire est engagée ". L'article R. 221-11 du même code dispose que : " I. Le président du conseil départemental du lieu où se trouve une personne se déclarant mineure et privée temporairement ou définitivement de la protection de sa famille met en place un accueil provisoire d'urgence d'une durée de cinq jours, à compter du premier jour de sa prise en charge, selon les conditions prévues aux deuxième et quatrième alinéas de l'article L. 223-2. / (...) / IV. Au terme du délai mentionné au I, ou avant l'expiration de ce délai si l'évaluation a été conduite avant son terme, le président du conseil départemental saisit le procureur de la République en vertu du quatrième alinéa de l'article L. 223-2 et du second alinéa de l'article 375-5 du code civil. En ce cas, l'accueil provisoire d'urgence mentionné au I se prolonge tant que n'intervient pas une décision de l'autorité judiciaire ".
6. En l'espèce, M. A... a fait état lors de son arrivée en France de sa naissance le 28 mars 2001. Il ressort des pièces produites en première instance par M. A... que par arrêté du président du conseil départemental de Loire-Atlantique du 21 mars 2017, il a été admis dans le service d'aide sociale à l'enfance du département du 16 mars 2017 au 20 mars 2017 au titre du recueil provisoire. Le procureur de la République du tribunal de grande instance de Nantes l'a, par ordonnance de placement provisoire du 3 avril 2017, confié à l'aide sociale à l'enfance de la Seine-Maritime. C'est cette dernière date qui doit être retenue pour apprécier l'âge de l'intéressé pour l'application des dispositions du 2 bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, il résulte de ces éléments que M. A... a été confié à l'aide sociale à l'enfance alors qu'il avait seize ans révolus. Il ne pouvait donc pas bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 2 bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, seul fondement de la demande de l'intéressé. Le préfet de la Seine-Maritime est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a annulé pour ce motif sa décision du 16 juillet 2020. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... tant en première instance qu'en appel.
Sur les autres moyens soulevés par M. A... :
7. Si le préfet fait état dans sa décision des liens que M. A... a gardé avec sa famille d'origine, il ne s'est pas fondé sur ce seul critère et a pris en compte, sa date et ses conditions d'entrée en France, la formation suivie, les relations qu'il y a nouées. Par suite, le préfet de la Seine-Maritime qui ne s'est pas fondé exclusivement sur les attaches de M. A... avec son pays d'origine n'a donc commis ni erreur de droit, ni défaut d'examen.
8. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a suivi une formation en alternance de " plâtrier-plaquiste " et a obtenu le certificat d'aptitude professionnelle correspondant en juin 2020. La structure d'accueil qui suit ce jeune a également émis un avis positif sur son insertion. Toutefois, M. A... a gardé des liens avec sa famille restée en Guinée, à savoir son père et ses deux sœurs, puisque c'est son père qui lui a permis d'obtenir les documents d'état-civil nécessaires à sa demande. L'intéressé n'est arrivé en France que depuis deux ans et demi à la date de la décision. S'il bénéficie d'un contrat à durée déterminée d'insertion depuis le 6 juillet 2021, cette circonstance est postérieure à la date de la décision. Par ailleurs, il ne fait valoir aucune relation, ni aucune autre insertion que sa formation et son travail, sur le territoire français. Par suite, le préfet de la Seine-Maritime, qui a également examiné la demande de titre au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, n'a pas porté une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de l'intéressé en lui refusant un titre de séjour par sa décision du 16 juillet 2020. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
9. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 16 juillet 2020 et par voie de conséquence ses arrêtés du 29 octobre 2020.
Sur la demande de sursis à exécution :
10. La cour statuant au fond par le présent arrêt sur les conclusions du préfet de la Seine-Maritime tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Rouen du 12 janvier 2021, les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont donc privées d'objet. Par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer.
Sur les conclusions au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
11. Les dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, la somme demandée par le conseil de M. A... à ce titre.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rouen du 12 janvier 2021 est annulé.
Article 2 : Les demandes de M. A... présentées tant devant le tribunal administratif de Rouen que devant la cour sont rejetées.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fins de sursis présentées par le préfet de la Seine-Maritime.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. B... A... et à Me Magali Leroy.
Copie sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.
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N°s21DA00447, 21DA00448