Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le conseil national des activités privées de sécurité à lui verser la somme de 40 000 euros en réparation du préjudice qu'il estimait avoir subi du fait de fautes commises dans la gestion de l'indemnisation de ses périodes de chômage.
Par un jugement n°1804176 du 28 octobre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 28 décembre 2020 et 10 mai 2021, M. A... B..., représenté par Me Marie-Christine Dutat, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner le conseil national des activités privées de sécurité à lui verser la somme de 44 000 euros en réparation des préjudices financier et moral qu'il estime avoir subis du fait de fautes commises dans la gestion de l'indemnisation de ses périodes de chômage ;
3°) de mettre à la charge du conseil national des activités privées de sécurité la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le conseil national des activités privées de sécurité n'a pas adhéré au régime de l'assurance chômage ni délégué à Pôle Emploi la gestion de ses agents au chômage ce qui lui a causé un préjudice financier en réduisant ses droits à la retraite complémentaire ;
- cette faute n'a pas permis qu'il lui soit fait application des dispositions du I de l'article 11 ter de l'arrêté du 31 décembre 1970 et de bénéficier de 1 200 points de retraite supplémentaire pour percevoir un surplus de pension actualisable de 600 euros par an pendant vingt-cinq ans voire quarante ans, somme qui, placée sur un compte épargne, aurait pu lui rapporter 80 000 euros ; selon les règles de prudence, le capital à constituer pour obtenir cette rente est d'environ de 40 000 euros ;
- le conseil national des activités privées de sécurité a méconnu les dispositions du II de l'article 11 ter de l'arrêté du 30 septembre 1970 dès lors qu'aucun point gratuit ne lui a été attribué pour la période au cours de laquelle il a été au chômage ; ces seuls points gratuits représentaient à eux seuls la somme de 5 850 euros ;
- le conseil a fait preuve d'un manque de diligence en ne lui fournissant aucune attestation pour lui permettre de justifier de ses périodes de chômage auprès de l'Ircantec et en ne déclarant pas directement ces périodes à la Carsat et l'Ircantec ;
- il a subi un préjudice moral, faute de pouvoir bénéficier de la juste retraite à laquelle il avait droit.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 7 mai et 7 juin 2021, le conseil national des activités privées de sécurité, représenté par le cabinet Centaure avocats, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. B... de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les moyens tirés de ce qu'il n'a effectué aucune déclaration auprès de l'Ircantec et de la Carsat, et n'a fourni à M. B... aucune attestation pour lui permettre de déclarer ses périodes de chômage indemnisé ne se rattachent pas à la même cause juridique que celle invoquée devant le premier juge et sont par suite irrecevables car nouveaux en appel ;
- les conclusions relatives au préjudice moral qui conduisent à porter le montant réclamé à 44 000 euros soit plus qu'en première instance, constituent une demande nouvelle et sont par suite irrecevables ;
- les autres moyens ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 10 mai 2021, la clôture de l'instruction, fixée au 17 mai 2021, a été reportée au 21 juin 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la sécurité intérieure ;
- le code du travail ;
- le décret n° 70-1277 du 23 décembre 1970 ;
- l'arrêté du 30 décembre 1970 relatif aux modalités de fonctionnement du régime de retraites complémentaire des assurances sociales institué par le décret du 23 décembre 1970 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Ghislaine Borot, présidente-rapporteure,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,
- et les observations de Me Pauline Wilpotte, représentant Me Bertrand B..., et Me Anissa Cherfi Yonis, représentant le conseil national des activités privées de sécurité.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a été recruté en contrat à durée déterminée le 8 octobre 2012 par le conseil national des activités privées de sécurité en tant que contrôleur à la délégation territoriale Nord. Son contrat n'a pas été renouvelé à son terme le 21 octobre 2015. En sa qualité d'employeur auto-assuré, le conseil national des activités privées de sécurité lui a versé des indemnités de chômage. Estimant que le choix fait par le conseil national des activités privées de sécurité de s'auto-assurer était fautif et à l'origine d'une réduction du montant de sa retraite complémentaire, M. B... a présenté une demande de réparation de ce préjudice. M. B... relève appel du jugement du 28 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation du conseil national des activités privées de sécurité à lui verser une somme de 40 000 euros en réparation du préjudice subi et demande à la cour de porter son indemnisation à la somme de 44 000 euros.
