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07/12/2021 | FRANCE | N°20DA01943

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 07 décembre 2021, 20DA01943


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 7 décembre 2020 et un mémoire enregistré le 28 octobre 2021, la société Brise picarde, représentée par Me Thomas Garancher, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 6 août 2020 par lequel la préfète de la Somme a rejeté sa demande d'autorisation unique pour construire et exploiter un parc éolien composé de six aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territoire des communes de Lignières-les-Roye et Laboissière-en-Santerre, ainsi que la décision implicite de rejet du recours hiérarc

hique qu'elle a formé le 7 octobre 2020 devant la ministre de la transition écologique...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 7 décembre 2020 et un mémoire enregistré le 28 octobre 2021, la société Brise picarde, représentée par Me Thomas Garancher, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 6 août 2020 par lequel la préfète de la Somme a rejeté sa demande d'autorisation unique pour construire et exploiter un parc éolien composé de six aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territoire des communes de Lignières-les-Roye et Laboissière-en-Santerre, ainsi que la décision implicite de rejet du recours hiérarchique qu'elle a formé le 7 octobre 2020 devant la ministre de la transition écologique ;

2°) de lui octroyer l'autorisation sollicitée ;

3°) à titre subsidiaire, d'enjoindre à la préfète de la Somme de lui octroyer l'autorisation sollicitée ou, à défaut, de réexaminer sa demande, ensemble dans un délai de trente jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'ordonnance n°2014-355 du 20 mars 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement ;

- l'ordonnance n°2014-1329 du 6 novembre 2014 relative aux délibérations à distance des instances administratives à caractère collégial ;

- l'ordonnance n°2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale, notamment son article 15 ;

- le décret n°2014-1627 du 26 décembre 2014 relatif aux modalités d'organisation des délibérations à distance des instances administratives à caractère collégial ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Stéphane Eustache, premier conseiller,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- et les observations de Me Thomas Garancher représentant la société Brise picarde.

Considérant ce qui suit :

1. La société Brise picarde a déposé le 21 décembre 2016 une demande d'autorisation unique pour construire et exploiter un parc éolien composé de six aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territoire des communes de Lignières de Lignières-les-Roye et Laboissière-en-Santerre. Par un arrêté du 6 août 2020, la préfète de la Somme a rejeté cette demande. Le 7 octobre 2020, la société Brise picarde a formé un recours hiérarchique contre cet arrêté devant la ministre de la transition écologique. Le silence gardé pendant plus de deux mois sur ce recours a fait naître une décision implicite de rejet. La société Brise picarde demande l'annulation de cet arrêté du 6 août 2020 et de la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique.

Sur le cadre juridique applicable :

2. D'une part, aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 susvisée : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : / (...) / 2° Les demandes d'autorisation au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, ou de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable (...). "

3. D'autre part, il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce.

4. En l'espèce, conformément aux dispositions précitées de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 susvisée, la demande présentée le 21 décembre 2016 par la société Brise picarde a été instruite par la préfète de la Somme dans les conditions prévues par l'ordonnance du 20 mars 2014 susvisée et ses mesures d'application. Dans le cadre de la présente instance, la légalité externe de l'arrêté attaqué doit être appréciée regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de son édiction et sa légalité interne au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date du présent arrêt.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité externe :

5. D'une part, aux termes de l'article R. 341-16 du code de l'environnement : " La commission départementale de la nature, des paysages et des sites concourt à la protection de la nature, à la préservation des paysages, des sites et du cadre de vie et contribue à une gestion équilibrée des ressources naturelles, et de l'espace dans un souci de développement durable ". Aux termes de l'article R. 341-25 du même code : " Lorsque la commission ou l'une de ses formations spécialisées est appelée à émettre un avis sur une affaire individuelle, la personne intéressée est invitée à formuler ses observations. La commission délibère en son absence ". Aux termes de l'article R. 512-25 de ce code dans sa rédaction applicable : " Au vu du dossier de l'enquête et des avis prévus par les articles précédents, qui lui sont adressés par le préfet, l'inspection des installations classées établit un rapport sur la demande d'autorisation et sur les résultats de l'enquête. Ce rapport est présenté au conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques saisi par le préfet. / L'inspection des installations classées soumet également à ce conseil ses propositions concernant soit le refus de la demande, soit les prescriptions envisagées. / Le demandeur a la faculté de se faire entendre par le conseil ou de désigner, à cet effet, un mandataire. Il est informé par le préfet au moins huit jours à l'avance de la date et du lieu de la réunion du conseil et reçoit simultanément un exemplaire des propositions de l'inspection des installations classées ". Aux termes de l'article R. 553-9 dans sa rédaction applicable : " Pour les installations relevant du présent titre et pour l'application du titre Ier du livre V, la commission départementale de la nature, des paysages et des sites est consultée, dans sa formation spécialisée sites et paysages, en lieu et place de la commission compétente en matière d'environnement et de risques sanitaires et technologiques ".

