Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... E... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 26 octobre 2017 par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a refusé de délivrer une carte nationale d'identité et un passeport biométrique à son fils mineur, F... G....
Par un jugement n° 1703414 du 15 novembre 2019, le tribunal administratif d'Amiens, après avoir admis l'intervention de M. C... G..., a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2020, Mme E... et M. G..., représentés par Me Nzaloussou, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision du 26 octobre 2017 du préfet du Pas-de-Calais ;
3°) d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de délivrer à leur enfant une carte nationale d'identité et un passeport biométrique dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 55-1397 du 22 octobre 1955 instituant la carte nationale d'identité ;
- le décret n° 2005-1726 du 30 décembre 2005 relatif aux passeports électroniques ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Muriel Milard, première conseillère,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Manier, rapporteur public,
- et les observations de Me Nzaloussou, représentant Mme E... et M. G....
Considérant ce qui suit :
1. Mme D... E..., de nationalité congolaise (République du Congo), a demandé à l'autorité préfectorale, le 2 mai 2017, la délivrance d'une carte nationale d'identité et d'un passeport biométrique pour son fils mineur B... G..., né le 5 février 2017 à Lille, issu d'une relation avec un ressortissant français, M. C... G.... Par une décision du 26 octobre 2017, le préfet du Pas-de-Calais a refusé de lui délivrer des documents demandés. Mme E... et M. G... relèvent appel du jugement du 15 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens, après avoir admis l'intervention de M. G..., a rejeté la demande de Mme E... tendant à l'annulation de cette décision.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.
3. Il ressort des termes de la décision contestée que le préfet du Pas-de-Calais, pour refuser à Mme E... la délivrance des documents d'identité demandés, s'est fondé sur le motif tiré l'absence de contribution du père de l'enfant à l'entretien et l'éducation de celui-ci. Toutefois, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, cette circonstance ne permet pas, à elle seule, de justifier le refus de délivrance d'une carte nationale d'identité ou d'un passeport en vertu de l'article 2 du décret n° 55-1397 du 22 octobre 1955 instituant la carte nationale d'identité et des articles 4 et 5 du décret n° 2005-1726 du 30 décembre 2005 relatif aux passeports biométriques.
4. Il ressort toutefois du jugement attaqué que les premiers juges ont estimé que le préfet du Pas-de-Calais avait fait valoir en défense devant eux que le refus de délivrer les documents d'identité demandés était légalement justifié par le motif, autre que celui qu'il avait opposé à Mme E... résultant de la circonstance que le ressortissant français qui a reconnu le fils de A... E..., né le 5 février 2017, avait déjà reconnu la paternité de onze autres enfants, nés pour trois d'entre eux les 10 et 28 février 2017, au nombre desquels figure celui d'une ressortissante étrangère en situation irrégulière au titre du séjour et qu'ainsi, il y avait eu fraude. Les premiers juges ont ainsi apprécié la portée des écritures du préfet, comme ils leur revenaient de le faire, pour déterminer si celui-ci pouvait être regardé comme faisant valoir un autre motif que celui ayant initialement fondé la décision en litige, de telle sorte que l'auteur du recours soit, par la seule communication de ces écritures, mis à même de présenter ses observations sur la substitution de cet autre motif au motif initial, sans qu'il soit exigé du préfet qu'il formule une demande expresse en ce sens. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les premiers juges ont statué au-delà de ce qui leur été demandé et que le jugement serait entaché, à ce titre, d'irrégularité.
5. En second lieu, les requérants soutiennent que les premiers juges ne pouvaient retenir le motif tiré du faisceau d'indices quant à l'existence d'une fraude à la reconnaissance de paternité pour justifier la décision en litige. Toutefois, ce moyen, qui a trait au bien-fondé du jugement attaqué, est sans incidence sur sa régularité.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
6. Pour rejeter la demande tendant à l'annulation de la décision en litige, les premiers juges se sont fondés sur le signalement du service central d'état civil au procureur près le tribunal de grande instance d'Evry, en date du 27 mars 2017, concernant la délivrance à M. C... G... de douze livrets de famille depuis l'année 2012, à la suite de reconnaissances de paternité frauduleuses pour des enfants nés de mères différentes dont quatre nés le même mois, à savoir le mois de février 2017, et des comptes rendus d'audition de l'intéressé et de Mme E... par les services préfectoraux corroborant le caractère frauduleux de la reconnaissance de paternité du fils de cette dernière. Le ministre de l'intérieur soutient dans ses écritures en appel, qui ont été communiquées à Mme E..., que le refus est également fondé sur le caractère frauduleux de la reconnaissance de paternité et confirme la demande de substitution de ce motif à celui initialement indiqué dans la décision contestée. Or, les requérants ne produisent aucun élément au soutien de leurs allégations de nature à remettre en cause le bien-fondé de ce motif. S'ils soutiennent également que le préfet du Pas-de-Calais, en se fondant sur l'absence de contribution du père de l'enfant à l'entretien et l'éducation de celui-ci alors que M. G... exerce également l'autorité parentale sur le fils de A... E..., a entaché la décision en litige d'une erreur de fait et d'une erreur de droit, ils ne critiquent ainsi pas utilement l'existence d'une fraude à la reconnaissance de paternité qui constitue le motif fondant, en définitive, la décision contestée.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... et M. G... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme E... et de M. G... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... E..., à M. C... G... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Pas-de-Calais.
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N°20DA00133