Sur les fins de non-recevoir opposées par le conseil national des activités privées de sécurité :
2. La personne qui a demandé en première instance la réparation des conséquences dommageables d'un fait qu'elle impute à une administration est recevable à détailler ces conséquences devant le juge d'appel, en invoquant le cas échéant des chefs de préjudice dont elle n'avait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur et que ses prétentions demeurent dans la limite du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance, augmentée le cas échéant des éléments nouveaux apparus postérieurement au jugement, sous réserve des règles qui gouvernent la recevabilité des demandes fondées sur une cause juridique nouvelle.
3. En premier lieu, il ressort des écritures de première instance que M. B... a demandé la condamnation du conseil national des activités privées de sécurité à lui verser une somme de 40 000 euros au titre du préjudice financier résultant des fautes consistant pour l'établissement public à ne pas avoir adhéré au régime d'assurance chômage de l'Unedic, à ne pas avoir conclu une convention de gestion avec Pôle emploi et à lui avoir fait application des dispositions de l'article II de l'article 11 ter de l'arrêté du 30 décembre 1970. Il n'est pas recevable à demander pour la première fois en appel la condamnation du conseil national des activités privées de sécurité à l'indemniser en tant qu'il aurait été victime d'un manque supposé de diligence du conseil à lui transmettre certains justificatifs et d'une absence de déclaration fautive de périodes d'indemnisation alors que ces circonstances ne se rattachent pas aux mêmes faits générateurs que ceux mis en avant tant dans sa réclamation préalable, qu'en première instance. Dans ces conditions, la fin de non-recevoir opposée par le conseil national des activités privées de sécurité doit être accueillie.
4. En second lieu, M. B... a augmenté en appel ses prétentions indemnitaires de 4 000 euros en demandant l'indemnisation de son préjudice moral, sans que cette augmentation ne soit justifiée par des éléments nouveaux apparus postérieurement au jugement de première instance. Dans ces conditions, ses conclusions à fin d'indemnisation ne sont pas recevables, en tant qu'elles excèdent la somme de 40 000 euros réclamée devant les premiers juges et la fin de non-recevoir opposée en défense par le conseil national des activités privées de sécurité doit également être accueillie.
Sur le bien-fondé du jugement :
5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 632-3 du code de la sécurité intérieure : " Le Conseil national des activités privées de sécurité peut recruter (...) des agents contractuels de droit public ou des fonctionnaires détachés auprès de lui. (...) ". Aux termes de l'article L. 5424-1 du code du travail : " Ont droit à une allocation d'assurance, lorsque leur privation d'emploi est involontaire ou assimilée à une privation involontaire (...), et lorsqu'ils satisfont à des conditions d'âge et d'activité antérieure, dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 : 1° Les agents fonctionnaires et non fonctionnaires de l'Etat et de ses établissements publics administratifs, (...) ". Aux termes de l'article L. 5424-2 du même code : " Les employeurs mentionnés à l'article L. 5424-1 assurent la charge et la gestion de l'allocation d'assurance. Ceux-ci peuvent, par convention conclue avec Pôle emploi, pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 5427-1, lui confier cette gestion. / Toutefois, peuvent adhérer au régime d'assurance : 1° Les employeurs mentionnés au 2° de l'article L. 5424-1 ; 2° Par une option irrévocable, les employeurs mentionnés aux 3°, 4°, 4° bis, 6° et 7° de ce même article ; 3° Pour leurs agents non titulaires, les établissements publics d'enseignement supérieur et les établissements publics à caractère scientifique et technologique ; 4° Pour les assistants d'éducation, les établissements d'enseignement mentionnés à l'article L. 916-1 du code de l'éducation. (...) ".