6. D'autre part, en vertu des articles 1er et 3 de l'ordonnance du 6 novembre 2014 susvisée, le président du collège d'une autorité administrative de l'Etat chargée d'adopter un avis peut décider, sous réserve de la préservation, le cas échéant, du secret du vote, qu'une délibération sera organisée " par tout procédé assurant l'échange d'écrits transmis par voie électronique permettant un dialogue en ligne ou par messagerie ". Le cas échant, " Les observations émises par chacun des membres sont immédiatement communiquées à l'ensemble des autres membres participants ou leur sont accessibles, de façon qu'ils puissent y répondre pendant le délai prévu pour la délibération, afin d'assurer le caractère collégial de celle-ci ". Aux termes de l'article 3 du décret du 26 décembre 2014 susvisé : " Le président du collège informe les autres membres de la tenue de cette délibération par voie électronique, de la date et de l'heure de son début ainsi que de la date et de l'heure à laquelle interviendra au plus tôt sa clôture. Cette information suit les règles applicables à la convocation des réunions du collège. / Les membres du collège sont précisément informés des modalités techniques leur permettant de participer à la délibération (...) ". Aux termes de l'article 4 du même décret : " La séance est ouverte par un message du président à l'ensemble des membres du collège, qui rappelle la date et l'heure limite pour la présentation des contributions. / A tout moment, le président du collège peut décider de prolonger la durée de la délibération. Il en informe les membres y participant. / Seuls les tiers invités à être entendus peuvent être destinataires des messages envoyés par les membres du collège dans le cadre de la délibération ". Aux termes de l'article 5 de ce décret : " Les débats sont clos par un message du président, qui ne peut intervenir avant l'heure limite fixée pour la clôture de la délibération. Le président adresse immédiatement un message indiquant l'ouverture des opérations de vote, qui précise la durée pendant laquelle les membres du collège participants peuvent voter ". Aux termes de l'article 6 du même décret : " Au terme du délai fixé pour l'expression des votes, le président en adresse les résultats à l'ensemble des membres du collège ".

7. En premier lieu, il résulte de l'instruction que les membres de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites ainsi que la société pétitionnaire, qui ont reçu le rapport établi par l'inspection des installations classées pour la protection de l'environnement, ont été informés par un courriel du 5 juin 2020 que le projet ferait l'objet d'une délibération par voie électronique du 12 juin 2020 à 14 heures au 26 juin 2020 à 14 heures. Une note jointe à ce courriel précisait que les membres de la commission pourraient adresser leurs contributions avant le 17 juin 2020 à 17 heures et que chacun des membres en aurait communication, puis que le pétitionnaire, sur la base d'une synthèse de ces contributions, pourrait transmettre ses observations avant le 22 juin 2020 à 17 heures et qu'enfin, les membres de la commission, sur la base d'une synthèse de ces observations, pourraient remettre leurs nouvelles contributions avant le 26 juin 2020 à 14 heures, avant le déroulement des opérations de vote qui s'achèveraient le 30 juin 2020 à 14 heures. Contrairement à ce que soutient la requérante, ces modalités, qui permettaient à la pétitionnaire de faire valoir utilement ses observations auprès des membres de la commission dans le cadre d'une délibération organisée par voie électronique, ne contrevenaient pas aux prescriptions précitées des articles R. 341-25 et R. 512-25 du code de l'environnement, ni à celles de l'ordonnance du 6 novembre 2014 et du décret du 26 décembre 2014 susvisés.

