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10/02/2022 | FRANCE | N°21DA00075

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 10 février 2022, 21DA00075


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions, contenues dans l'arrêté du 15 septembre 2020, par lesquelles le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, d'autre part, d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ", dans

un délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement à interve...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions, contenues dans l'arrêté du 15 septembre 2020, par lesquelles le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, d'autre part, d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 2003827 du 17 décembre 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 janvier 2021, Mme A... C..., représentée par Me Megherbi, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions, contenues dans l'arrêté du 15 septembre 2020, par lesquelles le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ;

3°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leur famille, ainsi que le protocole qui y est annexé ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu, au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A... C..., ressortissante algérienne née le 22 janvier 1993 à Tizi Ouzou (Algérie), est entrée, pour la seconde fois, en France le 20 juillet 2017, sous couvert d'un passeport national revêtu d'un visa portant la mention " visiteur " en cours de validité, après y être entrée une première fois en 1999 avec sa mère et son frère, à l'âge de six ans, y avoir été scolarisée pendant un an et être retournée en Algérie en 2001 avec sa mère et ses deux frères, dont le dernier est né en France en 2001. Elle a sollicité du préfet de la Seine-Maritime, le 4 août 2017, son admission au séjour, en faisant état de la présence de ses parents, tous deux titulaires d'un certificat de résidence de dix ans en tant que parents d'un enfant français. Par un arrêté du 4 janvier 2019, devenu définitif, la préfète de la Seine-Maritime a refusé de faire droit à sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français. S'étant maintenue en France, Mme A... C... a, le 26 septembre 2019, demandé au préfet de la Seine-Maritime de l'admettre au séjour en tant qu'étudiante et au titre de la vie privée et familiale. Par un arrêté du 15 septembre 2020, le préfet de la Seine-Maritime a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français avant l'expiration d'un délai de deux ans. Mme A... C... relève appel du jugement du 17 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, des décisions de refus de séjour et portant obligation de quitter le territoire français contenues dans cet arrêté.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. Il ressort des motifs de l'arrêté contesté que, pour refuser d'accorder à Mme A... C... la délivrance d'un certificat de résidence portant la mention " étudiant ", le préfet de la Seine-Maritime a estimé, sous le visa des stipulations du titre III du protocole annexé à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, dont il a repris des extraits pertinents, que l'intéressée n'était plus étudiante et qu'elle ne pouvait donc se prévaloir de ces stipulations. Mme A... C... produit des certificats de scolarité attestant de son inscription, au titre des années universitaires 2019/2020 et 2020/2021, dans une formation préparant à l'obtention du brevet de technicien supérieur de prothésiste dentaire, de sorte que le motif ainsi retenu doit être regardé, comme l'intéressée le soutient, comme entaché d'une erreur de fait. Toutefois, il ressort des motifs de l'arrêté contesté que la décision de refus de délivrance d'un certificat de résidence en qualité d'étudiant n'est pas fondée sur ce seul motif, mais aussi sur celui tiré de ce que Mme A... C... était seulement titulaire d'un visa de court séjour portant la mention " visiteur ", qui ne lui donnait pas vocation à s'installer durablement sur le territoire français. Or, ce motif suffisait, à lui seul, à justifier le refus de délivrance du certificat de résidence, portant la mention " étudiant ", visé au titre III du protocole annexé à l'accord franco-algérien, dont le bénéfice est subordonné, en vertu des stipulations de l'article 9 de cet accord, à la possession d'un visa de long séjour. Par suite, l'erreur de fait qui entache le motif tiré de l'absence de justification de la qualité d'étudiant s'avère dépourvue d'incidence sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour en litige.

3. Aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; / (...) ". Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. Mme A... C..., entrée en dernier lieu en France le 20 juillet 2017, sous couvert d'un visa de visiteur, se prévaut de son inscription, à la date de la décision contestée, à la formation préparatoire à l'obtention du brevet de technicien supérieur de prothésiste dentaire, ainsi que des perspectives d'insertion professionnelle que lui ouvre cette formation diplômante et dont témoigne la promesse d'embauche dont elle bénéficie. Elle fait état, en outre, de la présence, sur le territoire français, de ses parents, titulaires d'un certificat de résidence de dix années en cours de validité, et de celle de ses grands-parents maternels, établis en France depuis une quarantaine d'années, ainsi que de l'un de ses frères. Elle ajoute que son plus jeune frère, né en 2001, est de nationalité française, de même que certains de ses oncles, tantes, cousins et cousines qui sont établis sur le territoire français. Il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme A... C... est majeure, célibataire, sans enfant et qu'elle n'a fait état d'aucune circonstance particulière, liée notamment à l'état de santé des membres de sa famille proche qui sont installés en France, qui rendrait nécessaire sa présence auprès d'eux, alors que la décision de refus de titre de séjour n'a pas pour effet, par elle-même, de faire obstacle à ce que ceux-ci puissent lui rendre visite pour le cas où elle regagnerait son pays d'origine. En outre, elle n'établit, ni même n'allègue, qu'elle serait dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où elle a habituellement vécu jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans, à l'exception de la période d'un peu plus d'une année où elle a résidé en France durant son enfance. D'ailleurs, l'aîné de ses deux frères, de nationalité algérienne, fait lui-même l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise le même jour à destination de l'Algérie et devenue définitive. Enfin, dès lors que Mme A... C... ne produit aucun élément permettant d'apprécier son investissement et ses chances de réussite dans la formation préparatoire au brevet de technicien supérieur de prothésiste dentaire à laquelle elle est inscrite, elle ne peut être regardée comme justifiant de perspectives d'insertion professionnelle suffisamment établies à la date d'édiction de la décision de refus de titre séjour, en dépit de la promesse d'embauche, d'ailleurs non datée, dont elle se prévaut sur un emploi de prothésiste dentaire. Ainsi, et eu égard à la durée et aux conditions du séjour de Mme A... C... en France, cette décision ne peut être tenue comme ayant porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Cette décision ne peut, dès lors, être regardée comme intervenue en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni de celles, précitées, du 5. de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

Sur les deux autres décisions en litige :

5. Il ressort des motifs de l'arrêté contesté que le préfet de la Seine-Maritime, après avoir procédé à l'examen de la situation de Mme A... C..., a apprécié l'opportunité de l'obliger à quitter le territoire français et de lui faire interdiction de retour sur le territoire français. Ainsi, le moyen tiré de ce que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'une erreur de droit, dès lors que le préfet se serait cru à tort tenu de la prononcer, ne peut qu'être écarté. Il en est de même, en tout état de cause, du moyen tiré de ce que la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français serait entachée d'une telle erreur de droit.

6. Comme il a été dit aux points 2 à 4, les moyens que Mme A... C... dirige contre la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ne sont pas fondés. Par suite, les moyens tirés par Mme A... C... de ce que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ainsi, en tout état de cause, que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français devraient être annulées par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus de titre de séjour ne peuvent qu'être écartés.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles qu'elle présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise à la préfète de la Seine-Maritime.

1

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No 21DA00075


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA00075
Date de la décision : 10/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : MEGHERBI

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-02-10;21da00075 ?
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