6. Il résulte de ces dispositions combinées que, d'une part, le conseil national des activités privées de sécurité, établissement public administratif de l'Etat, ne compte pas parmi les employeurs publics pouvant adhérer au régime d'assurance chômage et, d'autre part, que la conclusion d'une convention de gestion avec Pôle emploi n'est pour lui qu'une faculté et non une obligation. M. B..., qui a par ailleurs bénéficié de l'allocation d'aide au retour, n'établit pas plus en appel qu'en première instance que le conseil national des activités privées de sécurité aurait commis une faute susceptible d'engager sa responsabilité en n'adhérant pas au régime d'assurance chômage de l'Unedic et en ne concluant pas de convention de gestion avec Pôle emploi.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 11 ter de l'arrêté du 30 décembre 1970 relatif aux modalités de fonctionnement du régime de retraites complémentaire des assurances sociales institué par le décret du 23 décembre 1970 : " I. Les périodes de chômage indemnisées en application des dispositions du titre II du livre IV de la cinquième partie du code du travail et donnant lieu à prélèvement de cotisations au titre de la retraite complémentaire ouvrent droit, pour chaque jour indemnisé, à l'attribution de points dans les conditions suivantes : / 1. La validation des périodes de chômage est subordonnée à la condition que celles-ci soient indemnisées au titre d'un emploi relevant de l'institution. 2. L'assiette de validation de ces droits est constituée, pour chaque jour indemnisé, du salaire journalier de référence ou du montant journalier déterminé par la collectivité ou l'organisme chargé du paiement de l'allocation chômage. Le calcul des points sur la période considérée se fait par application des taux prévus à l'article 7 du décret n° 70-1277 du 23 décembre 1970 modifié à l'assiette définie ci-dessus et en divisant le montant ainsi obtenu par le salaire de référence. / II. Les périodes de chômage indemnisées en application des dispositions du titre II du livre IV de la cinquième partie du code du travail et ne donnant pas lieu à prélèvement de cotisations au titre de la retraite complémentaire ouvrent droit à l'attribution de points gratuits dans les conditions suivantes : / 1. La validation des périodes de chômage est subordonnée à la condition que celles-ci soient indemnisées au titre d'un emploi relevant de l'institution et que, durant les douze mois précédant la perte de l'emploi au titre duquel est versée l'indemnisation, le participant ait acquis contre cotisations un nombre de points IRCANTEC au moins égal à celui qu'aurait obtenu un affilié rémunéré sur la même période au salaire minimum de croissance mentionné par le chapitre Ier du titre III du livre II de la troisième partie du code du travail. / 2. La validation de la période de chômage débute après un délai de carence de trois mois et ne peut excéder un an. 3./ L'assiette de validation de ces droits est constituée, pour chaque jour indemnisé, par le salaire minimum de croissance. Le calcul des points sur la période considérée se fait par application à l'assiette susdite des taux de cotisation prévus à l'article 7 du décret n° 70-1277 du 23 décembre 1970 modifié et en divisant la cotisation ainsi obtenue par le salaire de référence en vigueur. ".
8. Ainsi qu'il a été dit au point 6, le conseil national des activités privées de sécurité ne pouvait légalement adhérer au régime d'assurance chômage. En conséquence, aucun prélèvement au titre de la retraite complémentaire ne pouvait être opéré sur le salaire journalier de référence comme le prévoient les dispositions de l'article 19 du règlement général annexé à la convention d'assurance chômage du 6 mai 2011 en fixant un taux de participation de 3 %. M. B... entrait donc dans le cadre des dispositions du II de l'article 11 ter de l'arrêté du 30 décembre 1970 et non dans celles du I. Par suite, le conseil national des activités privées de sécurité n'a commis aucune faute en refusant de le faire bénéficier des dispositions du I de l'article 11 ter de l'arrêté du 30 décembre 1970.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme réclamée par le conseil national des activités privées de sécurité sur le même fondement.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le conseil national des activités privées de sécurité au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au conseil national des activités privées de sécurité.
Délibéré après l'audience publique du 6 janvier 2022 à laquelle siégeaient :
- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 janvier 2022.
Le président-assesseur,
Signé : M. C...
La présidente de chambre,
présidente-rapporteure,
Signé : G. BOROTLa greffière,
Signé : A-S. VILLETTE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
La greffière,
Anne-Sophie Villette
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N°20DA02033
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N°"Numéro"