8. En second lieu, si la requérante soutient que chacun des membres de la commission n'a pas reçu l'ensemble des contributions émises, ni les observations qu'elle a elle-même produites, elle ne fait toutefois état d'aucun élément précis et circonstancié à l'appui de ses allégations, alors que ces transmissions étaient prévues par des notes de juin 2020 de la préfète de la Somme. Par ailleurs, si la requérante soutient qu'elle aurait dû recevoir les contributions des membres de la commission, et non une synthèse de celles-ci, aucune disposition n'imposait une telle formalité. En outre, la synthèse des contributions qui lui a été adressée le 18 juin 2020 était suffisamment détaillée et fidèle aux diverses opinions exprimées par les membres pour lui permettre de présenter utilement ses observations, ce qu'elle a pu faire le 22 juin 2020 en remettant un document de vingt-trois pages qui a été communiqué aux membres de la commission. Enfin, aucune disposition n'imposait de transmettre à la société pétitionnaire, en l'absence de demande de communication de sa part, les motifs au vu desquels la commission avait émis le 30 juin 2020 un avis défavorable sur le projet.

9. Il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué aurait été pris au terme d'une consultation irrégulière de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. Par suite, le moyen tiré d'un vice de procédure doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne :

10. D'une part, aux termes du I de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas ". Aux termes de l'article L. 511-1 du même code : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ".

11. D'autre part, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ". Il résulte de ces dispositions que, si les constructions projetées portent atteinte aux paysages naturels avoisinants, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site

12. Pour rejeter la demande présentée par la société Brise picarde, la préfète de la Somme s'est fondée sur la " transformation des caractéristiques essentielles " du paysage du plateau du Santerre et du secteur de Montdidier que provoquerait la construction du projet. La préfète souligne en particulier une " perte de lisibilité des silhouettes des monuments protégés de Piennes-Onvillers et de Montdidier et du village bosquet de Laboissière-en-Santerre ".

13. Il résulte de l'instruction et notamment de l'étude d'impact que le projet prend place au sein d'un plateau où s'étirent de vastes parcelles agricoles ponctuées de bosquets arborés, encadré au nord et au sud par deux routes départementales, au nord et au nord-est par les bourgs de Lignières et de Laboissière-en-Santerre et à l'ouest et au sud-ouest par ceux d'Etelfay et de Faverolles, à la lisière desquels se trouvent plusieurs sites agroindustriels. Ce paysage de " cœur de Santerre " se caractérise, selon L'Atlas des paysages de la Somme, par l'émergence à l'horizon de repères visuels constitués par les clochers des églises et beffrois des communes limitrophes, en particulier de Piennes-Onvillers, de Montdidier et de Laboissières-en-Santerre. En outre, vingt-trois et cent-vingt-deux éoliennes sont implantées ou le seront dans un rayon de respectivement cinq et dix kilomètres autour du projet.

14. Au sein de ce paysage, la ministre fait valoir que le parc éolien apparaîtra à l'horizon en covisibilité avec les clochers des édifices situés dans les bourgs de Montdidier, Laboissière-en-Santerre et Piennes-Onvillers, ainsi qu'avec plusieurs autres parcs éoliens.

15. Toutefois, s'agissant des vues sur Montdidier, il résulte de l'instruction et notamment du photomontage n°22 que si les éoliennes du projet, vues depuis la route départementale n°26, se trouvent en arrière des clochers des édifices classés de cette commune, elles apparaissent, compte tenu de la distance les séparant, d'une taille plus modeste et ne sont pas dans un rapport d'échelle comparable, seule une partie de leur pale étant visible. En outre, comme le montre le photomontage n°23, les éoliennes du projet, vues depuis la route départementale n°930, émergent à l'est des clochers de ces édifices, certes dans un rapport d'échelle comparable, mais hors de la zone urbaine et sans s'intercaler entre eux, ni les dominer.

16. S'agissant des vues sur Laboissière-en-Santerre, il résulte de l'instruction et notamment du photomontage n°50 que si les éoliennes du projet, vues depuis la sortie sud de Marquivillers, surgissent en arrière et au-dessus de ce bourg, une zone arborée, par sa localisation et sa densité, atténue fortement cet effet de surplomb, alors qu'apparaît, dans la même perspective, un autre parc éolien déjà construit à l'est de la commune.

17. S'agissant des vues sur Piennes-Orvillers, il résulte de l'instruction et notamment du photomontage n°56 que si les éoliennes du projet, vues depuis la route départementale n°135, apparaissent dans un rapport d'échelle comparable avec le clocher de cette commune, elles ne sont toutefois pas situées en arrière ou en surplomb et elles n'entrent pas en concurrence visuelle avec celui-ci dès lors que l'horizon est d'ores et déjà occupé par plusieurs zones arborées de même échelle.

18. Enfin, s'agissant des effets de saturation visuelle, il résulte de l'instruction qu'en raison de la présence de plusieurs parcs éoliens situés à proximité, le projet est susceptible d'occuper à l'horizon de nouvelles vues depuis l'intérieur ou en direction des bourgs environnants, notamment Etelfay, Lignières, Laboissière-en-Santerre, Piennes-Orvillers et Montdidier. Se référant à une méthode d'analyse élaborée par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de la région Centre, la ministre fait valoir que, dans ces bourgs, le projet est susceptible de provoquer une augmentation significative de l'indice d'occupation de l'horizon et une réduction importante de l'angle de respiration visuelle.

19. Toutefois, les valeurs de référence de l'indice d'occupation de l'horizon, qui est égal à la somme des angles de vue occupés par des éoliennes, et celles de l'angle de respiration visuelle, qui correspond au plus grand angle de vue sans éolienne, sont déterminées, selon la méthode mentionnée ci-dessus, à une distance de 10 kilomètres et sans prendre en compte la configuration particulière des lieux, ni les obstacles visuels localement implantés, notamment la végétation ou les constructions, qui sont susceptibles de réduire les effets de saturation concrètement subis. Or, en l'espèce, la plupart des éoliennes déjà implantées se concentrent dans une zone comprise entre 5 et 10 kilomètres autour des bourgs environnants et le paysage dans lequel s'inscrira le projet est ponctué de bosquets arborés et de constructions qui, par leur localisation et leur hauteur, atténueront nettement les risques de saturation visuelle.

20. Il résulte de ce qui précède que la covisibilité qu'entretiendra le projet avec les communes environnantes et d'autres parcs éoliens situés à proximité ne portera pas une atteinte au paysage du plateau de Santerre de nature à justifier le refus opposé par la préfète de la Somme.

21. Il résulte de tout ce qui précède que la société Brise picarde est fondée à soutenir que l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur d'appréciation et doit pour ce motif être annulé, ainsi que la décision implicite de la ministre de la transition écologique rejetant son recours hiérarchique.

Sur les conclusions tendant à la délivrance de l'autorisation :

22. Il ne résulte pas de l'instruction, et il n'est d'ailleurs pas allégué en défense, que le projet serait susceptible de porter atteinte à d'autres intérêts que ceux analysés ci-dessus parmi ceux mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, dans une mesure telle que le projet devrait être refusé.

23. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de délivrer à la société Brise picarde l'autorisation sollicitée et d'enjoindre à la préfète de la Somme de définir, dans un délai de quatre mois à compter de la date de notification du présent arrêt, les mesures appropriées afin de prévenir les dangers et inconvénients pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, et notamment les mesures de bridage nécessaires à la réduction des impacts prévisibles sur les chiroptères, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés à l'instance :

24. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Brise picarde et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : L'arrêté du 6 août 2020 de la préfète de la Somme, ainsi que la décision implicite de la ministre de la transition écologique rejetant le recours hiérarchique de la société Brise picarde contre cet arrêté, sont annulés.

Article 2 : L'autorisation environnementale tendant à construction et à l'exploitation d'un parc éolien composé de six aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territoire des communes de Lignières-les-Roye et Laboissière-en-Santerre est accordée à la société Brise picarde, sous réserve des prescriptions mentionnées à l'article 3.

Article 3 : Il est enjoint à la préfète de la Somme de définir, dans un délai de quatre mois à compter de la date de notification du présent arrêt, les prescriptions nécessaires à la prévention des dangers et inconvénients pour l'ensemble des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement.

Article 4 : L'Etat versera à la société Brise picarde une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Brise picarde et à la ministre de la transition écologique et à la préfète de la Somme.

N°20DA01943 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01943
Date de la décision : 07/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Stéphane Eustache
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : AARPI FRECHE et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-12-07;20da01943 ?
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